PRÉAMBULE : LES LANGUES ET CULTURES
DE L'ANTIQUITÉ AU LYCÉE
Au lycée, les principes qui fondent la notion de " culture humaniste " dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture ne perdent évidemment rien de leur pertinence : " La culture humaniste permet aux élèves d'acquérir tout à la fois le sens de la continuité et de la rupture, de l'identité et de l'altérité. [...] Elle se fonde sur l'analyse et l'interprétation des textes et œuvres d'époques et de genres différents. Elle repose sur la fréquentation des œuvres littéraires (récits, romans, poèmes, pièces de théâtre) qui contribue à la connaissance des idées et à la découverte de soi. " Ces principes, historiquement issus de l'humanisme et des humanités, président de soi à l'enseignement du latin et du grec au lycée : l'examen critique des textes transmis, lus directement dans leur langue originelle, y reste une occasion privilégiée de forger la liberté de jugement et de construire l'autonomie personnelle.
Ne relevant plus de la communication orale, les langues latine et grecque ont acquis le statut de langues de culture par excellence : elles ont produit une littérature exceptionnellement riche et étendue. Les textes de ce corpus, dont la transmission s'étend sur plus de deux mille cinq cents ans et qui ont été régulièrement réinterprétés, ont au cours des siècles constamment nourri la pensée, la création artistique, le droit, la science, la vie politique et sociale. A travers les médiations successives des productions humanistes de la Renaissance et de l'âge baroque, des Lumières et du romantisme, ces textes et ces langues continuent aujourd'hui d'irriguer les langues que parle l'Europe, ses littératures et sa philosophie. Avec leurs multiples échos dans les lettres françaises et européennes, les littératures latine et grecque constituent naturellement le premier objet du cours de langues anciennes au lycée.
L'autre objet, qui n'est pas moindre, est de permettre à l'élève de découvrir, directement et personnellement, les langues qui sont à l'origine des nôtres.
Le latin, d'abord, est la langue-mère du français ainsi que de toutes les langues romanes modernes, qu'elles soient nationales, comme l'italien, le castillan et le portugais, ou régionales, comme le catalan, le corse ou l'occitan. Mille ans après la fin de Rome, et jusqu'au xviiie siècle, le latin a été partout en Europe la langue de travail de l'humanisme, celle du droit et celle de la science moderne à ses débuts, à l'époque des Galilée, Pascal, Newton ou Leibniz. Parmi les langues germaniques, à travers le français qu'il a absorbé, le latin continue de nourrir l'anglais littéraire ou scientifique.
Le grec a servi à formuler le trésor le plus ancien de la philosophie et de la science occidentales. Il demeure, pour les sciences et la médecine, la langue source de la terminologie et des nomenclatures.
La lecture, pratiquée selon des modalités souples et diverses, ainsi que l'analyse et l'interprétation des textes authentiques sont au cœur de l'apprentissage des langues de l'Antiquité au lycée. Grâce à la lecture directe et personnelle des textes originaux, l'élève apprend une langue et il découvre qu'elle est de façon privilégiée et multiple à l'origine de la nôtre. Il entre ainsi en possession des pleins pouvoirs de sa langue maternelle, le pouvoir de lire ce que dit un texte, mais aussi et surtout celui de traduire ce qu'il veut dire. En outre, cet apprentissage favorise et renforce notablement celui des langues étrangères, ainsi que la conscience d'une appartenance européenne.
En s'initiant à lire et à comprendre par lui-même nos textes premiers, le lycéen d'aujourd'hui acquiert des méthodes exclusives d'interprétation ainsi que les repères indispensables pour mettre en perspective les représentations du monde et les valeurs qui lui sont proposées quotidiennement dans notre société de la communication. La lecture attentive des textes originaux, par des allers et retours à travers l'histoire entre les mondes grec, romain, médiévaux ou renaissants et les mondes contemporains, exerce la compétence à interpréter, forme l'esprit critique, favorise la perception des permanences et des évolutions, permet de mieux comprendre le jeu des identités et des altérités à travers la diversité des cultures. Ainsi l'enseignement des langues anciennes rayonne-t-il vers l'ensemble des disciplines pratiquées au lycée : les enseignements de français et de littérature au premier chef, mais aussi l'histoire-géographie, la philosophie, les langues vivantes, les sciences, les disciplines artistiques, l'histoire des arts...
1. Finalités
L'enseignement des langues et cultures de l'Antiquité au lycée répond à deux objectifs :
-contribuer, en liaison avec l'enseignement du français et des sciences humaines, à la formation de l'individu et du citoyen par l'accès, pour le plus grand nombre d'élèves, à l'héritage linguistique et culturel gréco-romain ;
-favoriser la formation de spécialistes des disciplines littéraires et de sciences humaines.
Avec l'ensemble des disciplines des sciences humaines, les langues et cultures de l'Antiquité permettent de comprendre l'importance du monde gréco-romain dans notre culture politique, historique, morale, littéraire et artistique. Elles permettent par ailleurs de prendre conscience du fonctionnement des systèmes linguistiques et renforcent l'apprentissage raisonné du lexique en langue maternelle. Elles contribuent enfin à l'acquisition de compétences intellectuelles grâce à la diversité des exercices qui structurent leur enseignement.
