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Article Français AUTONOME VIGUEUR, en vigueur depuis le (Arrêté du 10 janvier 1997 relatif aux programmes du cycle central des collèges)

Article Français AUTONOME VIGUEUR, en vigueur depuis le (Arrêté du 10 janvier 1997 relatif aux programmes du cycle central des collèges)

Français
(abrogé par l'arrêté du 8 juillet 2008 sauf pour la classe de 4ème.)

Programme du cycle central

Objectifs d'ensemble du cycle

L'enseignement du français au collège : rappel des objectifs

L'enseignement du français au collège a pour finalité de permettre à chacun de former sa personnalité et de devenir un citoyen conscient, autonome et responsable. Le collège est le niveau d'enseignement le plus élevé commun à tous les élèves; lorsqu'ils le quittent, leurs itinéraires se diversifient, mais ils ont tous besoin des mêmes connaissances fondamentales dans les domaines linguistique et culturel. D'autre part, approchant de l'âge de la majorité, ils deviennent des participants actifs de la vie sociale: ils doivent donc être tous en mesure de s'exprimer et de structurer leur jugement.

Cette finalité se traduit par les objectifs fondamentaux suivants :

- donner aux élèves la maîtrise des principales formes de discours ;

- leur donner les moyens de former leur jugement personnel et de l'exprimer de façon à être entendu et compris ;

- leur fournir les connaissances culturelles fondamentales nécessaires à la construction de leur identité individuelle et sociale ;

- leur permettre d'enrichir leur imaginaire, et de s'initier à la compréhension des formes symboliques.

En ce qui concerne les formes de discours, la progression d'ensemble du collège est la suivante:

- en : étude de la narration, repérage de l'argumentation ;

- en 5e et 4e : étude approfondie de la narration conduisant à y intégrer la description et le dialogue, approche de l'explication, qui prépare l'étude de l'argumentation ;

- en 3e : étude de l'argumentation, et poursuite de l'étude des autres formes de discours.

Objectifs du cycle central

Dans le cadre des objectifs généraux de l'enseignement du français au collège, le rôle de la classe de 6e est de consolider les acquis de l'école élémentaire, en particulier dans le domaine de l'étude de la langue, et de sensibiliser les élèves aux formes essentielles du discours autour des pôles narratif et argumentatif. Pour les classes de 5e et de 4e, l'objectif central est la maîtrise de formes de discours progressivement plus complexes. Cet objectif se traduit par l'étude et la production réfléchie de textes mêlant le narratif et l'argumentatif. En même temps se poursuit la formation d'une culture par des lectures diversifiées de textes, notamment littéraires.

Les contenus du programme proposent en 5e un certain nombre de notions nouvelles, qui seront enrichies et complétées en 4e. Pour tenir compte de la diversité des situations et des niveaux des classes et des élèves, les contenus de la classe de 5e peuvent être repris en 4e en vue de leur consolidation ; inversement, des contenus de la classe de 4e peuvent faire l'objet d'une initiation dès la classe de 5e: il appartient aux professeurs d'évaluer le niveau des élèves en début d'année et de construire leur projet pédagogique annuel en tenant compte de cette évaluation.

Vers la maîtrise des formes de discours...

Au cours du cycle, on précise les caractères distinctifs des formes principales de discours qui se combinent dans la réalité des textes. On affine la connaissance des formes narratives, on engage l'étude des formes descriptives et explicatives, on aborde la pratique de l'argumentation. Le but est qu'en fin de cycle, les élèves aient une compréhension équilibrée de ces différents discours. On les habitue notamment à identifier le degré d'implication du locuteur et à prendre en compte la notion de point de vue (première approche de l'énonciation).

Dans cette perspective, on met l'accent, en classe de 5e, sur la description, et en classe de 4e sur l'explication et l'approche de l'échange argumentatif (la classe de 3e approfondira l'étude de l'argumentation). En liaison avec ces formes de discours, on aborde l'étude du dialogue.

Le travail sur les formes de discours recoupe aussi les perspectives de certaines autres disciplines, l'éducation civique, bien sûr, mais également les sciences de la vie et de la terre et les mathématiques pour la description et l'explication, par exemple). L'étude de l'image, de la représentation jusqu'à l'argumentation, est mise en relation avec l'apprentissage des discours verbaux; elle est ainsi complémentaire de l'enseignement des arts plastiques. Les lectures informative et documentaire contribuent à la poursuite de l'acquisition et du perfectionnement des méthodes personnelles de travail.

... par l'approche diversifiée des textes, notamment littéraires...

La lecture au collège doit permettre aux élèves d'accéder au plaisir du texte. On associe au cours du cycle des lectures diversifiées : littérature pour la jeunesse, textes littéraires, textes documentaires. En relation avec le travail sur les formes des discours, l'étude des textes littéraires permet de mettre en place une approche raisonnée des genres. Elle inclut des textes porteurs de références culturelles importantes pour la constitution d'une culture commune et choisis le plus souvent en relation avec la progression mise en œuvre en histoire.

... dans une démarche combinant les différents contenus.

Une démarche unissant l'étude des formes de discours et l'approche des textes implique une logique de décloisonnement: elle fédère les pratiques de lecture, d'écriture, et les pratiques orales, organisées dans le cadre de séquences d'enseignement.

N.B. - Les compétences et les exemples d'activités de lecture, d'écriture et d'oral, avec les outils de la langue correspondants, sont présentés de façon synthétique sous forme de tableaux dans le document d'accompagnement.

I - La lecture

Objectifs du cycle

L'objectif général du collège étant de développer la capacité de lire des textes variés et de susciter le goût de la lecture, celui du cycle central est de faire accéder les élèves à un premier seuil d'autonomie en ce domaine. Pour cela, trois formes d'approche des textes, développant des pratiques complémentaires, peuvent se combiner:

Dans la mesure où c'est en lisant régulièrement que l'élève améliore ses performances de lecteur, on s'efforce de mener chacune de ces trois approches pour trois ouvrages. Ce nombre n'est cependant pas impératif et il appartient au professeur d'estimer jusqu'où il peut aller dans ses classes. Dans tous les cas, on évite de s'arrêter trop longtemps sur une même œuvre afin de ne pas diluer l'intérêt. On privilégie donc les lectures - fréquentes, régulières et menées selon des modalités diverses - d'ouvrages variés, afin d'amener les élèves à développer progressivement, aussi bien sur le plan culturel que sur le plan technique, leurs capacités de lecteur.

Classe de 5e

A. Objectifs

En matière de discours et de genres, on amène les élèves à maîtriser progressivement la compréhension logique des textes à dominante narrative, à identifier les principaux constituants du récit et leur agencement, notamment pour l'insertion de descriptions et de dialogues. Ils sont sensibilisés à la notion de genre à travers la distinction entre dominante du récit (roman ou nouvelle) et dominante du dialogue (théâtre).

Pour la formation d'une culture commune, il s'agit de donner accès, de façon diversifiée selon le niveau de la classe, à des textes représentatifs de références culturelles du Moyen Âge, de la Renaissance et de l'Âge classique.

B. Textes à lire

1. Approche des genres

On privilégie en 5e:

2. Choix de textes et d'œuvres

Littérature pour la jeunesse

On privilégie les récits brefs et le roman d'aventure lus de façon cursive. On vise à faire repérer les propriétés des genres narratifs, et à faire saisir la signification d'une œuvre dans sa globalité. Le choix des titres est laissé au professeur.

Textes du Moyen Âge au XVIIe siècle, choisis pour leur intérêt culturel

Comme en 6e, l'objectif est de donner aux élèves des connaissances culturelles en les mettant en contact avec des textes littéraires devenus des références.

Ces textes sont tantôt lus dans leur intégralité, tantôt abordés de façon plus rapide, au choix du professeur. Dans ce dernier cas, la lecture porte sur un passage cohérent (un livre, un chapitre, un épisode) clairement situé dans le contexte de l'œuvre.

Ces textes sont lus en version moderne, avec si possible un regard sur l'état de langue d'origine.

En mettant ces textes en relation les uns avec les autres, ainsi qu'avec les œuvres lues en 6e, on fait percevoir des effets d'écho, de reprise, et éventuellement de parodie.

Les textes suivants seront étudiés selon les modalités ainsi définies :

Ces lectures se font en relation avec le programme d'histoire. Elle peuvent au besoin porter sur une adaptation.

Textes documentaires

En fin de 5e, les élèves maîtrisent le maniement d'un dictionnaire usuel, distinguent définition et exemple. Ils ont été initiés à la lecture de la presse (par exemple étude de la une d'un quotidien). Enfin, ils doivent savoir adapter leur lecture aux différentes formes de textes, en particulier lorsqu'il s'agit de lire des consignes.

Pour les autres ouvrages documentaires, on reprend les approches de supports documentaires diversifiés. Par ailleurs, on poursuit également l'initiation aux ressources documentaires sur supports informatiques, audiovisuels et multimédias (CD Rom). Dans ce domaine, la collaboration avec les documentalistes du CDI est essentielle.

C. Lecture de l'image

On précise les relations entre texte et image. On poursuit l'étude de la fonction illustrative de l'image, et on aborde sa fonction argumentative (son rôle d'exemple ou de preuve). Le choix des supports est laissé à l'appréciation des professeurs, l'approche de l'image étant toujours mise en relation avec des pratiques de lecture, d'écriture ou d'oral.

Classe de 4e

A. Objectifs

Dans le prolongement de la classe de 5e, on approfondit l'étude de récits complexes pour les textes à dominante narrative, on développe l'initiation au discours argumentatif, on étudie le discours explicatif (comment développer des informations en réponse à des questions) éventuellement à partir de dialogues.

On aborde l'étude de l'implicite dans tous les types de discours.

Pour développer les connaissances culturelles, on fait lire des textes français et européens des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles.

B. Textes à lire

1. Approche des genres

On poursuit la lecture de récits et d'œuvres théâtrales ; on compare différents types de dialogues (théâtre, roman, bande dessinée, scripts cinématographiques).

On approfondit la lecture de la poésie (voir aussi infra, Textes à écrire, II B, et Textes à dire, III B) en abordant une œuvre poétique ou un ensemble de poèmes, notamment du XIXe siècle.

On étudie la correspondance en comparant les formes du genre épistolaire littéraire et celles de la correspondance quotidienne.

2. Choix de textes et d'œuvres

Littérature pour la jeunesse

En privilégiant toujours la lecture cursive, on pratique la lecture de récits longs (romans). Les titres sont choisis par le professeur.

Textes des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles choisis pour leur intérêt culturel

L'objectif d'ensemble reste le même : donner aux élèves des connaissances culturelles en les mettant en contact avec des textes littéraires devenus des références.

On lira:

Comme en 5e, ces textes sont tantôt lus dans leur intégralité, tantôt abordés de façon plus rapide. Pour ces derniers, la lecture porte sur un passage cohérent (un livre, un chapitre, un épisode) situé par le professeur dans le contexte de l'œuvre.

Les textes sont mis en relation avec le programme d'histoire et avec celui d'éducation civique dans toute la mesure du possible (on peut envisager dans cette perspective la lecture de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen).

Textes documentaires

Pratique du dictionnaire, suite: en fin de 4e, les élèves doivent savoir utiliser les dictionnaires de langue, de synonymes, d'antonymes, en relation avec le travail sur le vocabulaire.

Dictionnaires et encyclopédies : en fin de cycle, les élèves doivent savoir distinguer, selon les usages adaptés, les dictionnaires de langue, les dictionnaires encyclopédiques, les ouvrages encyclopédiques simples.

Autres supports documentaires : poursuite des acquisitions de 5e et approfondissement de l'étude de la presse.

N.B. - Les documents d'accompagnement donneront, à titre indicatif, des listes d'œuvres de qualité pour la littérature de jeunesse, et des listes de textes choisis pour leurs références culturelles.

C. Lecture de l'image

Dans la perspective de l'argumentation, on approfondit l'étude d'images utilisées comme exemples ou comme preuves.

Dans l'étude du dialogue, on utilisera des enregistrements audiovisuels montrant des dialogues de théâtre, de cinéma, de télévision.

D'autres images peuvent être analysées, au choix du professeur, notamment en relation avec les sources culturelles étudiées. Dans tous les cas, on engage l'étude des questions de point de vue (cadrage, angle de prise de vue) et de leurs implications (qu'est-ce qui est montré ? qu'est-ce qui est caché ? qu'est-ce qui est mentionné par des mots et non par l'image ? comment certains éléments sont-ils mis en relief et d'autres minorés ?). On passe ainsi, peu à peu, de l'observation des images à l'étude du discours visuel.

II - L'écriture

Objectifs du cycle

On s'attache à développer la maîtrise des différentes formes de discours, et donc la capacité et le goût d'écrire, en faisant rédiger des textes variés. En fin de cycle, les élèves doivent être capables de produire un récit de deux à trois pages, organisé de façon cohérente, ainsi qu'un texte explicatif d'une page environ.

Mis en œuvre dès le début de l'année, les exercices d'écriture sont réguliers et fréquents. Ils donnent chacun matière à diverses formes d'évaluation, notées ou non.

Pour favoriser cet apprentissage de l'écriture, on développe l'utilisation du traitement de texte, en relation avec l'enseignement reçu en technologie.

L'étude de la langue s'appuie notamment sur les productions des élèves.

Classe de 5e

A. Objectifs

En classe de 5e, on retient trois objectifs essentiels : la maîtrise de la narration et de la description ; leur utilisation conjointe dans un récit incluant également des dialogues; la prise en compte de la situation d'énonciation (en adaptant le propos en fonction du lecteur, notamment dans le cas de l'explication).

En fin d'année, les élèves doivent être en mesure de produire un récit complet et cohérent de deux pages environ. Ils doivent également savoir justifier une réponse par écrit.

B. Textes à écrire

Pour soi

- rédaction de ce qu'on retient (d'un texte, d'un document, avec leurs références) ;

- écriture et réécriture d'un brouillon ;

- reformulation écrite d'un court énoncé (produit par l'élève lui-même, entendu par lui).

Pour autrui

- description (objet, lieu, image) ;

- récit complet rendant compte d'une expérience personnelle ;

- récit fictif ayant un rapport avec le Moyen Âge ou la Renaissance;

- textes poétiques : exercices à contraintes formelles.

Classe de 4e

A. Objectifs

En classe de 4e, les élèves doivent maîtriser la composition d'un récit complet et complexe de deux à trois pages, combinant différentes formes de discours (éléments descriptifs, éléments dialogués, éléments argumentatifs) et incluant un travail sur l'implicite dans le récit (ellipses narratives, ruptures temporelles). Ils sont également capables de rédiger un texte explicatif court (une page environ).

B. Textes à écrire

Pour soi

- écriture et réécriture d'un brouillon (suite) ;

- prise de notes à partir d'un support écrit ou d'une communication orale (initiation) ;

- mise en ordre des idées et des informations afin d'argumenter (initiation à l'élaboration d'un plan) ;

- résumés simples.

Pour autrui

- portrait;

- lettre simple présentant une demande et la justifiant, ou réponse à une telle lettre;

- récit fictif simple ayant pour cadre le XVIIe, le XVIIIe ou le XIXe siècles;

- récit complexe (incluant ellipse narrative, retour en arrière, anticipation) ;

- récit à partir d'un récit donné : suite avec ou sans changement de point de vue;

- texte explicatif avec liens entre assertions et justifications.

III - L'oral: écouter, parler

Objectifs du cycle

L'élève doit savoir écouter, et parler de façon claire et ordonnée, dans un dialogue où il prend en compte le point de vue d'autrui. Il s'initie aussi à la prise de parole devant un auditoire (poursuite des exercices de récitation, développement des exercices de diction, initiation à la prise de parole devant la classe).

La pratique d'un recueil personnel de textes mémorisés par l'élève, engagée à l'école, poursuivie en 6e, est encore recommandée en 5e-4e.

Chacune des activités indiquées aux paragraphes Textes à dire est pratiquée et évaluée au moins une fois dans l'année. On les fait intervenir le plus tôt possible. On préfère des exercices brefs, fréquents et réguliers, à des exercices longs et rares.

Lors de ces activités, on fait appel le plus souvent possible à des enregistrements de documents authentiques et on initie les élèves à une pratique maîtrisée du dialogue.

Classe de 5e

A. Objectifs

Le but de la classe de 5e en ce domaine est que l'élève sache écouter et parler de manière efficace, qu'il sache participer à un dialogue à deux interlocuteurs en respectant la situation de communication dans laquelle il se situe (dialogue avec le professeur, dialogue avec un autre élève), en choisissant le niveau de langage adapté.

B. Textes à écouter, à dire

La récitation : elle s'appuie sur des textes faisant l'objet d'une étude; elle porte en priorité sur des poèmes, et éventuellement sur des extraits de théâtre.

Les dialogues : écoute et analyse de dialogues enregistrés, de pièces de théâtre, de sketches, de conversations diverses ; lecture orale de dialogues extraits de romans, pièces de théâtre et poèmes (travail de la diction) ; pratiques orales dans le débat (échange d'idées et d'arguments), dans les jeux de rôle, dans des formes simples de mise en scène.

La narration : écoute et étude de récits enregistrés, comptes rendus de visites, films, documents sonores.

La description orale : elle peut porter sur un objet, un lieu, un document ou un monument, un paysage, une image; elle met l'accent sur la perspective adoptée et le point de vue de l'observateur.

Classe de 4e

A. Objectifs

On continue les travaux engagés en 5e (diction, écoute), mais en classe de 4e on se propose d'amener les élèves à accepter et à comprendre le point de vue d'autrui, à prendre part à un dialogue explicatif ou argumentatif, à présenter une communication orale construite en l'adaptant au public devant lequel elle est prononcée.

