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L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ci-après « l'ARCEP » ou l'« Autorité »),
Vu la directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 modifiée concernant les règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service ;
Vu le code des postes et des communications électroniques (ci-après « CPCE »), notamment ses articles L. 1, L. 2, L. 2-2 et R. 1-1 ;
Vu le code général des impôts, et notamment le 3° du II de l'article 1635 sexies ;
Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée relative au service public de la poste et à France Télécom, notamment son article 6 ;
Vu la loi n° 95-115 du 4 février 1995 modifiée d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ;
Vu le décret n° 2006-1239 du 11 octobre 2006 relatif à la contribution de La Poste à l'aménagement du territoire ;
Vu le décret n° 2011-849 du 18 juillet 2011 précisant la méthode de calcul du coût net du maillage complémentaire permettant à La Poste d'assurer sa mission d'aménagement du territoire ;
Vu la décision n° 2023-1978 de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en date du 19 septembre 2023 relative à l'évaluation pour l'année 2022 du coût net du maillage complémentaire permettant à La Poste d'assurer sa mission d'aménagement du territoire ;
Vu la consultation publique de l'ARCEP relative aux avantages immatériels dont La Poste est susceptible de bénéficier du fait de son obligation de présence territoriale, menée entre le 12 juin et le 13 juillet 2012, et les réponses reçues à cette occasion ;
Vu la consultation publique de l'ARCEP relative au modèle d'évaluation du coût net de la mission d'aménagement du territoire de La Poste, menée entre le 17 juillet et le 10 septembre 2013, et les réponses reçues à cette occasion ;
Vu la consultation publique de l'ARCEP relative au modèle d'évaluation du coût net de la mission d'aménagement du territoire de La Poste, menée entre le 7 décembre 2020 et le 7 janvier 2021, et la réponse reçue à cette occasion ;
Vu la réponse de La Poste en date du 15 juillet 2024 au questionnaire envoyé par l'ARCEP le 20 juin 2024 ;
Après en avoir délibéré le 24 octobre 2024,
1. Cadre juridique
Le 2° de l'article 2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 indique que compte parmi les missions de service public et d'intérêt général de La Poste « [l]a contribution, par son réseau de points de contact, à l'aménagement et au développement du territoire dans les conditions fixées à l'article 6 […] ».
Le I de l'article 6 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 dispose notamment que « […], La Poste contribue, au moyen de son réseau de points de contact, à l'aménagement et au développement du territoire national, en complément de ses obligations de service universel au titre des articles L. 1 et L. 2 du code des postes et des communications électroniques et dans le respect des principes fixés à l'article 1er de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. / Pour remplir cette mission, La Poste adapte son réseau de points de contact, notamment par la conclusion de partenariats locaux, publics ou privés, en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale. Ce réseau compte au moins 17 000 points de contact répartis sur le territoire français en tenant compte des spécificités de celui-ci, notamment dans les départements et collectivités d'outre-mer. […] / Sauf circonstances exceptionnelles, ces règles [(1)] ne peuvent autoriser que plus de 10 % de la population d'un département se trouve éloignée de plus de cinq kilomètres et de plus de vingt minutes de trajet automobile, dans les conditions de circulation du territoire concerné, des plus proches points de contact de La Poste ».
En application du IV de l'article 6 de la même loi, l'Autorité est chargée « d'évaluer chaque année le coût net du maillage complémentaire permettant d'assurer la mission d'aménagement du territoire confiée à La Poste […]. Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission supérieure du numérique et des postes et publié au plus tard le 31 mars 2010, précise la méthode d'évaluation mise en œuvre ».
L'article 2 du décret n° 2011-849 du 18 juillet 2011 précisant la méthode de calcul du coût net du maillage complémentaire permettant à La Poste d'assurer sa mission d'aménagement du territoire dispose que « [l]e coût net de ce maillage complémentaire est égal au coût évité en son absence, diminué des recettes perdues en son absence ».
L'article 3 du décret n° 2011-849 précité dispose que « les recettes perdues […] sont égales aux recettes imputables au maillage complémentaire, y compris, le cas échéant, les recettes résultant des avantages immatériels dûment constatés, que La Poste en retire, diminuées des recettes qui, en l'absence de ce maillage, se reporteraient dans les points de contact maintenus ».
