30.1. Forfaits en heures
L'entreprise peut proposer au salarié que son temps de travail soit régi par un forfait en heures sur la semaine, le mois ou l'année. Un contrat de travail ou un avenant formalisant l'accord du salarié devra alors être conclu en ce sens.
30.1.1. Salariés visés (1)
Conformément à l'article L. 3121-56 du code du travail, la possibilité de conclure une convention de forfait en heures sur l'année peut être convenue avec les salariés qui ne sont pas occupés selon l'horaire collectif applicable au sein du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés et qui, pour l'accomplissement de l'horaire de travail auquel ils sont soumis, disposent, en application de leur contrat de travail, d'une certaine autonomie.
Cette autonomie se définit par la liberté qui leur est reconnue dans l'organisation de leur emploi du temps par rapport aux horaires de fonctionnement des équipes, services et/ ou équipements auxquels ils sont affectés, de telle sorte que leur horaire de travail effectif ne peut être déterminé qu'a posteriori.
30.1.2. Régime juridique
Le contrat de travail mentionne l'horaire hebdomadaire, mensuel ou annuel convenu avec le salarié, étant précisé que cet horaire est égal à la référence hebdomadaire, mensuelle ou annuelle convenue dans l'entreprise auxquelles s'ajoute le nombre d'heures supplémentaires prévu, sans pouvoir excéder les limites prévues en la matière sur la semaine, le mois ou l'année (au pro rata temporis pour des années incomplètes).
La conclusion d'une convention de forfait en heures n'exclut pas le respect des dispositions des articles sur le travail effectif et le repos de la présente convention collective.
La rémunération du salarié ayant conclu une convention de forfait en heures sera au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l'entreprise pour le nombre d'heures correspondant à son forfait, augmentée des majorations pour les heures supplémentaires prévues. Il est précisé que les primes de sujétions telles que celles liées au travail de nuit ou du dimanche ne sont pas prises en compte dans la détermination de la rémunération du salarié ayant conclu une convention de forfait en heures, primes de sujétions qui pourront donc se rajouter à cette rémunération le cas échéant.
Le bulletin de paie de l'intéressé doit faire apparaître le nombre moyen mensuel d'heures de travail sur la base duquel le salaire forfaitaire a été convenu.
Le nombre d'heures compris dans le forfait, les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période, les caractéristiques principales des conventions individuelles de forfait qui doivent notamment fixer le nombre d'heures compris dans le forfait sont déterminés par l'accord collectif d'entreprise permettant la conclusion de la convention individuelle du forfait.
30.2. Forfaits annuels en jours
L'entreprise peut proposer au salarié que son temps de travail soit régi par un forfait annuel en jours. Un contrat de travail ou un avenant formalisant l'accord du salarié devra alors être rédigé et conclu en ce sens.
30.2.1. Salariés visés et période de référence
Conformément à l'article L. 3121-58 du code du travail, peuvent conclure une convention de forfait en jours sur l'année :
– les cadres qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés ;
– les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées.
Il en ressort que seuls les salariés relevant des classifications III (A, B, C), IV (A, B, C), V (A, B, C) et VI pourront voir leur temps de travail régi par une convention de forfait annuel en jours. Cette disposition n'est pas applicable aux entreprises déjà couvertes par un accord collectif d'entreprise régissant le forfait annuel en jours à la date de conclusion de la présente convention collective et dont l'équilibre global est au moins équivalent.
La période de référence du forfait en jours est déterminée par l'entreprise selon deux options :
– soit l'année civile ;
– soit la période de référence retenue pour les congés à savoir du 1er juin au 31 mai.
30.2.2. Régime juridique
i) Nombre de jours travaillés par an
Le contrat de travail écrit, sur la base de la présente convention collective ou l'accord conclu sur le sujet dans l'entreprise, détermine le nombre de jours sur la base duquel le forfait est défini. Une fois déduits du nombre total des jours de l'année les jours de repos hebdomadaire, les jours de congé légaux et conventionnels auxquels le salarié peut prétendre et les jours de réduction du temps de travail, le nombre de jours travaillés sur la base duquel le forfait est défini ne peut excéder 216 jours pour 1 année complète de travail et pour un droit complet à congés payés. Ce forfait comprend la journée de solidarité.
Cette disposition n'est pas applicable aux entreprises déjà couvertes par un accord collectif d'entreprise régissant le forfait annuel en jours à la date de conclusion de la présente convention collective et dont l'équilibre global est au moins équivalent.
