RAPPORT ANNEXÉ
Ce rapport prend en compte l'actualisation en 2015 de la présente loi, conformément à son article 6. Il intègre ainsi les évolutions du contexte stratégique intervenues depuis 2013 ; les grands principes de la stratégie de défense et de sécurité nationale énoncés dans le Livre blanc, de même que les grands équilibres de la programmation militaire, ne s'en trouvent cependant pas remis en cause. Par conséquent, si les paragraphes portant sur l'analyse du contexte stratégique et de ses conséquences ont été réécrits afin de tenir compte des développements intervenus depuis fin 2013, le reste du texte du présent rapport n'est modifié que là où cela s'avère nécessaire.
La présente loi s'appuie sur l'analyse d'un environnement international en pleine évolution où s'est affirmé un haut niveau de risques et de menaces pour la sécurité de la France et des Français. En conséquence, elle conjugue la volonté de maintenir un niveau d'ambition élevé, adapté à ces besoins de sécurité et aux responsabilités internationales de notre pays, avec la nécessité du redressement des finances publiques. Elle s'appuie à cette fin sur la stratégie militaire renouvelée dans le Livre blanc de 2013 et sur une utilisation plus efficiente de nos moyens, garanties par un niveau de ressources significatif, accru par rapport à la loi votée en 2013 pour tenir compte de l'intensité des engagements de nos forces et des nouveaux besoins apparus depuis lors. L'effort de défense de la France, devenu prioritaire dans ce contexte, sera renforcé en conférant un haut degré de priorité à la préservation et au développement de nos capacités industrielles et en recherchant un plus haut degré d'interaction avec nos alliés et partenaires.
Sans constituer des ruptures, les crises qui se sont produites depuis 2013 sont caractérisées par leur soudaineté, leur intensité et leur simultanéité. La menace des groupes armés terroristes a pris une dimension sans précédent. Elle s'est de plus nourrie de l'imbrication croissante entre la défense de la France à l'extérieur des frontières et la sécurité de la population française sur le territoire national. Au même moment, la crise ukrainienne repose d'une façon inédite depuis de nombreuses années la question de la sécurité et de la stabilité des frontières sur le continent européen.
1. Une stratégie de défense et de sécurité nationale confortée
1.1. Un contexte stratégique qui se dégrade1.1.1. De multiples foyers de crises simultanés
Le Livre blanc de 2013 souligne une modification en profondeur de l'environnement stratégique de notre pays, structurée par plusieurs évolutions majeures.
Au plan économique, une crise financière internationale durable a modifié les rapports de forces internationaux et limite particulièrement les marges de manœuvre des Etats-Unis et, plus encore, de l'Europe par une réduction de la dépense et de la dette publiques qu'elle impose ; la crise qui en a résulté pour l'Union européenne et la baisse de l'effort de défense largement au-dessous de 2 % du produit intérieur brut (PIB) dans plusieurs pays illustrent les conséquences lourdes sur la construction de l'Europe de la défense.
Au plan géopolitique, il y a lieu de relever :
- les inflexions de la politique étrangère des Etats-Unis, dont la nouvelle posture stratégique privilégie les alliances et coopérations multilatérales, supposent de la part des Européens une implication accrue dans les zones où les intérêts de sécurité de l'Europe, au sens large, sont engagés ;
- les conséquences des révolutions dans le monde arabe, qui restent difficiles à évaluer dans leur globalité s'agissant de leur impact sur la sécurité nationale et européenne compte tenu de la proximité géographique de cette zone ;
- la multiplication des foyers de crise sur l'ensemble du continent africain.
Depuis 2013, la situation internationale a de plus été bouleversée par des crises aussi soudaines que graves.
En Afrique et au Moyen-Orient, la menace des groupes armés terroristes a pris une nouvelle dimension. Si l'intervention française au Mali lancée en janvier 2013 a endigué la montée en puissance des groupes armés terroristes (opération Serval), la crise n'est pas pour autant terminée. Elle a poussé les groupes les plus radicaux à se disperser dans l'ensemble de la bande sahélo-saharienne (BSS), ce qui a nécessité de régionaliser mi-2014 le dispositif français (opération Barkhane) en appui des cinq pays concernés (Mali, Mauritanie, Tchad, Niger, Burkina Faso). Au cours de l'été 2014, en Irak et en Syrie, la militarisation de la menace terroriste s'est accentuée et a franchi un nouveau seuil avec la progression de Daech, qui manifeste une volonté politique d'implantation territoriale. Ce groupe terroriste dispose dorénavant de moyens militaires et financiers inégalés. Il rivalise avec des groupes terroristes plus anciens, comme Al Qaeda ou Boko Haram. L'existence de territoires entiers désormais placés sous le contrôle de groupes terroristes constitue dès à présent une menace pour la sécurité internationale et pour notre sécurité intérieure.
Les attentats de janvier 2015 à Paris ont démontré que la France, comme d'autres Etats européens, était directement exposée, jusque sur son propre sol. Au-delà de la problématique des combattants qui s'expatrient pour le djihad et dont certains rentrent en Europe avec la volonté et les moyens de commettre des actes terroristes, la propagande djihadiste, utilisant tous les ressorts de la communication de crise, fait des émules dans nombre de pays, en particulier en Europe, dont la France.
Face à ces développements, nos forces armées sont engagées à grande échelle dans des opérations militaires de contre-terrorisme.
Depuis le printemps 2014, la crise russo-ukrainienne a marqué le retour d'une politique de puissance de la Russie et de conflits aux frontières de l'Union européenne.
1.1.2. Des risques et des menaces qui augmentent
Le Livre blanc de 2013 met en évidence la persistance d'un très large spectre de risques et de menaces. Les crises décrites supra en ont confirmé les grandes lignes ; elles traduisent néanmoins une dégradation de la situation internationale et une augmentation durable des risques et des menaces.
L'évolution, depuis 2013, de la situation à l'est de l'Europe et en Asie confirme que la France ne peut ignorer la possibilité de conflits entre Etats, y compris aux frontières de l'Union européenne. La crise ukrainienne, en particulier, remet en cause le statu quo politique et juridique en Europe.
La mondialisation poursuit ses effets multiplicateurs sur les risques et les menaces, en raison de l'augmentation et de la rapidité des échanges de biens et de personnes ainsi que des échanges dématérialisés. Elle génère des vulnérabilités et des risques déstabilisants qui se sont encore accrus : cybermenaces, pandémies, trafics, mouvements de population massifs, etc.
Les évolutions du contexte stratégique depuis 2013 ont également confirmé que la faiblesse de certains Etats constitue souvent un facteur d'aggravation d'une menace. Les risques associés se sont à la fois étendus géographiquement et singulièrement aggravés. Ces fragilités compliquent l'action de la communauté internationale.
L'effondrement ou la faiblesse des Etats, la porosité des frontières et l'absence de contrôle font le lit des trafics et du terrorisme qui s'installe dans les zones de non-droit. La grave détérioration de la situation en Libye procure ainsi aux terroristes un sanctuaire au nord du Sahel et leur ouvre l'espace méditerranéen. La guerre civile en Syrie et l'instabilité en Irak et au Yémen fragilisent en outre leurs voisins, avec un risque de régionalisation de ces conflits. Si les Etats africains s'impliquent de plus en plus pour juguler collectivement les menaces sur leur continent, des facteurs chroniques d'instabilité politique, sécuritaire et sanitaire perdurent sur tout le continent. Enfin, les conséquences de la chute des cours des matières premières (dont le pétrole) sur la stabilité à moyen terme des Etats qui en sont fortement dépendants doivent être évaluées.
Le terrorisme international d'inspiration djihadiste sait tirer parti de la mondialisation et de la complicité de certaines entités à des fins criminelles, principalement au travers des trafics (êtres humains, armes, hydrocarbures, stupéfiants, etc.). Il exploite aussi l'expansion des réseaux sociaux et utilise tous les canaux et codes médiatiques pour séduire, convaincre, tromper ou terroriser. Devenu un champ de bataille, le cyberespace s'affirme comme une dimension spécifique de la confrontation et ce, quel que soit le type d'affrontement. La menace cybernétique ne cesse en outre de s'intensifier et de se perfectionner.
De plus, à eux seuls, les conflits récents (Syrie, Irak, Nigéria, République centrafricaine, Libye, Ukraine) ont entraîné le déplacement de plus de dix millions de personnes, et l'Europe doit ainsi faire face à l'afflux toujours croissant et souvent dramatique des réfugiés économiques ou fuyant les conflits tant par la terre que par la mer. La densification des flux complique aussi le confinement des grandes crises sanitaires dans des pays fragiles, comme le montre l'épidémie Ebola : elle a nécessité une mobilisation internationale à laquelle participe la France depuis l'été 2014.
Dans le domaine technologique, l'émergence de nouveaux pays producteurs d'armements modernes va de pair avec le développement de capacités militaires de haute technologie (missiles hypersoniques, armes à énergie dirigée, furtivité, par exemple). La diffusion rapide de nombreuses technologies duales issues des marchés civils induit également des fragilités inédites, voire des risques de rupture difficilement prévisibles. C'est le cas des minidrones et microdrones, aériens, terrestres ou marins, de la banalisation de la biologie moléculaire et de la fabrication par les technologies numériques, notamment les imprimantes 3D.
1.1.3. Des défis militaires accrus et toujours plus complexes
Les forces armées françaises sont engagées à un niveau et pour une durée rarement égalés. Elles garantissent en métropole comme outre-mer, la sûreté du territoire, de son espace aérien et de ses approches maritimes. Face à la montée de la menace terroriste, leur contribution à la protection des citoyens et ressortissants français a été renforcée, tant sur le territoire national aux côtés des forces de sécurité intérieure qu'à l'extérieur de nos frontières.
Le développement d'une menace terroriste militarisée dans la bande sahélo-saharienne, un théâtre aussi vaste que l'Europe, constitue un défi considérable pour les forces de l'opération Barkhane et nécessite un effort conséquent sur le renseignement ainsi que sur la mobilité et la réactivité des forces. La capacité à concentrer les efforts, à frapper précisément et par surprise sont déterminantes dans les opérations militaires de contre-terrorisme. Parallèlement, la réémergence des "menaces de la force" impose de maintenir des capacités de haut niveau aptes à y faire face, comme le montrent les démonstrations de force aériennes, maritimes ou terrestres aux frontières de l'Europe afin de tester les moyens de surveillance, de détection et de protection.
La détérioration de la situation stratégique globale et la diversité des risques sécuritaires confortent le choix d'un modèle d'armée le plus complet possible évitant, même temporairement, toute lacune capacitaire majeure.
1.2. Une stratégie de sécurité nationale adaptée au nouveau contexte
Les objectifs de la stratégie de sécurité nationale énoncée dans le Livre blanc de 2013, ses priorités, ses principes et les grands équilibres entre les fonctions stratégiques restent pertinents. Cependant des ajustements, notamment pour certaines capacités, sont nécessaires en raison du haut niveau d'engagement des forces françaises.
1.2.1. Un concept de sécurité nationale confirmé
Le Livre blanc de 2013 a confirmé le concept de sécurité nationale, introduit dans la stratégie française en 2008 et inscrit par la loi dans le code de la défense en 2009.
Ce concept tire les conséquences de la continuité des menaces et des risques intérieurs et extérieurs qui pèsent sur la France, son territoire, sa population et ses intérêts de sécurité. Il favorise une approche globale dans l'identification des crises susceptibles d'affecter la vie de la Nation comme dans les réponses à leur apporter. La stratégie de sécurité nationale revêt une dimension interministérielle et requiert l'association de multiples acteurs pour prévenir et gérer les conséquences des crises majeures. L'action des forces armées s'envisage conjointement avec celle de l'ensemble de l'appareil d'Etat ― forces de sécurité intérieure et de sécurité civile, ministères, services publics, collectivités territoriales ― et des opérateurs, publics et privés, d'infrastructures et de réseaux vitaux.
Le Livre blanc de 2013 a, dans ce cadre, identifié des priorités, parmi lesquelles figurent le renforcement de la fonction stratégique connaissance et anticipation , la politique de cybersécurité, la capacité à lutter contre le terrorisme et la consolidation des capacités de l'Etat à répondre aux crises.
Comme l'ont montré dramatiquement les attentats du mois de janvier 2015 en France, la menace terroriste impose un continuum entre sécurité intérieure et défense extérieure. De même, ces attentats ont rappelé que la lutte contre le terrorisme et la protection de nos concitoyens devaient prendre en compte plus nettement encore les domaines de l'information et des perceptions, pour lutter contre de nouvelles menaces, comme les opérations d'influence sur les réseaux sociaux.
1.2.2. Des priorités géostratégiques adaptées à l'évolution du contexte
Le Livre blanc énonce et hiérarchise des priorités géostratégiques cohérentes avec l'analyse, par la France, de son environnement international et avec les responsabilités qu'elle entend exercer :
― protéger le territoire national et les ressortissants français, garantir la continuité des fonctions essentielles de la Nation et préserver notre souveraineté. Les risques et les menaces identifiés sont les agressions par un autre Etat contre le territoire national, les attaques terroristes, les cyber-attaques, les atteintes au potentiel scientifique et technique, la criminalité organisée dans ses formes les plus graves, les crises majeures résultant de risques naturels, sanitaires, technologiques et industriels, et les attaques contre nos ressortissants à l'étranger ;
― garantir, avec nos partenaires européens et alliés, la sécurité de l'Europe et de l'espace nord-atlantique, par un rôle actif au sein de l'Union européenne et de l'OTAN. La stabilité de tous les pays de l'espace européen est une priorité. La nature étroite et profonde de nos relations bilatérales avec les Etats-Unis et le Canada, nos engagements de défense collective au titre du traité de l'Atlantique Nord et notre communauté de valeurs fondent entre nous une solidarité de droit et de fait ;
― stabiliser avec nos partenaires et alliés le voisinage de l'Europe. Il s'agit notamment d'éviter l'émergence de menaces susceptibles d'affecter les approches orientales de l'Europe, la zone méditerranéenne, le Sahel ― de la Mauritanie à la Corne de l'Afrique ― et une partie de l'Afrique subsaharienne ―, notamment le golfe de Guinée et les pays riverains ;
― participer à la stabilité au Proche et Moyen-Orient et dans le golfe arabo-persique et, dans ce cadre, avoir la capacité de mettre en œuvre, en coordination avec nos alliés, les accords de défense souscrits par la France en protégeant ses intérêts stratégiques et de sécurité. La sécurité de la zone qui s'étend des rives de la Méditerranée orientale au golfe arabo-persique et jusqu'à l'océan Indien revêt une importance majeure pour l'Europe et l'équilibre international. La France est engagée par des accords de défense à Djibouti, aux Emirats arabes unis, au Koweït et au Qatar. Elle entretient une base interarmées à Abou Dabi, met en œuvre un accord de coopération avec Bahreïn et souhaite développer des relations étroites avec l'Arabie saoudite ;
― contribuer à la paix et à la sécurité internationale dans le monde, en portant une attention particulière à la sécurité de l'océan Indien et à la maîtrise des risques en Asie du Sud. La France entend promouvoir des intérêts globaux, justifiant le maintien d'un réseau diplomatique étendu et des capacités de présence et d'action dans ces régions et sur tous les océans. Elle consolidera donc son engagement politique en Asie, dans l'océan Indien, dans le Pacifique et en Amérique latine, à travers sa coopération de défense, une présence militaire active, le développement de partenariats stratégiques et l'intensification de ses réseaux de coopération.
