Le président adjoint de la section du contentieux du Conseil d'Etat, les secrétaires générales de la première présidence et de la présidence du parquet général de la Cour de cassation, le président de l'Ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation et la directrice de l'Institut de formation et de recherche des avocats aux Conseils entendus sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 463-7 du code de commerce ;
La rapporteure, la rapporteure générale adjointe, les représentants du ministère de la justice et le commissaire du Gouvernement entendus lors de la séance de l'Autorité de la concurrence du 28 mars 2025 ;
Est d'avis :
- de recommander la création d'un office d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
- d'établir un bilan sur l'accès aux offices, et de formuler des recommandations au garde des sceaux, ministre de la justice, afin d'améliorer cet accès ;
Sur la base des observations suivantes :
Résumé (1)
En vertu de l'article L. 462-4-2 du code de commerce créé par l'article 57 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, l'Autorité de la concurrence (ci-après « l'Autorité ») rend au ministre de la justice, qui en est le garant, un avis sur la liberté d'installation des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation (ci-après « avocats aux Conseils »). Cet avis, émis au moins tous les deux ans, formule également des recommandations pour améliorer l'accès aux offices et permettre une augmentation progressive du nombre d'offices à créer, de manière à ne pas bouleverser les conditions d'activité des offices existants.
L'Autorité a émis quatre précédents avis, respectivement publiés au Journal officiel le 1er novembre 2016, le 1er novembre 2018, le 9 avril 2021 et le 22 avril 2023. Alors que le nombre de 60 offices était resté inchangé depuis 1817, l'Autorité a recommandé la création de quatre offices en 2016, quatre offices en 2018, deux offices en 2021 et deux offices en 2023. Onze offices (2) ont été créés par arrêtés du garde des sceaux, ministre de la justice, permettant au total à 14 nouveaux avocats aux Conseils de s'installer dans les offices nouvellement créés. Ces nominations ont largement contribué à l'augmentation du nombre d'avocats aux Conseils ces dernières années, lequel est passé de 112 à 132 entre 2016 et aujourd'hui.
Après un bref rappel du cadre légal et réglementaire applicable, le présent avis vise à présenter un état des lieux des évolutions récentes de l'offre et de la demande au cours des cinq dernières années, afin d'émettre de nouvelles recommandations quantitatives et qualitatives.
Du point de vue de l'offre, malgré une croissance significative du nombre d'offices et de professionnels depuis 2017, les résultats financiers de la profession sur la période 2019-2023, notamment le taux de marge (3), demeurent particulièrement élevés. En effet, ces professionnels jouissent de plusieurs atouts qui leur ont permis de maintenir un haut niveau de rentabilité, notamment le recours aux collaborateurs externes et la liberté tarifaire.
On a observé ces dernières années une augmentation des écarts de chiffres d'affaires entre les offices, qui est en partie imputable à l'intégration des nouveaux offices. Ces derniers affichent toutefois une forte croissance et un taux de marge qui surpasse celui de la profession de plus de 15 points.
Du côté de la demande, l'activité de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat marque une baisse globale.
L'Autorité relève enfin que le vivier actuel de candidats à la nomination dans un office créé ou existant serait d'une douzaine de personnes en 2025 et qu'une partie de cet effectif pourrait être mobilisée pour maintenir le niveau d'offre actuel, dans le cadre de départs à la retraite de titulaires ou d'associés d'offices existants. Les perspectives d'évolution du nombre d'avocats aux Conseils restent donc limitées dans les deux années à venir.
Ces différentes considérations conduisent l'Autorité à adopter une approche prudente et à recommander la création d'un nouvel office d'avocats aux Conseils sur la prochaine période biennale.
Au-delà de cette recommandation quantitative, l'Autorité relève - avec satisfaction - que plusieurs des recommandations qualitatives qu'elle avait formulées dans ses précédents avis ont été suivies.
Par ailleurs, l'Autorité salue les avancées significatives réalisées dans la modernisation de la profession et la promotion de l'accès des femmes à la profession d'avocat aux Conseils.
Toutefois, l'étroitesse du vivier de candidats ne doit pas faire obstacle à la réalisation de l'objectif inscrit dans la loi d'une augmentation progressive du nombre d'offices lorsque la situation économique le justifie. Il apparaît donc essentiel de continuer à mettre en place des mesures favorisant l'arrivée de nouveaux professionnels, notamment en facilitant l'entrée dans la profession de professionnels expérimentés, en particulier les collaborateurs d'avocats aux Conseils. Tel est le sens des recommandations n° 1 et n° 2.
Par ailleurs, les conditions d'exercice des sociétés pluri-professionnelles associant avocats aux Conseils et avocats à la Cour pourraient être précisées, ces sociétés ouvrant de nouvelles perspectives professionnelles aux collaborateurs d'avocats aux Conseils ayant le titre d'avocat à la Cour. De même, la limite géographique d'exercice de la profession ainsi que le recours au salariat pourraient être élargis, permettant d'attirer davantage de profils. Tel est le sens des recommandations n° 3, n° 4 et n° 5.