En cas d'absence du salarié non assimilée à du temps de travail effectif au sens de l'article L. 3141-5 du code du travail (ex : maladie non professionnelle), le nombre annuel de jours de travail défini par la convention de forfait établie entre les parties est réduit du nombre de jours d'absence, ceci en tenant compte du nombre de jours de repos réellement acquis pendant ladite absence.
Le temps de travail peut être réparti sur certains ou sur tous les jours de la semaine, en journées ou demi-journées de travail. Cette répartition doit tenir compte de la prise des jours de réduction du temps du travail.
ii) Nombre de jours de repos par an
Afin de ne pas dépasser le plafond annuel de jours travaillés visé ci-dessus, le salarié bénéficie de jours de repos.
Compte tenu de la variation du nombre de jours fériés compris du lundi au vendredi d'une année sur l'autre, les entreprises peuvent faire le choix de ne pas gérer au réel l'attribution des jours fériés et décider de figer ce nombre pour ne pas avoir à subir la variation des jours fériés précitée. Dans ce cas, le nombre de jours de repos retenu est calculé sur la base de 8 jours fériés pris en moyenne chaque année par les salariés du lundi au vendredi. En conséquence, si le nombre de jours fériés s'avérait inférieur à ces 8 jours, il n'y aurait pas d'octroi de jours de repos supplémentaires. Si à l'inverse, le nombre de jours fériés s'avérait supérieur à ces 8 jours, il n'y aurait pas de diminution du nombre de jours de repos.
Dans ce cadre, le salarié a droit à 12 jours de repos minimum sur la base d'une année complète de travail effectif dans les conditions précisées par accord d'entreprise.
Toutefois, en cas d'absence (s) non-assimilée (s) à du temps de travail effectif, le nombre de jours de repos, est réduit au prorata du nombre annuel de jours d'absence sur le nombre annuel de jours travaillés en appliquant un arrondi au 1/2 jour inférieur.
Pour les salariés ne bénéficiant pas d'un congé annuel complet, le nombre de jours de travail est augmenté à concurrence du nombre de jours de congé légaux et conventionnels auxquels le salarié ne peut prétendre.
En cas de dépassement du nombre de jours travaillés prévus au contrat constaté à la fin de la période de référence, il est convenu que le salarié en forfait annuel en jours bénéficiera de jours de récupération à prendre dans les 3 mois de leur acquisition sauf autres dispositions conventionnelles de même nature convenues au sein des entreprises (tel qu'un accord mettant en place un compte épargne-temps par exemple).
iii) Prise des jours de repos
Les jours de repos sont pris pendant la période de référence au cours de laquelle ils ont été attribués par journées ou demi-journées.
Ils ne peuvent être pris qu'après leur attribution ou durant le mois en cours d'acquisition, et ne peuvent donc pas être pris par anticipation.
La programmation des jours de repos doit permettre une prise régulière répartie sur l'année.
Sauf accord d'entreprise dérogatoire sur ce point, il n'est pas possible de reporter sur la période de référence suivante les jours de repos non pris au cours de ladite période. Aussi, faute pour le salarié d'avoir effectivement pris ces jours de repos avant la fin de la période d'attribution, ces jours de repos seront perdus, exceptés ceux acquis durant le dernier mois de la période de référence qui pourront être posés jusqu'à la fin du 1er mois de la nouvelle période de référence, sur demande écrite du salarié à la direction. Passé ce délai, les jours de repos non pris seront définitivement perdus.
Par exception, si le salarié a été dans l'impossibilité de les prendre du fait d'un arrêt maladie, il pourra les reporter afin de les prendre dans les 3 mois civils suivants son retour.
En vue de concilier les impératifs liés aux nécessités de l'organisation de l'entreprise et l'organisation de la vie personnelle des salariés, les jours de repos sont fixés :
– soit prioritairement à l'initiative du salarié ;
– soit pour partie à l'initiative du salarié et pour partie à l'initiative de l'employeur sans que pour ce dernier, le nombre puisse excéder 50 % des jours de repos.
Au regard de la finalité des jours de repos qui est de permettre un repos régulier, il est recommandé de prendre les jours de repos régulièrement au fil de l'année de référence.
