1. CADRE JURIDIQUE APPLICABLE AUX SERVICES NUMÉRIQUES MULTIMODAUX
1. L'article 28 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (2) a inséré dans le code des transports une nouvelle section intitulée « Services d'information et de billettique multimodales », constituée notamment des articles L. 1115-10 à L. 1115-12 relatifs aux « services numériques multimodaux ». Les conditions d'application de ces articles ont été codifiées aux articles R. 1115-12 à R. 1115-17 du code des transports.
1.1. Le cadre juridique résultant des articles L. 1115-10 à L. 111-512 du code des transports
1.1.1. La notion de service numérique multimodal
2. Aux termes du I de l'article L. 1115-10 du code des transports, « [u]n service numérique multimodal est un service numérique qui permet la vente de services de mobilité, de stationnement ou de services fournis par une centrale de réservation ».
3. Un service numérique multimodal peut effectuer deux types de prestations :
- assurer « [l]a délivrance des produits tarifaires (3) » des services de mobilité, de stationnement ou de services fournis par une centrale de réservation (ci-après, ensemble, les « services de mobilité »), « en appliquant leurs conditions d'utilisation, de tarification et de réservation » (1° du I de l'article L. 1115-10 précité) ;
- assurer, « [s]ous réserve de l'accord de l'autorité organisatrice compétente ou du fournisseur du service, la revente desdits services au prix qu'il fixe ainsi que la vente de ses propres produits tarifaires » (2° du I de l'article L. 1115-10 précité).
4. Un service numérique multimodal peut notamment être fourni par les autorités organisatrices de la mobilité (ci-après « AOM ») (article L. 1115-12 du code des transports).
1.1.2. Le droit des fournisseurs de services numériques multimodaux de délivrer les produits tarifaires de certains services de mobilité et l'obligation des gestionnaires de ces services de fournir un accès à leur(s) service(s) numérique(s) de vente
5. Aux termes du I de l'article L. 1115-11 du code des transports, le fournisseur d'un service numérique multimodal peut, de droit, effectuer la délivrance des produits tarifaires de certains services de mobilité, énumérés limitativement aux points 1° à 6°.
6. Sont notamment visés au point 1° les services réguliers de transport public de personnes (4), les services à la demande de transport public de personnes, les services relatifs aux mobilités actives, les services relatifs aux usages partagés de véhicules terrestres à moteur et les services de stationnement que les AOM (5), les collectivités territoriales et leurs groupements organisent (6).
7. Pour pouvoir délivrer aux usagers des produits tarifaires afférents à des services de mobilité, les fournisseurs de services numériques multimodaux doivent, en pratique, accéder aux services numériques de vente de leurs gestionnaires.
8. Le droit de délivrance dont disposent les fournisseurs de services numériques multimodaux se traduit ainsi, corrélativement, par l'obligation imposée aux gestionnaires des services de mobilité de mettre à leur disposition « une interface permettant l'accès de l'usager à leur service numérique de vente » (II de l'article L. 1115-11) (7).
9. Cette obligation s'impose aux gestionnaires de services de mobilité lorsqu'ils remplissent les deux conditions cumulatives suivantes :
- d'une part, ils disposent d'ores et déjà d'un service numérique de vente (II de l'article L. 1115-11) (8) ;
- d'autre part, le chiffre d'affaires et la durée d'existence de la société gestionnaire ou, le cas échéant, de la société qui en assure le contrôle au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, sont respectivement supérieurs à 5 000 000 d'euros et à trois ans (III de l'article L. 1115-11 et article R. 1115-12 du code des transports).
1.1.3. Les obligations incombant aux services numériques multimodaux
10. Le II de l'article L. 1115-10 du code des transports prévoit qu'un service numérique multimodal est tenu de respecter trois types d'obligations.
a) Obligations relatives à la sélection des services de mobilité dont un service numérique multimodal assure la vente :
11. D'une part, lorsqu'un service numérique multimodal propose la vente d'un service de mobilité organisé par une AOM, une collectivité territoriale ou leurs groupements, il doit proposer la vente de l'ensemble des services de mobilité, pour chacune des catégories de services dont il assure la vente, que l'autorité compétente organise ou au développement desquels elle contribue (1° du II de l'article L. 1115-10 précité).
