ACCORD-CADRE
ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ET LES NATIONS UNIES PORTANT SUR LES ARRANGEMENTS RELATIFS AUX PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS AINSI QUE D'AUTRES QUESTIONS AFFÉRENTES AUX RÉUNIONS DES NATIONS UNIES TENUES SUR LE TERRITOIRE FRANÇAIS, SIGNÉ À NEW YORK LE 16 JANVIER 2025, COMPLÉTÉ PAR L'ÉCHANGE DE LETTRES SIGNÉ LE 14 MARS 2025
CONSIDÉRANT que la tenue de Réunions des Nations unies sur le territoire français a, au fil des années, été bénéfique tant pour la France que pour les Nations unies et continue de générer des opportunités d'échanges fructueux ;
CONSIDÉRANT qu'un accord-cadre sur les arrangements pertinents relatifs aux privilèges et immunités des représentants, observateurs, participants, et autres personnes travaillant lors de ces Réunions sur le territoire français faciliterait les négociations à mener pour les futures Réunions ;
RECONNAISSANT qu'un tel accord-cadre refléterait la volonté de la France et des Nations unies de développer davantage leur coopération, notamment en ce qui concerne la tenue de Réunions des Nations unies sur le territoire français ;
CONSIDÉRANT que la France est devenue Partie, le 18 août 1947, à la Convention sur les privilèges et immunités des Nations unies, adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 13 février 1946 ;
CONSIDÉRANT que la France est devenue Partie, le 2 août 2000, à la Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 21 novembre 1947 ;
Le Gouvernement de la République française (ci-après désignée comme « la Partie française ») et les Nations unies, ci-après désignées collectivement comme les « Parties » sont convenues de ce qui suit :
Article 1er
Définitions
Aux fins du présent accord-cadre (ci-après désigné « Accord ») :
a) La « Réunion » ou les « Réunions » désignent les conférences, séminaires, symposiums, cours, ateliers ou autres Réunions tenues sur le territoire français organisées par les Nations unies ou co-organisées par la France et les Nations unies ;
b) Les « locaux de la Réunion » ou les « locaux des Réunions » comprennent tous les locaux, y compris les salles de conférence pour des Réunions informelles, les bureaux, les espaces de travail et d'autres installations connexes servant à une Réunion spécifique, selon les besoins ;
c) La « Convention générale » signifie la Convention sur les privilèges et immunités des Nations unies, adoptée par l'Assemblée générale le 13 février 1946.
d) La « Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées » renvoie à la Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, adoptée par l'Assemblée générale le 21 novembre 1947.
e) Le « territoire français » signifie l'ensemble du territoire de la République française ;
Article 2
Objet et champ d'application
1. Le présent accord établit le cadre juridique concernant les privilèges et immunités ainsi que d'autres questions afférentes aux Réunions.
2. Le présent accord s'applique aux Réunions tenues avec l'assentiment de la Partie française et faisant l'objet d'un accord ad hoc conformément à l'article 11.
Article 3
Privilèges et immunités
1. La Convention générale s'applique à la Réunion qui se tient sur le territoire français. En particulier :
a) Les représentants des Etats jouissent des privilèges et immunités prévus à l'article IV de la Convention générale ;
b) Les fonctionnaires des Nations unies participant à la Réunion ou y exerçant des fonctions jouissent des privilèges et immunités prévus aux articles V et VII de la Convention générale ;
c) Les experts en mission pour les Nations unies dans le cadre de la Réunion jouissent des privilèges et immunités prévus aux articles VI et VII de la Convention générale.
2. Les personnes représentant des institutions spécialisées des Nations unies et des organisations apparentées jouissent, le cas échéant, des privilèges et immunités prévus par la Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, ou par les accords respectifs concernant les organisations apparentées.
3. La Partie française accorde aux représentants de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) les privilèges et immunités prévus par l'article XV du Statut de l'Agence internationale de l'énergie atomique nécessaires à l'exercice de leurs fonctions en toute indépendance pendant la durée de la Réunion.
4. Les autres participants jouissent de l'immunité de juridiction en ce qui concerne les propos tenus oralement ou par écrit et les actes accomplis par eux en rapport avec leur participation à la Réunion.
5. Sans préjudice des paragraphes précédents du présent article, toutes les personnes qui exercent des fonctions en rapport avec les Réunions et toutes celles qui y sont invitées, jouissent des privilèges, immunités et facilités nécessaires à l'exercice en toute indépendance de leurs fonctions liées à leur participation aux dites Réunions. Il est entendu qu'aucun privilège, immunité ou facilité fiscale supplémentaire à la Convention générale n'est accordé en vertu de la présente disposition.