Les dates souhaitées pour prendre les jours de repos devront être communiquées en respectant les règles en vigueur de pose de congé dans l'entreprise. La direction pourra s'y opposer pour des raisons tenant notamment aux contraintes du service, aux périodes d'activité et à la nécessité de maintenir un certain pourcentage de salariés en activité.
iv) Conditions de rémunération des salariés en forfait annuel jours
La rémunération des salariés en forfait jours est fixée annuellement dans le cadre d'une convention de forfait qui exclut par nature le bénéfice de majorations horaires liées à des sujétions particulières. Cette rémunération est lissée indépendamment du nombre de jours travaillés et des sujétions susvisées et, le cas échéant, de la prise de jours de repos.
Il est précisé que la rémunération des salariés en forfait jours devra, a minima, être supérieure de 6 % par rapport au salaire minimum, en correspondance avec les classifications définies dans l'article 21 du titre V.
Le bulletin de paie doit mentionner le nombre de jours du forfait annuel en jours.
En cas d'absence non rémunérée, ainsi qu'en cas d'entrée ou de sortie en cours de mois, la rémunération mensuelle du salarié est diminuée à hauteur du salaire journalier correspondant au nombre de jours d'absence sur le mois considéré.
v) Durée maximale de travail, durée de repos et droit à la déconnexion
Les seules dispositions de la présente convention collective relatives aux amplitudes de travail qui s'appliquent aux salariés régis par une convention de forfait en jours sont celles relatives au repos quotidien et au repos hebdomadaire.
Néanmoins, afin de garantir la protection de la sécurité et de la santé du salarié, l'amplitude et la charge de travail des salariés concernés doivent rester raisonnables et assurer une bonne répartition des temps travaillés.
Les dispositions du présent article visent à permettre l'effectivité du respect de ces droits.
En outre, les règles relatives au repos quotidien et hebdomadaire leur sont applicables.
Dès lors, ils bénéficient de :
– un repos minimal quotidien de 11 heures consécutives ;
– un repos minimal hebdomadaire de 24 heures consécutives, auquel s'ajoute le repos quotidien de 11 heures, soit 35 heures.
Il est précisé que le forfait en jours, bien qu'exclusif de tout décompte des heures travaillées, ne doit pas avoir pour conséquence de limiter de manière récurrente le repos quotidien à son niveau minimum légal de 11 heures.
Les supérieurs hiérarchiques veillent à ce que la charge de travail confiée permette de prendre effectivement et régulièrement les temps de repos et jours de repos.
L'effectivité du respect par les salariés des durées de repos implique pour ces derniers une obligation de déconnexion des outils de communication à distance durant leurs temps de repos quotidien et hebdomadaire ainsi que pendant leurs congés payés, repos et arrêts maladie. À cet égard, les managers veillent à ne pas utiliser ou faire utiliser les moyens de communication informatique à leur disposition pendant les temps impératifs de repos.
L'amplitude des journées travaillées et la charge de travail des salariés devront être raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps de travail de l'intéressé. Les responsables hiérarchiques seront sensibilisés au fait qu'il leur appartient eux-mêmes de respecter cette obligation pour ce qui les concerne et de s'abstenir de formuler des demandes pendant les horaires de nuit, le week-end, et à plus forte raison pendant les congés payés des salariés.
Si un salarié en forfait annuel en jours constate qu'il ne sera pas en mesure de respecter ces durées minimales de repos, il peut, compte tenu de l'autonomie dont il dispose dans la gestion de son temps de travail, avertir sans délai son supérieur hiérarchique afin qu'une solution alternative lui permettant de respecter les dispositions légales soit trouvée. En cas de difficulté, le salarié pourra saisir la direction.
vi) Contrôle et suivi
Le forfait annuel en jours s'accompagne d'un décompte des journées travaillées au moyen du système auto-déclaratif mis en place par l'entreprise, sous la supervision du supérieur hiérarchique. Dans cette optique, les entreprises s'engagent à mettre en œuvre un système de contrôle et de suivi de l'activité des salariés en forfait annuel jours permettant de s'assurer du respect du nombre de jours travaillés, des temps de repos quotidien et hebdomadaire. Tout moyen pourra être utilisé.
Ce dispositif permet aux salariés soumis à la présente modalité de faire apparaître :
– le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées au cours du mois, ainsi que leur cumul annuel ;
– le positionnement et la qualification des journées ou demi-journées non travaillées (repos hebdomadaires, congés payés, jours de repos, arrêt maladie, etc.) ;
– le respect des temps de repos quotidien et hebdomadaire ou la durée des temps de repos quotidien et hebdomadaire effectivement pris par le salarié.