Sommaire
Introduction
I. - Cadre légal et réglementaire
A. - Présentation générale de la profession
B. - L'accès à la profession et la formation des avocats aux Conseils
C. - Les rémunérations perçues par l'avocat aux Conseils
1. Des honoraires libres
2. L'aide juridictionnelle
D. - Les évolutions récentes en matière de discipline et de déontologie
E. - Les modalités d'installation et les précédents avis de l'autorité
1. Le cadre applicable aux installations dans les offices créés
a) Une liberté d'installation régulée
b) Les conditions de nomination dans les offices créés
2. Les précédents avis de l'Autorité et les offices créés
a) Les avis n° 16-A-18 du 10 octobre 2016 et n° 18-A-11 du 25 octobre 2018
b) L'avis n° 21-A-02 du 23 mars 2021
c) L'avis n° 23-A-03 du 7 avril 2023
F. - Le présent avis et la consultation publique
II. - Etat des lieux de l'offre et de la demande
A. - Etat des lieux de l'offre
1. Evolution du nombre de professionnels
a) La croissance du nombre de professionnels
b) Un nombre toujours faible de candidats potentiels à l'installation
c) Le renouvellement des professionnels en place
2. L'évolution de l'activité et du niveau de revenu des professionnels
a) Les résultats financiers par office et par avocat libéral
b) L'activité, la rentabilité et l'organisation des avocats aux Conseils
La place majeure des dossiers en monopole dans l'activité des avocats aux Conseils
Une modulation des honoraires compensant les fluctuations de l'activité juridictionnelle
Un volume toujours élevé de dossiers traités et des écarts marqués dans la répartition des dossiers
Un besoin toujours soutenu de collaborateurs libéraux
c) La situation des offices créés depuis 2017
B. - Etat des lieux de la demande
1. L'activité contentieuse devant le Conseil d'Etat
a) La baisse du contentieux devant le Conseil d'Etat
b) Le contentieux devant les juridictions administratives du fond
2. L'activité contentieuse devant la Cour de cassation
a) La baisse du contentieux devant la Cour de cassation
L'évolution du volume d'activité
b) L'évolution des taux de cassation
c) La baisse du contentieux devant les juridictions judiciaires du fond
III. - Détermination du nombre recommandé de créations d'office
A. - Un potentiel d'accroissement de l'offre
B. - Les facteurs justifiant une approche prudente
IV. - Autres recommandations de l'autorité
A. - Bilan et perspectives en matière d'accès à la profession d'avocats aux Conseils
1. Les avancées en matière d'information délivrée aux candidats à l'installation
2. L'accès des femmes à la profession
3. L'obligation de procéder à un appel à manifestation d'intérêt
4. Les charges collectives attribuées aux offices
5. La déontologie
B. - Nouvelles recommandations en vue de faciliter l'accès à la profession
1. Favoriser les voies d'accès dérogatoires à la profession
a) L'information relative aux voies d'accès dérogatoire à la profession
b) Assouplir les voies d'accès dérogatoires à la profession
2. Favoriser la réussite au CAPAC
a) Supprimer la limite de trois présentations à l'examen
b) Supprimer la limite d'un redoublement par année
c) Elargir les mesures mises en place par l'IFRAC pour favoriser la réussite des étudiants aux candidats bénéficiant de dispenses
3. Clarifier les règles applicables aux sociétés pluri-professionnelles d'exercice
4. Supprimer la limitation géographique d'exercice de la profession
a) Supprimer l'obligation de disposer d'un domicile professionnel à Paris
b) Permettre aux étudiants à l'IFRAC de suivre davantage de cours à distance
5. Augmenter d'un à deux le nombre d'avocats aux Conseils salariés par avocat aux Conseils libéral
Conclusion
Introduction
1. Les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation (ci-après « avocats aux Conseils ») sont des officiers ministériels nommés par le garde des sceaux, ministre de la justice, dans un office existant, vacant ou créé. Au 1er janvier 2025, 134 avocats aux Conseils (dont 5 avocats salariés) exercent dans 71 offices.
2. Le présent avis est adopté dans le cadre des missions confiées à l'Autorité de la concurrence (ci-après « l'Autorité ») par l'article L. 462-4-2 du code de commerce, créé par l'article 57 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (ci-après « loi Croissance et activité »). Il porte sur la liberté d'installation des avocats aux Conseils. Il formule des recommandations en vue d'améliorer l'accès aux offices et de permettre une augmentation progressive du nombre d'offices à créer, de manière à ne pas bouleverser les conditions d'activité des offices existants. Il établit, en outre, un bilan en matière d'accès des femmes et des hommes à ces offices.
3. L'annexe fait partie intégrante du présent avis.
4. Conformément à l'article 3 du décret du 26 février 2016 susvisé, le présent avis et les recommandations dont il est assorti seront publiés au Journal officiel de la République française (ci-après « JORF »).
I. - Cadre légal et réglementaire
5. Bénéficiant d'un double monopole, attaché à l'attribution par l'Etat de matières réservées et d'un office ministériel (A), ainsi qu'à la détention d'un certificat d'aptitude à la profession délivré à l'issue d'une formation de trois ans (4) (B), les avocats aux Conseils jouissent d'une liberté tarifaire (C) et sont soumis à un corpus de règles qui a connu des évolutions notables ces dernières années (D). Pour la première fois depuis 1817, la réforme opérée depuis l'adoption de la loi Croissance et activité a permis la création de 11 nouveaux offices d'avocats aux Conseils « [a]u vu des besoins identifiés par l'Autorité » dans ses avis de 2016, 2018, 2021 et 2023 (0). C'est dans ce même cadre rénové que s'inscrivent le présent avis de l'Autorité et la consultation publique (F).