On passe des situations à deux interlocuteurs à des situations plus complexes (interlocuteurs nombreux, échange avec un groupe). On aborde, sans y insister, la réflexion analytique sur les pratiques orales, à partir des productions des élèves. Leurs énoncés oraux peuvent servir de support aux travaux sur la langue.

Plus encore qu'en 5e, les activités orales sont engagées dès le début de l'année et pratiquées de façon fréquente et variée.

B. Textes à écouter, à dire

Le travail de la diction (suite) :

La narration : suite des pratiques de 5e, en construisant des récits plus complexes.

Le compte rendu : préparé, il est limité dans sa durée (quelques minutes) et peut porter sur une lecture, sur un document écouté ou vu, sur une visite.

Le dialogue: il est mis en jeu entre élèves; il porte sur des sujets précis, limités ; il vise l'échange d'arguments et repose sur une documentation commune préalable.

Les outils de la langue pour la lecture, l'écriture et la pratique de l'oral

Objectifs du cycle

L'étude de la langue est liée aux formes de discours qui organisent l'enseignement du français au collège : la narration, la description, l'explication, l'argumentation. Toujours associée à la lecture, l'écriture et l'expression orale, l'étude de la langue est menée à partir des productions des élèves et des lectures. Il est souhaitable que l'accent soit mis en 5e sur la pratique du récit et du dialogue, en 4e sur la pratique de l'explication et l'initiation à l'argumentation.

Le but du cycle est que les élèves maîtrisent les marques syntaxiques des discours complexes, y compris dans leur orthographe, en même temps qu'ils enrichissent leur vocabulaire.

La progression d'ensemble est laissée à l'appréciation du professeur, en fonction de son projet, de ses objectifs et du niveau de sa classe.

Tout en étant liée à la lecture, à l'écriture et à l'oral, l'étude de la langue doit faire l'objet d'un apprentissage spécifique à l'intérieur des séquences.

Ces outils sont présentés ici, pour les classes de 5e et de 4e, de façon à donner une vue synthétique de l'ensemble du cycle. Les contenus qui correspondent plus particulièrement à la classe de 4e y sont indiqués en italiques.

N.B. - On aura soin de se reporter aux tableaux Lecture, Écriture et Oral présentés dans le document d'accompagnement pour y retrouver la façon dont les outils de la langue trouvent leurs principales mises en relation avec ces activités.

1. Grammaire

Discours

- la situation d'énonciation et ses indices ;

- l'énoncé ancré dans la situation d'énonciation :

adverbes (ici, maintenant, demain) ;

temps verbaux (présent, passé composé, futur) ;

pronoms personnels (1re et 2e personne) ;

déterminants ;

- l'énoncé coupé de la situation d'énonciation :

adverbes (le lendemain) ;

temps verbaux (passé simple, imparfait) ;

pronoms personnels (3e personne) ;

déterminants.

- le dialogue et sa ponctuation ;

- paroles rapportées directement et indirectement.

Texte

- les reprises pronominales (pronoms personnels et indéfinis) ;

les reprises nominales (reprises fidèles, par synonymie, périphrastiques).

Phrase

- les principales classes de mots ;

- les principales fonctions par rapport au nom : expansions du nom, apposition ;

par rapport au verbe : sujet et attribut du sujet, compléments essentiels, en particulier d'objet et d'agent,

par rapport à la phrase : compléments circonstanciels.

Conjugaison (indicatif, subjonctif, impératif, "conditionnel") des verbes du 1er et du 2e groupe, puis des verbes usuels du 3e groupe.

2. Orthographe

Étude, en liaison avec les textes lus :

- des familles de mots et de leurs particularités graphiques;

- des différentes formes de dérivation ;

- des homophones et des paronymes.

- marques du genre et du nombre;

- accords dans la phrase et dans le texte;

- marques de l'énonciation (je suis venu/je suis venue) ;

- segmentation et homophonie (sait/s'est/ses/ces/c'est) ;

- désinences verbales.

On propose aux élèves des exercices brefs, nombreux et variés, distinguant l'apprentissage (dictées guidées ou préparées, exercices à trous, réécritures diverses) et l'évaluation (dictées de contrôle). Les réalisations écrites des élèves (qu'il s'agisse de leurs propres textes ou de textes d'autrui) donnent lieu à observation, interrogation sur les causes d'erreur, et mise en place de remédiation. Dans tous les cas, l'évaluation cherche à valoriser les graphies correctes plutôt qu'à sanctionner les erreurs.

3. Lexique

Le lexique constitue un enjeu majeur. On a soin de l'enrichir en toutes occasions et en tous domaines. Chaque fois que possible, on recourt à l'étymologie (de façon simple) et à l'histoire du mot (en relation avec la lecture des textes).

Plutôt que de disperser l'approche lexicale en ensembles thématiques successifs, on s'attache à organiser l'enseignement du lexique selon différents niveaux d'analyse:

Préface

Les programmes du cycle central entrent en vigueur à partir de la rentrée de septembre 1997, pour la classe de 5e. Leur mise au point est le résultat d'un travail long et minutieux qui a impliqué, aux différentes phases du processus, les représentants de l'enseignement supérieur (universités, IUFM, etc.), les corps d'inspection et les professeurs de l'enseignement secondaire.

La consultation menée dans tous les collèges a permis d'améliorer considérablement les projets initiaux. Il a cependant été parfois nécessaire d'opérer des choix entre des options divergentes. Un programme ne peut en effet se limiter au plus petit ensemble accepté par tous : les disciplines risqueraient d'y perdre leurs spécificités et surtout la formation s'en trouverait sans nul doute appauvrie. Des orientations importantes ont donc été maintenues en dépit de réserves ou d'interrogations formulées ici ou là : elles ont déjà été présentées et expliquées dans les programmes eux-mêmes.

Les documents d'accompagnement qui sont présentés dans ce livret et dans les six autres analogues proposent des développements sur les choix les plus importants ou les plus nouveaux.

C'est ainsi que :

Ainsi les documents d'accompagnement, en fournissant des explications et en proposant des démarches, se situent entre les programmes eux-mêmes et l'ensemble des matériels pédagogiques (manuels, logiciels, CD Rom, émissions TV, etc.) qui accompagnent traditionnellement la mise en œuvre d'un nouveau programme. Références pour les enseignants, ils ne peuvent remplacer leur réflexion personnelle, et ne se substituent pas aux programmes eux-mêmes.

Au-delà des aspects strictement disciplinaires, d'autres éléments sont au cœur des apprentissages du cycle central du collège : la maîtrise de la langue, l'orientation, la citoyenneté, la sécurité routière, l'environnement, etc.

Si certains d'entre eux peuvent être l'objet d'apports de connaissances spécifiques, l'éducation à l'environnement, conformément aux orientations fixées au plan international, repose sur une réflexion pluridisciplinaire: considéré du point de vue de l'environnement, le savoir revêt une dimension globale: il doit asseoir une prise de conscience intellectuelle et morale de la "dimension planétaire" des questions liées à la sauvegarde de la nature et du patrimoine, mais aussi plus largement au développement économique et au destin de l'humanité. Dans plusieurs disciplines, ces documents d'accompagnement proposent aux enseignants des ouvertures pour que ces réflexions puissent être menées avec les élèves dans le cadre même des programmes.

La mise en œuvre des nouveaux programmes pourra révéler au fil des heures de cours la nécessité de donner d'autres précisions ou de nouvelles explications : ces documents d'accompagnement devront être réactualisés. D'autres, fondés sur cette expérience au quotidien des professeurs de collège, pourront voir le jour au plan local ou au plan national pour faciliter la réflexion pédagogique dans les établissements.

I - Le français au cycle central

Le programme du cycle central s'inscrit dans la conception globale de l'enseignement du français au collège. Le texte introductif du document Accompagnement pour la classe de 6e présente une réflexion d'ensemble qui concerne les trois cycles : cycle d'adaptation (6e), cycle central (5e et 4e) et cycle d'orientation (3e). Il est utile cependant de rappeler et de préciser les choix et orientations essentiels qui ont guidé, pour le cycle central, l'élaboration du programme.

A. Un choix théorique: le discours

La définition du discours comme "mise en pratique du langage à l'oral et à l'écrit" (1) invite à souligner trois aspects indissociables de la notion : l'énonciation, l'interaction et l'usage.

Ce choix théorique du discours éclaire concrètement les différentes composantes de l'enseignement du français : lecture, écriture, oral et outils de la langue. Il permet de les réunir et de les rendre explicitement solidaires les unes des autres. Il suggère aussi de mettre l'accent, au cours du cycle central, sur certains aspects spécifiques de chacune de ces composantes.

(1) Glossaire.

1. La lecture

Considérer la lecture comme une activité de discours et non comme un simple décodage consiste tout d'abord à reconnaître la légitimité des diverses formes de lecture, en fonction de la situation et des objectifs du lecteur. On a pu ainsi, dès la 6e, introduire dans le contexte scolaire la pratique la plus familière à tout lecteur compétent, la lecture cursive, à côté de la lecture analytique. Au cours du cycle central, cette ouverture se renforce : en stimulant la lecture cursive, on peut élargir les possibilités de contact avec la diversité des textes. Par ailleurs, mettre la lecture dans la perspective du discours consiste à faire prendre conscience aux élèves qu'il n'y a pas de texte qui ne soit pris en charge et orienté par un point de vue. Un des objectifs de la classe de 4e sera de permettre la reconnaissance et l'analyse de ce fait essentiel.

L'approche fondée sur les formes de discours justifie l'introduction d'une grande variété de textes : textes porteurs de références culturelles, littérature, littérature de jeunesse, textes fonctionnels et documentaires, presse, bande dessinée, médias non verbaux. La sensibilisation aux genres, puis leur reconnaissance et leur analyse sont développées à travers cette diversité. Pratiques discursives culturellement codifiées, les genres permettent d'appréhender des ensembles de textes d'un seul tenant, qu'ils soient littéraires ou non : la narration épique peut être reconnue dans un extrait de chanson de geste, mais aussi dans un article sportif ou dans une mise en scène cinématographique. L'intérêt d'une étude des genres est de préparer les élèves à une approche comparative des textes. Cette démarche, introduite en classe de 4e (une fable de La Fontaine comparée à une fable d'Esope, par exemple), sera développée en 3e.

En ce qui concerne les textes choisis pour leur apport culturel, la répartition sur les deux années du cycle est globalement chronologique (du Moyen Âge au XIXe siècle), comme elle l'était en 6e (l'héritage antique) et comme elle le sera en 3e (le XXe siècle). Cette dimension historique apportée par l'étude d'œuvres représentatives est un des fondements de la formation culturelle des élèves. Elle n'impose pas une progression chronologique sur l'année. Le travail sur les textes privilégie les formes du discours qui s'y entrecroisent et les genres qui les spécifient. Le choix des œuvres, lues intégralement ou sous forme d'extraits resitués dans leur contexte narratif et culturel, est laissé à l'initiative du professeur à l'intérieur des textes proposés pour chacune des deux années.

La priorité est encore celle du récit, mais on poursuit la lecture des textes poétiques et du théâtre; on introduit des œuvres théâtrales complètes ainsi que des ouvrages où s'exprime la distanciation critique. Conduite en liaison avec l'histoire, l'approche des œuvres permet aux élèves de se situer dans la culture de leur langue. Enfin, la lecture des œuvres littéraires, tournée aussi vers le plaisir du texte, vise à enrichir et à structurer l'imaginaire ; elle permet du même coup de stimuler, dans l'exercice de l'écriture, la créativité des élèves.

L'image est omniprésente dans la culture d'aujourd'hui, le plus souvent liée aux discours verbaux. Son appréhension et sa lecture se font donc dans la perspective du discours : celle-ci prend en compte aussi bien les fonctions narrative, descriptive, argumentative de l'image, que les spécificités du langage visuel.

2. L'écriture

Tout écrit est finalisé, il appelle la présence d'un lecteur qu'il s'agit d'informer, d'émouvoir, de séduire, de persuader. Cette présence est toujours soulignée, faisant de l'écriture une véritable relation d'échange. On insiste au cours du cycle central sur la pluralité des destinataires possibles et la précision de leur définition. Qu'il s'agisse de soi-même ou d'autrui, qu'il s'agisse de destinataires individuels ou collectifs, qu'il s'agisse de destinataires explicites ou implicites, appelés par des écrits à caractère fonctionnel ou par des écrits fictionnels : dans chaque cas, on introduit dans l'écriture la perspective du lecteur.

Le lien avec la lecture est aussi, d'une autre manière, renforcé : l'élève rédacteur est simultanément lecteur d'autres textes ; il y puise des contenus, des formes et des stratégies, il imite et transforme. En inscrivant les pratiques d'écriture dans une culture du texte, et en développant les possibilités d'une pédagogie de l'intertextualité, y compris du pastiche, l'enseignant souligne l'importance, dans toute production écrite, de la relation avec d'autres écrits mis en mémoire dans la communauté culturelle. L'écriture, même "imaginative", se travaille avec des matériaux préexistants : ils concernent aussi bien le jeu des positions énonciatives, que les formes de discours, les thèmes, les motifs ou les genres.

3. L'oral

Forme la plus ordinaire du discours, l'expression orale voit son importance reconnue comme équivalente à celle de la lecture et de l'écriture. Les difficultés propres à la mise en place d'une véritable pédagogie de l'oral sont connues : quel oral enseigner, entre l'expression spontanée et l'expression normée ? quelle régulation, lorsque les groupes sont nombreux ? quels exercices et quelle progression ? quelle évaluation, enfin ? Le chapitre consacré à l'oral dans les programmes met en avant l'écoute : "L'oral : écouter, parler". De même que la perspective du discours permettait de reconnaître la validité des différentes variétés de lecture, elle suggère de distinguer ici la diversité des écoutes : on écoute différemment selon qu'il s'agit de mémoriser, de noter une consigne, d'écrire un texte sous dictée, de se préparer à répondre, etc.

La prise de parole est étroitement associée à la pédagogie de l'écoute: la parole ne doit pas seulement être audible, claire, ordonnée et régulée, elle doit aussi prendre en compte le statut, les attentes, la demande ou le point de vue de l'interlocuteur. L'expression orale offre une mesure immédiate de l'efficacité communicative. Les élèves sont sensibilisés à la visée interlocutive, aux stratégies mises en œuvre pour l'accomplir, à sa réussite ou à son échec, à travers la diversité des situations de dialogue (à deux interlocuteurs, puis à plusieurs, puis avec un auditoire).

Cette situation, quelle qu'elle soit, impose à chaque fois ses propres normes et implique par conséquent la maîtrise progressive des niveaux de langue. Les variétés du français montrent qu'il existe plusieurs "bons usages", dont il convient de dominer les codes pour participer pleinement à la vie sociale. Les pratiques orales des élèves occupent dans ce contexte une place importante. L'étude systématique et approfondie du dialogue introduite au cours du cycle central embrasse la pratique orale du dialogue courant, le transfert du dialogue à l'écrit, l'étude du dialogue érigé en genre dans les œuvres théâtrales.

4. Langue et discours : des outils pour la lecture, l'écriture et l'expression orale

Le programme réaffirme très clairement le lien essentiel entre les outils de la langue (lexique, grammaire, orthographe) et les pratiques d'expression (lecture, écriture, oral). La nomenclature grammaticale a été réduite; le lexique, ainsi que l'orthographe et ses fonctions, ont été en revanche développés et précisés.

Ces différentes rubriques sont toutes envisagées selon trois niveaux d'analyse: la phrase, le texte, le discours. Ainsi, la rubrique "lexique" différencie la structuration lexicale, les champs lexicaux et sémantiques, le lexique et l'énonciation. Un accent particulier est mis sur les contraintes contextuelles que l'usage impose au lexique. La rubrique "orthographe" distingue les accords dans la phrase, puis dans le texte, et les marques orthographiques liées à l'énonciation. La rubrique "grammaire" s'organise entièrement selon ces trois niveaux d'analyse complémentaires. Pour l'étude de la phrase, des directions essentielles sont indiquées, sans être détaillées. Le professeur approfondira ou non les points ainsi proposés, selon son projet et le niveau de ses élèves.

Des tableaux synoptiques sont présentés à la fin de chacune des parties "lecture", "écriture" et "oral". Ces tableaux présentent les principales compétences qu'il s'agit de former chez les élèves et, en regard, des exemples d'applications qui permettent cette formation. Les contenus grammaticaux y sont introduits, dans le contexte des activités d'expression qui justifient leur connaissance et leur approfondissement. Afin de souligner l'unité des deux niveaux qui forment le cycle central du collège, les outils et les notions retenus sont proposés en un seul ensemble pour les classes de 5e et de 4e. Il appartient au professeur d'opérer des choix en fonction de son contexte d'enseignement. Quelques notions paraissent cependant devoir être réservées à la classe de 4e: elles sont indiquées en italiques. Ces tableaux proposent une vue synthétique et intégrée des pratiques, préalablement développées et commentées dans le texte des documents d'accompagnement. Leur but est d'aider les professeurs, sans pour autant leur imposer des modèles, à concevoir les séquences didactiques qu'il leur revient d'organiser.