La France participera activement aux efforts de réduction et de maîtrise des armements dans l'optique d'un désarmement général et complet. Elle veillera notamment à l'universalisation du traité de non-prolifération et à celle du traité international d'interdiction des essais nucléaires. Elle s'engagera ainsi résolument dans la négociation d'un nouveau traité interdisant la production de matières fissiles destinées aux armes. Elle agira tout particulièrement pour aboutir à mettre en place un régime international efficace de lutte contre la prolifération des armes de destruction massive, de leurs vecteurs et des matériels connexes.
1.2.3. La réaffirmation de la volonté de la France de participer à la construction de l'Europe de la défense, de renforcer la norme internationale et d'inscrire son action dans le cadre de ses alliances
La France partage avec ses partenaires européens la plupart des menaces et des risques auxquels elle est confrontée. C'est pourquoi, dans le cadre de sa stratégie de défense et de sécurité nationale, la France considère que la construction européenne en matière de défense et de sécurité est une nécessité. Elle souhaite que l'impulsion, pour les Européens, vienne du plus haut niveau politique des Etats membres, à travers les orientations et décisions que prend le Conseil européen. La France œuvrera avec ses principaux partenaires européens, et au premier rang desquels le Royaume-Uni, l'Allemagne, la Pologne, l'Espagne et l'Italie, en faveur du renforcement de la politique de sécurité et de défense commune de l'Union européenne, conduisant à une défense commune européenne crédible et autonome. La France soutiendra le principe d'une solidarité accrue pour la prise en charge des dépenses liées à des opérations militaires conduites pour la sécurité de l'Europe et, à ce titre, demandera que soit étendu le mécanisme européen (Athena) qui permet le financement en commun d'une partie des dépenses relatives à des opérations militaires menées dans le cadre de l'Union européenne.
Cette impulsion doit permettre de donner tout son sens à une démarche européenne pragmatique et concrète, reposant sur des actions conjointes de prévention, sur des opérations extérieures et sur des programmes d'armement communs. Dans ce cadre, il est souhaitable d'encourager nos partenaires européens à travailler à la création d'une académie européenne du renseignement. Un débat est engagé avec nos partenaires européens sur la possibilité de créer un pôle de défense européenne à Strasbourg ainsi qu'un quartier général militaire européen au Mont Valérien, dans le but de regrouper et d'intégrer la formation de militaires des Etats membres.
Dans le même temps, la France entend occuper toute sa place au sein de l'Alliance atlantique et de son organisation militaire, composante essentielle de la défense collective de ses membres, forum naturel du lien transatlantique et cadre commun privilégié de l'action militaire conjointe de l'Amérique et de l'Europe. La France s'attachera donc à développer, avec ses partenaires européens, un engagement dynamique dans l'OTAN. Elle continuera à participer activement aux opérations de l'alliance. Elle est attachée à la solidarité de l'alliance dans toutes ses dimensions militaires : elle veillera notamment au maintien d'une combinaison appropriée de capacités nucléaires, conventionnelles et de défense antimissile ; elle s'attachera particulièrement à l'adaptation de cette alliance politico-militaire aux engagements les plus probables. Elle y exprimera sa vision de l'organisation atlantique et du rôle de l'Europe dans la relation transatlantique en matière de défense et de sécurité.
L'OTAN et l'Union européenne jouent ainsi un rôle complémentaire dans la stratégie de défense et de sécurité nationale de la France. Celle-ci exercera pleinement ses responsabilités dans l'une comme dans l'autre organisation pour contribuer à la sécurité collective. C'est notamment en raison de sa place au sein de l'Europe, qui lui confère, avec d'autres, des responsabilités particulières d'entraînement, que la France conservera une capacité d'intervention militaire significative ; cette capacité doit aussi lui permettre de préserver l'autonomie d'action nécessaire pour intervenir en propre face à une agression ou une menace d'agression sur ses intérêts stratégiques.
La dégradation de la situation internationale s'accompagne d'un affaiblissement des normes internationales et de la gouvernance mondiale.
L'emploi d'armes chimiques par le régime syrien en 2013-2014 a rompu une nouvelle fois le tabou d'emploi d'armes de destruction massive et rappelle le précédent irakien, malgré les mises en garde de la communauté internationale. En annexant la Crimée, la Russie a, entre autres engagements, violé le protocole de Budapest de 1994 dont elle était signataire. L'ONU et les architectures de sécurité régionales peinent parfois à répondre au niveau et avec la réactivité nécessaires à des risques et menaces en perpétuelle évolution. Certaines organisations, jusque-là peu ou moins visibles, font cependant la démonstration de leurs capacités à jouer leur rôle (OIAC pour la crise chimique syrienne, OSCE en Ukraine).
Pour contribuer au règlement des crises dans la durée, il est essentiel d'assurer une transition efficace entre les opérations militaires extérieures nationales et les opérations de maintien de la paix des Nations unies, lorsqu'elles se succèdent ou coexistent sur un théâtre.
Si notre participation directe à ces dernières reste actuellement pour l'essentiel concentrée sur la FINUL, notre rôle est central dans leur mise en place et leur assurance, notamment sur le continent africain. La France usera de son influence spécifique au sein du Conseil de sécurité pour améliorer leur efficacité et mieux convaincre ses partenaires, en Europe et, au-delà, d'y contribuer, notamment dans les domaines qui font actuellement défaut (génie, aéromobilité, projection, soutien médical...).
Le Conseil européen de décembre 2013, le premier consacré aux questions de défense depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, a enclenché une dynamique positive qui doit être préservée, et permis d'identifier des priorités dans le long terme. Les évolutions récentes du contexte stratégique, notamment au sud et à l'est de l'Europe, soulignent la nécessité pour les membres de l'Union européenne de poursuivre ou de renforcer leurs investissements de défense et d'œuvrer à la convergence de leurs visions stratégiques. En Afrique, l'Union européenne a montré son efficacité dans des missions de stabilisation, de formation et de conseil dans le cadre de la réforme des systèmes de sécurité et certains Etats membres apportent en outre des contributions précieuses aux opérations françaises. Mais ces évolutions doivent se poursuivre. La France continuera donc à développer et à entretenir une gamme complète et autonome de capacités, de manière à pouvoir, le cas échéant, agir seule et rapidement. Pour autant, elle continuera à promouvoir de façon pragmatique des logiques de mutualisation dans certains domaines clés de l'intervention extérieure (transport, logistique, mobilité). Elle soutiendra également la mise en place de mécanismes de décision collectifs pouvant prendre la forme, à terme, d'un état-major permanent de planification des opérations ou d'une agence européenne d'armement dotée d'une réelle autorité.