A. - Présentation générale de la profession
6. Les avocats aux Conseils sont titulaires d'un office attribué par l'Etat. Ils disposent d'un monopole de représentation des justiciables devant le Conseil d'Etat et la Cour de cassation pour les pourvois en cassation dans la plupart des matières, ainsi que devant le Tribunal des conflits, ce qui représente environ 90 % de leur activité. Le reste de leur activité résulte d'interventions devant d'autres juridictions (tribunaux administratifs, cours administratives d'appel, Conseil constitutionnel, Cour européenne des droits de l'homme, Cour de justice de l'Union européenne, etc.) et de missions de conseil juridique.
7. Le statut des avocats aux Conseils est précisé par l'ordonnance du 10 septembre 1817 modifiée (5). Par ailleurs, l'article 91 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances, qui prévoit l'existence d'un droit de présentation au profit des officiers ministériels, s'applique aux avocats aux Conseils.
8. Si les avocats aux Conseils exercent en principe leur métier à titre libéral, il est néanmoins possible « [d']exercer sa profession en qualité de salarié d'une personne physique ou d'une personne morale titulaire d'un office » (6). Chaque office ne peut employer plus d'un avocat aux Conseils salarié (7).
9. Par ailleurs, l'avocat aux Conseils libéral « peut exercer sa profession soit à titre individuel, soit dans le cadre d'une entité dotée de la personnalité morale, à l'exception des formes juridiques qui confèrent à leurs associés la qualité de commerçant » (8) (soulignement ajouté).
10. Le nombre maximal d'associés au sein d'une société civile professionnelle d'avocats aux Conseils est fixé à quatre (9). En revanche, les autres formes sociales ne connaissent pas de limitation analogue.
11. L'exercice sous forme de société de la profession d'avocat aux Conseils est désormais prévu par le décret n° 2024-876 du 14 août 2024, pris en application de l'ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 relative à l'exercice en société des professions libérales réglementées. Ce décret, entré en vigueur le 1er septembre 2024, a regroupé au sein d'un texte unique et à droit constant les textes déjà applicables à la profession (10), d'une part, et permis aux avocats aux Conseils de se constituer en société d'exercice libéral et en société de participations financières de professions libérales, d'autre part.
12. Les sociétés disposent d'un délai d'un an, à compter du 1er septembre 2024, pour se mettre en conformité avec les exigences du décret du 14 août 2024 précité (11).
B. - L'accès à la profession et la formation des avocats aux Conseils
13. La formation des avocats aux Conseils fait l'objet d'un règlement (12) adopté par le Conseil de l'Ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation (ci-après « l'Ordre ») et approuvé par le garde des sceaux, ministre de la justice. Elle est organisée par l'Institut de formation et de recherche des avocats aux Conseils (ci-après « IFRAC »). Cette formation de trois ans comprend un enseignement théorique, la participation aux travaux de la conférence du stage et un stage effectué dans le cadre d'un contrat de collaboration libérale avec un avocat aux Conseils. A l'issue de la formation, les étudiants peuvent se voir délivrer, sur proposition du conseil d'administration de l'IFRAC, un certificat de fin de formation qui leur permet de s'inscrire aux épreuves du certificat d'aptitude à la profession d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation (ci-après « CAPAC »).
14. Pour accéder à la profession d'avocat aux Conseils, les huit conditions cumulatives suivantes doivent être remplies :
1° être français ou ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ;
2° être titulaire d'au moins une maîtrise en droit ou de titres ou diplômes reconnus comme équivalents pour l'accès à la profession d'avocat ;
3° avoir été inscrit pendant un an au moins au tableau d'un barreau ;
4° avoir suivi la formation de trois ans dispensée par l'IFRAC ;
5° avoir subi avec succès l'examen d'aptitude à la profession d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
6° n'avoir pas été l'auteur de faits ayant donné lieu à condamnation pénale pour agissements contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs ;
7° n'avoir pas été l'auteur de faits de même nature ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation, de retrait d'agrément ou d'autorisation ; et,
8° n'avoir pas été frappé de faillite personnelle ou d'interdiction de diriger, gérer administrer ou contrôler, toute personne morale (13).
15. Certains professionnels sont dispensés des conditions mentionnées aux 2°, 3° et 4° et d'autres peuvent l'être, sous réserve de justifier d'une expérience professionnelle auprès d'un avocat aux Conseils. Ces professionnels sont ainsi admis à se présenter directement à l'examen du CAPAC.
16. Les dispenses sont très peu utilisées. Les données transmises par l'IFRAC aux services d'instruction de l'Autorité indiquent en effet que seules deux demandes de dispense de formation initiale ont été formées depuis 2022. Aucune des deux personnes ayant bénéficié de dispenses n'a été admissible au CAPAC (14).
