PROTOCOLE EXPÉRIMENTAL POUR LE TEST DE SENSIBILITÉ AUX ROUILLES À MELAMPSORA
A. - But et conception des essais
Les rouilles à Melampsora peuvent compromettre la culture de clones sensibles. Sur les peupliers classiquement cultivés (section Aigeiros, Tacamahaca et leurs hybrides), trois espèces existent en France : M. larici-populina, M. allii-populina et M. medusae. Jusqu'à présent la troisième espèce n'est pas apparue nuisible et sa répartition classique est restreinte à la région située au sud de la ligne Bordeaux-Toulouse. M. larici-populina est la plus dangereuse et M. allii-populina offre une situation intermédiaire.
Des infections mixtes, par deux ou trois espèces de Melampsora, sont fréquentes et gênent l'interprétation des notations. Il convient donc de conduire les tests de sensibilité en nature soit dans des sites où M. larici-populina ou M. allii-populina sont nettement majoritaires, soit de provoquer une infection par l'espèce souhaitée.
L'expérience antérieure a montré que la fiabilité des tests de sensibilité des clones envers les rouilles sur le terrain était étroitement liée à la précocité, la quantité et la qualité de l'inoculum. Une infection tardive et/ou une faible pression d'inoculum ne permettent pas de mettre en évidence les clones trop sensibles qui ne devront pas être cultivés. L'aspect qualitatif de l'inoculum correspond à la composition de la population de l'agent pathogène en termes d'espèce de Melampsora et au sein de chaque espèce de la présence et des fréquences des virulences (combinées au sein des races) connues du parasite. L'absence ou la très faible fréquence d'une virulence se traduit par un apparent bon état sanitaire des clones dont l'infection exige la présence de cette virulence. On risque ainsi de juger intéressants des clones qui pourraient s'avérer très sensibles dès que la virulence en question sera bien représentée dans la population du parasite. Cette virulence deviendra d'autant plus fréquente que ces clones seront cultivés et de ce fait leur état sanitaire risque de se dégrader sérieusement.
B. - Protocole pour M. Larici-populina
La durée du test est de deux ans (ou le test comporte deux années de notation).
Mise en place du dispositif :
- effectif et disposition des boutures : 8 boutures par clone, 8 blocs de parcelles monoarbres ou 4 blocs (2 boutures, clone, bloc) ;
- espacement : de l'ordre 1 à 1,5 mètre entre les lignes et de 0,4 à 0,8 mètre sur les lignes, ces distances pouvant être adaptées en fonction du matériel utilisé pour l'entretien ;
- conduite des plants : recépage en fin de chaque année et conservation d'une pousse par souche ;
- clones témoins : Populus deltoides 87B12 , A4A , Beaupré , Brabantica , P. candicans Aurora , Hoogvorst , Ogy , Rap , Raspalje , Robusta et Unal . Ces témoins seront plantés à raison de 24 boutures par clone. Des témoins devront être ajoutés en cas de découverte de nouvelle virulence ;
- plantation de jeunes mélèzes d'Europe : sur les lignes de bordures et sur une ligne centrale, cette dernière n'étant nécessaire que si un nombre assez élevé de clones est planté. Les boutures de peuplier doivent être distantes de moins de 5 mètres des mélèzes les plus proches. Prévoir un mélèze pour 10 à 12 boutures situées dans l'essai (non comprises les boutures des lignes de bordure et de la ligne centrale si elle existe). Les mélèzes sont plantés par couple pour limiter l'incidence d'un défaut éventuel de reprise de l'un d'entre eux ;
- bordures : plantées d'un clone compatible avec toutes les races connues Fritzi-Pauley , Raspalje , Robusta , par exemple).