L'article 4 du décret n° 2011-849 précité dispose que « [p]our le calcul du coût net […], l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes veille à exclure tout double compte avec le calcul des autres missions de service public ».
Par ailleurs, l'article L. 2 du CPCE dispose notamment que « La Poste est le prestataire du service universel postal pour une durée de quinze ans à compter du 1er janvier 2011 ». L'article L. 1 du CPCE précise notamment que le « service universel postal concourt à la cohésion sociale et au développement équilibré du territoire. Il est assuré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale. Il garantit à tous les usagers, de manière permanente et sur l'ensemble du territoire national, des services postaux répondant à des normes de qualité déterminées ».
L'article R. 1-1 du CPCE, pris en application de l'article L. 2 du même code, précise que « les points de contact avec le public donnant accès aux prestations de service universel autres que les envois en nombre et à l'information sur ces prestations doivent permettre qu'au moins 99 % de la population nationale et au moins 95 % de la population de chaque département soit à moins de 10 kilomètres d'un point de contact et que toutes les communes de plus de 10 000 habitants disposent d'au moins un point de contact par tranche de 20 000 habitants ».
Le déploiement du maillage complémentaire permettant à La Poste d'assurer sa mission d'aménagement du territoire induit pour celle-ci un coût supplémentaire, au financement duquel contribuent des abattements de fiscalité locale fixés chaque année par décret, après l'évaluation de l'ARCEP.
Le 3° du II de l'article 1635 sexies du code général des impôts relatif aux « impositions directes locales perçues au profit des collectivités territoriales et des établissements et organismes divers » dispose que « [l]es bases d'imposition de La Poste font l'objet d'un abattement égal à 85 % de leur montant, en raison des contraintes de desserte de l'ensemble du territoire national et de participation à l'aménagement du territoire qui s'imposent à cet exploitant. L'abattement ne donne pas lieu à compensation par l'Etat. Chaque année le taux des abattements prévus au premier alinéa du présent 3° est fixé par décret, dans la limite de 99 %, de manière à ce que le produit de ces abattements contribue au financement du coût du maillage territorial complémentaire de La Poste tel qu'il est évalué par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, conformément au IV de l'article 6 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom ».
En application de l'article précité, l'évaluation de l'ARCEP du coût net du maillage complémentaire intervient dans le calcul des abattements pour l'exercice 2023.
Ces abattements alimentent le fonds postal national de péréquation territoriale qui est constitué, conformément au II de l'article 6 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, « dans les conditions fixées par un contrat pluriannuel de la présence postale territoriale passée entre l'Etat, La Poste et l'association nationale la plus représentative des maires […] ».
2. Modèle d'évaluation utilisé par l'ARCEP
Conformément à la méthode précisée par le décret n° 2011-849, le coût net du maillage complémentaire est égal aux coûts évités en son absence (coûts associés au réseau complémentaire moins coûts liés au report de l'activité) diminués des recettes perdues en son absence (recettes associées au réseau complémentaire moins recettes liées au report de l'activité).
Pour réaliser cette évaluation, l'ARCEP s'est dotée d'une modélisation technico-économique du réseau de points de contact de La Poste, qu'elle a mise en consultation publique du 17 juillet au 10 septembre 2013. Cette consultation présentait les fonctions de coûts utilisées ainsi que la méthode d'évaluation des avantages immatériels que retire La Poste de sa mission d'aménagement du territoire.
Depuis l'évaluation de l'exercice 2020, la méthode de sélection des points de contact du réseau accessible sur laquelle s'appuie le calcul du coût net de la mission d'aménagement du territoire a été actualisée. La méthode utilisée pour l'exercice 2023 est celle présentée lors de la consultation publique menée du 7 décembre 2020 au 7 janvier 2021. Elle permet d'atteindre l'ensemble des objectifs d'accessibilité définis par le cadre légal (2) en s'appuyant sur des critères démographiques et géographiques reflétant plus précisément la réalité des territoires.
3. Evaluation
3.1. Identification des périmètres
Pour son évaluation, l'Autorité s'est attachée à prendre en compte le réseau pertinent au sens de l'obligation d'aménagement du territoire. Ce réseau de référence comprend 16 985 points au 30 juin 2023 (3).
Le nombre de points relevant de l'obligation d'accessibilité dans le réseau de référence s'élève à 6 689 points. Le réseau complémentaire s'obtient par différence entre le réseau de référence et le réseau accessible. Il comporte donc 10 296 points de contact.
3.2. Evaluation du coût évité
En l'absence d'enregistrement des charges au niveau de chaque point de contact, le coût des différents réseaux est établi à partir de la modélisation technico-économique du réseau présentée dans la consultation publique menée entre le 17 juillet et le 10 septembre 2013 et s'appuyant sur des fonctions de coûts. Ces fonctions sont étalonnées sur le périmètre comptable correspondant à l'ensemble du réseau déployé (4), à l'exception de deux corrections apportées par l'ARCEP (5).
3.3. Evaluation des recettes perdues
Les travaux effectués jusqu'alors par l'ARCEP sur la fonction de demande ne conduisent pas à remettre en cause les hypothèses de demande (notamment l'absence de perte d'activité) présentées dans la consultation publique relative au modèle d'évaluation, sur lesquelles se sont fondées les évaluations du coût net depuis 2010.
3.4. Evaluation des avantages immatériels
L'Autorité a mené en 2013 des travaux sur la valeur publicitaire du logo de La Poste, présentés dans la consultation publique relative au modèle d'évaluation (6). Compte tenu des réponses à cette consultation, l'ARCEP avait retenu dans l'évaluation du coût net 2012 l'avantage procuré par la valeur publicitaire de l'affichage du logo sur les points de contact relevant du maillage complémentaire. Cet avantage est retenu pour l'évaluation du coût net 2023. Les travaux sur les avantages immatériels réalisés par l'ARCEP en 2022 ont permis d'actualiser l'un des paramètres utilisés.
3.5. Bilan de l'évaluation
Pour l'exercice 2023, les coûts pertinents du réseau de référence s'établissent à [SDA] millions d'euros.
Le passage au réseau hypothétique dans la modélisation s'accompagne d'un report intégral de l'activité. Ce report représente en 2023 14,6 % de l'activité totale.
Le coût du réseau de points de contact dans le scénario hypothétique s'obtient en ajoutant aux coûts actuels du réseau accessible, évalués à [SDA] millions d'euros, les coûts résultant du report sur ce réseau de l'activité du maillage complémentaire, évalués à [SDA] millions d'euros, ce qui conduit à un coût de [SDA] millions d'euros au total. La différence entre le coût du réseau hypothétique et celui de référence constitue le coût évité, soit 324 millions d'euros pour 2023.
L'avantage immatériel procuré par l'affichage du logo de La Poste sur les points du maillage complémentaire est par ailleurs évalué à 2 millions d'euros en 2023.
Ainsi, le coût net pour l'année 2023 est évalué à 322 millions d'euros.
3.6. Absence de double compte
Outre sa mission d'aménagement du territoire, La Poste est investie de trois autres missions de service public : (i) service universel, (ii) transport et distribution de la presse et (iii) accessibilité bancaire.
L'article L. 2-2 du CPCE modifié par la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021, a confié à l'ARCEP la mission d'évaluation du coût net du service universel postal. Le périmètre sur lequel le coût net des obligations de service universel est évalué par l'ARCEP diffère par construction de celui utilisé pour l'aménagement du territoire :
- en ce qui concerne l'obligation d'accessibilité des points de contact, la modélisation du réseau dit « commercial » (qui, en l'absence de toute contrainte de dimensionnement, maximiserait la marge de chaque métier de La Poste au sein du réseau), du réseau accessible (répondant à l'obligation d'accessibilité du service universel) et du réseau actuel (répondant à la mission d'aménagement du territoire) permet par différence d'évaluer de façon séparée le coût net des deux missions ;
- en ce qui concerne les obligations afférentes à la distribution, les périmètres comptables concernés sont disjoints.
De même, le périmètre sur lequel est évalué le coût de la mission de transport et de la distribution de la presse est distinct de celui du réseau de points de contact.
Enfin, les coûts liés à l'accessibilité bancaire font partie des coûts de La Banque Postale dont certains entrent dans le périmètre de coûts du réseau de points de contact. Toutefois, la modélisation mise en œuvre par La Poste veille à évaluer ces coûts sur la partie « commerciale » du réseau de référence. Elle se situe donc en dehors du périmètre de l'aménagement du territoire.
Au regard de ces éléments, l'ARCEP considère qu'il n'y a pas de double compte entre le calcul du coût net de la mission d'aménagement du territoire et celui des autres missions de service public.
Décide :