12. Ces catégories de services sont celles visées au point 1° du I de l'article L. 1115-11 du code des transports et mentionnées au point 6 de la présente décision.
13. D'autre part, sur le territoire qu'il couvre, pour chacune des catégories de services dont il assure la vente, le service numérique multimodal doit sélectionner de façon non discriminatoire les services de mobilité suivants (2° du II de l'article L. 1115-10 précité) :
(i) les services de transport ferroviaire librement organisés, les services de transport public routier réguliers interurbains librement organisés, ainsi que les services de transport maritime réguliers privés pour la desserte des îles françaises faisant l'objet d'obligations de service public, lorsque le point d'origine et la destination finale sont situés dans le ressort territorial d'une région ou distants de moins de cent kilomètres et situés dans le ressort territorial de deux régions limitrophes ;
(ii) les services de partage de véhicules, cycles et engins permettant le déplacement de personnes, autres que ceux organisés par les AOM, les collectivités territoriales et leurs groupements (c'est-à-dire ceux relevant de l'initiative privée), lorsque le véhicule, le cycle ou l'engin n'est pas fourni par une personne physique.
b) Obligations relatives à la relation avec les gestionnaires des services de mobilité dont il assure la vente :
14. D'une part, le fournisseur de service numérique multimodal a l'obligation de transmettre aux gestionnaires des services de mobilité dont il assure la vente et, le cas échéant, à la collectivité territoriale compétente, les données nécessaires (i) à la connaissance statistique des déplacements effectués, (ii) au service après-vente des produits tarifaires vendus et (iii) à la lutte contre la fraude, y compris les données d'identification du client collectées par le service numérique multimodal (3° du II de l'article L. 1115-10 précité) (9).
15. D'autre part, il doit établir un plan de gestion des informations confidentielles concernant les services dont il assure la vente (4° du II de l'article L. 1115-10 précité). Ce plan garantit que le fournisseur d'un service concurrent ne peut avoir connaissance des informations protégées par le secret des affaires.
16. Enfin, lorsqu'il perçoit le produit des ventes, le service numérique multimodal doit justifier auprès du gestionnaire des services de mobilité dont il assure la vente d'une garantie financière (IV de l'article L. 1115-10 et article R. 1115-13 du code des transports).
c) Obligations relatives à la relation avec les usagers :
17. D'une part, le fournisseur de service numérique multimodal doit mettre en place un processus d'achat assurant l'information sur les services de mobilité dont il assure la vente ainsi que la simplicité d'utilisation et la qualité du service numérique multimodal pour l'usager (5° du II de l'article L. 1115-10 précité).
18. D'autre part, les solutions de déplacement proposées en réponse à la requête de l'usager doivent être présentées de manière claire et insusceptible de l'induire en erreur. Les critères utilisés pour la sélection et le classement de ces solutions, y compris les critères directement ou indirectement liés au profil de l'usager, doivent être explicites et aisément identifiables par l'usager. Ces critères doivent être appliqués de façon non discriminatoire à tous les services dont le service numérique multimodal assure la vente (6° du II de l'article L. 1115-10 précité).
1.1.4. Le contrat conclu entre le fournisseur du service numérique multimodal et les gestionnaires des services de mobilité dont il assure la vente
19. Aux termes du III de l'article L. 1115-10 du code des transports, « (…), la vente des produits tarifaires des services (…) est effectuée selon des modalités techniques et financières définies par un contrat conclu entre le fournisseur du service numérique multimodal et le gestionnaire de chacun des services. Ses conditions sont raisonnables, équitables, transparentes et proportionnées ».