Liste des professionnels bénéficiant de dispense de diplôme, d'inscription au barreau depuis un an et de la formation à l'IFRAC (15)
Sans condition d'ancienneté dans leur corps |
4 ans d'exercice dans leurs corps + 1 an de pratique auprès d'un avocat aux Conseils |
8 ans d'exercice dans leurs corps + 1 an de pratique auprès d'un avocat aux Conseils |
10 ans d'exercice dans les fonctions + 1 an de pratique auprès d'un avocat aux Conseils |
---|---|---|---|
Membres et anciens membres du Conseil d'Etat, à l'exception des maîtres des requêtes et des auditeurs *** Magistrats et anciens magistrats à la Cour de cassation, à l'exception des conseillers et des avocats généraux référendaires et des auditeurs *** Magistrats et anciens magistrats de la Cour des comptes, à l'exception des conseillers référendaires et des auditeurs *** Ressortissants de l'un des Etats de l'UE ou parties à l'accord sur l'EEE, ayant acquis leur qualification dans l'un de ces Etats, exerçant à titre permanent et justifiant d'une activité régulière et effective sur le territoire national d'une durée au moins égale à trois ans |
Professeurs d'université, chargés d'un enseignement juridique *** Maîtres des requêtes et anciens maîtres des requêtes au Conseil d'Etat et les conseillers et avocats généraux référendaires et anciens conseillers et avocats généraux référendaires à la Cour de cassation ou à la Cour des comptes |
Magistrats et anciens magistrats de l'ordre judiciaire, autres que ceux bénéficiant de la dispense sans condition d'ancienneté ou sous conditions de 5 ans d'exercice (4 + 1) *** Membres et anciens membres du Conseil d'Etat et de la Cour des comptes autres que ceux bénéficiant de la dispense sans condition d'ancienneté ou sous conditions de 5 ans d'exercice (4 + 1) *** Membres et anciens membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel *** Membres et anciens membres des chambres régionales des comptes |
Maîtres de conférences de droit et les anciens maîtres-assistants, titulaires du doctorat en droit *** Avocats et anciens avocats inscrits d'un barreau français ou d'un Etat membre de l'Union européenne *** Conseils juridiques et anciens conseils juridiques inscrits sur une liste de conseils juridiques *** Notaires |
17. L'examen du CAPAC comprend trois épreuves écrites d'admissibilité, puis trois épreuves orales d'admission (16) et nul ne peut se présenter plus de trois fois (17). En outre, les professionnels bénéficiant de dispenses peuvent, selon leur profil, être dispensés de l'ensemble ou bien d'une seule des épreuves écrites d'admissibilité (18).
18. Le jury de l'examen du CAPAC est composé de trois avocats aux Conseils, de deux membres du Conseil d'Etat, de deux membres de la Cour de cassation et d'un professeur des universités (19).
19. En outre, depuis le 1er septembre 2020, la gouvernance et le déroulement de la formation des avocats aux Conseils ont été modifiés afin de conférer à l'IFRAC une autonomie de gestion par rapport à l'Ordre (20). Ainsi, l'IFRAC est désormais dirigé par un professeur des universités et doté d'un conseil d'administration (21).
20. Par ailleurs, depuis 2020, la formation peut être suspendue sans que l'étudiant ait à justifier d'un motif légitime et cela pendant une durée maximum d'un an. Une demande de prolongation de la suspension peut être adressée au président de l'Ordre, qui statue après avis du directeur de l'IFRAC, et après que la personne concernée a été entendue ou appelée. La décision doit être motivée et lui être notifiée (22).
21. Enfin, la radiation d'une personne admise à la formation intervient par décision du conseil de l'Ordre, après avis du conseil d'administration de l'IFRAC. La personne radiée doit être informée du ou des motifs de la radiation (23).
C. - Les rémunérations perçues par l'avocat aux Conseils
1. Des honoraires libres
22. A l'inverse des autres officiers ministériels, notaires et commissaires de justice, concernés par la réforme de la liberté d'installation instaurée par la loi Croissance et activité (24), les avocats aux Conseils ne sont pas soumis à des tarifs réglementés. La rémunération des avocats aux Conseils est essentiellement constituée d'honoraires libres (25), convenus entre le professionnel et le client dans le cadre d'une convention d'honoraires écrite (26).
23. Les honoraires doivent être fixés en fonction « de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, de sa notoriété et des diligences de celui-ci » (27). Il est possible de fixer un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu, mais il est interdit de subordonner la détermination du montant total des honoraires au résultat de l'affaire (28).
24. L'avocat aux Conseils n'est pas tenu de justifier du décompte des frais et débours (29). De plus, les honoraires sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée.
25. Une partie des honoraires de l'avocat aux Conseils est usuellement rétrocédée aux collaborateurs de l'office au titre de leur rémunération. Cette rétrocession peut prendre la forme soit d'une rémunération mensuelle forfaitaire négociée avec l'office, soit d'une rémunération forfaitaire au dossier (30).
2. L'aide juridictionnelle
26. En application de l'article 43 du décret n° 2023-146 du 1er mars 2023 relatif au code de déontologie des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les avocats aux Conseils ont le devoir de contribuer aux charges collectives de l'Ordre. Les avocats peuvent notamment être désignés pour représenter les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle, mais aussi être désignés membres d'un des deux bureaux d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation et près le Conseil d'Etat, pour un mandat de trois ans renouvelable une fois.
27. L'aide juridictionnelle consiste en la prise en charge par l'Etat de tout ou partie des frais de procédure, incluant les honoraires de l'avocat aux Conseils (31). Une partie, « dont les ressources sont insuffisantes » (32), et ayant recours aux services d'un avocat aux Conseils, peut en demander le bénéfice auprès des bureaux d'aide juridictionnelle précités.