L'infection de l'essai est réalisée en apportant des feuilles de peuplier porteuses de télies de M. larici-populina (télies présentes sur la face supérieure des feuilles). Ces feuilles doivent être récoltées l'année précédant le test sur les clones : Populus deltoides 87B12 , A4A , Beaupré , Brabantica , Populus candicans Aurora , Hoogvorst , Ogy , Rap et Unal (avec ajout de clone ad'hoc en cas de nouvelles virulences). La récolte doit concerner des feuilles prêtes à tomber. Ces feuilles seront stockées à l'extérieur dans des cages grillagées et séparément pour chaque clones. Durant la première quinzaine de mars de l'année suivante, ces feuilles seront rentrées dans un local pour y être séchées naturellement puis stockées (un lot par clone) de préférence en chambre froide, toujours dans des cages grillagées. Lorsque les mélèzes ont débourré (aiguilles en groupes prêts à s'étaler), des feuilles porteuses de télies sont placées au sol sous les mélèzes, face supérieure (celle portant les télies) orientées vers le ciel et sont aussitôt plaquées au sol au moyen d'un grillage. Il n'est pas judicieux de les arroser, mieux vaut attendre qu'une pluie humecte les feuilles et permette ainsi aux télies de libérer des spores pour contaminer les mélèzes.
Notation de l'infection :
Observations : il est conseillé d'observer l'infection des mélèzes puis celle des clones témoins et enfin des clones testés. La détection de la rouille sur mélèze (face inférieure des aiguilles) sera conduite entre la mi-avril et la mi-mai (ou plus tard en cas de retard dans l'implantation des mélèzes et/ou des feuilles porteuses de télies). Lorsque les premières infections sur mélèze auront été détectées (en noter la date), la détection de l'infection sur les clones témoins devrait intervenir 2 à 4 semaines plus tard (en noter la date).
Dates de notation : elles dépendront de la précocité et de l'intensité de l'infection, qui dépendent elles-mêmes de celles de la contamination des mélèzes et du climat (climat général et microclimat). L'objectif est de pouvoir conduire deux notations, l'une fin juillet-début août et la seconde fin août-début septembre. Selon le développement de l'épidémie, ces dates pourront être avancées ou retardées dans une fourchette de ± 2 semaines. La notation devra porter sur tous les plants en tests ainsi que sur tous les témoins. La notation des plants de bordure n'est pas strictement indispensable.
Méthode de notation : une note est attribuée visuellement à chaque plant lors de chaque notation, selon un barème de 1 à 9 :
1 = aucun sore sur tout le plant ;
2 = de 1 à 10 sores sur moins de 50 % des feuilles ;
3 = de 1 à 10 sores sur plus de 50 % des feuilles ;
4 = de 11 sores à 50 % de la surface couverte sur moins de la moitié des feuilles ;
5 = de 11 sores à 50 % de la surface couverte sur plus de la moitié des feuilles ;
6 = de 50 à 75 % de la surface couverte sur moins du quart des feuilles ;
7 = de 50 à 75 % de la surface couverte sur plus du quart des feuilles ;
8 = plus de 75 % de la surface couverte sur moins du quart des feuilles ;
9 = plus de 75 % de la surface couverte sur plus du quart des feuilles.
Lors de chaque notation d'infection, il sera aussi attribué à chaque plant une note décrivant succinctement son état de défeuillaison selon le barème :
1 = pas de défeuillaison ;
2 = défeuillaison faible à moyenne ;
3 = forte défeuillaison.
Dépouillement des données : après le calcul de la note moyenne de chaque clone (clones testés et clones témoins), un calcul statistique sera conduit de manière à définir cinq groupes homogènes. Ces groupes peuvent être définis comme suit :
1 : très sensible ;
2 : sensible ;
3 : peu sensible ;
4 : résistant ;
5 : très résistant.
Deux conditions doivent être remplies pour que le clone soit admis :
- les témoins doivent se répartir correctement dans les groupes (validité du test) ;
- le clone candidat n'appartient pas aux groupes 1 et 2.
Récolte de feuilles infectées : en fin de première année, et afin de disposer d'une source d'inoculum pour la seconde année, des feuilles porteuses de télies seront collectées selon la procédure décrite ci-dessus (§ Infection de l'essai).
Mesure de la hauteur des plants : après arrêt de la croissance, tous les plants devront être mesurés chaque année.