20. Ce contrat doit notamment traiter du plan de gestion des informations couvertes par le secret des affaires mentionné au 4° du II de l'article L. 1115-10 précité, ainsi que des modalités de présentation de la marque du gestionnaire de services par le service numérique multimodal (III de l'article L. 1115-10 du code des transports). Dans le cadre de ce contrat, le gestionnaire des services de mobilité peut demander au fournisseur du service numérique multimodal une compensation financière, raisonnable et proportionnée, des dépenses encourues pour la fourniture d'une interface permettant l'accès de l'usager à son service numérique de vente (II de l'article L. 1115-11 du code des transports).
1.2. Le pouvoir de règlement de différend de l'Autorité
21. L'article L. 1263-5 du code des transports dispose notamment que :
« Les autorités organisatrices de la mobilité, les collectivités territoriales et leurs groupements, les gestionnaires des services de mobilité et de stationnement, les centrales de réservation au sens de l'article L. 3142-1, les services de mise en relation facilitant la pratique du covoiturage et les fournisseurs de services numériques multimodaux mentionnés aux articles L. 1115-10 à L. 1115-12 peuvent saisir l'Autorité de régulation des transports d'un différend portant sur la mise en œuvre des mêmes articles L. 1115-10 à L. 1115-12.
La décision de l'autorité, qui peut être assortie d'astreintes, précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans le délai qu'elle accorde. Lorsque cela est nécessaire, elle fixe, de manière objective, transparente, non discriminatoire et proportionnée, les modalités d'accès aux services de vente ainsi que les obligations applicables au service numérique multimodal. Cette décision est notifiée aux parties et est publiée au Journal officiel, sous réserve des secrets protégés par la loi. (…).
Lorsque le différend concerne une partie au titre des activités qu'elle exerce en tant que cocontractant d'une autorité organisatrice de la mobilité, d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales, cette autorité, cette collectivité ou ce groupement a la qualité de partie devant l'Autorité de régulation des transports (…) ».
2. FAITS ET PROCÉDURE
2.1. Faits
2.1.1. Les parties
a) Myzee Technology :
22. Le 21 février 2024, la société Myzee Technology, société par actions simplifiée au capital de 3 696 euros, a saisi l'Autorité d'une demande de règlement du différend l'opposant à Nantes Métropole et à la SEMITAN concernant la possibilité de distribuer numériquement aux usagers, en tant que « fournisseur de service numérique multimodal », des titres « dématérialisés » des services de transport en commun du réseau Naolib, fondée sur l'article L. 1263-5 du code des transports.
23. Myzee Technology indique dans sa saisine être « née en 2015 de l'ambition de percer dans le monde de la Tech, en produisant des services numériques innovants de pointe, dont la valeur ajoutée est à la fois sociétale et environnementale ».
24. Elle se présente comme étant « au départ une entreprise spécialisée dans le développement de logiciels applicatifs dédiés à l'achat et à la validation de titres de transport sur smartphone » (10). La saisissante indique en outre : « [notre] modèle économique est fondé sur une commission dégressive sur la distribution de titres dématérialisés étant donné que nous ne percevons pas les recettes des ventes réalisées mais que nous agissons comme apporteurs d'affaires » (11).
25. Myzee Technology a développé « Witick », une application mobile gratuite permettant aux usagers d'acheter et de valider des titres de transport dématérialisés à partir de n'importe quel téléphone mobile disposant d'une connexion internet. Cette application permet à ce jour aux usagers d'acheter des titres des réseaux de transport en commun de l'agglomération du Havre (réseau LiA), ainsi que pour les navettes assurant les trajets vers l'île aux Moines (Izenah croisières). Elle a précédemment assuré la distribution des titres des réseaux de transports en commun pour l'agglomération de Brive-la-Gaillarde et pour Bordeaux Métropole.
b) Nantes Métropole :
26. Nantes Métropole est, en vertu de l'article L. 1231-1 du code des transports, une autorité organisatrice de la mobilité dans son ressort territorial.
27. Aux termes de l'article L. 1231-1-1 dudit code, elle est ainsi compétente pour organiser notamment des services réguliers de transport public de personnes, plus communément désignés par les termes de transports en commun (notamment les services de bus pour les lignes urbaines, d'autocars pour les lignes interurbaines, de tramways et de trolleys, de navettes fluviales et maritimes, de bacs).