Un débat sur le mécanisme ATHENA et le financement de la défense européenne serait souhaitable et constituerait un préalable nécessaire à la mise en place d'un budget européen dédié à la politique de sécurité et de défense commune.
La crise ukrainienne a conduit, lors du sommet de l'OTAN de Newport, à réaffirmer l'unité de l'Alliance ainsi que l'objectif de mettre fin à la tendance à la baisse des budgets de défense. Cette crise souligne la nécessité d'un compromis entre une vision centrée sur la défense collective et l'impératif de disposer d'une capacité de réponse rapide, adaptée à la diversité des crises. La réaffirmation de la mission de défense collective a conduit aux mesures "d'assurance" au bénéfice de nos alliés orientaux, auxquelles participent nos forces. Notre présence active dans l'organisation, y compris au sein de la structure de commandement, correspond à notre vision d'une Alliance qui sert notre sécurité nationale, notamment pour la défense collective de la zone euratlantique. Pour autant, nos engagements en Afrique et au Levant contribuent aussi directement à la sécurité du flanc sud de l'OTAN.
1.3. Une stratégie militaire réaffirmée
Le Livre blanc de 2013 décrit les fondements d'une nouvelle stratégie militaire, adaptée à ce nouveau contexte. La présente loi détaille sa mise en œuvre à travers le développement du modèle d'armée qui lui est associé.
1.3.1. Les trois priorités de notre stratégie
La stratégie générale présentée dans le Livre blanc se caractérise tout d'abord par une articulation nouvelle autour des trois grandes priorités, étroitement complémentaires, qui structurent l'action des forces armées : la protection, la dissuasion et l'intervention.
L'existence d'une menace terroriste durable et avérée sur le sol national confirme la convergence de ces trois priorités clés. Elle renforce désormais l'importance de la protection.
La protection du territoire national et des Français, en métropole comme outre-mer, est première. Elle vise à garantir l'intégrité du territoire contre toute menace de nature militaire, à assurer aux Français une protection efficace contre l'ensemble des risques et des menaces, en particulier le terrorisme et les cyber-attaques, à préserver la continuité des grandes fonctions vitales de la Nation et à garantir sa résilience. La protection du territoire ne saurait être assurée sans que la France dispose de la capacité de dissuasion et d'intervention.
La dissuasion nucléaire vise à protéger la France de toute agression d'origine étatique contre ses intérêts vitaux, d'où qu'elle vienne et quelle qu'en soit la forme. Elle permet notamment d'écarter toute menace de chantage sur ses intérêts qui tendrait à paralyser sa liberté de décision et d'action. Elle constitue la garantie ultime de la sécurité, de la protection et de l'indépendance de la Nation.
L'intervention à l'extérieur du territoire national vise, par la projection de capacités militaires, à protéger les ressortissants français et européens, à défendre les intérêts de la France dans le monde et à honorer nos engagements internationaux et nos responsabilités. Elle s'effectue en recherchant prioritairement un cadre multinational s'appuyant de façon privilégiée sur les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. Elle confère à la sécurité de la France la profondeur stratégique qui lui est indispensable. Elle conforte par là même la crédibilité de la dissuasion.
1.3.2. Quatre principes directeurs pour notre stratégie militaire et l'adaptation de nos capacités
Afin de donner aux forces armées les moyens d'assurer ces trois missions fondamentales dans leur nouveau contexte, un nouveau modèle d'armée a été défini dans le Livre blanc de 2013. Il repose sur quatre principes directeurs, dont la combinaison dessine une stratégie militaire renouvelée.
Le maintien de notre autonomie stratégique
Ce principe vise à garantir à la France une liberté permanente d'appréciation de situation, de décision et d'action, ainsi qu'à préserver sa capacité d'initiative dans des opérations que lui dictent la défense de ses intérêts et la prise de responsabilité liée à ses engagements internationaux. L'autonomie stratégique doit également permettre à la France, lorsqu'elle décide de s'engager en coalition, d'y jouer un rôle conforme à ses objectifs politiques.
Les moyens autorisant ou commandant l'autonomie d'appréciation, de planification et de commandement seront donc conservés ou développés. De même, certaines capacités militaires critiques seront privilégiées, en particulier celles qui conditionnent la défense de nos intérêts vitaux ; celles qui sont nécessaires à la prise d'initiative dans des opérations simples et probables ; celles qui permettent de disposer des moyens nécessaires pour exercer en pleine souveraineté le rôle souhaité dans une coalition. Ainsi les capacités de commandement interarmées, de renseignement, de ciblage, de frappes de précision dans la profondeur, les forces spéciales, les capacités de cyberdéfense et certains moyens de combat au contact de l'adversaire feront l'objet d'un effort particulier. Il en est de même de celles qui sont liées à la capacité de fédérer et d'entraîner des partenaires au sein d'une coalition tout en conservant notre indépendance d'appréciation : capacité autonome à entrer en premier sur un théâtre dans les trois milieux, terrestre, naval et aérien, capacité de commandement dans une opération interalliée.
La cohérence du modèle d'armée avec les missions dans lesquelles la France est susceptible d'engager ses forces armées
Les forces armées doivent pouvoir agir sur tout le spectre des conflits potentiels où la France risque d'être engagée et répondre à la diversité des situations de crise identifiées dans le Livre blanc. Le modèle défini dans le Livre blanc de 2013 leur permettra de répondre aux menaces d'emploi de la force exercées par des Etats, de conduire dans la durée des opérations de gestion de crises de tous types visant à faire cesser les situations de violence, de faire respecter le droit, de participer aux côtés de nos partenaires, en particulier européens, à la protection de nos intérêts communs de sécurité face aux risques amplifiés par la mondialisation.
Son adaptation lui permettra de renforcer, au-delà des postures permanentes de sûreté aérienne et maritime, de manière significative et durable la protection directe de nos concitoyens sur le territoire national. Le principe de différenciation des forces en fonction des missions qu'elles sont appelées à remplir sur le territoire national comme à l'extérieur.
La différenciation des forces repose sur le constat de la variété des missions et l'analyse de leurs spécificités militaires. Elle consiste à distinguer les forces en fonction de ces spécificités : mise en œuvre de la dissuasion nucléaire, protection du territoire et des Français, opérations de coercition et de guerre, gestion de crises sous les formes très diverses qu'elles revêtent aujourd'hui, ces engagements appellent des moyens et des stratégies différents.
Il s'agit à la fois d'un principe d'efficience ― entraîner et équiper nos unités et nos équipages en fonction des spécificités de chaque mission ― et d'un principe d'économie ― ne financer les capacités les plus onéreuses que pour les missions où elles sont indispensables.
En vertu de ce principe de différenciation et en cohérence avec les missions que les forces françaises pourront être appelées à remplir, nos armées s'appuieront le plus longtemps possible sur les capacités existantes, de façon à permettre la modernisation des équipements dans les secteurs clés où la supériorité technologique est le facteur déterminant du succès. La situation financière du pays ne permettra pendant quelques années qu'une modernisation progressive de certains équipements. Le choix des investissements doit également permettre de sauvegarder tous les secteurs majeurs d'une industrie performante, où la recherche de la compétitivité sera permanente. Cet ajustement du rythme de la modernisation dans les prochaines années sera appliqué de manière différenciée en fonction des défis opérationnels que nos forces doivent pouvoir relever. Sur terre, sur mer ou dans les airs, nos forces continueront de disposer des moyens du meilleur niveau leur permettant de s'imposer face à un adversaire de qualité étatique ; la rénovation de certaines de nos capacités, notamment des frégates légères furtives, des avions Mirage 2000 D, de certains appareils de transport aérien ou des moyens blindés permettra par ailleurs de conserver des volumes de forces significatifs, adaptés aux opérations de protection, de présence ou de gestion de crise dans la durée.
Le principe de mutualisation
Ce principe repose, par exception au principe de différenciation, sur la mutualisation des ensembles de capacités rares et critiques conçues et engagées au bénéfice de plusieurs types de missions, selon les besoins et le temps des engagements. Ces capacités militaires ou de sécurité peuvent être mutualisées au bénéfice de différentes missions des armées (protection, dissuasion, intervention) ou entre plusieurs organismes de l'Etat (pour les capacités techniques partagées entre services de renseignement) ou pour une mise en commun avec nos partenaires européens.
Nous pourrons ainsi tirer le meilleur parti de l'acquisition et de l'utilisation de certains des systèmes les plus coûteux. Ainsi, l'accompagnement des composantes aérienne ou océanique de la dissuasion, l'engagement dans une opération majeure de haute intensité, la sécurisation des approches du territoire ou d'un théâtre de gestion de crise font souvent appel aux mêmes moyens, que notre stratégie devra pouvoir utiliser de manière centralisée. Cette mutualisation pourra également s'appliquer au niveau européen, en particulier dans le domaine spatial, dans les domaines du transport aérien, du ravitaillement en vol, de la capacité aéronavale, de la surveillance des théâtres d'opérations ou de la logistique dans les zones de crise.
1.3.3. Les cinq fonctions stratégiques, les contrats opérationnels et les capacités militaires associées
La stratégie française repose sur une convergence accrue entre les cinq grandes fonctions stratégiques identifiées progressivement depuis la professionnalisation des forces armées. Les objectifs de cette stratégie s'incarnent notamment dans les contrats opérationnels assignés par le Président de la République aux armées. Ces nouveaux contrats opérationnels distinguent des missions permanentes ― postures à tenir pour le renseignement, la protection du territoire et de la population, la dissuasion, les capacités de réaction en urgence ― et non permanentes ― opérations de coercition majeures ou opérations de gestion de crise.
Les adaptations de ces contrats opérationnels et le renforcement de la fonction protection à la suite des attentats de janvier 2015 ne modifient pas les équilibres précédents. En revanche, depuis 2013, le retour de la conflictualité en Europe et un niveau d'engagement inédit de lutte contre le terrorisme djihadiste se sont conjugués. Ces engagements se caractérisent encore plus en 2015 par la diversité de leurs formes, leur extension, leur intensité et leur durée.
Ce contexte impose des ajustements et une vigilance particulière. Pour s'adapter aux modes d'action de l'adversaire et le priver de sa liberté d'action, la maîtrise du processus de ciblage doit être accentuée, en gagnant en réactivité et en intégrant les actions dans les champs immatériels et des perceptions. Il est aussi nécessaire de continuer à diversifier et à moduler les effets des armements pour les adapter à tous les types d'objectifs. Un effort doit encore être fait sur l'identification, l'adéquation avec la cible et la précision. Le recours à la force, sous faible préavis, impose de consolider des capacités d'intervention prépositionnées ou projetables. Une capacité nationale de réaction d'urgence doit être conservée en propre.
Le besoin de régénération des forces, tant sur le plan du personnel que sur le plan des matériels, doit être pris en compte. En effet, la pression opérationnelle de ces deux dernières années a un impact majeur sur la disponibilité technique des matériels, la capacité de renouvellement du potentiel opérationnel, le niveau de préparation opérationnelle du personnel et leur capacité à poursuivre cet effort dans la durée, éventuellement au-delà de la référence des contrats opérationnels. De plus, la permanence des engagements impose d'accentuer le caractère adaptable des organisations du commandement et de disposer d'un soutien logistique performant.
Les engagements récents révèlent le besoin de moyens de commandement compatibles avec l'exigence de permanence du partage de l'information, malgré la diversité des théâtres et des opérations conduites ainsi que l'élongation très importante des liaisons. Par ailleurs, ils exigent une forte connectivité entre les modules de force, du plus bas aux plus hauts niveaux.
La connaissance et l'anticipation
La fonction " connaissance et anticipation " vise à donner à la France une capacité d'appréciation autonome des situations, indispensable à une prise de décision libre et souveraine comme à la conduite de l'action. Le renseignement joue un rôle central dans cette fonction, qui conditionne aussi l'efficacité des forces ; il constitue l'une des priorités majeures du Livre blanc de 2013.
Plus précisément, le développement de nos capacités de recueil, de traitement et de diffusion du renseignement sera prioritaire sur toute la durée de la planification d'ici à 2025-2030. Les efforts porteront sur les composantes spatiales et aériennes, pour l'imagerie comme pour l'interception électromagnétique, ainsi que sur les ressources humaines. Toutes les opérations récentes ont montré l'impérieuse nécessité de disposer de drones, qu'il s'agisse de drones de théâtre de moyenne altitude longue endurance (MALE) ou de drones tactiques. La mutualisation du renseignement d'origine satellitaire a été approfondie avec nos partenaires européens, de même que la capacité à déployer et à exploiter les drones de surveillance. Les capacités de veille stratégique et les nouveaux moyens de surveillance et d'interception nécessiteront d'accroître encore les capacités de traitement des données pour garantir l'efficacité de cette fonction stratégique. L'effort consenti depuis le début des années 2000 au bénéfice des capacités techniques interministérielles sera prolongé. En raison de leur importance nouvelle, le développement des activités du renseignement dans l'espace numérique et des moyens techniques associés sera poursuivi ; il doit permettre de mieux identifier l'origine des attaques, d'évaluer les capacités offensives des adversaires potentiels, afin de pouvoir, lorsque nécessaire, les stopper.
Dans le même temps, la communauté française du renseignement est consolidée sous l'égide du coordonnateur national du renseignement. La mutualisation des moyens et une plus grande interopérabilité entre les services seront recherchées. Les effectifs consacrés à la fonction renseignement seront mis en cohérence avec les besoins nouveaux associés à la mise en œuvre des équipements techniques et à l'analyse de flux d'informations accrus. Le renseignement fera l'objet d'une attention prioritaire et bénéficiera d'un effort financier substantiel sur la période 2014-2019. S'agissant du renseignement intérieur, la transformation de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) en une direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), directement rattachée au ministre de l'intérieur, s'accompagnera du recrutement de 2 680 personnels supplémentaires, consacrés à la lutte contre le terrorisme au cours des trois prochaines années, notamment 1 400 au ministère de l'intérieur, 950 au ministère de la justice et 80 au ministère des finances (dont 70 pour les douanes).
Parmi ces 2 680 emplois supplémentaires, 1 100 seront alloués aux services de renseignement intérieur chargés de lutter contre le terrorisme (500 à la DGSI, 500 au service central du renseignement territorial et 100 à la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris).
425 millions d'euros de crédits d'investissement, d'équipement et de fonctionnement seront consacrés à ce plan de renforcement au cours des trois prochaines années, dont 233 millions d'euros pour le ministère de l'intérieur et 181 millions d'euros pour celui de la justice.
Les premiers tests du dispositif "Passenger Name Record" (PNR) commenceront dès septembre 2015.
Pour leur part, les services de renseignement relevant du ministère de la défense bénéficieront d'un renforcement des effectifs de l'ordre de 900 postes supplémentaires, qui s'ajoutent aux 300 initialement prévus par la loi de programmation militaire, ce chiffre incluant les 250 postes créés dans le cadre du plan de lutte antiterroriste décidé par le Premier ministre en janvier 2015.
Outre le contrôle administratif, via la constitution d'une fonction d'inspection du renseignement, le contrôle parlementaire de la politique du Gouvernement en matière de renseignement a été étendu par le renforcement des compétences et des attributions de la délégation parlementaire au renseignement.
La dissuasion
La dissuasion française repose sur la retenue qu'impose à un adversaire étatique la perspective de dommages inacceptables, hors de proportion avec l'enjeu d'une agression ou d'une menace d'agression contre les intérêts vitaux de la France. Par essence purement défensive, son exercice relève de la responsabilité directe du Président de la République. Elle doit pouvoir s'adapter à la diversité des situations qui résultent, notamment, de la croissance ou de la modernisation de certains arsenaux dans le monde et des risques de la prolifération nucléaire au Moyen-Orient et en Asie. Elle contribue par son existence à la sécurité de l'Alliance atlantique et à celle de l'Europe. Elle garantit en permanence notre autonomie de décision et notre liberté d'action dans le cadre de nos responsabilités internationales.
Le maintien de deux composantes, océanique et aéroportée, a été réaffirmé par le Président de la République pour répondre au besoin de complémentarité des performances et des modes d'action, et pour se prémunir d'une surprise opérationnelle ou technologique. Ce choix impose de poursuivre l'effort nécessaire à la crédibilité et à la pérennité des capacités nécessaires à la mise en œuvre de la dissuasion par les deux composantes. Cet effort exerce aussi un effet d'entraînement sur nos aptitudes technologiques et nos capacités industrielles. Il sera conduit dans le respect du principe de stricte suffisance de l'armement nucléaire attaché à notre concept de dissuasion.
La protection
La fonction protection vise à garantir l'intégrité du territoire, à assurer aux Français une protection efficace contre l'ensemble des risques et des menaces, en particulier le terrorisme et les cyberattaques, à préserver la continuité des grandes fonctions vitales de la Nation et à garantir sa résilience. Si l'ensemble des fonctions stratégiques et des moyens civils autant que militaires concourent à la protection, les armées garantissent, en métropole comme outre-mer, la sûreté du territoire, de son espace aérien et de ses approches maritimes. S'agissant de la défense sur le territoire, les armées apportent leur concours à la protection dans les trois milieux et dans le cyberespace.
Dans ce cadre, la posture permanente de sûreté terrestre de nos armées sera renforcée, les postures de sûreté aérienne et de sauvegarde maritime seront maintenues. Les armées continueront également à apporter une contribution à l'action de l'Etat en mer.
Face à la hausse et à la continuité dans le temps d'une menace terroriste majeure sur le territoire national, les armées seront en mesure de déployer dans la durée, dans le cadre d'une opération militaire terrestre, 7 000 hommes sur le territoire national, avec la possibilité de monter jusqu'à 10 000 hommes pendant un mois, ainsi que les moyens adaptés des forces navales et aériennes.
Cette capacité de déploiement doit permettre de contribuer en quelques jours, au profit de l'autorité civile et en renfort des forces de sécurité intérieure et de sécurité civile, à la sécurité de points d'importance vitale, à celle des flux essentiels pour la vie du pays, au contrôle de l'accès au territoire et à la sauvegarde des populations. Les capacités pouvant être mises en œuvre dans ce cadre comprennent les moyens propres de commandement et de renseignement, des dispositifs terrestres, aériens et maritimes de sécurisation et des moyens spécialisés des armées permettant de concourir au rétablissement des fonctions essentielles du pays en cas de menace sur la sécurité nationale (communication, circulation, transport). La fonction protection prendra également en compte l'émergence des menaces représentées par les drones sur le territoire national.
L'opération "Sentinelle" doit être évaluée pour en tirer toutes les conséquences tant sur le rôle des forces armées par rapport aux forces de sécurité intérieure et de sécurité civile, que sur la chaîne de commandement, sur le cadre juridique de l'intervention des militaires, sur la doctrine d'emploi, sur la préparation opérationnelle et la formation ou encore sur le type de sites à protéger et les modalités de cette protection (garde statique ou autre). Le Président de la République a demandé au Premier ministre de préparer un rapport sur cette question. Il est indispensable que la représentation nationale ait connaissance des résultats de ce travail en cours et puisse en débattre.
Parallèlement à cet engagement au profit de la Nation, l'accroissement des risques visant les installations, moyens et activités du ministère de la défense nécessite, pour ce ministère, des aménagements d'infrastructures et le déploiement de moyens matériels et humains supplémentaires.
Cette posture sera complétée par le dispositif de cyberdéfense militaire renforcé, qui fera l'objet d'un effort marqué sur la période de programmation, en relation étroite avec le domaine du renseignement. La France développera une organisation de cyberdéfense étroitement intégrée aux forces, disposant de capacités défensives et offensives pour préparer ou accompagner les opérations militaires. L'organisation opérationnelle des armées intégrera ainsi une chaîne opérationnelle de cyberdéfense, cohérente avec l'organisation et la structure opérationnelles de nos armées et adaptée aux caractéristiques propres à cet espace de confrontation : unifiée, pour tenir compte de l'affaiblissement de la notion de frontière dans cet espace ; centralisée au sein du centre de planification et de conduite des opérations de l'état-major des armées, pour garantir une vision globale et une mobilisation rapide des moyens nécessaires ; et spécialisée, car faisant appel à des compétences et des comportements spécialement adaptés. La composante technique confiée à la direction générale de l'armement (DGA) aura pour mission d'analyser la menace, de développer la recherche amont, et d'apporter son expertise en cas de crise informatique touchant le ministère de la défense.
Pour cette fonction protection, la contribution de la réserve opérationnelle militaire sera en outre renforcée. Ainsi, l'activation du contrat opérationnel de protection à 10 000 hommes sur le territoire, répondant à une menace affectant la sécurité nationale, pourra entraîner le recours à des conditions nouvelles d'appel de la réserve. Les modalités de recours aux réservistes pour des situations ne justifiant pas l'instauration de l'état d'urgence ont été facilitées et le champ du service de sécurité nationale a été élargi à l'ensemble des opérateurs d'importance vitale. Ce dispositif vise à améliorer la réactivité et l'employabilité de la réserve sur notre sol dans de telles circonstances.