Ces données mensuelles sont soit :
– enregistrées par le biais d'un système automatisé ;
– renseignées par le salarié selon un système auto-déclaratif ;
Dans ce dernier cas, le salarié les transmettra à la fin de chaque mois à la direction qui les examinera à réception. Ces états seront signés par le salarié et contresignées par leur supérieur hiérarchique.
Il est entendu que ce suivi n'a pas pour but de contrôler l'activité individuelle des salariés mais de contrôler le temps de travail en vue de concourir à préserver le droit au repos et à la santé de ces derniers en apportant tous les correctifs nécessaires.
vii) Entretiens de suivi
Le salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours bénéficie a minima d'un entretien par an lui permettant d'aborder sa charge de travail.
Par ailleurs, le salarié peut alerter la direction, à tout moment, par l'outil de décompte et de suivi du temps de travail ou par tout autre moyen, de tout élément qui accroît de façon inhabituelle ou anormale sa charge de travail. Le supérieur hiérarchique est alors tenu d'organiser sans délai un entretien. Le salarié peut également le solliciter de lui-même.
Lors de ces entretiens, le salarié précise les événements ou éléments qui sont à l'origine de ces difficultés relatives à sa charge de travail. La direction et le salarié analysent ensuite la charge de travail de ce dernier sur la base des éléments objectifs et factuels présentés par le salarié. Ils déterminent notamment si la surcharge de travail identifiée relève d'un événement ponctuel ou temporaire auquel il peut être remédié par un allégement de la charge de travail ou par la prise de jours de repos une fois cet événement passé, ou bien au contraire d'une problématique structurelle, qui conduira alors à envisager des mesures d'ajustement de la charge de travail à long terme.
Compte tenu de ces éléments, et si nécessaire, la direction formule par écrit un plan d'action et les mesures à mettre en place pour permettre un traitement effectif et adapté de la situation.
Ces mesures feront l'objet d'un compte rendu écrit et d'un suivi.
30.2.3. Modalités de mise en place du forfait en jours
Le forfait annuel en jours ne peut être mis en place qu'avec l'accord écrit et préalable du salarié concerné.
Précisément, l'entreprise, après s'être assurée que le salarié concerné remplit les conditions d'accès au forfait en jours, peut lui proposer de conclure une convention individuelle de forfait en jours qui sera intégrée au contrat de travail initial ou fera l'objet d'un avenant.
30.2.4. Forfait-jours réduit
À l'instar des salariés dont le temps de travail est géré en heures, les salariés assujettis à un forfait annuel en jours, peuvent bénéficier avec l'accord de leur supérieur hiérarchique d'un forfait jours réduit formalisé contractuellement. Dans ce cas, le contrat de travail de l'intéressé doit spécifier le nombre de jours que le salarié travaille sur la période de référence.
Les salariés en forfait en jours réduit travaillent selon un pourcentage de réduction défini contractuellement et appliqué aux 216 jours pour 1 année complète de travail et pour un droit complet à congés payés.
La rémunération des salariés en forfait en jours réduit est adaptée à due proportion.
Les incidences des absences et de l'arrivée/ départ en cours d'année, aussi bien concernant la rémunération du salarié que le nombre de jours de RTT, sont calculées comme pour un forfait en jours complet et le résultat est déterminé proportionnellement au temps convenu.
Les cadres ayant un forfait en jours complet souhaitant un forfait en jours réduit ou inversement, doivent en formuler la demande par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en main propre à la direction en précisant la date envisagée pour la mise en œuvre. La demande doit être faite au moins 3 mois avant cette date.
La société dispose d'un délai de 1 mois pour examiner la demande. Le refus peut être motivé notamment pour des raisons relatives aux nécessités du service, aux spécificités du poste ou à la compétence particulière de la personne occupant le poste.
30.2.5. Bilan d'application
Les parties conviennent d'établir un bilan sur l'application des dispositions conventionnelles relatives au forfait annuel en jour sous forme d'état des lieux dans les entreprises de la branche qui sera effectué 2 ans après l'extension de la présente convention collective puis régulièrement. Ces états des lieux constitueront la documentation de référence permettant l'adaptation éventuelle des dispositions conventionnelles sur le forfait annuel en jour.
30.3. Cadres dirigeants
Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant, les cadres :
– auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps ;
– qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome ;
– qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.
Ces trois critères sont cumulatifs.
Les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée du travail.
(1) L'article 30.1.1 est étendu sous réserve qu'en application du 1° du I de l'article L. 3121-64 du code du travail, un accord d'entreprise précise les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait annuel en jours.
(Arrêté du 4 février 2022 - art. 1)