28. Par un contrat conclu le 13 décembre 2018, Nantes Métropole a confié la gestion déléguée et l'exploitation des services de transports publics urbains de l'ensemble du réseau de Nantes Métropole à la SEMITAN.
c) La SEMITAN :
29. La SEMITAN est une société d'économie mixte dont l'objet est l'exploitation de services collectifs de transport public, et dont Nantes Métropole est l'un des actionnaires.
30. Les missions dévolues à la SEMITAN au titre du contrat susmentionné incluent notamment la commercialisation des titres de transport.
2.1.2. Les faits à l'origine du litige
31. Par un courrier adressé par lettre recommandée avec accusé de réception à Nantes Métropole en date du 19 octobre 2023, dont l'objet était intitulé « Demande d'établissement d'un contrat de distribution des titres de transports en commun de Nantes Métropole dans le cadre de la Loi d'Orientation des Mobilités », Myzee Technology a exprimé son souhait de « distribuer les titres de transports en commun dématérialisés sur le périmètre de [cette] autorité organisatrice des mobilités, en tant que fournisseur de service numérique multimodal au sens du 1° de l'article L. 1115-10-I du code des transports ».
32. Elle a indiqué se tenir à la disposition de Nantes Métropole « pour poursuivre toutes les démarches nécessaires à l'établissement du contrat type [qu'elle a] choisi de mettre en place pour les demandeurs étant dans les mêmes dispositions que [Myzee Technology] (entreprise privée éditrice de logiciels dont le modèle économique est fondé sur une commission dégressive sur la distribution de titres dématérialisés étant donné [qu'elle ne perçoit] pas les recettes des ventes réalisées mais [qu'elle agit] comme apporteur[s] d'affaires) ».
33. Nantes Métropole n'a pas répondu à ce courrier.
34. Par un courrier adressé par lettre recommandée avec accusé de réception à la SEMITAN en date du 27 novembre 2023, dont l'objet était intitulé « Demande d'établissement d'un contrat de distribution des titres de transports en commun de la TAN dans le cadre de la Loi d'Orientation des Mobilités », Myzee Technology a également exprimé son souhait d'« effectuer la délivrance des titres de transports en commun dématérialisés sur le périmètre de Nantes Métropole, en tant que fournisseur de service numérique multimodal au sens du 1° de l'article L. 1115-10-I du code des transports ».
35. Elle a ajouté : « Nous vous demandons par la présente de bien vouloir nous fournir un contrat dont les conditions techniques et financières soient raisonnables, équitables, transparentes et proportionnées, dans le respect de l'Article L. 1115-10.-III. du Code des transports. // Sur le plan technique, nous sommes prêts à intégrer la solution technique que vous nous indiquerez (NFC, QR Code, Bluetooth, etc.). // Sur le plan financier, bien qu'ayant un modèle économique fondé sur la commission (comme des dépositaires classiques), nous restons ouverts à d'autres propositions rémunératrices. // Nous nous tenons à votre disposition pour échanger sur notre demande de rentrer en négociation contractuelle dès à présent pour pouvoir signer un contrat respectant pleinement l'esprit de la Loi d'Orientation des Mobilités dès que possible ».
36. La SEMITAN n'a pas répondu à ce courrier.
2.2. Procédure
2.2.1. La saisine de l'Autorité
37. Au terme des échanges rappelés ci-dessus, le 21 février 2024, la saisissante a saisi l'Autorité, sur le fondement de l'article L. 1263-5 du code des transports, d'une demande en règlement de différend.