B. Un choix didactique: les principes de progression

1. Trois notions différentes

Le principe idéal de progression est qu'à chaque séance il y ait du nouveau, s'appuyant sur ce qui est déjà connu et maîtrisé. Eu égard à l'hétérogénéité des élèves et des classes, la mise en œuvre d'un tel principe est souvent malaisée. Il convient donc tout d'abord de distinguer dans l'organisation de l'enseignement pendant l'année scolaire trois notions différentes : le programme, la progression, la programmation.

a. Le programme

Il est organisé autour des grandes composantes de l'enseignement du français (lecture, écriture, oral, outils de la langue). Il appelle la lecture d'une série d'œuvres et établit une liste de notions à faire étudier. Il ne se préoccupe pas de l'ordre selon lequel ces activités sont menées dans la classe.

b. La progression

Élaborée par les professeurs en fonction de leur projet, elle établit un ordre dans les apprentissages, un itinéraire et des étapes parmi les notions, tout en tenant compte de points de passage obligés (par exemple, les œuvres au programme). Elle s'efforce de déterminer un enchaînement précis des séquences, de façon à éviter l'empilement et la juxtaposition des notions. Elle ménage également, entre les séquences, des temps de synthèse qui permettent de dresser avec les élèves le bilan des acquis, en particulier dans les domaines lexical et grammatical, et de mesurer les besoins qui restent à combler.

c. La programmation

Elle se préoccupe de la distribution chronologique des séquences retenues dans le cadre de la progression et prend en compte le calendrier scolaire (il est essentiel que des séquences ne soient pas coupées par des vacances; celles-ci, en revanche, peuvent permettre la lecture préalable d'une œuvre). On s'attache à préserver une indispensable souplesse, permettant de faire varier le rythme des apprentissages selon les réactions, les difficultés et les intérêts des élèves. De ce fait, on peut estimer que la programmation sur l'année scolaire d'une dizaine de séquences didactiques (d'une douzaine d'heures en moyenne) est un point de départ raisonnable, laissant la place à quelques activités "décrochées" des séquences (temps de synthèse ou de remédiation, notamment en matière de grammaire ou d'orthographe) ou imprévues (sorties pédagogiques, spectacles, vie de la classe ou du collège).

Les programmes pour le cycle central ont été arrêtés par le BO n° 1 du 13 février 1997. La programmation ne peut s'établir qu'en fonction de la classe et de ses spécificités. Les principes de progression, en revanche, peuvent être précisés.

2. Quelle progression de la 6e à la 3e?

a. Une progression d'ensemble

La progression d'ensemble est définie dans le préambule "Le français au collège" des programmes pour la classe de 6e:

- en 6e : identifier le pôle narratif et le pôle argumentatif; lire, produire, étudier diverses formes de récit; s'entraîner à l'expression orale d'un point de vue argumenté;

- en 5e-4e: pour le pôle narratif, poursuivre l'étude de la narration et développer celle de la description ; pour le pôle argumentatif, aborder l'étude du discours explicatif;

- en 3e: pour le pôle argumentatif, étudier les principales formes d'argumentation ; pour le pôle narratif, enrichir la pratique des formes du récit.

b. Des complexifications progressives

La progression d'ensemble ainsi définie est fondée sur les formes et les fonctions du discours, ainsi que sur le récit et le dialogue qui les intègrent. Elle établit clairement des dominantes (narration en 6e, description en 5e, explication en 4e, argumentation en 3e), mais elle n'est pas linéaire pour autant. Il n'est donc pas question d'étudier toutes les questions liées à la narration en 6e, pour n'y plus revenir, puis toutes les questions liées à la description en 5e, pour n'en plus parler. Au contraire, l'argumentation est abordée dès la classe de 6e, la narration et la description sont étudiées jusqu'à la classe de 3e.

Cette progression d'ensemble se propose cependant d'éviter les répétitions. Pour y parvenir, elle procède par complexification progressive des notions et aménage, dans l'acquisition des compétences, des étapes successives réparties de la 6e à la 3e.

Les formes de discours sont en effet naturellement entremêlées dans la pratique. L'enseignant les étudie à travers des textes plus variés et plus complexes, il en précise le contexte culturel en les inscrivant dans des genres et dans des œuvres, il propose des instruments d'analyse de plus en plus finement articulés et conduit ainsi ses élèves à une meilleure maîtrise des pratiques discursives.

Pour le cycle central, l'accent est mis sur l'articulation et l'entrecroisement des formes de discours : en introduisant en 5e l'analyse du descriptif, on précise les liens entre le narratif et le descriptif, dont les fonctions réciproques pourront être approfondies en classe de 4e (avec la dimension explicative de la description, par exemple), et même en classe de 3e (avec sa dimension argumentative). On découvre en 5e le fonctionnement du dialogue, dont les articulations formelles, les valeurs et les fonctions interlocutives seront progressivement précisées au cours du cycle. À la classe de 4e est réservée l'approche raisonnée du discours explicatif, ouvrant ainsi sur la question de l'argumentation qui sera explicitée et développée en 3e. À titre d'exemple, et seulement à titre d'exemple car de nombreuses possibilités différentes existent, on proposera les étapes suivantes dans l'acquisition de deux compétences : savoir décrire et savoir argumenter.

Savoir décrire

6e

5e

4e

3e

- Identification de passages descriptifs dans un récit
- Caractérisation - élémentaire des lieux - et des personnages

- Structuration spatiale de la description (droite/gauche, haut/bas, etc.)
- Verbes de perception régissant la description
- Formes simples d'insertion de la description dans le récit
- Première approche des fonctions de la description (informative)

- Fonctions simples de la description dans le récit (description préparant ou différant le moment fort d'une action)
- Le portrait
- Description et discours : le point de vue ; la visée explicative de la description

- Description et récit : les différentes formes d'insertion du descriptif dans le narratif
- Fonctions complexes de la description
- Description et discours : la visée argumentative de la description

Savoir argumenter

6e

5e

4e

3e

- Identification de passages - argumentatifs dans - un récit
- Expression orale d'un - point de vue argumenté

- Image et argumentation - (publicité, affiches)
- Dialogue - et argumentation : - qui argumente, pour qui, - avec quel objectif ?
- Organisation d'un débat : - l'échange des arguments

- Approche de textes centrés sur l'argumentation - (critiques de films, articles polémiques simples)
- Production d'un article

- Organisation d'une - argumentation simple : - thèse, arguments, - exemples
- Ajustement de l'argumentation à celui que l'on - désire convaincre (écrire - et réécrire un texte pour - deux destinataires - différents)

3. Quels principes de progression sur l'année ?

Les progressions de la 6e à la 3e telles que nous venons de les définir amènent à construire, pour chaque niveau, des blocs de compétences (permettant de raconter, de décrire, d'expliquer, d'argumenter). C'est à partir de ces blocs qu'il est possible de construire des progressions sur l'année. Trois principes essentiels de progression sont alors envisageables : succession, combinaison, entrecroisement.

a. La succession

Concevoir une progression selon un principe de succession revient à aborder les uns après les autres les divers blocs de compétences, sans envisager croisements ni retours. Dans une classe de 4e, et de façon très schématique, l'étude d'une série de nouvelles ou d'un roman permet d'aborder les problèmes liés à la narration puis ceux liés à la description ; l'étude d'une pièce de théâtre est l'occasion d'étudier le dialogue; une série de textes fonctionnels et fictionnels amène l'étude du discours explicatif tandis que l'argumentation est envisagée à travers des extraits d'un texte de critique sociale du XVIIIe siècle. Ce type de progression peut offrir l'avantage de la clarté pour les élèves : les séquences sont contrastées, donc nettement identifiables. Conduisant cependant à une approche typologique (types de textes), il présente un risque de morcellement et de rigidité par la juxtaposition de notions sur lesquelles on ne revient pas.

b. La combinaison

Concevoir une progression selon un principe de combinaison consiste à partir des textes pour étudier la façon dont ils combinent les différents types de discours. L'étude d'un récit en classe de 5e (récit de voyage, roman d'aventures, roman de chevalerie) permet ainsi d'étudier la narration, la description et le dialogue, non plus successivement mais de façon complémentaire, en envisageant, par exemple, les formes d'insertion du descriptif dans le narratif ou la fonction informative du dialogue. De même, l'analyse du dialogue peut s'ouvrir par une comparaison entre le dialogue romanesque et le dialogue théâtral pour se centrer ensuite sur une pièce de théâtre où le dialogue aura fréquemment une fonction argumentative. De la sorte, les blocs de compétences continuent d'exister mais les compétences se construisent les unes par rapport aux autres et sont constamment en relation les unes avec les autres. Elles peuvent donc être mises en œuvre simultanément, par exemple, pour l'écriture longue d'un récit. Un tel type de progression est relativement simple à réaliser et il permet de prendre appui très directement sur les textes, étudiés en tant que tels. Il a également le mérite de permettre des combinaisons et des synthèses constantes, au cours desquelles les compétences s'associent, les savoirs et les savoir-faire se structurent entre eux.

c. L'entrecroisement

Concevoir une progression selon un principe d'entrecroisement revient à combiner entre elles les compétences et à entrecroiser chronologiquement les apprentissages. On peut ainsi, en classe de 4e, aborder une première fois la narration dans le cadre de la nouvelle, étudier le rôle des dialogues dans ce genre d'écrit et envisager ensuite la question du dialogue théâtral. On revient alors à la narration pour étudier le point de vue à partir d'un groupement de textes, avant de s'arrêter sur le regard dit "naïf" d'un texte de critique sociale du XVIIIe siècle et aborder ainsi la question de l'argumentation. On peut, de la même façon, envisager une première fois la description dans le récit et revenir ensuite sur le rôle qu'elle a joué dans les discours explicatif (décrire pour expliquer) ou argumentatif (décrire pour argumenter). De la sorte, les notions se croisent, les retours s'organisent et les compétences se construisent progressivement, toujours à partir des textes et en liaison les unes avec les autres. Les itinéraires qui s'établissent ainsi peuvent être très variés ; ils semblent cependant plus difficiles à concevoir que ceux envisagés précédemment, les retours sur les notions ne pouvant en aucun cas signifier leur répétition pure et simple.

4. Progression, compétences et contenus

Nous avons raisonné essentiellement, dans cette partie "Progressions", en termes de compétences, ce qui revient à centrer la réflexion sur les résultats que l'on cherche à obtenir et sur l'élève qui se trouve au cœur des apprentissages ainsi envisagés. Il est bien évident cependant qu'une compétence n'existe qu'en fonction d'un contenu, qu'un savoir-faire renvoie toujours à un savoir.

C. Un choix pédagogique: le décloisonnement

1. Le décloisonnement

Le mode d'organisation du travail proposé par les programmes, celui de la séquence didactique, invite expressément à associer autour d'un même objectif les différentes composantes du français et à passer d'un enseignement cloisonné à un enseignement décloisonné.

Dans un enseignement cloisonné, le cours de français est composé d'activités diverses (orthographe, grammaire, étude de texte, expression écrite), envisagées isolément les unes des autres. L'étude de texte n'a alors aucun lien avec l'expression écrite, qui elle-même se développe parallèlement aux notions abordées en grammaire ou en vocabulaire. Les apprentissages sont multiples et éclatés, les objectifs nécessairement parcellaires.

Or l'étude des formes du discours lie écrit et oral, lecture et écriture, approches des faits de langue (lexicaux, grammaticaux, orthographiques) et analyse des textes. Elle appelle donc un enseignement décloisonné qui fédère les pratiques et les met au service d'un même objectif. Ainsi, si l'objectif retenu est, en 5e, l'écriture du discours descriptif, les textes étudiés fournissent des exemples de descriptions et permettent l'identification de quelques caractéristiques et l'analyse de quelques procédés; la grammaire s'arrête sur la qualification du nom ; le vocabulaire étudie les formes de mises en relation spatiales et les verbes de perception. De la sorte, la poursuite d'un objectif unique, suffisamment large et porteur, amène les différentes composantes du français à s'associer entre elles.

2. La séquence didactique

Définie dans le document Accompagnement des programmes de 6e comme un "mode d'organisation des activités qui rassemble des contenus d'ordre différent autour d'un même objectif sur un ensemble de plusieurs séances", la séquence didactique permet de mettre en œuvre le décloisonnement. Elle se fixe un objectif unique expliqué aux élèves (production d'un discours, le plus souvent écrit mais éventuellement oral), puis choisit les compétences à faire acquérir et les apprentissages à organiser pour que cet objectif soit atteint, au fil d'un nombre variable de séances consécutives ayant chacune une dominante (étude de texte, ou vocabulaire, ou grammaire, etc.). Ce principe général étant affirmé, on apportera deux séries de précisions, sur l'organisation et sur l'évaluation de la séquence.

a. L'organisation de la séquence

Il n'y a pas lieu de définir un cadre-type de la séquence, un modèle pré-établi qui se voudrait applicable à toutes les situations d'enseignement. Bien au contraire, selon le projet du professeur, l'objectif retenu et les réactions des élèves, la séquence se construit dans une série de va-et-vient variés entre les activités de réception (lecture et/ou écoute de textes permettant de faire naître les questions et d'analyser les réponses apportées par les auteurs) et de production (expression orale et/ou écrite permettant l'appropriation par les élèves des procédés observés ou des notions analysées dans les textes). De ce fait: :

- la durée de la séquence est variable, une douzaine de séances étant considérée comme une dimension moyenne, que l'on peut être amené à dépasser en fonction d'un projet précis ;

- les composants de la séquence ne sont pas intangibles : une séquence peut aborder plus rapidement les questions grammaticales et insister sur le lexique, une autre privilégier l'étude des textes et passer très vite sur l'orthographe;

- la séquence prend appui sur un texte de départ (texte d'auteur ou production d'élève) ou sur toute autre forme de support, oral ou iconographique. Elle rebondit ensuite de texte en texte de façon à relancer constamment la recherche et à maintenir en éveil l'intérêt des élèves. De la même façon, elle ne conduit pas à l'écriture d'un texte unique (rédaction ou composition française considérée comme le devoir de fin de séquence) mais s'appuie au contraire sur des exercices d'écriture variés, sur des productions intermédiaires multiples et rapides qui se développent au fil des séances et préparent les élèves à la production de fin de séquence.

b. L'évaluation de la séquence

Ainsi définie, la séquence didactique appelle deux types de productions - intermédiaires et finale - et donc deux formes d'évaluation distinctes.

- Les productions intermédiaires, relevant d'une évaluation essentiellement formative, ne sont pas notées systématiquement. Mais il est cependant possible que des notes soient attribuées (orthographe, expression écrite et orale, grammaire, etc.), même si elles n'ont pas un statut équivalent à la note de fin de séquence.

- La production finale relève d'une évaluation sommative (on évalue l'ensemble des apprentissages menés au cours de la séquence) et, dans la mesure du possible, critériée (on mesure, à l'intérieur de la note globale, la part de chaque apprentissage).

Les notes globales de français, qui ont vocation à figurer sur les bulletins scolaires et pièces administratives diverses (2), se fondent sur les notes de production de fin de séquence et peuvent intégrer avec souplesse les évaluations réalisées en cours de séquence.

Sous ses différents aspects, le décloisonnement permet ainsi de passer d'une logique d'enseignement à une logique d'apprentissage qui met l'élève au centre de toutes les démarches.

D. L'interdisciplinarité

Le français est naturellement à la croisée des disciplines. Selon les activités, et peut-être selon les années, certaines relations entre les différentes matières de l'enseignement au collège peuvent être privilégiées.

- Relation entre le français et l'histoire tout d'abord, à travers les textes institués "références culturelles" : domaine par excellence de l'approche interdisciplinaire, l'histoire littéraire au collège prépare l'examen plus problématisé des rapports entre textes, littérature et histoire qui sera développé au lycée.

- Relation entre le français et les autres langages (arts plastiques, musique) : l'image doit être considérée comme un discours visuel qui, avec son langage propre, raconte, décrit, argumente, émeut, persuade. Le cinéma, la télévision, la publicité associent les langages visuel, musical et verbal. Ces différentes dimensions sont prises en compte dans une concertation entre le français, la musique et les arts plastiques.

- Relation entre le français et les autres langues, langues anciennes et langues vivantes: si pour les premières, le latin et le grec, les liens sont fortement réactivés dans les programmes (3), pour les secondes, en revanche, un travail de concertation peut être développé, surtout en fin de cycle et en classe de 3e, à travers la lecture et l'étude de textes traduits des littératures étrangères, notamment européennes.

- Relation, enfin, entre le français et les disciplines scientifiques, non seulement autour du problème général de la maîtrise de la langue, mais plus précisément à propos des formes de discours : qu'est-ce que décrire, raconter, expliquer, justifier en sciences de la vie et de la terre ou en mathématiques ?

La relation entre les disciplines au collège consiste à croiser des compétences plus que des contenus. Elle vise notamment à faire apparaître les compétences transversales ou voisines que les différentes disciplines doivent, séparément, former. Des propositions pour la mise en œuvre concrète de l'interdisciplinarité sont présentées dans la partie de ce document consacrée aux "Actions particulières" : pédagogie de soutien et parcours diversifiés (pp. 127-130).

(2) Cette logique voudrait aussi que le cahier de textes de la classe cesse d'être cloisonné en rubriques étanches et qu'il présente les séquences successives, dans l'ordre de leur déroulement.

II - Lecture

A. Objectifs généraux du cycle

L'objectif du cycle central en matière de lecture vise l'autonomie progressive de l'élève-lecteur: la diversité des pratiques de lecture lui permettra de multiplier les accès au texte, la formation des compétences de lecture favorisera une meilleure maîtrise de la compréhension et de l'interprétation, la variété des textes avec lesquels il entre en contact lui permettra d'élargir ses possibilités de choix. Il s'agit avant tout de former, d'entretenir et de développer le goût de la lecture.

La diversité des pratiques de lecture

Comme en 6e, on reconnaît à l'intérieur du contexte scolaire la légitimité des diverses pratiques de la lecture, parce qu'elles permettent d'élargir concrètement l'accès à un plus grand nombre de textes, mais aussi parce qu'elles sensibilisent l'élève-lecteur à ce qu'il fait en lisant. Trois pratiques essentielles de lecture sont mises en œuvre au cours du cycle :

- la lecture cursive (ouvrages documentaires simples, œuvres littéraires et notamment littérature pour la jeunesse) ;

- l'étude de textes intégraux (récits littéraires courts, littérature pour la jeunesse, œuvres théâtrales) ;

- l'étude analytique d'extraits en contexte (passages d'œuvres littéraires plus longues et plus complexes).