La lecture et l'interprétation des textes grecs et latins, dans le prolongement du collège, doivent permettre aux lycéens, en développant leurs compétences de lecteur :
-de se situer dans l'histoire et de comprendre les événements et idées d'aujourd'hui ;
-de mieux comprendre et de mieux maîtriser, en l'enrichissant, leur langue maternelle par l'étymologie et par la traduction comme par la comparaison avec les autres langues, romanes en particulier ;
-de mieux maîtriser les formes de discours ;
-de former leur capacité à argumenter et à délibérer par l'approche des modes de pensée antiques politiques, religieux et philosophiques ;
-de développer leur capacité d'imaginer par la connaissance des mythes, des représentations de l'Antiquité et les différentes formes de l'art antique.
L'enseignement des langues et cultures de l'Antiquité contribue ainsi pleinement à la formation de la personnalité du lycéen comme individu et comme citoyen conscient, autonome et responsable. Il est donc en relation d'abord avec l'enseignement du français, mais aussi de l'histoire, de l'éducation civique, juridique et sociale, de la philosophie, des arts (architecture, sculpture, peinture, etc.) et des sciences ; il renforce les compétences développées dans l'apprentissage des langues étrangères.
2. Textes, genres et références historiques et culturelles
La lecture et la traduction d'extraits authentiques des œuvres majeures de la littérature latine et grecque contribuent à la constitution d'une culture commune. La lecture et l'étude de textes en traduction française visent à mettre en perspective des extraits étudiés dans une œuvre complète ou dans un groupement de textes.
La lecture et la traduction se construisent à partir des compétences et des savoirs acquis au collège, en langues anciennes et en français. Les élèves prennent progressivement conscience de la manière dont les genres, les œuvres, les problématiques s'inscrivent dans l'histoire romaine et grecque. A partir de la lecture des textes est ainsi fixée une chronologie sommaire de cette histoire dans ses aspects politiques, religieux, sociaux, littéraires et philosophiques.
3. Apprentissages et progression
L'étude des genres et des références culturelles part des acquis du collège. En latin, cette étude prend appui sur les connaissances historiques, sociales et politiques mémorisées concernant Rome, de ses origines à l'apogée de l'Empire de Trajan et d'Hadrien ; elle réactualise les éléments de la langue mémorisés ou identifiés : lexique (800 à 1 000 mots mémorisés), morphologie et syntaxe retenus en fonction des thèmes et textes étudiés jusqu'en troisième. En grec, cette étude prend appui sur les connaissances des mythes fondateurs d'Athènes et les représentations de la démocratie athénienne abordés en troisième ; elle consolide les éléments de morphologie, de syntaxe et de lexique mémorisés en troisième. Il est donc nécessaire que les professeurs de lycée tiennent compte des programmes de collège pour assurer une liaison réfléchie avec la classe de troisième.
3.1. Lecture
Au lycée, la lecture des textes reste au centre de l'apprentissage, complétée par l'étude de l'image, de sites, et par la visite des musées. La compétence de lecture a été progressivement construite au collège par des recherches sur un texte accompagné d'une traduction, des exercices de traduction orale cursive, de traduction écrite de brefs passages, des exercices structuraux, des exercices de résumé en français, des usages variés de traductions.
Au lycée, la pratique de la traduction devient plus systématique pour tendre, en fin de formation, vers l'exercice traditionnel de la version écrite. Ces deux activités, lecture et traduction, sont fondées sur l'approche des genres, des problématiques et des textes porteurs de références, replacés dans l'histoire politique, institutionnelle et culturelle romaine et grecque. Cette approche s'harmonise avec les objectifs du cours de français.
3.2. Langue
Fondé sur des textes littéraires, l'apprentissage de la langue vise à l'acquisition d'un lexique, à l'étude de la syntaxe et des effets stylistiques et poétiques, condition nécessaire à la compréhension du texte et au travail du commentaire.
L'apprentissage de la grammaire est conduit prioritairement, mais non exclusivement, en relation avec la lecture des textes. Les faits de langue sont découverts et reconnus dans les textes, sans s'interdire le recours à d'autres sources, à d'autres exemples, lors des séances spécifiques de langue. Ils font ainsi l'objet d'une présentation méthodique et systématique qui peut permettre une comparaison fructueuse avec la langue française. Cette comparaison se fait également, sous une autre forme, dans la traduction.
Pour les grands commençants, on privilégiera en grammaire l'étude des structures principales de la phrase, les faits de langue récurrents dans les textes étudiés, une approche de la syntaxe fréquentielle. Pour la morpho-syntaxe, on organisera un apprentissage progressif des morphologies verbale et nominale. Le professeur veillera à des mises au point régulières, sous forme notamment de schémas simplificateurs ou de tableaux synoptiques. Ce souci ne sera pas limité aux grands commençants : en seconde, tous les élèves ont besoin de réactualiser méthodiquement leurs connaissances de collège.
