Lors de circonstances exceptionnelles ou de force majeure (événement imprévisible, irrésistible et extérieur), les entreprises et les salariés peuvent se retrouver contraints d'adapter temporairement leurs organisations de travail et de vie.
Une forme adaptée de télétravail peut permettre de maintenir l'activité de l'entreprise et d'éviter un recours à des dispositifs de réduction du temps de travail ou de l'emploi.
À cet effet, et fort des enseignements tirés de la crise sanitaire du « Covid-19 », les partenaires sociaux de la branche invitent les entreprises à prévoir, par anticipation, les modalités d'un télétravail adapté aux circonstances extérieures. Ces modalités pourront faire l'objet d'un accord collectif ou d'une charte d'entreprise.
1. Définition
Le télétravail adapté aux circonstances extérieures se définit comme l'organisation du travail, nécessaire à la continuité des activités de l'entreprise tout en préservant la santé et sécurité des salariés, consistant à leurs imposer temporairement de travailler hors des locaux habituels de l'entreprise.
La mise en place de ce télétravail adapté aux circonstances extérieures peut être rendu nécessaire par exemple en cas d'épidémies ou de pandémies ; d'évènements climatiques, environnementaux ou industriels exceptionnels ; de mouvements sociaux importants empêchant le déplacement des salariés de leurs domiciles vers leurs lieux de travail...
2. Modalités de recours et critères d'éligibilité
Les entreprises devront déterminer le type de situation pouvant constituer des circonstances extérieures nécessitant de recourir au télétravail adapté, cette liste ne pouvant être considérée comme limitative afin de conserver une agilité nécessaire en temps de crise.
En tout état de cause, l'employeur peut s'appuyer prioritairement sur le fondement de l'article L. 1222-11 du code du travail pour décider unilatéralement le recours au télétravail pour tout ou partie des salariés. En effet, le télétravail est alors considéré comme un aménagement du poste de travail permettant la continuité de l'activité de l'entreprise et la protection des salariés.
Le CSE est consulté dans les plus brefs délais suivant cette décision.
Les critères d'éligibilité au télétravail devront également être déterminés afin de permettre au maximum de salariés de continuer leur activité professionnelle en télétravail.
Le rythme et la durée du télétravail peuvent difficilement être anticipés et devront être adaptés aux circonstances extérieures rencontrées.
La détermination des situations constituant des circonstances exceptionnelles et des critères d'éligibilité au télétravail peut être intégrée au plan de continuité d'activité, lorsqu'il existe. Les entreprises pourront également s'appuyer sur ce plan afin de déterminer en amont le matériel nécessaire à l'exercice du télétravail en cas de circonstances exceptionnelles par les différentes populations de salariés.
Lorsque la situation exceptionnelle perdure, les entreprises sont invitées à déterminer un plan de reprise d'activité. Ce plan pourra notamment comporter des dispositions visant à accompagner le retour à une organisation du travail « classique », notamment lorsque l'urgence de la situation a dû entraîner une organisation du travail improvisée.
Contrairement au télétravail « régulier » le principe du double volontariat ne s'applique pas au recours au télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure. Dans ce cas, l'employeur devra informer les salariés par tout moyen du recours au télétravail, en respectant si possible un délai de prévenance.
Le télétravail adapté peut s'imposer aux salariés et aux entreprises. Ces dernières restent décisionnaires d'y recourir ou non.
3. Organisation et suivi du temps de travail
Dans le cadre du télétravail adapté aux circonstances extérieures, les entreprises devront être particulièrement attentive aux salariés lorsque le télétravail se prolonge sur une longue période, et notamment aux salariés non habitués au télétravail.
Lorsque la durée du télétravail pour circonstances exceptionnelles est supérieure à un mois continu, les entreprises devront veiller à ce que le salarié d'ordinaire non éligible au télétravail régulier puisse bénéficier des dispositions normalement applicables au télétravail régulier dans l'entreprise en matière de fourniture de matériel informatique et bureautique.
Pendant la période de recours à ce type de télétravail, les entreprises sont invitées à adapter les plages horaires de travail afin de permettre aux salariés d'organiser leur journée de travail avec plus de flexibilité, sans que cela ne présage d'une augmentation de la durée du travail ou contrevienne avec les dispositions applicables relatives au droit à la déconnexion. Les temps de repos légaux ou conventionnels devront être respectés et la charge de travail des salariés faire l'objet d'un suivi régulier par l'employeur.
De la même manière que pour le télétravail régulier, et afin de concilier vie privée et vie professionnelle, les entreprises sont invitées à prévoir des plages horaires pour :
– contacter les salariés ;
– organiser les réunions.
4. Matériel informatique nécessaire
L'employeur reste tenu de mettre à disposition des salariés le matériel informatique nécessaire à l'exécution de leurs missions.
Pour les salariés n'étant pas des télétravailleurs, au sens du télétravail régulier en vigueur dans l'entreprise, les entreprises s'efforceront de leur mettre à disposition ou de leur permettre d'acquérir le matériel strictement nécessaire à l'exercice de leur travail.
À défaut et dans le cadre de ces circonstances exceptionnelles et impromptues, ces salariés pourront être amenés à titre temporaire, sous réserve qu'ils en donnent leur accord, à utiliser leur matériel personnel avec l'autorisation préalable de l'entreprise et sous la responsabilité de celle-ci.
5. Accompagnement des salariés
Une attention particulière sera portée par les entreprises à l'ensemble des salariés qui seraient contraints de télétravailler pendant une période plus ou moins longue. À cette fin, les managers pourront bénéficier d'une sensibilisation spécifique en amont leur permettant d'acquérir le comportement adapté face à cette situation particulière. Ils devront notamment mettre en œuvre les mesures permettant de garder un contact et un suivi régulier des salariés concernés et leur fixer des objectifs clairs et atteignables.
Par ailleurs, lorsque le télétravail visé par le présent article perdure pendant une période minimale d'un mois, l'entreprise pourra mettre en place un système permettant à l'ensemble des salariés concernés d'exprimer leurs ressentis et demandes sur la situation exceptionnelle lié à ce mode de travail à leur manager, à leurs interlocuteurs de la direction des ressources humaines ou les représentants du personnel. Un bilan de ces remontées d'information pourra être partagé par l'employeur avec les représentants du personnel.
6. Accident du travail et risques professionnels
L'accident survenant pendant cette période sera traité conformément aux dispositions de l'article 2.12 du présent accord.
Les partenaires sociaux rappellent qu'à l'instar du télétravail régulier, le télétravail pour circonstances exceptionnelles est tout autant si ce n'est plus susceptible d'être créateur de risques professionnels, notamment psychosociaux, lorsqu'il perdure. Dans ce cadre, les entreprises devront être d'autant plus vigilantes vis-à-vis des signaux d'alerte qui peuvent être remontés par les salariés ou les partenaires sociaux, et prendre les mesures adaptées le cas échéant.
7. Protection des données
Il appartiendra à chaque entreprise de prendre les mesures qui s'imposent pour assurer la protection des données utilisées et traitées par le télétravailleur à des fins professionnelles. Il incombe au télétravailleur de se conformer aux dispositions légales et aux règles édictées par chaque entreprise relative à la protection des données et à leur confidentialité.
8. Le maintien et l'adaptation du dialogue social
Face à des circonstances exceptionnelles nécessitant la mise en place du télétravail adapté aux circonstances extérieures, les entreprises, les représentants du personnel et les organisations syndicales de salariés devront adapter leur fonctionnement afin de maintenir un dialogue social de qualité. À ce titre, les entreprises sont invitées à prévoir dans l'accord ou la charte une procédure de fonctionnement du dialogue social en cas de circonstances exceptionnelles.
Sous réserve de l'impossibilité de respecter les règles habituellement applicables en matière de dialogue social et de l'acceptation par les partenaires sociaux, les entreprises pourront notamment prévoir un assouplissement des modalités d'organisation des informations et consultations des CSE, ainsi que de négociation avec les organisations syndicales, qui pourront par exemple prendre la forme d'un recours à la visioconférence, ou encore d'un aménagement des délais de consultation.
En tout état de cause, la situation exceptionnelle ne doit pas faire échec aux prérogatives habituelles des représentants du personnel, notamment en matière de liberté de déplacement et de circulation dans les locaux de l'entreprise.
Des modalités spécifiques de communication entre les salariés et leurs représentants devront être prévues par les entreprises afin de faciliter l'exercice du droit syndical en cas de télétravail pour circonstances exceptionnelles ou force majeure. Dans un contexte de crise, le rôle des représentants des salariés est particulièrement important pour faciliter l'expression des salariés.