28. Après examen du dossier, l'aide peut être accordée partiellement ou totalement, en fonction des critères définis par la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique (33). Ces critères comprennent principalement une condition de nationalité (ou de résidence habituelle) et une condition de ressources (revenu fiscal de référence, patrimoine mobilier et patrimoine immobilier). Les plafonds de ressources sont revalorisés chaque année (34).
29. Chaque bureau d'aide juridictionnelle compte respectivement deux membres choisis par la Cour de cassation et deux par le Conseil d'Etat, deux avocats aux Conseils, un représentant « du ministre des finances ou du ministre chargé du budget », un représentant du ministre « chargé de l'aide sociale » et un représentant des usagers (35).
30. Lorsque la décision d'admission est prononcée, il appartient à l'Ordre de désigner un avocat aux Conseils (36), à l'exception des cas où le bénéficiaire a déjà choisi celui par lequel il souhaite être représenté.
31. Les montants versés aux avocats aux Conseils au titre d'une aide juridictionnelle totale sont prévus aux articles 90 et 91 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 relatif à l'aide juridique et ont récemment été revalorisés de 50 % par le décret n° 2023-457 du 12 juin 2023 portant diverses dispositions en matière d'aide juridique.
D. - Les évolutions récentes en matière de discipline et de déontologie
32. Afin de simplifier le cadre légal et réglementaire applicable en matière de discipline et de déontologie des officiers ministériels, auparavant source de confusion selon le rapport du 21 octobre 2020 sur la discipline des professions du droit et du chiffre (37), la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire a regroupé les règles applicables autour de quatre textes (38).
33. La surveillance des officiers ministériels est désormais confiée au procureur général, à l'exception des avocats aux Conseils compte tenu de leur statut spécifique et de leur rôle auprès de ces juridictions (39). En outre, de nouvelles juridictions disciplinaires, présidées par un magistrat, sont créées et disposent de services d'enquête indépendants. Enfin, la loi précitée du 22 décembre 2021 investit les instances de chaque profession de pouvoirs préventifs destinés à mettre en conformité l'action du professionnel avec ses obligations. Un collège de déontologie, chargé notamment de participer à la rédaction d'un code de déontologie, est placé auprès de l'instance nationale de chaque profession.
34. S'agissant des règles déontologiques des officiers ministériels, compte tenu des spécificités de chaque profession, le législateur a fait le choix de laisser à l'instance nationale de chaque profession le soin de les préparer (40). Elles se composent d'un code de déontologie et d'un ensemble de règles professionnelles, qui précisent les dispositions du code.
35. Pris en application du premier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 relative à la déontologie et à la discipline des officiers ministériels, le projet de décret relatif au code de déontologie des avocats aux Conseils a été soumis pour avis à l'Autorité, qui a formulé, dans son avis n° 23-A-02 du 10 février 2023 (41), plusieurs recommandations visant à accroître la transparence des avis du collège de déontologie et à préciser plusieurs règles professionnelles. Par exemple, elle a préconisé de :
- publier les avis du collège de déontologie sur le site internet de l'Ordre ;
- donner un cadre d'interprétation précis au principe général d'indépendance ;
- mieux définir l'interdiction de « se lier à un autre professionnel » ;
- clarifier de la notion de domicile professionnel ;
- clarifier l'interdiction de la mention de spécialisation ;
- intégrer les dispositions relatives à la publicité personnelle dans les règles professionnelles ; ou, encore
- préciser que la diffusion d'arrêts et de commentaires doctrinaux est autorisée.
36. A la suite de cet avis, le code de déontologie des avocats aux Conseils a été adopté par le décret n° 2023-146 du 1er mars 2023 (42). Un règlement professionnel précisant les dispositions du code de déontologie a également été pris. Ces deux documents, qui reprennent quasiment à droit constant l'ancien règlement général de déontologie du 5 novembre 2020 (43), sont entrés en vigueur le 2 mai 2023.
E. - Les modalités d'installation et les précédents avis de l'Autorité
1. Le cadre applicable aux installations dans les offices créés
a) Une liberté d'installation régulée
37. Afin d'assouplir les conditions d'installation des avocats aux Conseils, l'Autorité a pour mission d'identifier le nombre de créations d'offices « nécessaires pour assurer une offre de services satisfaisante au regard de critères définis par décret et prenant notamment en compte les exigences de bonne administration de la justice ainsi que l'évolution du contentieux devant ces deux juridictions » (44).
38. Comme pour les autres officiers ministériels, l'objectif est de permettre « une augmentation progressive du nombre d'offices à créer », afin d'ouvrir l'accès à la profession sans bouleverser les conditions d'activité des offices existants (45).
39. L'article 2 du décret n° 2016-215 du 26 février 2016 portant définition des critères prévus pour l'application de l'article L. 462-4-2 du code de commerce a précisé les critères qui permettent à l'Autorité d'évaluer le niveau et les perspectives d'évolution de la demande et de l'offre, afin de déterminer le nombre de créations d'offices nécessaire pour assurer une offre de services satisfaisante.
b) Les conditions de nomination dans les offices créés
40. Le décret n° 2016-652 du 20 mai 2016 modifiant les conditions d'accès à la profession d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation définit de nouvelles conditions de nomination des avocats aux Conseils et modifie en conséquence les articles 24 à 29 du décret n° 91-1125 précité.