38. Dans sa saisine, la saisissante a demandé à l'Autorité de « prendre toutes les mesures nécessaires pour :
- statuer sur l'éligibilité de MYZEE TECHNOLOGY en tant que S.N.M. au sens de l'article L. 1115-10-I 1° du Code des transports ;
- contraindre la NANTES MÉTROPOLE à reconnaître le statut de S.N.M. accordé à MYZEE TECHNOLOGY au sens de l'article L. 1115-10-I 1°du Code des transports ;
- contraindre la SEMITAN à reconnaître le statut de S.N.M. accordé à MYZEE TECHNOLOGY au sens de l'article L. 1115-10-I 1°du Code des transports ;
- inciter NANTES METROPOLE et/ou la SEMITAN à finaliser et conclure un contrat avec MYZEE TECHNOLOGY sur le modèle proposé en annexe 7, en :
- fixant un délai de signature dudit contrat ;
- fixant un calendrier d'exécution tel que prévu dans l‘annexe 1 dudit contrat ;
- assortissant les obligations de la décision à intervenir d'une astreinte à déterminer à compter d'un délai de deux (2) mois passée la notification de la décision de l'Autorité de régulation des transports. »
2.2.2. L'instruction
39. Par courrier en date du 12 mars 2024, l'Autorité a informé la saisissante de la désignation du rapporteur en charge de l'instruction de sa demande et du calendrier prévisionnel fixant les dates limites de réception de ses écritures et de clôture de l'instruction.
40. Par courrier daté du même jour, l'Autorité a transmis la demande de la saisissante à Nantes Métropole et la SEMITAN.
41. Par courriel du service de la procédure de l'Autorité du 19 mars 2024, le rapporteur a adressé une première mesure d'instruction à la saisissante, à laquelle celle-ci a répondu le 2 avril 2024.
42. Cette réponse a été communiquée par l'Autorité à Nantes Métropole et à la SEMITAN le 23 avril 2024.
43. Par courriel du service de la procédure de l'Autorité du 19 mars 2024, le rapporteur a adressé une première mesure d'instruction à Nantes Métropole, à laquelle celle-ci a répondu le 5 avril 2024.
44. Cette réponse a été communiquée par l'Autorité à la saisissante le 17 avril 2024 et à la SEMITAN le 23 avril 2024.
45. Par courriel du service de la procédure de l'Autorité du 19 mars 2024, le rapporteur a adressé une première mesure d'instruction à la SEMITAN, à laquelle celle-ci a répondu le 5 avril 2024.
46. Cette réponse a été communiquée par l'Autorité à la saisissante le 17 avril 2024 et à Nantes Métropole le 23 avril 2024.
47. Par courriel du 11 avril 2024, Nantes Métropole a transmis à l'Autorité ses observations en réponse n° 1 à la demande formulée par la saisissante.
48. Ces observations en réponse ont été communiquées par l'Autorité à la saisissante le 17 avril 2024 et à la SEMITAN le 23 avril 2024.
49. Par courriel du 12 avril 2024, la SEMITAN a transmis à l'Autorité ses observations en réponse n° 1 à la demande formulée par la saisissante.
50. Ces observations en réponse ont été communiquées par l'Autorité à la saisissante le 17 avril 2024 et à Nantes Métropole le 23 avril 2024.
51. Par courriel du 13 mai 2024, la saisissante a transmis à l'Autorité ses observations en réplique n° 1, par lesquelles celle-ci entendait faire part de ses remarques sur les observations en réponse n° 1 de Nantes Métropole et à la SEMITAN.
52. Ces observations en réplique n° 1 ont été communiquées par l'Autorité à Nantes Métropole et à la SEMITAN le 17 mai 2024.
53. Par courriel du 12 juin 2024, Nantes Métropole et la SEMITAN ont transmis à l'Autorité leurs observations conjointes en réponse n° 2 à la demande formulée par la saisissante.
54. Ces observations en réponse ont été communiquées par l'Autorité à la saisissante le 26 juin 2024.
55. Par courriel du service de la procédure du 3 septembre 2024, les parties ont reçu leur convocation à la séance publique devant le collège de l'Autorité du 12 septembre 2024.
56. En application des dispositions de l'article 31 du règlement intérieur de l'Autorité, l'instruction a été close cinq jours ouvrés avant la date de cette séance.
57. Par courriel du 6 septembre 2024, la saisissante a formulé une demande de communication du sens des conclusions du rapporteur.
58. Par courriel du service de la procédure de l'Autorité du 10 septembre 2024, le rapporteur a adressé le sens de ses conclusions à la saisissante, à Nantes Métropole et à la SEMITAN.