(3) Les professeurs de français sont ainsi invités à sensibiliser leurs élèves en 4e à la possibilité de l'apprentissage du grec en 3e (Cf. infra, p. 93 et pp. 123-125).

La formation des compétences du lecteur

Au cours du cycle, on s'attache à développer les compétences de lecture. On peut distinguer :

- Le développement des modes de lecture selon les objectifs qui sont visés. La saisie rapide s'attache à reconnaître la mise en page, invite à pratiquer la lecture-balayage, entraîne au repérage de mots-clefs. La saisie raisonnée prend appui sur la lecture de consignes qui permettent la lecture sélective d'un texte et l'utilisation d'un appareil critique simple. La lecture linéaire et exhaustive est bien entendu pratiquée.

- Le développement de l'observation pour l'analyse des textes. Les élèves sont invités à reconnaître les principales formes de discours dans les textes - qu'ils soient homogènes ou non -, à identifier les dominantes et à reconnaître à partir de ces formes de discours les premiers principes de la segmentation des textes. Ils observent les traits spécifiques des différentes formes de dialogues : dialogue quotidien, de la conversation à l'interview, dialogue théâtral, dialogue dans un récit, dialogue dans les bandes dessinées. Ils apprennent à distinguer les genres fictionnels et non-fictionnels, et surtout à identifier les caractères propres à différents genres narratifs (épopée, roman, conte, nouvelle), théâtraux (comédie, farce, drame), et poétiques (des formes fixes au vers libre).

- La mise en œuvre d'un langage de description simple. Les éléments de ce métalangage portent sur l'énonciation (énonciateur et situation d'énonciation, point de vue, paroles rapportées, mise en relief), sur la cohérence des formes de discours (structures narratives, descriptives, explicatives), sur la structuration textuelle (substituts et reprises, connecteurs, thème/propos), sur les trois grandes dimensions de la signification dans les textes (acteur, espace, temps).

La variété des textes

Comme en 6e, la lecture des textes littéraires, des textes documentaires et des œuvres de littérature pour la jeunesse est menée en classe. Les objectifs sont à chaque fois précisés, les relations entre les différentes sortes de textes soulignées.

En ce qui concerne les textes particulièrement porteurs de références culturelles, le plus souvent étudiés sous forme d'extraits, l'approche faite en liaison avec le programme d'histoire est comprise comme une contribution réciproque des deux disciplines l'une à l'autre: de même que la connaissance de l'histoire éclaire la lecture d'une œuvre en la contextualisant, de même cette lecture donne souvent de la chair et de la vie à des connaissances historiques. Cependant, la lecture de ces textes n'a pas seulement pour objectif la construction d'un savoir lié au programme d'histoire; elle a aussi d'autres finalités : en 5e, par exemple, l'introduction des récits de voyage liés aux découvertes permet de sensibiliser les élèves à la dimension de l'altérité. En 4e, l'étude des dialogues favorise la prise en compte de l'autre, et le début d'une analyse des points de vue et positions de chacun.

1. La lecture en 5e

On poursuit, en 5e, la lecture des récits. Alors qu'en 6e, les textes à dominante narrative étaient envisagés essentiellement à travers la succession chronologique des événements, on s'attache en 5e à faire ressortir les éléments d'une structuration du récit, en commençant à reconnaître dans les textes les relations à distance, les symétries et les oppositions fonctionnelles qui en établissent la cohérence.

On aborde l'étude de la description, à la fois en elle-même, comme forme de discours, et plus particulièrement dans les relations, riches et complexes, qu'elle tisse avec le discours narratif. On poursuit ainsi le repérage des notations descriptives qui permettait, en 6e, d'étudier les éléments épars de la description dans un récit (concernant les lieux, les objets, les personnages). On commence à reconnaître et à analyser pour elles-mêmes les séquences descriptives (leur structure, les verbes de perception introducteurs de description, les formes et le lexique de l'évaluation, etc.). Mais on examine plus précisément les modes d'insertion de la description dans le récit, en dégageant par exemple, à partir de certaines positions stratégiques dans le texte (description inaugurale, pause narrative, description finale), les différentes fonctions qu'elle est susceptible d'exercer : la description finale peut avoir une fonction "glorifiante", la pause narrative peut avoir une fonction de suspension et différer le moment attendu de l'action, etc. Au-delà des moyens de la caractérisation, de nouvelles fonctions du discours descriptif dans le récit se font jour et se précisent. Ces observations de la lecture sont faites en liaison avec les pratiques d'écriture, où elles sont réinvesties. Elles seront développées en 4e.

L'étude du dialogue constitue un des objets d'étude spécifiques de la classe de 5e. Dans le cadre de la lecture, une attention particulière est portée à ses modes d'insertion dans le récit, parallèlement à ceux de la description. De même, ses différentes fonctions par rapport à l'action peuvent être dégagées : le dialogue anticipe l'action, la commande ou la prépare, ou inversement il la suit et la commente; le dialogue constitue l'action ou l'accompagne, 1 comme au théâtre, etc.

La lecture des textes est enfin l'occasion d'initier à l'identification des formes de discours explicatif et argumentatif, au sein de textes à dominante narrative ou descriptive. Mais il ne s'agit là encore, comme en 6e, que d'un simple repérage, associé aux pratiques discursives spontanément maîtrisées par les élèves dans ces domaines.

2. La lecture en 4e

On aborde en 4e des textes narratifs complexes comportant des bouleversements chronologiques (retours en arrière, anticipations, ellipses narratives). Le discours descriptif est approfondi et précisé avec l'introduction de l'observateur, sa place, son rôle et la notion de point de vue (qui parle, qui voit, qui sait dans le texte) ; on étudie les motivations de la description (une attente, une action, une recherche, etc.) ; on précise ses fonctions didactique, explicative, dilatoire ; on met en rapport la description et le temps (l'effet de suspense, par exemple). On découvre aussi plus précisément les formes du discours explicatif dans les textes littéraires (chez J. Vernes, par exemple) et non littéraires (comme dans les textes de vulgarisation scientifique), dont on analyse les fonctions et les effets dans leur contexte. Le travail sur l'explication à travers l'analyse de textes dialogués oriente les élèves vers l'approche de l'échange argumentatif.

Ce cheminement vers l'argumentation est, d'une autre manière, engagé à travers la lecture de textes de satire, de dérision et d'humour qui apprennent à former l'esprit critique, indiquent quelques-uns de ses moyens d'expression, entraînent à l'exercice de la distanciation.

La reconnaissance des fonctions discursives (articulation du descriptif, de l'explicatif, du narratif) et de leurs diverses insertions dans le récit constitue une initiation à l'analyse textuelle. Sans en faire l'objet d'exercices formels et systématiques, ces observations permettent de rendre sensibles les élèves aux moyens langagiers qui produisent les effets de cohérence, de force et de crédibilité d'un texte. Cette sensibilisation facilitera, lors de l'écriture, la mise en œuvre de moyens similaires à ceux qu'ils auront clairement observés et efficacement assimilés.

B. Textes à lire

1. Approche des genres

En 5e et en 4e, l'attention portée aux genres se renforce : les codes qui les régissent déterminent pour une large part les horizons d'attente du lecteur. Ainsi, les genres, loin d'être étudiés comme de simples instruments de classification de textes, sont mis en prise directe avec la lecture elle-même. Leur maîtrise progressive permet à l'élève d'élaborer, de vérifier ou de modifier les hypothèses qu'il forme en lisant et de s'approprier ainsi ses lectures.

Il ne s'agit, au collège, que des genres les plus larges et les plus usuels. Au cours du cycle central, on approfondit la connaissance des genres narratifs par l'étude de récits variés, de récits de voyage, de nouvelles (et leur comparaison avec les contes), de romans brefs. Il s'agit, lors de la lecture de ces textes à dominante narrative, de conduire les élèves d'une saisie chronologique à une compréhension logique (relations d'oppositions et de symétrie, rapports entre la succession des événements et les relations de cause à effet, traces de schématisation narrative et leur déformation singulière, etc.). On doit s'efforcer cependant d'éviter les excès formels et d'enrichir en les assouplissant les modèles souvent déjà assimilés par les élèves.

L'étude du dialogue est liée à la lecture et à l'analyse de pièces de théâtre. On analyse et on compare différents types de dialogue au théâtre, dans les romans, dans les bandes dessinées, dans les scénarios cinématographiques. On compare, si possible, différentes exécutions d'un même dialogue théâtral. On montre ainsi que le dialogue a diverses fonctions dans les différents genres de textes : il est action au théâtre, il interrompt la narration dans un roman ou une nouvelle, il est lié à l'image dans les bandes dessinées et au cinéma.

Prolongeant l'approche du dialogue, l'étude du genre épistolaire est abordée en classe de 4e, par la comparaison de ses formes littéraires (extraits de romans par lettres) et de la correspondance quotidienne. On insiste alors sur les relations qui s'établissent entre le scripteur et son destinataire (de l'espace d'intimité de la lettre privée à l'espace officiel de la lettre fonctionnelle), on précise les codifications ritualisées du genre, on amène les élèves à mettre en œuvre leurs connaissances en matière de discours pour en repérer les différentes formes qui s'entrecroisent dans une lettre.

Le travail sur la poésie est lié, de manière privilégiée, à l'oral : écoute et diction de poèmes. On commence à sensibiliser les élèves aux liaisons entre l'expression sonore (prosodie, rythme, assonances et rimes) et le contenu figuratif de la poésie. On identifie les figures-reines du discours poétique (métaphore, métonymie, antithèse, périphrase) et les symboles.

La découverte des genres documentaires se poursuit : on apprend à associer des sources documentaires variées, sur papier mais aussi sur supports multimédias. L'apprentissage des méthodes de recherche et d'organisation des informations recueillies se fait en collaboration avec les documentalistes des CDI et des bibliothèques municipales. On familiarise les élèves avec les outils de classement (cartes, fiches, catalogues, supports informatiques), en vue de les conduire progressivement à l'autonomie dans ce domaine.

2. Choix de textes et d'œuvres

a. La littérature pour la jeunesse

Comme en 6e, on accorde une place importante à la littérature pour la jeunesse qui permet aux élèves de s'identifier facilement à des personnages ou à des situations. L'accès à cette littérature est aisé et favorise le goût pour les livres et la lecture. Les jeunes lecteurs apprennent à aimer des auteurs et à choisir des livres de façon autonome; ils acquièrent des savoirs qui leur permettront d'aborder progressivement des textes plus difficiles. On propose en Annexe une liste non limitative d'œuvres dans laquelle le professeur peut choisir librement, en fonction des niveaux et des situations pédagogiques, des goûts et des intérêts de ses élèves. Il s'agit encore pour l'essentiel, en 5e et en 4e, d'œuvres narratives.

b. Textes du Moyen Âge au XIXe siècle choisis pour leur apport culturel

Ces textes sont, comme pour la classe de 6e, en relation étroite avec le programme d'histoire. Leur lecture fournit aux élèves des références culturelles et des repères chronologiques ; elle fournit aussi, par l'accès aux récits de voyages, aux dialogues (par le théâtre) et à la correspondance (par le genre épistolaire), le moyen de faire découvrir la problématique de l'ailleurs et de l'altérité. S'amorce ainsi une réflexion sur soi et sur autrui, qui est cruciale pour la maîtrise de l'argumentation en classe de 3e.

- Un roman de chevalerie (cycle de la Table ronde ou de Tristan). On souligne la permanence de certains motifs culturels, en mettant par exemple en relation le personnage du chevalier médiéval et sa stéréotypie actuelle dans les médias et les loisirs (cinéma, jeux interactifs, jeux vidéo, etc.).

- Un récit de voyage en relation avec les grandes découvertes (Marco Polo, Bougainville, Jean de Léry, etc.). On les lit pour le récit d'aventures, mais aussi pour leur dimension anthropologique : les élèves s'initient ainsi aux différentes manières de découvrir les autres. Ils étudient les descriptions en mobilisant les savoirs acquis en 6e et en affinent l'analyse.

- Un texte théâtral. On lit une pièce de théâtre brève du Moyen Âge, farce ou comédie (La farce de Maître Pathelin, La farce du cuvier, etc.) que l'on peut mettre en relation avec un Mystère. On peut préférer une comédie du XVIIe siècle.

- Un texte de dérision critique du Moyen Âge ou de la Renaissance choisi dans le Roman de Renart ou dans l'œuvre de Rabelais. Ces textes de dérision permettent de découvrir le pouvoir du rire satirique dans un contexte historique.

- Une pièce de Molière, et éventuellement une autre pièce du XVIIe siècle. On peut aborder la tragédie, afin de faire ressortir par confrontation les traits de la comédie. Cette étude s'ouvre aussi au travail comparatif: rapprochant une pièce de Molière et une comédie d'Aristophane, comme il peut par ailleurs rapprocher une fable de La Fontaine et une fable d'Ésope, le professeur sensibilise, en fin de 4e, ses élèves à la possibilité de l'apprentissage du grec en 3e.

- Des textes de satire et de critique sociale du XVIIIe siècle (extraits des Lettres persanes de Montesquieu, des Contes de Voltaire). On fait apercevoir les procédés d'écriture de la distanciation critique : ironie, parodie, etc. On étudie notamment l'emploi de l'antiphrase en apprenant aux élèves à la repérer tout d'abord, et à l'élucider ensuite en la mettant en rapport avec son interprétation dans le contexte.

Par ailleurs, dans le prolongement du travail sur la critique sociale, on peut sensibiliser les élèves à l'argumentation et ouvrir leur réflexion avec l'étude de la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen.

On approfondit la connaissance des genres par la lecture :

- d'un roman bref ou d'une série de nouvelles (Balzac, Flaubert, Gautier, Maupassant, Mérimée, Verne, Pouchkine, Stevenson, Tolstoï...) ;

- d'un ensemble de poèmes du XIXe siècle (Baudelaire, Gautier, Heredia, Hugo, Musset, Verlaine, Rimbaud...).

Ces lectures n'ont pas à être toutes analytiques : la lecture cursive y a toute sa place, pour un tiers ou la moitié des titres. L'important est la variété des textes lus, et leur bonne intégration dans les séquences, pour des réinvestissements à l'oral et à l'écrit.

Suggestion de séquence: "La poésie" (4)

On propose à des élèves de 5e la lecture du poème de Verlaine "Après trois ans" (in Poèmes saturniens) en leur demandant de préciser en quoi, à leurs yeux, ce texte est poétique. On se satisfait de réponses très techniques : présence de vers et de rimes (ici plates, croisées ou embrassées), majuscules au début des vers, forme fixe (ici, un sonnet).

Cette première représentation, très contestable mais très prégnante du texte poétique, est immédiatement remise en cause par l'étude de deux poèmes de Pierre Reverdy ("les Ardoises du toit" et "la Lucarne ovale", in Plupart du temps). Verlaine évoquait un jardin et Reverdy parle d'un grenier. Il s'agit à nouveau de poésie mais sans rimes, sans majuscules en début de vers, sans forme préétablie. En revanche, un rythme visuel est créé par la disposition typographique, un rythme auditif est donné par la longueur des vers et des strophes. En outre, diverses images (les diamants, l'or) éclairent les textes, qui sont relus à voix haute dans cette double perspective.

Ayant ainsi été arrachés à une vision par trop restreinte de la poésie, les élèves se voient proposer un exercice écrit: Verlaine, dans son poème, évoque un jet d'eau (Le jet d'eau fait toujours son murmure argentin"). Ils écrivent à leur tour, avec ou sans contraintes de versification, un court texte poétique jouant avec les images pour montrer le jet d'eau, avec les sonorités pour le faire entendre. Ces textes sont écrits individuellement, retravaillés en groupe et proposés oralement à l'ensemble de la classe. Le professeur, quant à lui, livre une autre possibilité d'écriture poétique avec "La Colombe poignardée" d'Apollinaire (in Calligrammes) et demande, en fonction des réactions des élèves, l'écriture d'un ou plusieurs autres calligrammes.

Dans un troisième temps, on en vient à une comparaison de textes : le jardin des Feuillantines est décrit par Adèle Hugo dans un texte en prose (in Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie), et par Victor Hugo lui-même dans un poème ("Ce qui se passait aux Feuillantines vers 1813", in Les Rayons et les Ombres, XIX, 1840). L'étude parallèle de ces deux textes permet de montrer la densité sémantique d'un texte poétique qui parvient à condenser tout ce que le texte en prose disperse. Elle peut également s'arrêter sur les figures (antithèses et comparaisons) et faire commenter leurs emplois. Elle est enfin l'occasion, au cours d'une séance à dominante grammaticale, d'étudier les différentes expansions du nom, dans chacun des deux textes.

Ayant ainsi approché de plus près la spécificité du texte poétique, les élèves peuvent revenir vers le texte initial et se poser à nouveau la question première... au fil d'une analyse de ce poème menée à partir des entrées découvertes au cours de la séquence. Enfin, une production écrite finale s'appuie sur ce texte pour demander l'écriture d'un poème en vers libres, consacré à l'évocation d'un lieu revisité "Après trois ans", comme chez Verlaine.

(4) Les séquences, succinctement présentées dans ce document d'accompagnement, ne sont que des suggestions. Leur propos est d'éclairer concrètement tel ou tel aspect du programme, et non de constituer des modèles. La plupart des séquences esquissées dans ce document sont inspirées de propositions, issues d'expérimentations, qui ont été faites lors des journées interacadémiques sur la mise en œuvre des nouveaux programmes à Marseille, Bordeaux, Tours, Paris, et Nancy (janvier/mars 1997). Leurs auteurs sont ici remerciés.

c. Textes documentaires

Comme en 6e, il est important de continuer à développer la lecture de textes documentaires. Dictionnaires et encyclopédies sont fréquemment utilisés, en classe et au CDI. Dans le cadre d'une recherche documentaire particulière faisant partie des objectifs d'une séquence, on apprend aux élèves des techniques de lecture spécifiques (appréhension immédiate de la typographie, lecture sélective d'informations, repérage des titres et des mots-clefs). On compare les différents usuels et on apprend à utiliser les outils multimédias.