41. Les candidats remplissant les conditions générales d'aptitude à la profession d'avocat aux Conseils peuvent déposer auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, leur demande de nomination dans un délai de deux mois à compter de la publication des recommandations de l'Autorité (46). Depuis 2016, ces recommandations sont établies pour une période biennale, en application de l'article L. 462-4-2 du code de commerce.
42. Le garde des sceaux, ministre de la justice, recueille, pour chaque candidature, l'avis motivé du vice-président du Conseil d'Etat, du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près cette cour. Il peut également solliciter un avis motivé du conseil de l'Ordre « sur l'honorabilité et sur les capacités professionnelles de l'intéressé ainsi que sur ses possibilités financières au regard des engagements contractés » (47).
43. Une commission est chargée d'examiner les candidatures et de les classer par ordre de préférence (48). Cette commission est composée de cinq membres (49), nommés par le garde des sceaux, ministre de la justice, pour une durée de trois ans, renouvelable une fois (50).
44. Les nominations sont faites au choix par le garde des sceaux, ministre de la justice, après avis de cette commission (51).
45. Les avocats aux Conseils déjà installés peuvent postuler à la création d'un nouvel office mais le décret prévoit, dans ce cas, que leur demande de nomination doit être accompagnée d'une demande de démission (pour un avocat exerçant à titre individuel) ou de retrait (pour un avocat associé), sous condition suspensive de nomination dans un nouvel office. Leur nomination dans ce nouvel office n'interviendra, le cas échéant, qu'après ou concomitamment à leur démission ou retrait (52).
2. Les précédents avis de l'Autorité et les offices créés
a) Les avis n° 16-A-18 du 10 octobre 2016 et n° 18-A-11 du 25 octobre 2018
46. Les 10 octobre 2016 et 25 octobre 2018, l'Autorité a respectivement rendu deux avis sur la liberté d'installation des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, publiés successivement le 1er novembre 2016 et le 1er novembre 2018 au JORF.
47. Elle constatait, dans ces deux avis, une situation économique très favorable des offices existants. A l'appui de ce constat, elle soulignait qu'ils bénéficiaient d'une organisation flexible grâce au recours massif à des collaborateurs externes pour traiter les dossiers, d'une part, et à la liberté tarifaire d'autre part. En outre, l'activité des juridictions suprêmes était globalement stable.
48. En conséquence, l'Autorité a recommandé la création de quatre offices dans son premier avis puis de quatre autres deux ans plus tard. Ainsi, sur la période 2016-2020, ses recommandations ont porté le nombre d'offices d'avocats aux Conseils de 60 à 68.
b) L'avis n° 21-A-02 du 23 mars 2021
49. Dans son troisième avis rendu le 23 mars 2021 et publié le 9 avril 2021 au JORF, l'Autorité a recommandé la création de deux offices supplémentaires, sur la période courant jusqu'au 8 avril 2023, portant ainsi le nombre d'offices d'avocats aux Conseils à 70.
50. Dans cet avis, l'Autorité relevait que les résultats financiers et le taux de marge de la profession étaient demeurés particulièrement élevés sur la période 2015-2019, malgré la hausse du nombre d'offices, la crise sanitaire et la baisse d'activité auprès de la Cour de cassation. Ainsi, en 2019, le taux de marge moyen de la profession était de 44 % et le bénéfice moyen par associé était légèrement supérieur à 500 000 euros par an.
51. Elle a également relevé que, si le chiffre d'affaires des offices créés augmentait rapidement, leurs perspectives de croissance à moyen terme pourraient être limitées par la concentration des affaires auprès des offices bien établis.
52. Les conséquences incertaines de la crise sanitaire à moyen terme, la faiblesse des effectifs de candidats à l'installation et la récente baisse des affaires enregistrées devant la Cour de cassation, avaient conduit l'Autorité à retenir une approche prudente dans ses recommandations.
53. Un arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, du 20 avril 2021 a créé deux nouveaux offices (53). Par deux arrêtés du 25 août 2021, ces offices ont été attribués à un professionnel exerçant à titre individuel et à une société civile professionnelle comptant deux associés.
c) L'avis n° 23-A-03 du 7 avril 2023
54. Dans son avis n° 23-A-03 du 7 avril 2023, l'Autorité a constaté, malgré un taux de marge et une rémunération toujours très favorables aux avocats aux Conseils, une nouvelle baisse des activités devant la Cour de cassation sur la période 2017-2021, et depuis 2022, une diminution des activités devant le Conseil d'Etat.
55. Elle a également relevé que le vivier de candidats potentiels à l'installation restait très réduit et pourrait être en partie mobilisé par les futurs départs en retraite.
56. En conséquence, l'Autorité a, de nouveau, retenu une approche prudente et recommandé la création de deux nouveaux offices pour la période 2023-2025.
57. Toutefois, faute d'un nombre suffisant de candidats, seul un office supplémentaire a été créé par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice (54), après avis d'une commission instituée par voie réglementaire (55). Cet office a été attribué par arrêté à un professionnel exerçant à titre individuel (56).
F. - Le présent avis et la consultation publique
58. L'article L. 462-4-2 du code de commerce dispose que : « L'Autorité de la concurrence rend au ministre de la justice, qui en est le garant, un avis sur la liberté d'installation des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation.