59. Par courriel du 17 septembre 2024, Nantes Métropole et la SEMITAN ont transmis conjointement à l'Autorité une note en délibéré.
3. SUR LA RECEVABILITÉ DE LA SAISINE DE MYZEE TECHNOLOGY
60. La compétence de l'Autorité dans le cas d'espèce est fondée sur l'article L. 1263-5 du code des transports. Celui-ci dispose que l'Autorité de régulation des transports peut être saisie :
- par une AOM, une collectivité territoriale ou l'un de leurs groupements, un gestionnaire de services de mobilité et de stationnement, une centrale de réservation au sens de l'article L. 3142-1 du code des transports, un service de mise en relation facilitant la pratique du covoiturage ou un « fournisseur de service numérique multimodal » ;
- d'un « différend portant sur la mise en œuvre des (…) articles L. 1115-10 à L. 1115-12 ».
61. Myzee Technology estime qu'un différend est caractérisé, en l'espèce, dès lors que Nantes Métropole et la SEMITAN ont « refusé » d'accéder à ses demandes visant à établir un contrat de distribution de titres de transports en commun sur le réseau Naolib, qu'elle entendait conclure en qualité de fournisseur de service numérique multimodal au sens du 1° du I de l'article L. 1115-10 du code des transports (12).
62. Les éléments suivants ressortent des pièces du dossier.
63. En premier lieu, dans les deux courriers cités aux points 31 et 34 de la présente décision, datés respectivement du 19 octobre 2023 et du 27 novembre 2023, Myzee Technology :
- a indiqué à Nantes Métropole et à la SEMITAN qu'elle souhaitait « distribuer » ou « effectuer la délivrance » des titres de transport en commun dématérialisés sur le périmètre du réseau Naolib, « en tant que fournisseur de service numérique multimodal au sens du 1° de l'article L. 1115-10-I du code des transports » ; et
- leur a demandé d'établir « un contrat de distribution des titres de transport en commun [pour ce réseau] dans le cadre de la loi d'orientation des mobilités » et d'engager des discussions avec elles afin de finaliser et de signer ce contrat.
64. Myzee Technology a ainsi demandé, dans ces courriers, de manière explicite et non équivoque, à bénéficier de la mise en œuvre des articles L. 1115-10 et L. 1115-11 du code des transports, en particulier de la possibilité de délivrer, en tant que fournisseur de service numérique multimodal, des produits tarifaires afférents aux services de transport en commun organisés par Nantes Métropole et exploités par la SEMITAN (13) et, en conséquence, de conclure un contrat à cette fin (14).
65. En deuxième lieu, Nantes Métropole et la SEMITAN n'ont pas répondu à ces courriers.
66. En troisième lieu, Myzee Technology a, sur le fondement de l'article L. 1263-5 du code des transports, directement saisi l'Autorité, le 21 février 2024, sans avoir, au préalable, relancé ses interlocuteurs ni fait diligence auprès d'eux d'aucune façon - nouveau courrier, courriel ou appel téléphonique. Ce faisant, elle a d'office interprété le silence de Nantes Métropole et de la SEMITAN à ses premiers courriers comme valant rejet de ses demandes, sans s'être assurée du caractère délibéré de ce silence ou avoir tenté d'obtenir une réponse, même négative, susceptibles de caractériser, dans l'un ou l'autre cas, un désaccord sur le fond dont elle aurait pu déduire l'existence d'un différend de nature à justifier la saisine de l'Autorité.
67. Il résulte de ces éléments - nonobstant les observations par lesquelles Nantes Métropole et la SEMITAN ont précisé, au cours de l'instruction, ne pas vouloir donner une suite favorable aux demandes de Myzee Technology - qu'à la date de la saisine de l'Autorité par celle-ci, le différend n'était pas caractérisé entre les parties.
68. Au regard de ce qui précède, l'Autorité déclare irrecevable la saisine de Myzee Technology, en ce qu'elle méconnaît l'exigence posée à l'article L. 1263-5 du code des transports.
Décide :