La prévention des crises
La prévention des crises qui affectent notre environnement proche ou plus lointain inclut des actions diversifiées, allant de l'élaboration de normes nationales et internationales à la lutte contre les trafics, au désarmement, à la consolidation de la paix, ainsi qu'à la coopération militaire.
Dans cette perspective, la France s'appuiera notamment sur des déploiements navals permanents dans une à deux zones maritimes et sur des moyens prépositionnés (base des Emirats arabes unis et plusieurs implantations en Afrique, en particulier à Djibouti avec deux composantes terrestre et aérienne et une base navale). En accord avec les Etats concernés, la France maintiendra en Afrique des forces déployées dans la bande sahélo-saharienne et sur les façades est et ouest africaines afin de contribuer activement à la sécurité de ce continent. Des actions de coopération structurelle et opérationnelle permettront la consolidation des capacités militaires et des architectures de sécurité sous-régionales africaines dans le cadre de l'Union africaine et, le cas échéant, la mise en œuvre des résolutions des Nations unies et la protection des ressortissants français. Ces déploiements seront adaptés afin de disposer de capacités réactives et flexibles en fonction de l'évolution des besoins. Les accords de coopération ou de défense entre la France et les pays africains concernés seront publiés et soumis au Parlement. Nos actions dans le domaine de la prévention des crises doivent aussi s'orienter vers la recherche de partenaires régionaux prêts à s'engager à nos côtés.
Les moyens et équipements utilisés pour cette fonction sont ceux des autres fonctions stratégiques. Les capacités dédiées à l'intervention dans le cadre d'opérations majeures de coercition peuvent notamment être utilisées pour empêcher un acteur régional de s'en prendre à nos intérêts de sécurité ou à ceux de nos alliés ou partenaires.
L'intervention
L'intervention extérieure a pour objectif d'assurer, par la projection de nos capacités militaires à distance du territoire national, la protection de nos ressortissants à l'étranger et la défense de nos intérêts stratégiques et de sécurité, comme de ceux de nos partenaires et alliés ; elle doit nous permettre d'exercer nos responsabilités internationales.
Nos capacités militaires d'intervention seront développées de manière différenciée, en fonction des missions que les armées sont appelées à remplir. Il s'agit de disposer d'un outil complet et crédible pour traiter la menace au plus tôt et au plus loin.
Les opérations de gestion de crise appellent des moyens militaires permettant de contrôler de vastes espaces, robustes, adaptés à des missions poursuivies dans la durée, à même de faire face à des situations de violence diffuse au milieu des populations, face à des adversaires utilisant des modes d'action asymétriques. Dans ces crises, nos capacités militaires devront permettre aux armées de s'engager dans la durée sur deux ou trois théâtres distincts, dont un en tant que contributeur majeur. Le total des forces déployées à ce titre sur l'ensemble des théâtres sera constitué, avec les moyens de commandement et de soutien associés :
― de forces spéciales et d'un soutien nécessaire à l'accomplissement des missions envisagées ;
― de capacités de cyberdéfense, tant offensives que défensives, en soutien aux forces déployées ;
― de l'équivalent d'une brigade interarmes représentant 6 000 à 7 000 hommes des forces terrestres ;
― d'une frégate, d'un groupe bâtiment de projection et de commandement et d'un sous-marin nucléaire d'attaque en fonction des circonstances ;
― d'une douzaine d'avions de chasse, répartis sur les théâtres d'engagement.
La nature des opérations ou leur sécurisation pourra rendre nécessaire l'utilisation de moyens supplémentaires permettant des frappes à distance à partir de plates-formes aériennes ou navales.
Les opérations à dominante de coercition nécessitent des forces du meilleur niveau technologique, capables de prendre l'ascendant sur un adversaire de niveau étatique déployant des moyens militaires organisés et disposant d'une puissance de feu importante. Les capacités militaires que nous développerons à ce titre devront nous permettre de mener en coalition, sur un théâtre d'engagement unique, une opération majeure dans un contexte de combats de haute intensité. Cet engagement, d'une durée limitée, suppose un préavis suffisant, évalué aujourd'hui à environ six mois, ainsi que la ré-articulation de notre dispositif dans les opérations qui seraient en cours.
Les armées devront pouvoir assumer tout ou partie du commandement de l'opération. À ce titre, les forces françaises conserveront la capacité de participer à une opération d'entrée en premier sur un théâtre de guerre dans les trois milieux (terrestre, naval et aérien).
La France pourra engager dans ce cadre, avec les moyens de commandement et de soutien associés :
― un ensemble significatif de forces spéciales ;
― jusqu'à deux brigades interarmes représentant environ 15 000 hommes des forces terrestres, susceptibles d'être renforcées par des brigades alliées pour constituer une division de type OTAN, dont la France pourra assurer le commandement ;
― jusqu'à 45 avions de chasse, incluant les avions de l'aéronautique navale ;
― le porte-avions, deux bâtiments de projection et de commandement, un noyau clé national d'accompagnement à base de frégates, de bâtiments de soutien, d'un sous-marin nucléaire d'attaque et d'avions de patrouille maritime ; la permanence de cette capacité aéronavale pourra s'inscrire dans le cadre de la force intégrée franco-britannique prévue par les accords de Lancaster House ;
― les moyens permettant d'assurer les fonctions de commandement, de renseignement et de logistique de l'opération (transport, santé, essence, munitions, stocks de rechange).
A l'issue de cet engagement, la France gardera la capacité de déployer sur le théâtre concerné une force interarmées pouvant participer à une opération de gestion de crise dans la durée.
Enfin, au titre de leurs missions permanentes et pour garantir la capacité de réaction autonome aux crises, les armées disposeront d'un échelon national d'urgence de 5 000 hommes en alerte, rassemblant des moyens adaptés aux opérations de gestion de crise comme aux opérations de coercition. Ce réservoir de forces permettra de constituer une force interarmées de réaction immédiate (FIRI) de 2 300 hommes, projetable dans un délai de sept jours à 3 000 km du territoire national ou d'une implantation à l'étranger. Les armées devront rester capables de mener, avant ce délai de sept jours, une action immédiate par moyens aériens.
2. La loi de programmation 2014-2019, une étape vers le modèle d'armée de l'horizon 2025
Le Livre blanc de 2013 définit un modèle d'armée qui sera atteint entre 2025 et 2030. Ce modèle détermine ainsi le point de convergence des efforts d'équipement exposés dans la présente loi.
2.1. Une dissuasion à deux composantes
D'ici à 2025, la pérennisation de la dissuasion nucléaire française sera conduite dans le respect du principe de stricte suffisance et le maintien des savoir-faire techniques et industriels sera assuré.
La période 2014-2019 sera marquée à la fois par la poursuite de la modernisation des composantes et par la préparation de leur renouvellement.
2.1.1. Composante océanique
La composante océanique bénéficiera notamment de la livraison du M 51.2 avec sa tête nucléaire océanique, de l'adaptation de deux SNLE NG au missile M 51, du lancement des travaux d'élaboration du sous-marin nucléaire lanceur d'engin de 3e génération (SNLE 3G) et du lancement du développement de la future version du missile M 51 (M 51.3).
2.1.2. Composante aéroportée
La modernisation de la composante aéroportée sera poursuivie, notamment par la livraison de Rafale permettant la transformation du second escadron nucléaire, le lancement des travaux de rénovation à mi-vie du missile ASMP-A et des études technologiques de son successeur.