Elle fait toutes recommandations en vue d'améliorer l'accès aux offices d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation dans la perspective d'augmenter de façon progressive le nombre de ces offices. Elle établit, en outre, un bilan en matière d'accès des femmes et des hommes à ces offices. Ces recommandations sont rendues publiques au moins tous les deux ans.
A cet effet, elle identifie le nombre de créations d'offices d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation qui apparaissent nécessaires pour assurer une offre de services satisfaisante au regard de critères définis par décret et prenant notamment en compte les exigences de bonne administration de la justice ainsi que l'évolution du contentieux devant ces deux juridictions.
Les recommandations relatives au nombre de créations d'offices d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation permettent une augmentation progressive du nombre d'offices à créer, de manière à ne pas bouleverser les conditions d'activité des offices existants.
L'ouverture d'une procédure sur le fondement du présent article est rendue publique dans un délai de cinq jours à compter de la date de cette ouverture, afin de permettre aux associations de défense des consommateurs agréées au niveau national pour ester en justice, au conseil de l'Ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, ainsi qu'à toute personne remplissant les conditions de nationalité, d'aptitude, d'honorabilité, d'expérience et d'assurance requises pour être nommée par le ministre de la justice en qualité d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, d'adresser à l'Autorité de la concurrence leurs observations.
Lorsque l'Autorité de la concurrence délibère au titre du présent article, son collège comprend deux personnalités qualifiées nommées par décret pour une durée de trois ans non renouvelable. »
59. En application de cet article, il appartient donc à l'Autorité d'élaborer un nouvel avis sur la liberté d'installation des avocats aux Conseils et de réviser ses recommandations en matière de création d'offices.
60. Cette procédure a été engagée le 19 septembre 2024, date de lancement par l'Autorité d'une consultation publique pour recueillir les observations des tiers intéressés. Les avocats aux Conseils, leur Ordre, leurs associations, groupements et syndicats professionnels, les personnes remplissant les conditions pour exercer cette profession et les associations de consommateurs agréées ont été invités à répondre à un questionnaire en ligne.
61. Sur les 39 contributions complètes reçues par l'Autorité (contre 33 en 2022 et 23 en 2020), une seule d'entre elles a été soumise par un avocat aux Conseils, marquant un moindre intérêt des avocats aux Conseils pour cette cinquième consultation en huit ans. En revanche, 25 collaborateurs, dont 4 titulaires du CAPAC et 10 étudiants à l'IFRAC, ont participé et sont donc davantage représentés comparé aux années précédentes. Une synthèse des observations reçues figure en annexe.
II. - Etat des lieux de l'offre et de la demande
A. - Etat des lieux de l'offre
62. L'examen de la période 2017-2023 démontre que la création de onze nouveaux offices n'a altéré ni la forte concentration du marché des avocats aux Conseils, ni son niveau toujours élevé de performance économique.
1. Evolution du nombre de professionnels
a) La croissance du nombre de professionnels
63. Le nombre d'offices d'avocats aux Conseils connaît une croissance progressive depuis 2017, sous l'impulsion des recommandations biennales de l'Autorité. Néanmoins, la progression du nombre de professionnels libéraux, initiée il y a dix ans, connaît un léger repli ces dernières années.
Figure n° 1. - Evolution du nombre d'avocats aux Conseils (hors salariés) et d'offices (2014-2024)
Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page
Lecture : L'échelle de gauche est relative à l'évolution du nombre d'avocats aux Conseils et l'échelle de droite à celle du nombre d'offices.
Source : Ordre des avocats aux Conseils, traitement par l'Autorité de la concurrence
64. En 2023, les avocats aux Conseils exercent au sein de 71 offices, dont 43 SCP, 13 entreprises individuelles, 12 SARL (dont 2 EURL) et 3 SAS. A ce titre, tous les offices sont pourvus, à ce jour. La part des offices individuels est passée de 36 % en 2017 à 45 % en 2023, notamment en raison des offices nouvellement créés. La part des offices comptant 3 ou 4 associés a également augmenté (de 20 % à 25 %), tandis que, comme relevé dans le précédent avis de l'Autorité (57), celle des offices comprenant 2 associés a baissé (de 44 % à 30 %).
b) Un nombre toujours faible de candidats potentiels à l'installation
65. L'Autorité a, dans ses précédents avis, relevé le faible nombre de candidats en capacité de candidater dans un office créé, sur la base du nombre de personnes titulaires du CAPAC n'exerçant pas la profession à titre libéral et donc susceptibles de souhaiter s'installer dans un office créé. Elle avait estimé que ce vivier pouvait être compris entre une dizaine et une quinzaine de personnes pour la période 2023-2025, composé de la façon suivante :
- six personnes qui, en décembre 2022, étaient titulaires du CAPAC mais n'exerçaient pas à titre libéral (58) ; et
- les futurs titulaires du CAPAC, potentiellement une dizaine d'ici à 2025 selon les estimations de l'Autorité.
66. L'Autorité avait également anticipé qu'une partie de ce vivier pourrait être mobilisée pour compenser les départs en retraite.
67. Dans les faits, parmi les six professionnels déjà titulaires du CAPAC en décembre 2022, cinq exercent désormais en tant qu'avocats aux Conseils, trois à titre libéral dans des offices existants (59) et deux en tant que salariés (60).
68. S'agissant des nouveaux titulaires du CAPAC, trois personnes ont été diplômées en fin d'année 2022, cinq en 2023 et sept en 2024.