Des manuels scolaires de différentes disciplines font l'objet d'étude d'énoncés : on repère et on analyse les formes canoniques des consignes, on apprend à les expliciter et à les reformuler, on établit des typologies, on confronte les formulations des diverses disciplines. On aborde à travers les consignes certaines formes du discours injonctif. Il convient tout au long du cycle de proposer des activités régulières sur la lecture des consignes.

Au cours du cycle central, on poursuit les activités de lecture et de consultation des dictionnaires. La pratique du dictionnaire de langue doit être maîtrisée en 5e; cet instrument accompagne désormais les élèves dans toutes leurs activités et doit devenir un objet très familier pour le travail lexical (en lecture, écriture, orthographe) aussi bien que pour les recherches spécifiques (d'étymologie, de polysémie, de familles lexicales, etc.). On effectue des comparaisons entre plusieurs dictionnaires : étude de différents articles correspondant à un même mot (nombre et ordre des définitions, présence ou non d'exemples, typographies différentes, illustrations). On vérifie l'étymologie d'un mot chaque fois qu'elle présente un intérêt, on fait rechercher les familles de mots, on procède à des exercices ludiques avec le dictionnaire (invention de définitions, etc.). En classe de 4e, on manipule fréquemment plusieurs types de dictionnaires en fonction des besoins ; on sait distinguer un dictionnaire de langue d'un dictionnaire encyclopédique.

En 5e, il est conseillé d'intégrer, au sein d'une séquence, une recherche documentaire qui conduit les élèves à utiliser des textes, des illustrations, des enregistrements. Ils apprennent à choisir parmi les différents ouvrages documentaires présents au CDI ou dans d'autres bibliothèques, à sélectionner et à fabriquer des enregistrements sonores et visuels, à travailler sur les manuels des autres disciplines. On peut, par exemple, proposer une recherche sur la commedia dell'arte dans le cadre d'une séquence sur le théâtre. On apprend à citer ses sources avec précision, on présente une petite bibliographie. On poursuit en classe de 4e les activités mises en place en 5e: on affine la recherche, on compare les documents, on procède à des synthèses plus élaborées.

On poursuit en 5e la lecture de la presse qui a été initiée en 6e. L'accès à la presse périodique peut se faire avec des magazines et des revues adaptées à l'âge et aux intérêts des élèves. On analyse les titres des articles et les différents types de phrases qui les constituent. En classe de 4e, on étudie des articles de presse que l'on choisit de préférence dans la presse jeunesse; on apprend à comparer plusieurs articles écrits sur un même sujet et on y distingue les différentes formes de discours mises à l'œuvre. On s'initie à la lecture de la une de quelques grands quotidiens nationaux.

C. Modalités pédagogiques

Il est essentiel que les élèves aient toujours un contact personnel et direct avec tous les textes lus ou étudiés en classe. Cela justifie les différentes pratiques de lecture : certains textes appellent une lecture unique; pour d'autres, il faut procéder à une lecture analytique après une première lecture de prise de contact.

Dans tous les cas, l'important est de faire de l'élève un lecteur actif, capable de repérer des détails pour les transformer en indices, d'anticiper, de formuler des hypothèses sur la suite ou le genre d'un texte, de construire le sens en mobilisant des références culturelles. Avec les textes abordés en lecture cursive ou analytique, ainsi que par l'étude d'œuvres intégrales, les élèves se constituent peu à peu un corpus : on les habitue à comparer, à confronter, à mettre en parallèle les textes lus ou étudiés afin de favoriser la mise en place d'un système de références. Dans la même perspective, on rappelle aussi, au besoin, les œuvres et les textes étudiés en 6e.

1. La lecture cursive

La lecture cursive, définie comme "la forme la plus usuelle de la lecture" (5), se poursuit au cours du cycle central dans le même esprit qu'en 6e et il convient de lui réserver une place à part entière, soit en liaison avec les séquences didactiques soit en dehors d'elles.

Comme activité préparatoire, la lecture cursive permet de faire découvrir aux élèves une époque (textes fictionnels ou documentaires) ou un univers littéraire (romans pour la jeunesse) avant l'étude d'une œuvre intégrale ou d'une série d'extraits. Ainsi, avant d'aborder des extraits d'un roman de chevalerie, on conseillera la lecture de textes documentaires sur le Moyen Âge, de romans conçus pour de jeunes lecteurs et situés dans un cadre médiéval (comme Les Chevaux du roi de Dejean), ou de romans à la portée de jeunes lecteurs (comme Ivanhoé de Walter Scott).

Si elle intervient après l'étude d'une œuvre intégrale ou d'une série d'extraits, la lecture cursive permet de prolonger le travail déjà mené, par exemple en l'élargissant (lire plusieurs nouvelles "réalistes" après en avoir étudié une en classe, ou plusieurs récits mettant en scène des animaux après avoir découvert des extraits du Roman de Renart). Elle rend également possible diverses formes d'approfondissement: lecture de textes documentaires sur un pays après avoir lu un roman d'aventure qui s'y déroule, retour en classe sur quelques extraits d'un ou plusieurs ouvrage(s) lu(s) par l'ensemble des élèves, pour en étudier un aspect précis (par exemple, le rôle des passages explicatifs dans un ou plusieurs romans de Jules Verne).

Menée à l'intérieur de la séquence didactique, la lecture cursive n'appelle pas d'autres formes d'évaluation que celles prévues dans le cadre de la séquence.

Le choix d'un livre s'opère selon des critères précis (thème, auteur, genre, titre, nombre de pages, première et quatrième de couverture, illustrations éventuelles) auxquels on familiarise les élèves. Dans le même esprit, on leur montre comment la consultation de la table des matières, la lecture balayage du premier chapitre ou de quelques passages permettent une découverte rapide de l'ouvrage. Cette phase préalable d'exploration du livre est essentielle; pour que l'élève ait effectivement la possibilité de choisir, elle se déroule au CDI ou dans une bibliothèque, en partenariat dans toute la mesure du possible avec les documentalistes ou les bibliothécaires.

Le lecteur autonome est celui qui met en œuvre de sa propre initiative une série de compétences. Comment lire, c'est-à-dire quand, combien de temps, à quel rythme ? Après quels passages interrompre sa lecture et comment la reprendre ? Quels indices (temps, lieux, caractérisation des personnages) prélever pour construire le sens ? Quelle relecture possible, et avec quels outils, d'un passage dont le sens n'est pas clairement apparu ? Toutes ces questions renvoient à un "savoir lire" travaillé ailleurs, dans le cadre des séquences, variant avec chaque lecteur, et que seule la lecture cursive permet d'exercer et de développer librement.

Cette lecture en liberté ne peut s'accommoder de formes d'évaluation rigides; elle doit cependant être prise en compte dans des activités d'échange, en classe, sur les livres lus. Des fiches de lecture présentées oralement ou par écrit et destinées à guider le choix d'un autre lecteur peuvent ainsi être rédigées, des questionnaires peuvent être élaborés, des jeux imaginés, des affiches ou des panneaux d'exposition réalisés, des exposés et des débats organisés, des comparaisons établies, etc. En définitive, la plus grande souplesse est souhaitable dans une phase d'évaluation qui reste très éloignée, dans son esprit et dans ses formes, d'un contrôle permettant de mettre une note (6). Ainsi conçue, la lecture cursive privilégie le fait de lire (un roman, un article d'encyclopédie, un magazine, une bande dessinée) sur le choix d'un titre. Elle permet donc une très grande individualisation de la pédagogie et ouvre un espace de liberté qui permet à chaque élève de lire selon ses compétences de lecteur. Elle s'affirme donc comme un des moyens permettant de gérer l'hétérogénéité dans les classes de collège.

(5) Glossaire.

(6) Pour cette raison, la pratique systématique des fiches de lecture "relevées et notées" paraît peu susceptible de développer chez l'élève le goût de la lecture. D'une manière générale, les fiches ne doivent jamais êtres coupées d'un travail sur le texte en classe.

2. La lecture analytique

La lecture analytique (ou méthodique) invite les élèves "à formuler des hypothèses que l'étude du texte permet d'infirmer ou de confirmer, dans un processus de construction du sens" (7). Au-delà de cette définition générale, il convient de préciser ce que peut être cette forme de lecture au collège, afin notamment d'aménager les étapes d'une progression du collège au lycée.

Les élèves de 5e ou de 4e découvrent souvent avec intérêt, voire curiosité, le texte qui leur est proposé. Ils ne ressentent pas véritablement, en revanche, la nécessité de l'étudier, sinon pour se faire expliquer les passages qui leur paraissent éventuellement obscurs. Il est donc nécessaire de montrer l'utilité de l'étude des textes : ainsi, les élèves proposent, après la lecture, des hypothèses d'interprétation qui, parce qu'elles sont souvent contradictoires, justifient le retour à un examen réfléchi du texte susceptible de les valider ou non.

Des démarches extrêmement variées peuvent alors être retenues, en dehors de tout rituel. Il n'existe aucun modèle de lecture méthodique, aucune grille préfabriquée utilisable par tous les élèves et applicable à tous les textes. Il convient au contraire d'adapter la démarche au texte, dans la mesure où il a une spécificité littéraire, historique, culturelle, esthétique, et parce que l'on ne peut étudier de la même façon un extrait de Rabelais et un poème du XIXe siècle. En bref, l'objectif n'est pas de faire faire "la lecture méthodique" du texte, mais bien plutôt d'étudier méthodiquement un texte précis, en partant des hypothèses premières pour les confronter à une relecture attentive, en obtenant des élèves une observation précise puis une interprétation raisonnée. Il s'agit ainsi de transformer des impressions en hypothèses et les hypothèses en pistes de travail. Cette démarche implique que l'enseignant prenne le risque d'accepter les propositions des élèves pour construire avec eux l'analyse.

Observer un texte, pour un élève de collège, signifie s'arrêter sur des éléments présents dans le texte et identifier des relations à distance entre éléments : parallélismes, contrastes, oppositions, similarités, etc. Ces observations portent aussi bien sur les formes d'expression (faits de langue lexicaux et grammaticaux, constructions de phrase, rythmes et sonorités) que sur celles du contenu (thèmes, figures de style, éléments d'intertextualité, etc.). Ce repérage préalable d'éléments potentiellement porteurs de signification s'effectue le plus souvent en classe, éventuellement à la maison.

Interpréter un texte signifie partir de ces observations pour construire sans cesse une ou plusieurs significations. Cette phase d'interprétation est essentielle et elle doit être soigneusement ménagée au collège, modestement, patiemment, et en tenant toujours compte de la spécificité du texte. On fera ainsi étudier, dans un poème, la dimension prosodique pour montrer la densité des relations entre signifiant et signifié et rendre sensibles les élèves aux effets de sens créés; on fera observer, dans une nouvelle, le jeu des reprises nominales pour analyser la façon dont un narrateur choisit de nommer, et donc de caractériser, un personnage ; on fera relever deux champs sémantiques dans un texte pour étudier la façon dont ils se répondent et les systèmes de valeurs qu'ils installent parallèlement, complémentairement ou contradictoirement, par exemple dans une séquence de roman de chevalerie; on essaiera de dégager, en liaison avec les œuvres qui apportent des références culturelles, quelques sujets majeurs de différentes époques et de divers milieux (par exemple, le désir de savoir à la Renaissance, la tolérance et l'intolérance au temps des Lumières).

Ainsi conçue, la lecture analytique relie constamment observation et interprétation. Elle place l'élève en situation d'enquête et le conduit à explorer le texte selon un objectif précis : trouver des réponses aux questions qu'il s'est posées préalablement, apprendre à les justifier, confronter ses observations et ses interprétations à celles de ses camarades et, au bout du compte, infirmer ou confirmer les hypothèses qu'il avait formées initialement. Cette activité conduit l'élève à comprendre le texte de plus en plus précisément, et à en apprécier la singularité.

La lecture silencieuse, qui permet la découverte du texte, est le point de départ des activités de l'élève; elle est donc indispensable. De nombreuses relectures sont souhaitables au cours de l'étude, réalisées par le professeur ou les élèves, ainsi qu'une ou plusieurs relectures finales par des élèves. Quant à la lecture à haute voix par le professeur, elle peut intervenir au début du cours, mais après la lecture silencieuse des élèves et après qu'ils ont formulé leurs hypothèses d'interprétation.

(7) Glossaire.

3. Le groupement de textes

Le groupement de textes, recommandé par les Instructions Officielles des classes de lycée, est une pratique répandue en collège. Il peut contribuer à assurer la cohérence d'une séquence.

Réunissant un nombre limité mais suffisant de textes (quatre à cinq paraît une bonne moyenne), il constitue une unité d'apprentissage autour d'une notion littéraire, culturelle ou fonctionnelle. Les élèves, que le professeur rend conscients de la cohérence de l'ensemble, établissent des relations d'un texte à l'autre, réinvestissent dans les recherches, dans les activités et les lectures afférentes à chaque texte les acquis mis en place lors de l'étude des textes précédents, rapprochent en distinguant, sont sensibles aux similitudes et aux différences, mesurent la spécificité de chaque élément au sein de la totalité. Il convient pour mener à bien le projet d'éviter la dispersion dans le temps : un groupement en collège construit une progression sur quelque cinq à six séances.

Pour les élèves en difficulté, la pratique du groupement de textes est un adjuvant précieux: découvrant d'un texte à l'autre des points communs, ils prennent appui sur les similitudes pour déchiffrer, pressentir et énoncer un sens, reconnaître un motif ou une forme. Ils se révèlent rassurés, mieux armés face à un texte moins étrange, moins "étranger".

Pour le rendre pleinement efficace, le professeur construit un groupement de textes en respectant quelques principes simples.

- Il définit un objectif de connaissance clairement identifié. Par exemple, la notion de "fable", celle de "portrait", celle de "farce", celle d'"épique" ou celle de "calligramme", la notion de "héros" ou de "personnage", la problématique de la "scène d'exposition", ou de la "robinsonnade".

- Il rapproche des textes autour d'un thème commun lorsque cette démarche permet de passer de la dimension thématique à l'étude d'une problématique. La notion de thème recouvre à la fois des topoï descriptifs et des topoï narratifs ; ainsi, du motif des "Soleils couchants" dans des poèmes du XIXe siècle, ou du "combat" dans des récits médiévaux. Les topoï littéraires offrent des éléments de cohérence précieux : celui de la tempête ou du naufrage dans les récits d'aventure, celui de la scène du balcon, du "dialogue de sourds" ou du personnage caché au théâtre, celui du "sauvage", de l'esclave ou du fou. Cette approche thématique permet alors de caractériser et de distinguer des esthétiques, des poétiques ou des représentations culturelles.

- Il étudie les textes réunis dans leur spécificité. Des rapprochements et des correspondances sont établis pour rendre sensibles les continuités et les ruptures, les échos et les écarts, les emprunts et les singularités. Une synthèse rassemble et formule les acquis, indique les axes communs, souligne les particularités.

- Il pourra proposer également des groupements d'images (bandes dessinées, photographies, publicités, tableaux) dont la conception obéira aux mêmes principes.

4. L'étude de l'œuvre intégrale

L'étude d'une œuvre intégrale constitue à coup sûr l'expérience de lecture la plus fertile; elle rend les élèves sensibles à l'unité d'une œuvre, à son intégrité. Loin de mimer passivement la découverte de l'ensemble page à page, chapitre après chapitre, scène après scène, cette étude consiste en une saisie de l'œuvre, considérée comme un tout signifiant. Cela implique que tous les élèves l'ont préalablement lue - au besoin en plusieurs étapes, guidées par le professeur - et que l'on aura évalué leur appréhension globale de cette lecture.

Mais les limites de la séquence unifiée et cohérente qu'elle permet de construire - et que l'on peut raisonnablement fixer à une dizaine d'heures maximum pour une pièce de théâtre ou un roman - imposent de faire des choix, de conduire un projet de lecture qui s'attache à la singularité de l'œuvre choisie par le professeur. S'il est légitime, en situation d'apprentissage, d'étudier les caractéristiques d'un genre, il serait très insuffisant de limiter l'étude d'une œuvre littéraire à l'analyse de formes générales ou à la mise en place d'outils valables pour toutes les œuvres. Ainsi, l'étude en 5e du Médecin malgré lui ne saurait se limiter à la définition des caractéristiques du texte théâtral ou à l'usage de tableaux d'entrées des personnages. Il convient que ces outils ou ces entrées utiles et pertinents soient mis au service du sens de l'œuvre, pour rendre justice à sa singularité, pièce comique de Molière, héritière à la fois de la farce du Moyen Âge et de la commedia dell'arte, en même temps qu'au rôle de la satire sociale et au plaisir du rire.

L'étude d'une œuvre intégrale articule les analyses fragmentées (un extrait dont on justifie le choix et les limites, un chapitre, une scène, un poème issu du recueil) et les visions d'ensemble: éléments de la fiction, réseaux de personnages, études de l'espace et du temps, construction et progression dramatiques, thèmes dominants, choix narratifs, dramaturgiques, esthétiques.

Tout comme les groupements de textes qui peuvent en préparer ou en prolonger l'étude, la lecture des œuvres intégrales se prête à des activités d'écriture variées : compte rendu de lecture ou de recherches, imitations, transpositions génériques, insertion de dialogues ou de descriptions dans un récit, écriture de quatrièmes de couvertures, élaboration de couvertures, etc. Dans cette perspective, l'étude de l'image trouve toute sa place : couvertures, photographies de spectacles, reproductions de tableaux, fac-similés d'éditions originales, illustrations de l'œuvre par des artistes, adaptations cinématographiques, transpositions en bandes dessinées ou en romans photos. L'iconographie facilite l'entrée dans le texte, notamment pour les élèves en difficulté, ouvre les horizons d'attentes, ancre l'œuvre dans le contexte culturel de ses diverses interprétations.