6. Sans préjudice de la Convention générale et de la Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, l'Organisation des Nations unies collabore, en tout temps, avec les autorités françaises compétentes en vue de faciliter la bonne administration de la justice, d'assurer l'observation des règlements de police et d'éviter tout abus auquel pourraient donner lieu les privilèges, immunités et facilités accordés en vertu du présent accord.
7. Le personnel mis à disposition par la Partie française pour une Réunion en vertu du présent accord jouit de l'immunité de juridiction pour les propos tenus oralement ou par écrit et les actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions officielles en rapport avec ladite Réunion.
Article 4
Inviolabilité des locaux
Les locaux des Réunions sont des locaux de l'Organisation des Nations unies au sens de la section 3 de l'article II de la Convention générale et l'accès à ceux-ci est placé sous l'autorité et le contrôle du Secrétaire général des Nations unies ou son représentant désigné. Ces locaux sont inviolables pendant toute la durée des Réunions de même que durant la phase préparatoire et la période de clôture, ainsi que durant toute période supplémentaire qui pourrait être convenue entre les Parties.
Article 5
Entrée et sortie
1. Tous les participants et toutes les personnes exerçant des fonctions en rapport avec une Réunion ont le droit d'entrer sur le territoire français et d'en sortir, et aucune entrave n'est imposée à leur transit vers et depuis les locaux de la Réunion, étant entendu que les procédures et réglementations nationales en matière d'entrée et de circulation restent applicables.
2. Les visas et autorisations d'entrée qui pourraient leur être nécessaires sont délivrés sans frais de visa et dans les meilleurs délais possibles.
3. Les autorisations de sortie, lorsqu'elles sont requises, sont accordées gratuitement, dans les meilleurs délais et, en tout état de cause, au plus tard trois jours avant la clôture de la Réunion.
Article 6
Exonération des restrictions à l'importation et à l'exportation et des taxes
1. La Partie française autorise l'importation temporaire, exonérée de droits de douanes et de taxes, de tout équipement, y compris l'équipement technique, et renonce à percevoir les droits et taxes à l'importation sur les fournitures nécessaires à une Réunion.
2. La Partie française délivre sans délai les autorisations d'importation et d'exportation nécessaires à cet effet.
3. Les Nations unies sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée sur la fourniture de biens et la prestation de services destinés à son usage officiel et en rapport avec une Réunion, dans les conditions prévues par la Convention générale.
Article 7
Protection policière et sécurité
1. La Partie française fournit la protection policière et la sécurité nécessaires pour garantir le bon déroulement d'une Réunion dans un climat de sécurité et de tranquillité, sans ingérence d'aucune sorte.
2. Pour les Réunions de grande envergure, les Nations unies peuvent décider d'assurer la sécurité à l'intérieur des locaux de la Réunion, tandis que la sécurité à l'extérieur des locaux de la Réunion relèvera de la responsabilité de la Partie française. La Partie française et le Département de la sûreté et de la sécurité des Nations unies (« UNDSS ») travaillent en étroite collaboration par l'intermédiaire de leurs hauts fonctionnaires désignés à cet effet.
3. Les modalités de coopération en matière de sécurité pour une Réunion, y compris les dépenses y afférentes, sont établies d'un commun accord par écrit entre la Partie française et le bureau des Nations unies concerné. La Partie française et les Nations unies coopèrent pour l'établissement d'un plan complet de sécurité fondé sur l'évaluation de la sécurité de la Réunion par les Parties, comprenant les équipements et le personnel de sécurité.
4. La sécurité à l'extérieur des locaux de la Réunion est placée sous la supervision et le contrôle de la Partie française, qui désigne à cet effet un haut responsable de la sécurité.
Article 8
Ajournement, annulation ou modification du format
Si des circonstances ou préoccupations surviennent et suite auxquelles :
a) La Partie française et les Nations unies conviendraient d'un commun accord qu'une Réunion ne peut se tenir aux dates prévues ou doit se tenir sous un autre format ; ou
b) L'une des Parties, moyennant un préavis de 30 jours minimum notifié par écrit à l'autre Partie, demanderait l'ajournement, l'annulation ou la modification du format d'une Réunion ;
la Partie française et les Nations unies se consulteront et conviendront d'un commun accord du règlement de toutes les questions découlant de cet ajournement, de l'annulation ou de la modification du format de la Réunion, et dans l'hypothèse d'un ajournement ou d'une modification du format, le présent accord reste applicable et les nouvelles dates ou le nouveau format de la Réunion sont définis, après accord mutuel par écrit.