69. Parmi ces quinze nouveaux diplômés, sept exercent à titre libéral (un dans un office nouvellement créé et six en tant qu'associés ou titulaires d'offices individuels) et trois en tant que salariés.
70. Au total, le nombre de titulaires du CAPAC n'exerçant pas encore la profession s'élève, sans considération d'éventuels projets d'association ou de reprise, à six. Le nombre d'avocats aux Conseils salariés, qui pourraient changer de voie et décider d'exercer à titre libéral, s'élève à cinq. Compte tenu de ses considérations, le vivier potentiel serait donc d'un peu moins d'une douzaine de candidats en 2025.
c) Le renouvellement des professionnels en place
71. Au 15 septembre 2024, 62 % des avocats aux Conseils libéraux avaient plus de 50 ans et 21 % avaient plus de 65 ans. Parmi ces derniers, sont recensés 12 avocats aux Conseils de plus de 70 ans, ce qui représente environ 10 % du total des professionnels. Ces statistiques s'inscrivent dans un contexte légal et réglementaire n'imposant aucune limite d'âge pour exercer la profession. Par ailleurs, selon l'Ordre, la moyenne d'âge de départ à la retraite s'établirait à 69 ans.
Figure n° 2. - Répartition par âge des avocats aux Conseils libéraux (hors salariés) au mois de septembre 2024
Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page
Source : Ordre des avocats aux Conseils, traitement par l'Autorité de la concurrence
72. Depuis le mois de février 2022, cinq avocats aux Conseils ont pris la décision de partir à la retraite. La moyenne d'âge des avocats aux Conseils, s'établissant à 55 ans, reste cependant toujours élevée comparativement aux notaires et aux commissaires de justice dont l'âge moyen est respectivement de 42 ans et 50 ans (61).
73. Ainsi, dans les années à venir, ces constats (moyenne d'âge et âge moyen de départ à la retraite) amènent à considérer que le vivier de candidats précédemment identifié pourrait être mobilisé pour compenser les départs en retraite, plutôt que pour accroître l'offre de service.
74. A cet égard, le président de l'Ordre a fait état d'un fort dynamisme des retraits et des nominations au sein des offices existants ces dernières années. Ainsi, comme mentionné précédemment (62), depuis le mois de février 2022, il y a eu cinq départs en retraite, et il y aurait actuellement six projets de départs à brève échéance et quatre autres à moyenne échéance, avec perspective d'association ou de reprise de charge (63).
75. Dès lors, si l'année 2024 a connu un nombre record de diplômés, le vivier de candidats potentiels à l'installation pourrait, comme en 2023, s'avérer plus réduit en raison des opportunités actuelles de reprise ou d'association dans des offices existants.
76. En effet, alors que l'Autorité avait recommandé la création de deux nouveaux offices en 2023, seule une candidature a été transmise dans le délai imparti de deux mois, ne donnant lieu à la création que d'un seul office (64).
77. Si le manque de candidatures à l'installation s'explique en partie par une conjoncture favorisant davantage l'association ou la reprise d'offices existants, il ressort de l'instruction que le renouvellement de la profession est également rendu difficile par de nombreux freins à l'accès au diplôme et à l'exercice la profession (voir paragraphes 201 et suivants).
2. L'évolution de l'activité et du niveau de revenu des professionnels
a) Les résultats financiers par office et par avocat libéral
78. Dans le prolongement de ses analyses antérieures (65), l'Autorité constate, à la lumière des données transmises, la persistance d'une situation économique particulièrement favorable pour les titulaires et associés d'offices d'avocats aux Conseils.
Tableau n° 1. - Evolution de la situation économique de la profession entre 2017 et 2023
Données |
2017 |
2019 (*) |
2021 |
2023 |
Evolution 2021-2023 |
Evolution 2017-2023 |
---|---|---|---|---|---|---|
Nombre d'offices |
64 |
68 |
70 |
71 |
1 % |
11 % |
Nombre de titulaires et associés |
120 |
124 |
126 |
129 |
2 % |
8 % |
Chiffre d'affaires total |
142,1 M€ |
139,4 M€ |
132,8 M€ |
137,2 M€ |
3 % |
- 3 % |
Bénéfice total |
61,5 M€ |
61,4 M€ |
55,3 M€ |
54,8 M€ |
- 1 % |
- 11 % |
Taux de marge |
43 % |
44 % |
42 % |
40 % |
- 4 % |
- 8 % |
Chiffre d'affaires par office |
2,2 M€ |
2,1 M€ |
1,9 M€ |
2 M€ |
3 % |
- 12 % |
Bénéfice par office |
961 k€ |
930 k€ |
790 k€ |
783 k€ |
- 1 % |
- 19 % |
Chiffre d'affaires par avocat libéral |
1,19 M€ |
1,14 M€ |
1,05 M€ |
1,07 M€ |
2 % |
-9 % |
Bénéfice par avocat libéral |
513 k€ |
503 k€ |
439 k€ |
428 k€ |
- 2 % |
- 16 % |
Source : Ordre des avocats aux Conseils, traitement par l'Autorité de la concurrence
(*) En 2019, deux avocats aux Conseils ont été nommés dans des offices créés au mois de décembre. N'ayant pas exercé cette année-là, ils ne sont pas pris en compte dans la détermination du chiffre d'affaires et du bénéfice par office et par avocat libéral.