Suggestion de séquence:
"L'étude d'une œuvre intégrale"

L'étude d'une œuvre intégrale fera, à trois ou quatre reprises dans l'année, l'objet d'une séquence, portant soit sur une œuvre choisie pour son apport culturel, soit sur une œuvre de littérature pour la jeunesse. On présente ici un exemple de séquence pour chacun des cas.

La séquence, destinée à des élèves de 5e, concerne seulement la première partie du roman, celle dont le héros est Perceval le Gallois (l'épisode de la réhabilitation de Gauvain pourra être proposé en lecture cursive, à titre de prolongement).

La sensibilisation à l'univers romanesque de Chrétien de Troyes pourra se faire par un travail sur l'actualité du Moyen Âge dans les productions contemporaines : jeux vidéos, séries télévisées, films (Les Visiteurs, de J. Poiré, ou quelques séquences de Perceval d'Éric Rohmer, etc.), textes de littérature pour la jeunesse. Ce travail initial a pour objectif d'installer deux éléments-clefs de cet univers, le chevalier-héros et le décor médiéval (château, forêt, etc.). Les élèves sont invités à préparer en groupes, par enquête documentaire au CDI et en relation avec le professeur d'histoire, un exposé (ou une exposition) sur un aspect particulier de l'univers médiéval, qui sera présenté en fin de séquence. Le texte du roman aura été lu préalablement, par étapes.

Une première lecture analytique portera sur le dialogue initial entre le jeune homme curieux et bavard, et le chevalier qu'il rencontre à la sortie du bois: "Êtes-vous Dieu ? - Non, ma foi. - Qu'êtes-vous donc ? - Je suis chevalier." Deux aspects retiennent l'attention : d'une part, le fonctionnement du dialogue (la confrontation comique de deux demandes de renseignements dont les réponses sont toujours différées ; cf. Oral) ; d'autre part, l'élaboration descriptive du personnage du chevalier (équipement, actions, valeurs). Les élèves seront ainsi amenés à accompagner le parcours initiatique du héros.

Les séances suivantes seront consacrées au développement de ce parcours et à l'organisation du récit à travers la succession des épisodes. Leur étude est répartie entre des groupes d'élèves à partir d'une lecture cursive de la première moitié du roman : l'enseignement des armes chevaleresques, l'adoubement du jeune homme, le château de Beaurepaire, etc. On reconnaît les répétitions, les régularités entre les épisodes. Peu à peu, on fait émerger la structuration qui donnera naissance au schéma narratif que les élèves connaissent déjà: le contrat et la mission, l'épreuve de l'action, la reconnaissance enfin. Ils reconnaîtront, dans Perceval, une histoire qui a façonné ce schéma et l'a pour ainsi dire déposé dans notre culture narrative; ils en apercevront ici toute la singularité.

Un troisième moment de la séquence pourra être consacré aux éléments de récits et de description qui reviennent sous des formes souvent très proches : les motifs narratifs et descriptifs. Motif du combat et de la victoire, motif de l'errance et de la quête d'aventures, motif du château au bord de la mer, ou de la jeune fille et de l'amour courtois, etc. On pourra alors proposer des petits exercices d'écriture (rédaction de motifs), éventuellement sous forme de pastiches.

L'étude du roman culmine avec le mystère du château du roi Pêcheur: le Graal. En comparant cette scène avec le récit stéréotypé d'un repas, on découvre peu à peu ce qui transforme celui-ci en mystère: la procession silencieuse, la lance qui saigne, et surtout l'absence de demandes d'explications du jeune homme qui était si bavard au début. Ce travail sur l'itinéraire du héros pourra se conclure avec la lecture analytique de la scène des "taches de sang sur la neige" où celui qui partait en quête d'aventures et de combats se trouve transformé en un héros contemplatif.

On travaillera, en fin de séquence, sur la langue elle-même. Le roman a été lu en traduction. On pourra alors montrer aux élèves un fac-similé d'un bref fragment du manuscrit original, accompagné de plusieurs traductions différentes (disponibles sur l'Internet: http://www. bretagne. com/doc/ref. htm, pour les ouvrages de référence et le lexique, ou http ://palissy. hu­mana. univ-nantes. fr/CETE. html, pour Chrétien de Troyes), qui motivera un travail sur la langue : lexique (histoire des mots), syntaxe (notamment les formes de phrases, le plus souvent simples) et les modes d'enchaînements qui articulent les passages description/récit.

La séquence pourra se conclure avec la présentation de l'univers médiéval par les élèves, confrontant la reconstitution documentaire et la construction romanesque.

L'Œil du loup, de Daniel Pennac (Pocket Junior)

La séquence (classe de 5e) a un double objectif: d'une part, découvrir la singularité d'un récit (tant par rapport à la structure convenue du schéma narratif, que par rapport au genre traditionnel du conte) et d'autre part, identifier et comprendre une situation d'énonciation très particulière (à travers l'insertion de la parole - monologue et dialogue - dans la narration, les procédés d'emboîtements, la fonction du narrateur, le ton).

Avant la lecture du livre, le professeur distribue une photocopie de l'image de couverture. Les élèves ne savent donc pas que "toute la vie du loup défile dans le fond de son œil" et que "l'œil de l'enfant raconte la vie d'un petit Africain" (texte occulté de la 4e de couverture). En travail personnel, ils ont à émettre des hypothèses de sens en se fondant sur les rapports entre titre et illustration de couverture. Une lecture collective du premier chapitre est ensuite menée en classe, et donne lieu à un premier examen analytique (Quand ? Où ? Qui parle ? Qui voit ? ; le monologue intérieur du loup; la situation de communication entre le loup et l'enfant).

Ce premier travail permet de définir un axe directeur pour la lecture du livre : quelles seront les modalités de l'échange entre les deux personnages ? Quels seront les rôles respectifs de la parole et du regard et les parallélismes entre eux ? Comment le regard devient-il le vecteur de la communication dans un dialogue muet ? L'intériorisation de la parole (monologue intérieur) est mise en rapport avec la vision de l'intérieur de l'œil : l'enchâssement du récit dans le récit est parallèle à l'enchâssement de la vie dans le regard.

Le travail se centrera alors sur le point de vue du narrateur (qui se déplace d'un personnage à un autre, d'un lieu à un autre, d'un temps à un autre) pour en venir à l'étude du récit enchâssé (La louve noire). Les élèves travailleront sur le fonctionnement narratif, en confrontant les formes prévisibles et convenues du récit avec celles qu'ils découvrent (perturbation de la chronologie, enchevêtrement des énonciations, transgressions du schéma narratif, brouillage des codes de la narration). L'image du loup pourra alors faire l'objet d'un travail thématique : recherches documentaires, rôle du loup dans l'imaginaire culturel, présence de ces stéréotypes dans le texte, et, au total, transformation de l'image du loup dans le roman de Pennac. Des travaux écrits (brèves séquences descriptives, narration) seront suscités par les noms propres, déclencheurs d'émotions et de récits.

Le roman, bien que déstabilisant par sa démultiplication en divers récits enchâssés, présente néanmoins une forte cohérence (thèmes, progressions logique et chronologique associées) : le professeur fera découvrir aux élèves en quoi il constitue une biographie.

Une activité d'écriture conclura la séquence. On demandera aux élèves d'imaginer, à partir d'une banque d'images extraites de différentes éditions du roman de Pennac (Pocket Junior, Pleine Lune, Arc en poche), le récit qu'un enfant pourrait faire de sa propre vie à un interlocuteur silencieux (animal, végétal, etc.).

D. La lecture de l'image

Les enseignants de français, bien que non professionnels de l'image, sont amenés à intégrer dans leur enseignement la dimension visuelle, qui imprègne de plus en plus profondément la formation culturelle et les pratiques quotidiennes de leurs élèves. Afin de les conduire progressivement à une approche raisonnée de l'image, les professeurs travaillent en particulier sur les relations entre le langage verbal et le langage visuel, dans la perspective du discours. Quatre orientations de travail peuvent être proposées.

1. La dimension visuelle du texte

On sensibilise les élèves au fait que le texte écrit est inséparable de la manière dont il s'offre à l'œil : typographie, calligraphie, mise en page, calligrammes, mots dans la peinture manifestent de différentes manières la dimension visuelle des textes. Elle est étroitement associée au sens: le choix de telle ou telle typographie entraîne des variations de signification. On peut ainsi comparer différentes réalisations typographiques d'un même texte et montrer comment elles font varier les effets ou influencent la lecture. Le développement de l'informatique (traitement de texte, PAO, multimedia) renouvelle aujourd'hui cette culture ancienne de la dimension plastique des textes.

2. La fonction d'ancrage réciproque du texte et de l'image

On étudie également les relations croisées entre texte et image, et les différentes fonctions qu'ils exercent l'un par rapport à l'autre.

La première consiste à "ancrer" l'image par le texte : légende d'une photographie (presse, manuel), ou titre d'un tableau. Le texte sélectionne dans la polysémie de l'image des éléments de signification, il hiérarchise le sens et dirige la lecture. Des jeux et exercices de transformation de légendes et de titres peuvent ainsi faire varier les manières de voir et de lire le sens d'une image.

À l'inverse, l'image "ancre" le texte : c'est sa fonction d'illustration. Elle en dirige aussi la lecture, donnant au héros un visage, des lignes et des couleurs au décor. Un travail de comparaison des illustrations (illustrations des Fables de La Fontaine par Gustave Doré comparées à celles d'un illustrateur contemporain) sensibilise les élèves à l'interprétation du texte qui est alors suggérée ; le texte est ainsi lu, pour ainsi dire vu, à travers l'image.

Mais l'image aussi, par sa dimension plastique (composition, couleurs, contrastes, etc.) peut proposer elle-même un ordre de lecture. S'imposent à travers elle le cadrage, l'angle de prise de vue, la mise en perspective de différents plans, permettant un découpage subjectif du sens, qui constituent des instruments de lecture visuelle. Les élèves, retrouvant à travers cet examen de l'image les mêmes notions que dans l'analyse des textes (points de vue, motifs, narrateur, observateur), sont sensibilisés à sa dimension discursive. Le travail sur la dimension plastique de l'image est mené en relation avec le professeur d'arts plastiques.

3. La fonction d'accompagnement du texte par l'image

Texte et image s'associent pour assurer le déroulement narratif, dans la bande dessinée ou au cinéma, par exemple. Ils sont alors perçus de manière inséparable, et l'image prend le relai du texte pour la conduite des séquences, la présentation des événements, la mise en place des décors. La structure particulière du déroulement visuel peut alors être observée : la segmentation de vignette en vignette dans la BD, le montage au cinéma. On n'en approfondira pas l'étude au cours du cycle central, mais la comparaison d'un même récit, en texte et en image, peut apporter aux élèves des éclairages sur la construction narrative.

4. L'image et le discours

En 5e, on approfondit l'étude de l'image en fonction des objectifs discursifs, telle qu'elle a déjà été engagée en 6e. Fixe ou mobile, l'image est alors envisagée comme discours : elle raconte et décrit, mais elle a aussi un rôle explicatif ou argumentatif. Dans ce domaine, on effectue en 5e un travail de sensibilisation et d'initiation que l'on approfondit en 4e, lorsque l'on examine séparément des genres de discours visuels :

- ceux qui ont une fonction explicative (schémas, "écorchés", etc., en sciences de la vie et de la terre, dans les dictionnaires et les manuels) qui procèdent par réduction et simplification ;

- ceux qui ont une fonction persuasive et argumentative (affiche ou film publicitaires) ;

- ceux qui ont une fonction informative (image de presse, journal télévisé) lorsque l'image vient renforcer la "vérité" (la preuve par l'image), accompagnant et confirmant la présentation verbale (orale ou écrite) ;

- ceux qui ont une fonction critique (dessin humoristique, par exemple).

Dans la perspective du discours, l'examen de ces fonctions informative et argumentative de l'image contribue à la formation de la distanciation et de l'esprit critique qui sera développée en 3e.

En relation avec le CDI, on aura soin de faire percevoir la place et les fonctions de l'image dans les multimédias (les "icônes" informatiques comme signes, les schémas et graphiques comme documents). Par là, on aborde l'image dans une perspective interdisciplinaire.

Compétences et applications

COMPÉTENCES

EXEMPLES D'APPLICATIONS

Identifier le genre

Reconnaître les caractéristiques des genres narratifs (romans d'aventure, nouvelles), théâtraux (farce, comédie), poétiques, épistolaires et didactiques

Repérer les fonctions du discours

Étudier la façon dont ces différentes fonctions se combinent entre elles

Étudier les discours narratif, descriptif, explicatif et argumentatif

Observer diverses formes d'argumentation (par le texte et par l'image)

Raconter ou décrire pour expliquer (exemple : le récit dans la tragédie classique)

Raconter ou décrire pour argumenter (exemple : la fable)

Tenir compte de la situation d'énonciation

- Repérer ses éléments constitutifs

- Déterminer les effets recherchés

Identifier l'énonciateur (qui parle ?) ainsi que le destinataire (à qui ?)

Analyser la situation d'énonciation dans les récits fictionnels (auteur, narrateur, personnage), les interventions du narrateur (explications ou commentaires) et les paroles rapportées

ÉNONCÉ-SITUATION D'ÉNONCIATION

ÉNONCÉ ANCRÉ DANS LA SITUATION D'ÉNONCIATION

ÉNONCÉ COUPÉ DE LA SITUATION D'ÉNONCIATION PAROLES

RAPPORTÉES DIRECTEMENT ET INDIRECTEMENT

Raconter pour amuser, décrire pour faire peur, expliquer pour justifier, argumenter pour convaincre ou dissuader, etc.

Repérer l'organisation du texte

Étudier l'organisation du texte narratif, l'ordre chronologique et ses ruptures L'ORGANISATION NARRATIVE et ses transformations

Étudier l'organisation du texte descriptif et les ordres possibles de la description (structuration spatiale, temporelle, verbes de perception, qualification, etc.) L'ORGANISATION DESCRIPTIVE

Étudier l'organisation du texte explicatif L'ORGANISATION EXPLICATIVE

Étudier le récit (contes, nouvelles, romans) et les formes d'insertion du dialogue

étudier les dialogues dans les récits, les textes de théâtre et la bande dessinée

TYPES ET FORMES DE PHRASE

PONCTUATION DANS LE DIALOGUE

NIVEAUX DE LANGUES

Étudier la façon dont ces différents types de textes se combinent entre eux

Prendre appui sur les éléments assurant la cohérence du texte

Transformer des détails en indices et utiliser ces indices pour construire le sens

Repérer les éléments assurant la continuité du texte (REPRISES NOMINALES ET PRONOMINALES) et les éléments assurant sa progression (THÈME, PROPOS, FORMES ET PROGRESSION) analyser leur rôle dans le texte, en liaison avec le genre THÈME/PROPOS, THÉMATISATION (VOIX PASSIVE, MISE EN RELIEF)

Repérer les connecteurs et analyser leur rôle dans le texte

LES CONNECTEURS SPATIO-TEMPORELS

LES CONNECTEURS LOGIQUES

Repérer les éléments essentiels à la construction du sens (indications spatio-temporelles, informations permettant d'identifier et de caractériser les personnages, etc.)

Anticiper sur la suite du texte

Imaginer, en fonction du genre identifié et du sens déjà construit, une suite possible cohérente

Prendre en compte, dans cet exercice, les retours en arrière et les ruptures temporelles

Analyse des textes littéraires

L'analyse des textes littéraires se fonde sur l'ensemble des compétences et des applications présentées ci-dessus. Elle précise et développe cependant certaines d'entre elles. On peut ainsi citer quelques pistes d'investigation, sans prétendre à l'exhaustivité, ni surtout imposer une grille d'analyse.

Analyser le point de vue

Analyser la perspective

Qui sait ? Qui voit ? Qui parle ?

Distinguer narrateur et auteur, narrateur explicitement marqué et narrateur implicite, narrateur et observateur (description)

Quel est le personnage au centre de l'action ? Comment se disposent autour de lui les autres personnages ?

Reconnaître ce qu'implique le choix de perspective (exemple : celle du chevalier ou celle de son valet, dans un récit médiéval)

Modifier la perspective

Analyser les relations entre les formes de discours

Reconnaître le rôle d'un passage descriptif dans une narration (construire un personnage, créer un décor et une atmosphère, différer une action, expliquer, etc.)

Identifier la place du narratif dans une description (dynamiser, exemplifier, introduire le récit des habitudes collectives, etc.)

Analyser les relations entre le discours du narrateur et les paroles citées

Distinguer les formes de citation de la parole dans le texte (directe ou indirecte, monologue ou dialogue) et préciser leur effet

Étudier le rôle d'un dialogue dans un récit (son mode d'insertion, sa fonction), et inversement le rôle d'un récit dans un dialogue (théâtral, par exemple)

Étudier les caractérisations des personnages par leur usage de la parole (niveaux de langue, syntaxe, lexique, etc.)

Étudier les relations entre les interlocuteurs dans le dialogue (visée interlocutive, stratégies, réussite ou échec)

Reconnaître et analyser les relations à distance dans un texte

Identifier les répétitions, les symétries, les parallélismes, les contrastes, les oppositions qui structurent un texte :

- sur le plan prosodique (rythme, rimes, assonances, etc.)

- sur le plan phrastique (formes de phrases dominantes, variations des types de phrases, formes d'enchaînements, etc.)

- sur le plan des contenus (développement des thèmes, mise en place des valeurs, contrastes et oppositions, présence de figures de rhétorique, etc.)