Article 9
Responsabilité
1. Sans préjudice des dispositions de la Section 29 de la Convention générale, il incombe à la Partie française de traiter toute action, plainte ou autre réclamation dirigée contre les Nations unies ou ses fonctionnaires et découlant de :
a) Blessures subies par des personnes ou de dégâts matériels ou pertes de biens survenus dans les locaux de la Réunion fournis par la Partie française ou qui sont sous son contrôle pour la Réunion ;
b) Blessures subies par des personnes ou de dégâts matériels ou pertes de biens causés par ou encourus lors de l'utilisation de tout service de transport fourni par la Partie française ou sous son contrôle pour une Réunion ;
c) L'emploi, pour la Réunion, de personnel fourni par la Partie française, ou engagé par son intermédiaire ;
d) L'ajournement, l'annulation ou la modification du format d'une Réunion conformément à l'article 8 ci-dessus.
2. La Partie française garantit et met hors de cause les Nations unies et ses fonctionnaires pour toute action, plainte ou autre réclamation mentionnée au paragraphe 1 du présent article.
Article 10
Acquisition des biens et services
La Partie française procède, en temps opportun, à l'acquisition des biens et services identifiés dans l'accord ad hoc pertinent pour la tenue d'une Réunion.
Article 11
Accords ad hoc
1. Les Parties concluent des accords ad hoc concernant les aspects organisationnels et financiers propres à chaque Réunion, et conformément au présent accord.
2. La coopération en vertu du présent accord s'effectue entre les Parties, ou les autorités compétentes, par la voie diplomatique.
Article 12
Règlement des différends
1. Tout différend concernant l'interprétation ou l'application du présent accord, hormis les différends relevant de la section 30 de l'article VIII de la Convention générale, ou de tout autre accord applicable, est, à moins que les Parties n'en conviennent autrement, résolu par voie de négociation ou par tout autre mode de règlement concerté convenu d'un accord commun entre la Partie française et les Nations unies.
2. Tout différend qui n'est pas réglé par des négociations ou tout autre mode de règlement concerté, sera soumis, à la demande de l'une ou l'autre des Parties, à un tribunal arbitral pour décision finale, selon les modalités suivantes :
a) Le tribunal arbitral est composé de trois arbitres, désignés l'un par le Secrétaire général des Nations unies, l'autre par le Gouvernement de la République française, et le troisième, qui exercera les fonctions de Président, par les deux autres arbitres ;
b) Si l'une des Parties ne désigne pas d'arbitre dans les trois mois suivant la désignation d'un arbitre par l'autre Partie ou si les deux premiers arbitres ne désignent pas de Président dans les trois mois suivant la désignation ou la nomination du second d'entre eux, le Président de la Cour internationale de justice procède aux nominations nécessaires à la demande de l'une ou l'autre des Parties au différend ;
c) Sauf convention contraire entre les Parties, le tribunal arbitral adopte ses propres règles de procédure, fixe l'indemnisation de ses membres et la répartition des frais entre les Parties, et prend toutes ses décisions à la majorité des deux tiers ;
d) Les décisions du tribunal arbitral sur toutes les questions de forme et de fond sont définitives et, même si elles sont rendues par défaut de l'une des Parties, elles sont contraignantes pour les deux Parties.
Article 13
Entrée en vigueur
Le présent accord entre en vigueur dès réception par les Nations unies de la notification, par écrit et par voie diplomatique, du Gouvernement de la République française indiquant l'accomplissement des procédures internes nécessaires à son entrée en vigueur.
Article 14
Durée et extinction
1. Le présent accord reste en vigueur pour une durée indéterminée.
2. Le présent accord peut être dénoncé par l'une ou l'autre des Parties par notification écrite à l'autre Partie par la voie diplomatique.
3. Le présent accord cesse d'être en vigueur six mois après la réception de cette notification de dénonciation.
4. Nonobstant les paragraphes 2 et 3 du présent article, le présent accord reste en vigueur jusqu'à l'exécution complète ou l'extinction de toutes les obligations contractées en vertu du présent accord.
Article 15
Amendements
1. Le présent accord peut être amendé par accord écrit entre les Parties.
2. Les amendements entrent en vigueur conformément aux conditions spécifiées à l'article 14 du présent accord.
Fait à New York le 16 janvier 2025, en deux exemplaires originaux, en langues française et anglaise, les deux textes faisant également foi.
Pour le Gouvernement de la République française : Nicolas DE RIVIERE Ambassadeur, Représentant permanent de la France auprès des Nations unies à New-York
Pour les Nations unies : Stephen MATHIAS Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique des Nations unies ad intérim