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Article AUTONOME (Décision n° 2024-653 du 3 juillet 2024 relative à la procédure de sanction engagée à l'encontre de la Société d'exploitation d'un service d'information (S.E.S.I.) le 10 avril 2024)

Article AUTONOME (Décision n° 2024-653 du 3 juillet 2024 relative à la procédure de sanction engagée à l'encontre de la Société d'exploitation d'un service d'information (S.E.S.I.) le 10 avril 2024)


Lors de la séance du 26 juin 2024, l'Autorité a entendu le rapporteur ainsi que M. Serge Nedjar, directeur général de CNews, M. Gérald-Brice Viret, directeur général de Canal + France en charge des antennes et des programmes, M. Thomas Bauder, directeur de la rédaction de CNews, Mme Laetitia Ménasé, secrétaire générale du groupe Canal +, M. Christophe Roy, directeur des affaires réglementaires et concurrence du groupe Canal + et Me Augustin de La Hosseraye.
Considérant ce qui suit :
Sur le cadre juridique :
1. En premier lieu, aux termes de l'article 42-1 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée : « Si la personne faisant l'objet de la mise en demeure ne se conforme pas à celle-ci, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut prononcer à son encontre, compte tenu de la gravité du manquement, et à la condition que celui-ci repose sur des faits distincts ou couvre une période distincte de ceux ayant déjà fait l'objet d'une mise en demeure, une des sanctions suivantes : […] 3° Une sanction pécuniaire assortie éventuellement d'une suspension de l'édition ou de la distribution du ou des services ou d'une partie du programme […] ». Aux termes de l'article 42-2 de cette loi : « Le montant de la sanction pécuniaire doit être fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages tirés du manquement, sans pouvoir excéder 3 % du chiffre d'affaires hors taxes, réalisé au cours du dernier exercice clos calculé sur une période de douze mois. Ce maximum est porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. ». Par ailleurs, aux termes de l'article 4-2-2 de la convention susvisée conclue entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel et la Société d'exploitation d'un service d'information (S.E.S.I.), le 27 novembre 2019 : « Si l'éditeur ne se conforme pas à une mise en demeure, [l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique] peut, dans les conditions prévues à l'article 42-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, prononcer contre l'éditeur une des sanctions suivantes : / 1° une sanction pécuniaire dans les conditions prévues à l'article 42-2 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée […] ». L'article 4-2-4 de la même convention prévoit que : « Les pénalités contractuelles mentionnées aux articles 4-2-2 et 4-2-3 sont prononcées par [l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique] dans le respect des garanties fixées par les articles 42 et suivants de la loi du 30 septembre 1986 modifiée. »
2. En deuxième lieu, aux termes de l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique s'assure « que les programmes mis à la disposition du public par un service de communication audiovisuelle ne contiennent : 1° Ni incitation à la haine ou à la violence fondée sur l'un des motifs visés à l'article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ou à raison de l'identité de genre […] ». En outre, l'article 2-3-2 de la convention susvisée stipule que : « L'éditeur veille dans son programme […] à ne pas encourager des comportements discriminatoires en raison de la race ou de l'origine […], de la religion ou de la nationalité ». Enfin, l'article 2-2-1 de cette même convention stipule que : « L'éditeur est responsable du contenu des émissions qu'il diffuse. Il conserve en toutes circonstances la maîtrise de son antenne. »
3. En troisième lieu, par une décision du 27 novembre 2019, la Société d'exploitation d'un service d'information (S.E.S.I.) a été mise en demeure de se conformer pour l'avenir, d'une part, au dernier alinéa de l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986, dans sa version alors applicable, repris aux sixième et septième alinéas de l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, ainsi qu'au quatrième alinéa de l'article 2-3-3 de sa convention du 19 juillet 2005, repris à l'article 2-3-2 de la convention du 27 novembre 2019 précitée et, d'autre part, à l'article 2-2-1 de cette même convention, repris à l'article 2-2-1 de la convention du 27 novembre 2019 précitée.
4. En quatrième lieu, par une décision du 17 mars 2021, la Société d'exploitation d'un service d'information (S.E.S.I.) a été sanctionnée en raison de manquements aux obligations qui pèsent sur elle en vertu des mêmes textes.
Sur l'émission « L'Heure des Pros 2 » diffusée le 15 novembre 2023 :
5. Il ressort du compte rendu de visionnage de l'émission « L'Heure des Pros 2 » diffusée le 15 novembre 2023 qu'a été évoqué le conflit israélo-palestinien. Au cours de ce programme, le responsable d'un mouvement politique a tenu des propos affirmant l'existence d'un conflit de civilisations dans le monde et sur le sol français, causé par la « civilisation arabo-musulmane » ou « islamique », assimilant Islam et islamisme, affirmant l'incompatibilité totale de l'Islam avec la République, présentant l'Islam comme la matrice de l'antisémitisme et de l'homophobie, et dénonçant les dangers présentés par le « peuple musulman » ou « islamo-gauchiste » issu de l'immigration. Ces propos ont fait l'objet d'une contradiction appuyée, émanant aussi bien du présentateur de l'émission que du reste des invités, qui ont notamment incité leur auteur à les tempérer.
6. Ainsi, sans préjudice de l'éventuelle qualification pénale des propos tenus par l'invité et des suites judiciaires susceptibles d'être engagées, l'éditeur a, compte tenu tant de la composition du plateau, qui visait à permettre l'expression d'une contradiction, que des interventions de l'animateur et de l'un de ses invités, maîtrisé son antenne. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer une sanction à l'encontre de la Société d'exploitation d'un service d'information (S.E.S.I.).
Après en avoir délibéré,
Décide :