Montrer comment le jeu de ces différents éléments contribue à la signification particulière du texte et à son effet sur le lecteur (confirmant ou infirmant des hypothèses de lecture)

III - Écriture

Au cycle d'adaptation, il s'agissait avant tout d'amener les élèves à concevoir l'écriture comme activité de communication et à la pratiquer en tant que telle ; on s'attachait essentiellement à la réalisation de textes narratifs. Au cours du cycle central, l'écriture met en œuvre des formes de discours plus nombreuses, ce qui conduit à prendre plus clairement en compte ses dimensions énonciative, pragmatique et textuelle.

En 6e, les travaux d'écriture consistant pour l'essentiel à produire des récits, l'élève se trouvait en position de narrateur. Désormais, l'étude et la pratique combinée des discours narratif, descriptif ou explicatif conduisent à distinguer les positions de narrateur et d'observateur, les perspectives, la mise en scène de la parole, les points de vue.

D'une part, il s'agit de montrer comment le destinataire oriente la production du discours ; lorsque l'on demande aux élèves d'écrire un texte, il convient donc de préciser l'identité du destinataire. D'autre part, quelle que soit la dominante du discours (narrative, descriptive, explicative), l'énonciateur écrit en fonction de l'effet qu'il cherche à produire sur son lecteur. On précise donc aux élèves la visée des textes à écrire, et l'effet qu'on en attend : écrire pour faire agir (écriture de consignes) ou réagir, pour faire réfléchir ou faire plaisir, pour informer, pour faire rire ou pour faire peur, etc.

Le travail sur les formes qui donnent au texte sa cohérence est développé et affiné au cours du cycle central: il s'agit de faire acquérir l'idée d'un ordre de progression, les données-clefs d'un plan (introduction, développement, conclusion), y compris dans un récit (exposition, événements, situation finale). Un récit d'une à deux pages, incluant description et dialogue, est l'objectif pratique de fin de 4e.

A. Objectifs généraux du cycle

1. Développer les acquis

Le cycle central assure la transition progressive entre le pôle narratif et le pôle argumentatif : l'écriture de textes à dominante narrative ou descriptive vient approfondir le travail déjà effectué en 6e; l'écriture de textes explicatifs est une nouveauté. Du point de vue méthodologique, les élèves apprennent à recenser les outils de la langue mis en jeu dans l'écriture des textes, à s'orienter d'eux-mêmes vers les moyens documentaires adaptés (différents types de dictionnaires, ouvrages documentaires, usuels, manuels, notes prises en classe, etc.).

On continue à accorder une grande attention à l'écriture des textes dont les élèves sont eux-mêmes les lecteurs: la tenue des cahiers de textes, cahiers et classeurs permet de développer le sens de l'organisation. Dans cette même perspective, on pratique des exercices qui, mettant en jeu la relation oral/écrit, vont initier les élèves aux techniques de la prise de notes et de la reformulation. Ainsi, en 5e, on les invite à rédiger quelques phrases sur ce qu'ils viennent d'entendre (par exemple, les explications orales du professeur ou d'un élève) ou sur ce qu'ils viennent de lire (texte ou document). La prise de notes en elle-même sera abordée en 4e: chacun étant appelé à organiser peu à peu son propre mode de prise de notes, on évitera d'imposer une méthode dans ce domaine.

On continue également à accorder une grande importance à la réalisation concrète et matérielle du texte: il doit dans tous les cas être lisible, c'est-à-dire écrit et orthographié correctement.

2. Vers la maîtrise du récit

a. La complexification des formes de discours

On vérifie au début du cycle central que les élèves maîtrisent, à travers l'ordre chronologique de la narration, la cohérence des éléments de l'histoire qu'ils écrivent. À partir de la 5e et au cours de la 4e, on complexifie peu à peu l'écriture de la temporalité : ellipses temporelles, retours en arrière, anticipations, accélérations et ralentissements de l'action, création d'effets de suspense, etc.

Au cours du cycle central, les travaux d'écriture mettent en jeu, en les croisant dans le récit, les diverses formes de discours et conduisent ainsi à des réalisations écrites plus variées et plus complexes. Narration, description, explication peuvent donner lieu à des exercices spécifiques (en 5e pour la description, en 4e pour l'explication). Mais il est nécessaire d'entraîner les élèves à les faire jouer entre elles. La description pourra alors avoir une visée explicative, ou, de manière plus élaborée en fin de collège, faire valoir des appréciations et des jugements, et avoir alors une portée argumentative.

b. Point de vue et perspective

On introduit au cours du cycle central la notion de point de vue. Les élèves apprennent à le reconnaître dans la lecture (cursive, analytique ou documentaire) et à le maîtriser dans la production écrite (fictionnelle ou non).

La notion de point de vue est cependant polysémique. Elle désigne aussi bien le statut du narrateur (racontez la prise de la Bastille du point de vue d'un attaquant ou du point de vue d'un marquis à la cour du roi), la position de l'observateur (décrivez une gare vue du quai ou vue du train), la prise de position de l'énonciateur dans le discours argumentatif (un point de vue que l'on défend, que l'on partage ou que l'on conteste), ou encore le choix d'un personnage dont on va suivre le parcours tout le long d'un récit (qui deviendra du même coup le héros).

Afin de clarifier ces diverses approches, on propose de réserver le terme point de vue à la relation entre le narrateur et son discours (qui voit ? qui sait ? qui parle ? qui raconte ?) et de désigner par le terme perspective la sélection, à l'intérieur du récit, du personnage dont le parcours sera privilégié. Un récit de chevalerie pourra être raconté selon la perspective d'un chevalier ou celle d'un domestique, de même que le récit policier peut être raconté dans la perspective de l'enquêteur (Sherlok Holmes) ou dans celle du voleur (Arsène Lupin). Le choix de perspective déterminera dans chaque cas l'ordre des valeurs mises en scène dans le texte, et plus largement le genre du texte lui-même (récits de héros ou d'anti-héros, récits de glorification des valeurs ou, au contraire, de dérision, etc.).

Parmi les exercices d'écriture que l'on demande aux élèves de réaliser, on peut ainsi proposer de raconter la même histoire en changeant de point de vue (celui de la mère ou celui de la fille, par exemple), ou en changeant de perspective (le héros de la version de départ devient personnage secondaire et inversement).

c. Les genres d'écriture

Les élèves sont également conduits, au cours du cycle central, à prendre en compte de manière plus précise les genres du récit : par exemple, l'importance de la "chute" dans la nouvelle, les éléments qui fondent le "merveilleux" dans le conte, la construction du héros dans le récit d'aventures, les ingrédients de la peur dans le récit fantastique, les techniques du réalisme dans le reportage, etc. Ils comprennent que leurs récits entrent dans des genres que la pratique culturelle a fixés et qui déterminent en partie la planification de l'écriture et les attentes de la lecture.

Suggestion de séquence: Le discours descriptif : "Décrire pour faire peur"

Dans le cadre de l'étude des discours descriptifs, on demande aux élèves d'une classe de 4e d'étudier quelques descriptions de châteaux, telles qu'elles apparaissent dans des ouvrages historiques ou des guides touristiques. Elles se proposent toutes d'informer le lecteur; c'est un point qu'il est facile de faire préciser.

Le professeur procède ensuite à la lecture des premières pages de la nouvelle de Lovecraft "La Maison de la sorcière" (Dans l'abîme du temps, éditions Denoël). C'est une maison, une mansarde, un quartier qui sont maintenant décrits, non plus pour informer le lecteur mais pour lui faire peur. Sans analyser les procédés utilisés par Lovecraft, le professeur demande à ses élèves de reprendre une des descriptions initiales, et de la réécrire en s'efforçant de faire peur au lecteur.

Les élèves travaillent en groupes et produisent quatre ou cinq descriptions qui sont lues à voix haute et commentées. Généralement, les réactions de la classe sont assez négatives. Il est en effet difficile de faire peur à travers une description... et l'accumulation des détails horribles tend très facilement à faire sourire. On se retourne donc vers deux auteurs afin d'envisager les solutions qu'ils ont su trouver à ce problème. Dans les Mystères d'Udolphe (1794), Ann Radcliffe décrit un château; dans "Qui sait ?", Guy de Maupassant décrit un jardin et une maison. Les deux descriptions sont narrativisées et les personnages ressentent différents malaises, pouvant aller chez A. Radcliffe jusqu'à "l'effroi", qu'exprime parfaitement le point de vue interne fréquemment adopté par les narrateurs. Quant aux lieux, ils ne sont décrits que très rapidement, par masses sombres et indistinctes, avec cependant la recherche, chez la romancière anglaise, de détails lugubres divers. On s'appuie donc sur une lecture analytique de ces deux textes pour faire élaborer le champ notionnel de la peur, de la crainte, de l'angoisse; on s'arrête sur les formes de perception - sonores et auditives - et sur les valeurs modales des verbes "sembler" et "paraître" qui apportent une part de subjectivité à la perception. On étudie également, en particulier chez Maupassant, les formes de parataxe qui s'accélèrent avec la montée du malaise. De la sorte, divers éléments lexicaux et grammaticaux et quelques procédés stylistiques se trouvent rassemblés. Les élèves peuvent alors reprendre leur première description, en supprimer systématiquement les éléments purement informatifs, créer un personnage de narrateur qui voit et ressent, jouer consciemment avec le point de vue, s'en tenir à l'évocation sommaire des lieux mais s'arrêter sur des détails suggestifs...

Ce travail mené de façon individuelle par les élèves peut être considéré comme la production écrite finale. Si le temps le permet, il est cependant possible de proposer aux élèves une autre description, en leur laissant le choix de ce qui sera décrit (lieu, personnage ou monstre) et en leur demandant simplement de faire très peur à leur lecteur à venir.

d. Récits authentiques et récits fictionnels

Les récits qui prennent comme point de départ l'expérience vécue, ou qui en rendent compte, continuent à être pratiqués en 5e et en 4e. L'écriture permet alors aux élèves, non seulement de faire valoir leur propre univers d'expérience, mais aussi de le reconstruire et de prendre une distance par rapport à lui.

Dans une perspective complémentaire, on habitue les élèves à la fiction située dans un cadre non contemporain. En liaison avec le programme d'histoire, on favorise l'écriture de récits ayant, en 5e, un rapport avec le Moyen Âge ou la Renaissance, et, en 4e, avec le XVIIe, le XVIIIe et le XIXe siècle. Pour construire le cadre de référence et imaginer les péripéties, on s'appuie sur les données concrètes du cours d'histoire et on s'aide de divers documents : images, ouvrages documentaires pour la jeunesse, etc. On propose aux élèves des situations d'énonciation précises, marquant l'identité du narrateur, celle des personnages et celle des destinataires (un voyage dans le temps impliquera d'autres effets - l'étonnement, l'étrangeté, par exemple - qu'un récit situé dans la perspective d'un personnage familier de son époque).

3. Écrire des dialogues

Ce que l'on nomme dialogue à l'écrit doit être compris, non pas comme la reproduction ou la transcription plus ou moins fidèle d'une conversation, mais comme la recréation codifiée d'un échange oral.

Vivant avant tout dans un monde régi par l'oral, les élèves font du dialogue un élément naturel et nécessaire de leurs productions écrites. C'est le plus souvent en rapportant les paroles des personnages qu'ils cherchent à les camper et à les caractériser. Apprendre à écrire des passages dans lesquels la parole est rapportée indirectement permet d'éviter l'omniprésence de la parole directe et de réserver le dialogue aux cas où il se révèle pertinent (il marque un mode de présence), de réfléchir alors sur les problèmes liés au transfert de l'oral à l'écrit (par exemple, est-il souhaitable de transcrire les hésitations, les répétitions, et si oui, comment le faire, pour produire quel effet ?). L'écriture de passages dans lesquels la parole est rapportée indirectement est du ressort de la classe de 4e, mais elle peut déjà être pratiquée en 5e.

L'insertion du dialogue dans un récit est effectuée progressivement au cours de l'année de 5e et approfondie en 4e, le maniement du dialogue dans le récit étant un exercice difficile : il implique, en effet, la combinaison de deux systèmes énonciatifs, celui du récit et celui du dialogue lui-même. Pour l'assurer dans les meilleures conditions, on tient compte des faits suivants :

- l'alternance entre dialogue et récit est matérialisée sur la page par une disposition et par une ponctuation spécifique (dimension textuelle) ;

- le lien du dialogue avec le récit qui l'encadre est rappelé au moyen des propositions incises qui, précisément, ajustent et associent les deux systèmes énonciatifs (dimension énonciative) ;

- enfin et surtout, la finalité du passage dialogué est précisément prise en compte. S'agit-il d'informer directement le lecteur, par le biais d'un personnage, de la suite de l'histoire ? de faire apparaître les traits psychologiques ou passionnels de tel ou tel ? de caractériser un personnage par le registre de langage qu'il utilise ? de mettre en scène une interaction dramatique ? L'insertion d'un passage dialogué suppose donc que l'on a réfléchi au lieu de son insertion, à sa fonction narrative au sein du récit et, partant, au réglage des proportions entre dialogue et récit.

Il est souhaitable que le cycle central soit, pour le dialogue écrit, le moment où l'élève passe d'une pratique calquée sur le dialogue spontané, et par conséquent parfois confuse, à une pratique raisonnée, liée aux contraintes plus générales de l'écrit.

4. De l'écriture spontanée à l'écriture réfléchie

Le brouillon est une étape nécessaire dans tout processus d'écriture. On montre aux élèves des brouillons d'écrivains, afin d'apporter des témoignages de ce travail. On engage ainsi, très modestement, une réflexion sur l'acte d'écrire, qui portera aussi ses fruits dans le domaine de la lecture (comparaison, au besoin, de divers états d'un même texte d'écrivain). Réfléchir à ce que l'on fait quand on écrit permet de mieux comprendre le texte d'autrui comme résultat d'une élaboration.

En ce sens, on travaille en classe les trois moments principaux de l'élaboration d'un texte, afin de prendre en compte aussi bien sa cohérence que la pertinence de son énonciation et les effets à produire sur le lecteur.

Le passage du brouillon au propre n'implique pas seulement des corrections portant sur de petites unités (accentuation, ponctuation, orthographe). Les élèves doivent, de plus en plus, faire porter leur travail d'amélioration sur des ensembles (phrases, groupes de phrases, paragraphes) en envisageant des ajouts, des suppressions, des déplacements. On conçoit l'aide que peut constituer, à ce niveau, l'utilisation d'un logiciel de traitement de textes. On en favorise donc le maniement dans la perspective d'un apprentissage de l'écrit. C'est par ce travail sur le brouillon que les élèves acquièrent une plus grande autonomie en écriture au cours du cycle central.

5. Accéder au plaisir d'écrire

Ayant à leur disposition un plus grand nombre d'instruments pour l'organisation des textes, étant davantage conscients de la variété des destinataires et de l'effet produit par le texte écrit, maîtrisant mieux les formes de discours en fonction de leur visée, les élèves ressentent le plaisir d'un pouvoir accru de l'écriture. C'est surtout en cela que le cycle central constitue un moment fort de l'apprentissage de l'écriture au collège. Les pratiques se diversifient, les compétences s'affinent. Les élèves ont plaisir à choisir et à utiliser, dans une gamme élargie, les moyens qui permettent de répondre de manière adéquate et efficace à un plus grand nombre de situations de communication écrite.

B. L'écriture en 5e

1. Objectifs de la classe

Les travaux d'écriture prennent essentiellement en compte le narratif et le descriptif, de manière à les agencer, à les faire alterner ou s'entrecroiser. L'objectif est de comprendre le rôle de consolidation réciproque de la narration et de la description dans un récit. Les élèves apprennent en outre à construire un récit combinant le discours du narrateur et celui de ses personnages dans les passages dialogués.

2. Textes à écrire

Le descriptif peut être envisagé en lui-même et donner lieu à l'écriture de descriptions. Elles portent principalement en 5e sur les objets, sur les lieux et sur les personnages. Ces travaux d'écriture prennent en compte le choix et l'agencement des éléments à décrire, la syntaxe descriptive (phrases nominales, verbes d'état) et la position de l'observateur qu'elle implique (de l'ensemble au détail particulier et inversement, de gauche à droite, du nord au sud, etc.). La description est liée à la perception du monde : les cinq sens sont concernés (verbes de perception). On travaille la description à partir de supports réels ou d'images.

Mais le discours descriptif est surtout envisagé comme constituant du récit. La description apporte des informations, participe à la mise en place d'une atmosphère et rend l'histoire plus vraisemblable. Elle exprime aussi une appréciation, a une portée explicative, livre des sentiments, ralentit, retarde ou diffère la narration. En relation étroite avec la lecture et l'étude des textes, et par des exercices écrits mesurés et progressifs, les élèves sont sensibilisés à ces différents aspects. Ils apprennent ainsi à insérer des passages descriptifs dans leurs récits, afin de rendre sensibles au lecteur les lieux, les objets et les personnages. Pour la narration elle-même, on continue en 5e à travailler le choix et l'agencement des faits, que l'on se contente de rapporter selon la chronologie de l'histoire.

Le discours explicatif est abordé dès la classe de 5e par l'écriture de réponses à une question ; il s'agit de savoir justifier un propos. Cette pratique simple prépare le maniement ultérieur de formes plus élaborées de l'explication et de l'argumentation.

Le dialogue est abordé par des exercices de reformulation : réécriture d'une narration en dialogue ou d'un dialogue en narration ; présentation d'un lieu, d'un personnage, d'un objet par un texte descriptif, puis par une réplique dans un échange dialogué, etc. Parallèlement au dialogue dans le récit, on travaille aussi le récit dans le dialogue. Pour mieux établir la spécificité de ce type de dialogue, on propose aux élèves des exercices d'écriture consistant à composer de courts dialogues théâtraux ou des saynètes. On fait percevoir aussi les différences avec le dialogue oral.

