L'UE a également identifié un certain nombre de matières dites « substances extrêmement préoccupantes (SVHC) » dont la libération dans l'atmosphère doit autant que possible être ramenée à zéro, notamment dans le règlement REACH (CE) 1907/2006, la convention OSPAR, la directive cadre relative à l'eau 2000/60/CE et le règlement POP (CE) 850/2004. L'industrie est également tenue de réduire de plus en plus ce type de rejets. Pour la navigation intérieure, il n'existe pas encore de prescriptions efficaces visant à empêcher la libération dans l'atmosphère de ces matières.
En outre, il n'existe à l'heure actuelle aucune réglementation internationale étendue qui interdise la libération de vapeurs dans l'atmosphère pour la navigation intérieure. De ce fait, de plus en plus de dispositions locales ont été introduites, ce qui peut conduire à un « tourisme des déchets » : les conducteurs attendent d'atteindre une zone où le dégazage n'est pas interdit et y ventilent leur bateau dans l'atmosphère.
2.2. Comment la modification proposée contribue-t-elle à la résolution du problème ?
Des interdictions de dégazage sont déjà en vigueur aux niveaux national, local et régional. Les autorités locales des provinces, des régions et des ports ainsi que des gouvernements nationaux ne peuvent cependant instaurer une interdiction généralisée, leur compétence se limitant à leurs propres voies d'eau. Il en résulte une réglementation fragmentée, ce qui peut conduire à un « tourisme des déchets ». Pour répondre à la problématique du dégazage, une réglementation internationale uniforme et adaptée est nécessaire, afin que les émissions de matières nocives soient limitées de façon intégrée sur l'ensemble des voies d'eau et que des règles du jeu équitables permettent d'éviter toute distorsion de concurrence.
La CDNI est une convention adoptée par six pays : le Luxembourg, la Suisse, les Pays-Bas, la Belgique, l'Allemagne et la France ; elle s'applique à l'ensemble du Rhin et à toutes les voies de navigation intérieure en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique, sur la Moselle internationale au Luxembourg et en France (NB : pour la France, les voies navigables soumises à la convention sont la Moselle, le Rhin, la Meuse et les canaux du Nord). Ce bassin concentre plus de 80 % de l'activité de la navigation intérieure européenne. L'incorporation dans la convention d'une interdiction de libérer des composés organiques volatils et dangereux pour l'environnement dans l'atmosphère permettra, moyennant une adaptation mineure, de couvrir la majeure partie de la navigation intérieure internationale en Europe. L'interdiction de dégazage s'appliquera alors de façon uniforme, ce qui empêchera le « tourisme des déchets ».
L'étude de l'impact des effets attendus de cette interdiction (RHDHV-3) indique que l'interdiction de ventilation proposée dans la CDNI préviendrait 95 % des dégazages nocifs à l'air libre par le transport fluvial dans le champ d'application géographique de la convention. Cela ne signifie pas pour autant que l'intégralité des dégazages dans l'atmosphère seront remplacés par des dégazages dans une station de réception des vapeurs : les experts du secteur s'attendent à ce que plus de 60 % des dégazages puissent être évités grâce à des solutions logistiques intelligentes, par exemple en faisant naviguer les bateaux avec la même cargaison ou avec des cargaisons qui sont parfaitement compatibles entre elles. Le dégazage dans une station de réception des vapeurs n'est nécessaire que lorsque la cargaison suivante du bateau est incompatible et que doit être fourni un bateau propre.
La CDNI est basée sur le principe du « pollueur-payeur ». C'est pourquoi les coûts des dégazages nécessaires sont imputés à l'affréteur. Pour les cargaisons liquides aussi, les coûts sont imputés à l'affréteur des marchandises qui pourraient polluer les eaux de surface.
2.3. Alternatives étudiées :
Plusieurs initiatives ont été prises dans le passé par des autorités régionales pour introduire des mesures environnementales concernant le dégazage dans l'atmosphère sur les voies navigables relevant du champ d'application géographique de la CDNI. Dans les conventions existantes, il s'est avéré que cet aspect ne pourrait être réglé sans l'accord des Parties Contractantes.
Les initiatives privées basées sur le volontariat se sont avérées inefficaces. Lors de la négociation des green deals aux Pays-Bas, les dirigeants du secteur ont affirmé explicitement qu'ils étaient partisans de prescriptions qui seraient coordonnées autant que possible à l'échelle internationale.
Au début des discussions en 2012, trois options ont été identifiées pour introduire dans la réglementation existante une interdiction du dégazage de vapeurs de composés organiques volatils et de matières dangereuses pour l'environnement : l'accord ADN, la directive européenne 94/63/CE et la convention CDNI relative à l'élimination des déchets survenant en navigation intérieure. Les interdictions nationales conviennent moins à cet égard, une mise en œuvre non uniforme laissant ouverte la possibilité d'un tourisme des déchets.
2.3.1. ADN :
L'accord ADN (†††) a été adopté par les Nations-unies pour encadrer le transport fluvial de marchandises dangereuses. Cet accord vise à réduire, autant que possible, les risques liés au transport de marchandises dangereuses pour le bateau et pour l'équipage. L'ADN et la réglementation sous-jacente portent également sur l'émission de matières dangereuses. Ces prescriptions sont en vigueur au niveau international.
La proposition d'une interdiction de dégazage ne vise pas une réduction des risques pour la sécurité mais la limitation des émissions nocives dans l'atmosphère et dans l'eau. Ces aspects dépassent la portée actuelle de l'ADN, qui concerne la sécurité du transport des marchandises dangereuses. Étant donné qu'une adaptation de l'ADN n'est pas plus avantageuse en termes de procédure, cette option a été écartée.
Les prescriptions actuelles dans le domaine du transport de marchandises dangereuses (ADN) ouvrent expressément aux administrations nationales la possibilité d'introduire des prescriptions plus détaillées. Une intensification des contrôles sur la base de la législation actuelle n'est donc pas une solution pour empêcher le rejet de ces vapeurs indésirables de façon uniforme : une réglementation complémentaire est nécessaire pour interdire le dégazage.
(†††) ADN : Accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieures.