DÉTERMINATION DU NIVEAU DE PROTECTION D'UN SYSTÈME D'ENDIGUEMENT PAR UNE DÉMARCHE MULTI-SCÉNARIO
Une démarche multi-scénario peut être adoptée quand l'aléa ne peut pas être déterminé par la seule hauteur d'eau (cote du cours d'eau ou niveau marin) ou le seul débit et quand il n'est pas possible de justifier quantitativement que le risque résiduel de rupture reste inférieur à 5 %. C'est notamment le cas pour certains systèmes d'endiguement protégeant contre une submersion marine ou situés le long de torrents ou de rivières torrentielles.
Cette démarche consiste en trois étapes.
La première étape établit des scénarios contrastés, dont l'occurrence paraît plausible. Chaque scénario est décrit par un aléa naturel et par la sollicitation de l'ouvrage par un mécanisme de détérioration ou une combinaison de mécanismes de détérioration pouvant mettre en péril l'ouvrage ou conduire à l'atteinte de la zone protégée.
Dans le cas marin, l'aléa consiste en un événement hydrométéorologique caractérisé par les variables pertinentes (telles que celles listées à l'article 11).
Dans le cas torrentiel, l'aléa consiste en un événement hydrologique caractérisé a minima par un hydrogramme de crue associé (phases liquide et solide) et les hauteurs d'écoulement (niveau d'eau ou charge hydraulique selon le cas), et la ou les variables pertinentes pour caractériser le ou les phénomènes en jeu dans le scénario (tels ceux listés à l'article 11), notamment :
1° les paramètres caractérisant l'érosion (vitesse, contraintes, orientation des écoulements …),
2° les paramètres caractérisant les évolutions prévisibles du niveau du fond du lit et des sections d'écoulement durant la crue, dont le rapport de la largeur sur la hauteur d'écoulement, notamment pour évaluer les niveaux d'écoulements dans le cas des lits larges,
3° et en cas de laves torrentielles, le type et volume de laves et leurs paramètres rhéologiques.
Dans tous les cas, cet aléa peut tenir compte de circonstances particulières : présence de glace, de flottants (générateurs d'embâcles), concomitance de crues sur des confluents, etc.
Ces scénarios sont établis pour chaque linéaire cohérent sur le plan hydraulique et sur le plan structurel. Pour le cas torrentiel, la présence d'éléments défavorables particuliers (comme une sinuosité, une rupture de pente, une présence d'obstacle, un rétrécissement, un front granulaire …) pouvant conduire à une érosion particulière est considérée.
Pour chaque valeur de hauteur d'eau ou débit, les scénarios considérés couvrent les mécanismes de dégradation et les facteurs aggravants plausibles pour cette hauteur d'eau ou ce débit (a minima ceux mentionnés à l'article 11 du présent arrêté). Le gestionnaire peut intégrer tout autre phénomène qu'il juge pertinent pour les scénarios qu'il considère.
Lors de la deuxième étape, sont estimées pour chaque scénario :
-la vraisemblance de la sollicitation de l'ouvrage (évaluée sur des tronçons homogènes) ;
-la vraisemblance conditionnelle de la capacité de l'ouvrage à résister à cette sollicitation.
Il en est déduit par croisement la probabilité de défaillance de l'ouvrage pour chaque scénario.
Quand l'état de l'art des connaissances et de la caractérisation des phénomènes en jeu ne permet pas le calcul d'une probabilité, ces vraisemblances peuvent être déterminées par analyse experte (combinant modélisations quantitatives là où elles sont d'une qualité suffisante, et expertise humaine). Elles sont alors exprimées de façon qualitative en indiquant une classe de vraisemblance parmi un choix fini. Les classes seront au moins au nombre de trois.
Dans le cas où des classes (qualitatives) sont utilisées pour caractériser les vraisemblances de sollicitation et de capacité à y résister, la probabilité de défaillance est également estimée de façon qualitative, à travers au moins 3 classes (par exemple risque limité , risque conséquent et risque aigu ). Les seuils entre les classes sont cohérents avec les valeurs de probabilité 0,05 et 0,5 correspondant aux scénarios de l'item 8 de l'annexe 1, conformément au tableau ci-dessous.
Probabilité conditionnelle de défaillance |
Qualification expertisée |
---|---|
P < 5 % |
Risque limité |
5 % < P < 50 % |
Risque conséquent |
50 % < P |
Risque aigu |
Cette qualification du risque de défaillance peut être réalisée à travers une grille croisant les classes des deux variables précitées, prenant une forme similaire au tableau ci-dessous.
Probabilité de défaillance |
||||
---|---|---|---|---|
Vraisemblance de sollicitation |
||||
Faible |
Moyenne |
Forte |
||
Vraisemblance de la capacité à résister à la sollicitation |
Forte |
Risque limité |
Risque limité |
Risque conséquent |
Moyenne |
Risque limité |
Risque conséquent |
Risque aigu |
|
Faible |
Risque conséquent |
Risque aigu |
Risque aigu |
La troisième étape détermine le niveau de protection comme étant une hauteur d'eau (cote fluvial ou niveau marin) ou un débit tel que tous les scénarios basés sur cette hauteur ou ce débit présentent une probabilité de défaillance suffisamment faible (soit inférieure à 5 % si cette probabilité peut être calculée, soit classée comme présentant un risque limité dans la démarche multi-scénario).