Le renouvellement des ravitailleurs C 135 (56 ans en 2019), longtemps retardé, a été engagé par le lancement en 2014 de l'acquisition d'une flotte de 12 MRTT, dont les deux premiers seront livrés sur la période. Ces nouveaux appareils répondront au besoin mutualisé des fonctions de dissuasion, de protection et d'intervention.
2.1.3. Transmissions nucléaires
Les systèmes de transmissions nucléaires feront l'objet de mesures de modernisation touchant principalement les réseaux d'infrastructures de transports des services (RAMSES), le système de transmissions de la composante océanique (TRANSOUM), le système de transmissions de la composante de dissuasion aéroportée (TRANSAERO) et le système de communication de dernier recours (SYDEREC NG).
2.1.4. Simulation
Le programme de simulation apporte à la dissuasion la garantie fondamentale de la fiabilité, de la sûreté et de la capacité de renouvellement dans le temps et en pleine souveraineté de nos armes nucléaires. Il est poursuivi avec la mise en service du laser MEGAJOULE depuis 2014.
2.2. Les capacités dédiées au renseignement
Au cours de la période 2014-2019, dans le domaine de l'imagerie spatiale, la France prévoit la mise en service de la composante spatiale optique (CSO) de MUSIS (Multinational Space-based Imaging System for surveillance, reconnaissance and observation) qui permettra des prises de vues en extrême haute résolution et une capacité de revisite (délai entre deux survols d'un même point du globe) améliorée. L'engagement de l'Allemagne dans la coopération en matière d'observation optique, dont la formalisation est prévue en juin 2015, permettra le lancement d'un troisième satellite CSO, tout en assurant l'accès de la France aux capacités tout temps du futur système allemand SARAh.
Les programmes de drones d'observation et de surveillance seront mis en œuvre de façon à prendre le relais des systèmes provisoires et vieillissants détenus jusqu'à ce jour par les armées. Ils devront apporter dans les délais les plus courts les capacités indispensables tant au niveau des théâtres d'opérations qu'au niveau tactique. Pour faire face à l'urgence et rattraper le retard qui pénalise aujourd'hui nos armées, ils seront acquis dans un premier temps auprès des Etats qui les produisent, compte tenu de l'absence de solutions nationales ou européennes. Ils devront emporter à terme des capteurs optique ou électromagnétique français ou européens. 10 drones de théâtre, de moyenne altitude longue endurance (MALE), seront acquis sur la période de la loi de programmation, en complément de l'acquisition de 2 drones REAPER en 2013. Un groupe d'utilisateurs a été constitué à l'initiative de la France avec nos partenaires européens pour partager nos expériences et nos capacités, et impliquer nos industries dans l'adaptation de ces équipements à nos propres besoins. Le système REAPER, livré depuis décembre 2013 dans la bande sahélo-saharienne, a été immédiatement utilisé de façon intensive dans le cadre des opérations en cours. L'exploitation de ces systèmes et les livraisons prévues appellent une augmentation sur la période des effectifs consacrés à leur mise en œuvre ; leur formation fera l'objet d'une attention particulière. La génération suivante de ces drones sera en outre préparée en privilégiant la coopération européenne.
Moins endurants (1) et plus nombreux, les drones tactiques permettent l'appui direct en renseignement des forces. La génération actuelle (SDTI) arrivera à obsolescence entre 2015 et 2017 ; de nouveaux systèmes de drones plus récents seront acquis pour disposer d'une quinzaine de vecteurs à l'horizon 2019 sur la trentaine prévue dans le modèle.
Des avions légers de surveillance et de renseignement compléteront le dispositif sur le segment d'évaluation et de suivi des crises. Leur emploi pourra être mutualisé entre les forces et les services de renseignement.
Par ailleurs, un flux financier sera nécessaire pour valoriser les systèmes d'exploitation actuels, afin de prendre en compte les nouveaux capteurs et, ultérieurement, d'en assurer la cohérence avec le Système d'information des armées (SIA) et la compatibilité avec les architectures JISR de l'OTAN.
Le renseignement d'origine électromagnétique (ROEM) est une composante essentielle du dispositif d'ensemble. La capacité ROEM spatiale est la seule à pouvoir établir la cartographie exhaustive des activités électromagnétiques adverses. A ce titre, elle est indispensable à la sauvegarde des aéronefs et navires. Elle garantit l'actualisation des contremesures et permet enfin de contrôler des sites protégés par des défenses sol-air. La France dispose aujourd'hui du démonstrateur ELISA, constellation de satellites-démonstrateurs lancée en 2011, et qui sert à la définition du programme CERES. Celui-ci est en cours de réalisation pour une mise en service au plus tard en 2020. Pour sa partie terrestre, le dispositif stratégique fixe de recueil de ROEM opéré par les armées et la direction du renseignement militaire (DRM) est constitué de centres d'interception et de la chaîne de radiogoniométrie. Des investissements sont nécessaires à la modernisation des équipements d'interception et de localisation, et à la rationalisation des systèmes d'exploitation associés (projets ROEM stratégique et SEVE [2]). S'agissant du renseignement aéroporté, les capacités du Transall Gabriel seront remplacées à l'horizon de l'arrêt de la flotte Transall avec l'entrée en service de la charge universelle de guerre électronique (CUGE), dont le vecteur devra être déterminé. L'acquisition d'une charge utile ROEM supplémentaire sur drone REAPER permettra de renforcer l'appui de nos forces en opérations extérieures au regard du retour d'expérience. Dans le domaine maritime, la charge utile du bâtiment Dupuy de Lôme sera modernisée en 2017. Les premières utilisations de drones, notamment en coopération avec nos alliés, ont montré que l'emploi du drone tactique embarqué en opérations navales était prometteur. Les études et les expérimentations en vue d'une intégration sur les plateformes de la marine seront lancées sur la période, notamment au profit des futures frégates de taille intermédiaire (FTI). Les moyens mobiles de renseignement électromagnétique (escadron électronique sol de l'armée de l'air, baies COMINT de la marine nationale et brigade de renseignement de l'armée de terre), qui appuient au plus près les forces engagées pour fournir notamment le renseignement d'alerte, devront être en partie renouvelés sur la période à venir, à travers le projet ROEM tactique.
Dans le domaine de la connaissance du milieu géophysique, indispensable aux opérations, un système d'information géophysique GEODE4D sera réalisé dans le but de mettre à disposition des forces l'ensemble des données géophysiques nécessaires à la conduite des opérations et au fonctionnement des systèmes d'armes dans les meilleures conditions de performances. Une capacité de renseignement géo-spatial (GEOINT) sera développée au profit de la fonction interarmées du renseignement à partir de la fusion et du traitement d'informations géolocalisées et datées, issues des chaînes traditionnelles d'exploitation des sources ouvertes ou maîtrisées (ROIM, ROEM, ROHUM...) et de la représentation géophysique opérationnelle (géographie, hydrographie, océanographie, météorologie).
La modernisation des équipements de navigation par satellite des armées (OMEGA) pourra être lancée dès que la maturité technologique sera jugée suffisante. Elle inclura le développement d'une capacité autonome de géolocalisation capable d'utiliser les signaux GPS et Galileo, et résistante aux interférences et au brouillage.
(1) Les drones tactiques agissent à portée radio. (2) Système de valorisation des écoutes.