Les exercices d'écriture poétique prennent surtout appui sur des consignes formelles qui sont, pour les élèves, plus stimulantes que contraignantes. Les exercices peuvent consister en des imitations de poèmes; ils peuvent viser une écriture plus créative en proposant une forme (par exemple, le distique, le quatrain) ou un mètre (par exemple, l'octosyllabe ou l'alexandrin). On accorde une attention particulière aux consignes qui prennent en compte les aspects sonore et visuel de la langue : les élèves composent des poèmes à partir de sons, de rimes, de mots choisis pour leurs sonorités suggestives; ils mettent en page mots, phrases et poèmes et peuvent aboutir, par exemple, à la réalisation de calligrammes.

C. L'écriture en 4e

1. Objectifs de la classe

En 4e, la pratique du discours descriptif trouve un aboutissement dans l'écriture de portraits. Cet exercice a été réservé pour la classe de 4e, car il s'agit d'un cas complexe de traitement du discours descriptif (le point de vue de l'énonciateur et l'effet sur le lecteur y prennent une importance particulière). On appelle portrait la description d'une personne dont on s'attache à rendre les traits physiques, les traits moraux, et les liens entre les deux.

Quant au travail sur le récit, il porte essentiellement sur la complexification narrative. L'objectif est que l'élève sache opérer des variations entre le plan de l'histoire et le plan du récit. Le travail porte donc en priorité sur les ellipses narratives, retours en arrière, anticipations. À ce niveau, on définit comme récit complexe un récit mettant en jeu un ou plusieurs de ces phénomènes.

Dans le domaine explicatif, l'objectif premier est que l'élève sache écrire un texte explicatif qui se suffise à lui seul, par exemple, un texte à visée documentaire, pour un ou des destinataires qui seront précisés. Le second objectif est que les élèves sachent insérer dans un récit un court passage à visée explicative. On rendra sensible la distinction entre l'explicatif scientifique (récit d'expérience, par exemple) et l'explicatif littéraire; on abordera différentes fonctions argumentatives de l'explication qui seront développées en classe de 3e: accusation, justification (cf. "je m'explique !"), vulgarisation, pastiche, etc.

2. Textes à écrire

L'écriture de portraits a pu être préparée en 5e par des exercices visant à décrire succinctement un personnage. On peut partir de la carte d'identité ou de la fiche signalétique pour montrer, par différence, la dimension et la portée que peut prendre le portrait écrit, jusqu'à constituer un genre littéraire. En 4e, le portrait peut être pratiqué pour lui-même ou en vue de son insertion dans un récit.

La complexification du récit donne lieu à des exercices progressifs, à objectifs limités. Ce n'est qu'en fin d'année que les élèves seront amenés à produire un récit associant ellipses narratives et ruptures temporelles. Travailler sur le récit, c'est aussi, en 4e, faire varier les modalités de la parole rapportée: on s'appuie sur les acquis consécutifs à l'écriture de dialogues en 5e (maniement de la parole directe à l'écrit) ; on apprend à insérer dans le fil du récit des passages rapportant indirectement les paroles. Par la pratique écrite du récit, les élèves apprennent à équilibrer ces deux modalités et en comprennent les avantages respectifs.

L'exercice consistant à pratiquer l'expansion d'un récit (développer une scène occultée, écrire la suite, etc.) présente la particularité d'associer en lui-même lecture et écriture. Il combine en outre la liberté (plaisir d'imaginer des actions, des faits nouveaux) et la contrainte (placer ce que l'on imagine dans la cohérence du texte de départ). Cette double particularité est une aide pour les élèves qui ressentent l'écriture d'imagination comme une difficulté, puisqu'ils disposent d'un point d'ancrage concret et rassurant. L'exercice exige cependant que le texte support soit choisi avec suffisamment de discernement pour permettre des expansions logiques (une péripétie nouvelle, une situation finale). L'expansion a son corollaire: la condensation. On pratiquera donc le résumé d'un texte narratif en 4e. On associe de cette manière le résumé qui est un exercice fondé sur la condensation de l'énoncé, et l'exercice inverse qui consiste à développer un énoncé par expansion : on fait ainsi prendre conscience aux élèves de l'élasticité du discours.

Suggestion de séquence: "L'élasticité du discours"

Une séquence en 4e, d'une durée de cinq à six séances, associera étroitement lecture et écriture, en se donnant comme objectif un travail sur l'élasticité du discours. Organisée autour des deux opérations corrélées de condensation et d'expansion de textes, elle inscrit l'exercice de résumé dans une pratique d'écriture qui permet aux élèves d'appréhender plus largement une propriété essentielle du discours.

On compare deux extraits de Vendredi ou les Limbes du Pacifique et de Vendredi ou la vie sauvage de Michel Tournier, portant sur la même séquence narrative (l'arrivée de Robinson sur la plage, par exemple) (8). On fait observer les réductions opérées par l'écrivain du premier texte au second, en relevant précisément les transformations linguistiques (modifications des phrases, qualification, lexique, etc.). On peut alors, sur un autre extrait du même ouvrage, faire réaliser par les élèves un exercice écrit de condensation, et reproduire ensuite cet exercice sur d'autres textes (articles de presse, par exemple).

L'opération inverse, qui consiste à faire d'un texte bref un texte long, est ensuite pratiquée à partir d'extraits littéraires ou de textes journalistiques. Ce travail conduit à une réflexion sur les outils de la langue: lexique (jeu des hyperonymes et des hyponymes pour les noms, décomposition de l'action pour les verbes, etc.), syntaxe de la phrase (formes d'expansion qualificative, de l'épithète à la proposition relative, en passant par le participe présent), discours (introduction d'un narrateur et de son point de vue, multiplication des séquences intermédiaires et des péripéties dans un récit, etc.). Des techniques oulipiennes peuvent aussi être utilisées, comme l'écriture définitionnelle, par exemple, qui consiste à remplacer un mot par sa définition de dictionnaire.

Au-delà de "l'art du bref et des techniques qui permettent au contraire de "tirer à la ligne", condensation et expansion de textes peuvent, dans un troisième moment de la séquence, être envisagées en situation concrète : développer ou résumer pour qui ? pour quoi ? dans quel contexte ? On peut alors penser au résumé de films dans les programmes de la télévision, qui ne portent que sur les séquences initiales..., ou au résumé de nouvelles policières qui interdisent de présenter la résolution de l'énigme... On peut également pratiquer la technique de la "pyramide inversée", développée par les agences de presse (AFP, par exemple) : elle consiste à associer la condensation (le premier paragraphe de la dépêche résume toute l'information) et l'expansion (les paragraphes suivants développent l'information en allant du plus important et du moins détaillé au moins important et au plus détaillé), autorisant ainsi les utilisateurs du texte, clients de l'agence, à retrancher, à partir de la fin, en conservant toujours l'essentiel de l'information.

L'écriture de textes explicatifs est surtout envisagée comme point de transition entre, d'une part, la pratique des discours narratif et descriptif, et, d'autre part, la pratique du discours argumentatif. Une narration ou une description peuvent avoir une visée explicative: on articule ainsi les formes de discours déjà pratiquées et maîtrisées avec cette forme nouvelle - l'explicatif - qui fait l'objet d'un travail explicite en 4e. Pour mieux initier à l'écriture de textes explicatifs, on peut s'appuyer sur des exercices de réécriture consistant à transformer des consignes en texte explicatif, ou sur la rédaction de brèves notices explicatives à visée documentaire. Le maniement du discours explicatif exige particulièrement la prise en compte du destinataire; pour y sensibiliser les élèves, on peut envisager des exercices consistant à expliquer le fonctionnement d'un même appareil soit à un néophyte, soit à une personne expérimentée.

En classe de 4e, le passage à l'explication, puis à l'étude du discours explicatif, peut prendre appui sur le dialogue: écriture, par exemple, d'un dialogue dans lequel un personnage explique quelque chose à la demande de son interlocuteur. On associera donc exercices oraux et productions écrites (avec, en premier lieu, la mise par écrit d'explications élaborées en situation d'oral).

L'écriture de lettres en classe se place dans la continuité de l'étude et de la pratique du dialogue. La correspondance épistolaire est une pratique de dialogue: la lettre appelle une réponse, elle matérialise un échange de parole, et elle est à la fois communication directe (pour le discours) et différée (dans le temps). L'échange épistolaire est, de surcroît, intéressant du point de vue discursif: dans la lettre se croisent les différentes formes de discours ; la lettre peut narrer, décrire, expliquer, etc. C'est pourquoi on s'exerce en 4e à écrire des lettres à visée explicative; elles peuvent combiner d'abord un récit et une description à fonction explicative (pour dire, par exemple, pourquoi on n'a pas fait telle ou telle chose), puis présenter une demande ou exprimer une plainte en les justifiant. Dans tous les cas, on rappelle que la lettre exige d'organiser le propos en fonction d'un destinataire précis.

Toute mise en œuvre du discours, que ce soit dans sa fonction narrative, descriptive, explicative ou argumentative, se fait selon un point de vue; même la neutralité est un point de vue, et partant, une stratégie discursive. En 4e, on commence à prendre en compte les implications du point de vue dans la production de textes. On fait raconter, ou décrire, ou expliquer selon un point de vue déterminé que l'on précise et qu'il s'agit de conserver au fil du texte. À l'inverse et de manière complémentaire, des exercices mettant en jeu la variation du point de vue peuvent être envisagés. On rappelle que, dans le cas du récit, c'est l'ensemble qui est dépendant du point de vue adopté: les passages narratifs, descriptifs, explicatifs, et ceux qui rapportent les paroles indirectement.

(8) L'œuvre de référence de Daniel de Foe peut, parallèlement, faire l'objet d'une lecture cursive

D. Modalités pédagogiques

1. Écriture et consignes

Les travaux sont guidés par des consignes d'écriture qui donnent notamment des indications sur le type de discours à produire.

Ces consignes peuvent aussi agir comme des contraintes formelles stimulant la créativité des élèves : dans le cas du récit, par exemple, préciser la place réservée aux passages narratifs, descriptifs et dialogués, désigner le destinataire auquel s'adresse le texte, qu'il soit individuel ou collectif, fictif ou réel (dans le cas des pratiques sociales de l'écrit), indiquer l'effet attendu. On peut proposer en ce sens, dans une classe de 5e, un exercice qui consisterait, à partir d'une même histoire, à faire rédiger deux récits différents selon l'effet visé : faire rire ou faire peur, par exemple. Les consignes d'écriture ont pour but de guider l'élève, de l'aider à se représenter la tâche demandée, de stimuler son imagination ; elles sont donc une forme d'aide et non une contrainte gratuite. En retour, on fait pratiquer aux élèves la rédaction de consignes simples.

2. Écriture et apprentissage de l'autonomie

Au cours du cycle central, on guide les élèves pour qu'ils accèdent à l'écriture la plus autonome possible. Cet apprentissage de l'autonomie se développe sur deux plans essentiels :

- Le cycle central marque le passage de l'écriture "en classe", effectuée avec le soutien du professeur, à une écriture de plus en plus "à la maison", que l'élève doit être capable d'exercer seul. Étapes et transitions sont donc souhaitables, afin d'assurer une acquisition progressive de l'autonomie recherchée. Des travaux commencés en classe peuvent être achevés à la maison, des recherches entreprises à la maison peuvent être exploitées en classe, des textes ébauchés à la maison retravaillés en classe. De plus, quel que soit leur mode d'élaboration, les travaux d'écriture sont toujours proposés, préparés, et corrigés en classe. Au cours de ce corrigé, le professeur s'appuie sur les productions des élèves pour signaler les réussites et les erreurs.

- Au cycle central, un élève doit être capable, lorsqu'il écrit et pour mieux écrire, d'utiliser divers outils (grammaire, dictionnaires, guides de conjugaison) et documents (les notes qu'il a prises, des ouvrages historiques ou géographiques, des encyclopédies). Il est donc nécessaire de l'habituer à rechercher, regrouper et exploiter les informations qu'appelle l'exercice écrit qui lui est demandé. Cette capacité à s'auto-documenter et à utiliser les outils appropriés est un élément fondamental dans la construction de l'autonomie recherchée.

3. Écriture et séquence

La séquence appelle, dans le domaine de l'écriture, deux formes principales de productions, intermédiaires d'une part (exercices rapides, nombreux, variés intervenant au fil des séances), finale d'autre part (rédaction ou composition française intervenant en fin de séquence).

- Les productions intermédiaires ont pour fonction essentielle d'amener l'élève à utiliser, manipuler, réemployer les notions qu'il a découvertes, le plus souvent dans l'étude de textes. Ayant étudié le principe de la description en mouvement, il le réutilise pour rédiger un court paragraphe descriptif; ayant analysé un discours explicatif destiné à un spécialiste, il le réécrit en s'adressant à un néophyte; ayant observé les effets de sens permis par l'adoption d'un point de vue dans un texte, il reprend ce texte pour faire varier le point de vue et les effets de sens. De la sorte, une véritable appropriation lui est proposée, dans un mouvement qui part de la lecture pour aller à l'écriture, et qui s'appuie sur l'écriture pour revenir à la lecture. On fait faire souvent de tels exercices brefs, et on les évalue.

- La production finale a pour fonction essentielle d'évaluer le degré d'acquisition des connaissances et compétences envisagées dans le cadre de la séquence. Elle peut prendre la forme de la rédaction ou de la composition française; elle peut aussi passer par des formes diverses d'écriture longue (récits, contes réalistes, nouvelles, chapitres ajoutés à un roman, scènes ajoutées à une pièce de théâtre), individuelle ou collective.

Compétences et applications

COMPÉTENCES

EXEMPLES D'APPLICATIONS

Assurer la lisibilité graphique

Écrire un texte orthographiquement et syntaxiquement correct

Mettre en page un texte - titre et intertitres - pour en faire apparaître clairement l'organisation

LA PHRASE

LA PONCTUATION (TEXTE ET PHRASE)

Produire un discours* :

En fonction de la relation énoncé/situation d'énonciation

En fonction de l'effet visé par l'énonciateur

En fonction du point de vue de l'énonciateur

En fonction du destinataire *

Les quatre compétences ici dissociées peuvent être associées dans les apprentissages

Faire varier l'énonciateur

Ancrer ou non l'énoncé dans la situation d'énonciation

ÉNONCÉ - SITUATION D'ÉNONCIATION

ÉNONCÉ ANCRÉ DANS LA SITUATION D'ÉNONCIATION

ÉNONCÉ COUPÉ DE LA SITUATION D'ÉNONCIATION

Raconter pour amuser ou pour démontrer, décrire pour faire peur, expliquer pour justifier, argumenter pour défendre ou accuser, etc.

Savoir adopter et conserver un point de vue précis

Écrire et réécrire l'énoncé en faisant varier ce point de vue (exemple : un même événement raconté par un enfant puis un adulte)

Savoir prendre en compte l'identité de celui auquel le discours est destiné. Écrire et réécrire un énoncé en le modifiant selon le destinataire (ex. : un même événement raconté à un enfant puis à un adulte)

NIVEAUX DE LANGAGE

FORMES SIMPLES DE THÉMATISATION

PAROLES RAPPORTÉES DIRECTEMENT ET INDIRECTEMENT

Écrire un texte cohérent

Assurer la cohérence d'un texte :

- par l'utilisation raisonnée des reprises nominales et pronominales

- par l'utilisation raisonnée des diverses formes de progression

SUBSTITUTS DU NOM

FORMES DE PROGRESSION DANS LE TEXTE

- par l'emploi des connecteurs (SPATIO-TEMPORELS et LOGIQUES)

Repérer (travail sur le brouillon) les incohérences éventuelles, en particulier logiques, spatio-temporelles ou liées à la gestion des personnages dans le récit

Raconter

Choisir et agencer des faits à rapporter selon la chronologie de l'histoire Introduire dans cette chronologie des ruptures temporelles

Résumer ou développer un texte narratif

ORGANISATION DU TEXTE NARRATIF

ORGANISATEURS TEMPORELS (compléments circonstanciels et connecteurs)

PROGRESSION à THÈME CONSTANT

Décrire

Choisir et agencer les éléments de la description

Faire varier l'ordre de la description (de haut en bas, de droite à gauche, de l'ensemble au particulier, etc.).

Décrire en faisant varier le point de vue

Développer un texte descriptif

ORGANISATION DU TEXTE DESCRIPTIF

ORGANISATEURS SPATIAUX (compléments circonstanciels et connecteurs)

PROGRESSION ÉCLATÉE

LES DIVERSES FORMES D'EXPANSION DU NOM

Compétences

Exemples d'applications

Expliquer

Transformer des consignes en texte explicatif

Rédiger de brèves notices explicatives (en liaison avec l'histoire-géographie, la biologie ou la technologie)

ORGANISATION DU TEXTE EXPLICATIF

ORGANISATEURS LOGIQUES (compléments circonstanciels et connecteurs)

PROGRESSION LINÉAIRE

Argumenter

Transposer à l'écrit un débat oral, mené préalablement en classe, choisir un des arguments avancés pendant ce débat et le développer par écrit

Écrire un dialogue

Écrire un dialogue fonctionnant de façon autonome et permettant un échange d'information, d'explications ou d'arguments

Écrire deux lettres, la seconde répondant à la première

LES MARQUES TYPOGRAPHIQUES DU DIALOGUE

LES NIVEAUX DE LANGAGE

TYPES ET FORMES DE PHRASES

Écrire un récit

Combiner à l'intérieur d'un récit les différentes formes de discours :

- insérer dans un texte narratif des passages descriptifs, explicatifs, argumentatifs, et des dialogues

TEMPS SIMPLES ET TEMPS COMPOSÉS

- complexifier progressivement l'exercice, par la prise en compte de variations temporelles (ruptures, retours en arrière, ellipses narratives)

Écrire, individuellement ou par groupe, un récit complet (conte ou nouvelle)

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