L'apprentissage du vocabulaire, toujours en contexte, et sa mémorisation sont organisés autour des mots-outils et des champs lexicaux les plus fréquents dans les textes étudiés. En latin, les élèves disposeront en fin de lycée d'un bagage de 1 600 à 1 800 mots choisis en fonction de leur fréquence dans les textes étudiés et de leur productivité en français ; en grec, d'un bagage de 1 000 mots environ. Connaître ce vocabulaire en fin de formation implique de la part des élèves un effort spécifique, régulier et soutenu et, de la part du professeur, l'organisation de moments d'apprentissage. Comme il le fait depuis le collège, l'élève décompose les formes en leurs éléments, s'approprie le système des désinences casuelles et verbales. Il identifie le vocabulaire connu, puis inconnu, sous ses formes fléchies et peut ainsi trouver les entrées de dictionnaire pertinentes.
En lisant, en traduisant eux-mêmes et en confrontant un texte ancien à une traduction française, les élèves s'interrogent sur la syntaxe et la morphologie latines et grecques en même temps que sur celles du français contemporain. Ils affermissent ainsi leur maîtrise de la langue française. Le programme indique les éléments à acquérir dans l'année mais le professeur construit sa propre progression. Si les textes à lire présentent du vocabulaire, des formes et des tournures syntaxiques que les élèves n'ont pas encore rencontrés, ce n'est pas un obstacle à la lecture : le professeur donne la solution ; mais il veille à ce que chaque texte proposé ne comporte que quelques points étrangers aux acquis et aux apprentissages en cours. En fin de terminale, les élèves sont en mesure de lire et de traduire, oralement et par écrit, un texte appartenant à la littérature antique ainsi que de le commenter ; dans le commentaire, ils sont aptes à mettre en relation une problématique du texte latin ou grec avec l'une ou l'autre des problématiques abordées dans les cours de français, de philosophie, d'histoire ou d'éducation civique, juridique et sociale.
4. Activités écrites et orales
Quelles que soient les modalités de lecture et de traduction retenues, on se souvient que l'intérêt de l'élève ne peut être maintenu s'il se borne à lire trois lignes d'un texte par séance. Les pratiques de lecture incluent des exercices variés, oraux et écrits, dont la mémorisation de textes authentiques. Elles procèdent selon les modalités suivantes.
4.1. Le groupement de textes
Le professeur choisit des extraits autour d'une problématique et/ ou d'une thématique ; les extraits choisis sont suffisamment représentatifs pour donner aux élèves une idée de l'œuvre dont ils sont issus. Selon la difficulté des textes retenus, les élèves lisent de larges extraits (au moins une page d'une édition universitaire), ou des extraits courts (d'une dizaine de lignes ou de vers) que le professeur resitue dans une traduction plus large donnée en français.
4.2. La lecture d'une œuvre
Les élèves lisent soit une dizaine de pages formant un ensemble (une scène de théâtre, une séquence narrative complète, une partie cohérente dans un discours), soit une suite d'extraits appartenant à la même œuvre.
4.3. Le commentaire
La compréhension du contexte de production et des valeurs portées par les textes latins et grecs est une des visées du commentaire. L'autre visée, tout aussi importante, est de faire accéder les élèves à la saisie intellectuelle et esthétique de ces textes pour nourrir leur réflexion d'aujourd'hui. On veillera donc à ne jamais sacrifier le temps du commentaire.
Les ressources de l'audiovisuel et de l'informatique (traitement de texte, documents multimédia, sites internet de qualité) sont mises à profit chaque fois que possible.
Le professeur pourra trouver des références et des pistes pédagogiques sur le site Educnet Langues anciennes, sur le site Musagora et sur le site Hélios :
http :// www2. educnet. education. fr/ sections/ lettres/ pratiques5675/ ticlal ;
http :// www. educnet. education. fr/ musagora/ ;
http :// helios. fltr. ucl. ac. be/
5. Programme du lycée
Le programme définit la progression générale du lycée (textes, genres, problématiques). Il suppose l'ouverture à d'autres champs disciplinaires, notamment l'histoire des arts (architecture, sculpture, peinture). Il laisse au professeur la liberté d'organiser précisément son projet pédagogique annuel pour chaque classe.
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LATIN |
GREC ANCIEN |
Seconde |
L'homme romain : |
L'homme grec : |
Le monde romain.-Mare nostrum : |
Le monde grec.-Regard et discours ethnographique. |
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Figures héroïques et mythologiques : |
Figures héroïques et mythologiques : |
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Première |
Récits et témoignages : |
Récits et témoignages : |
La rhétorique.-L'orateur et la puissance de la parole : |
La rhétorique. Le citoyen dans la cité. |
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Le théâtre : texte et représentation. |
Le théâtre : texte et représentation. |
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La poésie.-Amour et amours : |
La poésie.-Epos et eros : |
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Terminale |
Interrogations philosophiques : |
Interrogations philosophiques : |
Interrogations scientifiques : |
Interrogations scientifiques : |
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Interrogations politiques et juridiques : |
Interrogations politiques et juridiques : |
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Une œuvre au programme. |
Une œuvre au programme. |