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Article AUTONOME (Délibération n° 2024-22 du 30 janvier 2024 portant décision sur le tarif d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel de GRTgaz et Teréga)

Article AUTONOME (Délibération n° 2024-22 du 30 janvier 2024 portant décision sur le tarif d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel de GRTgaz et Teréga)


La trajectoire retenue par la CRE donne notamment les moyens à Teréga :


- de maintenir une politique de rémunération alignée avec les pratiques historiques constatées et tenant compte des effets des données récentes ;
- de disposer des effectifs nécessaires à la réalisation de ses missions, y compris en ce qui concerne la cybersécurité, la gestion de projets, l'intégration du biométhane et les affaires institutionnelles ;
- de mettre en œuvre son programme de maintenance et ainsi opérer son réseau dans des conditions de sécurité optimales, avec un budget en ligne avec les dépenses réalisées inflatées ;
- de maintenir à niveau son système d'information, en retenant l'essentiel des dépenses demandées par l'opérateur ;
- de mener des travaux de R&D portant sur la surveillance et l'intégrité du réseau, les outils de cybersécurité, la sécurité des agents, ainsi que l'impact des gaz verts (y compris l'hydrogène en mélange) sur l'intégrité du réseau, avec une trajectoire en hausse d'environ 25 % par rapport au réalisé inflaté ;
- d'étudier la possibilité de convertir une partie de ses actifs à l'hydrogène ou au CO2 (1,9 M€ sur la période).


Le tarif ATRT8 prévoit par ailleurs une clause de rendez-vous permettant d'intégrer les charges liées à la mise en œuvre du règlement européen visant à réduire les émissions de méthane (voir partie 2.3.2).
Ainsi, la trajectoire fixée par la CRE prévoit une hausse de + 6 % des charges nettes d'exploitation de Teréga entre 2022 et 2024 (+ 8 % hors « achats système »). Les charges nettes d'exploitation augmentent ensuite de + 2 % par an en moyenne sur la période 2024-2027 (+ 1 %/an hors « achats système »).



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3.1.4. Calcul des charges de capital normatives
3.1.4.1. Coût moyen pondéré du capital
3.1.4.1.1. Demande des opérateurs
3.1.4.1.1.1. GRTgaz


La demande tarifaire de GRTgaz a été établie en utilisant un coût moyen pondéré du capital (CMPC) de 4,65 % (réel, avant impôts) en hausse par rapport à celui du tarif ATRT7 (4,25 %). Cette demande s'appuie sur les conclusions d'une étude commandée par les opérateurs d'infrastructures régulées de gaz naturel du groupe Engie auprès d'un consultant externe.
Dans son dossier tarifaire, GRTgaz utilise par ailleurs le taux de 2,8 % (nominal, avant impôts) pour la rémunération des IEC.


3.1.4.1.1.2. Teréga


La demande tarifaire de Teréga a été établie en utilisant un CMPC de 4,70 % (réel, avant impôts), supérieur à celui du tarif ATRT7 (4,25 %). Cette demande s'appuie sur les conclusions d'une étude commandée par Teréga à un consultant externe.
Dans son dossier tarifaire, Teréga utilise par ailleurs un taux de 2,9 % (nominal, avant impôts) pour la rémunération des IEC.


3.1.4.1.2. Synthèse des résultats de l'audit externe de la CRE


Dans le cadre des travaux de préparation du tarif ATRT8, la CRE a réexaminé les hypothèses et les paramètres retenus pour le calcul du taux de rémunération des opérateurs. Dans cet objectif, elle a demandé à la société Compass Lexecon de réaliser un audit et une analyse des demandes de rémunération des deux GRT, des opérateurs de stockage et de GRDF sur la base des conclusions de leurs conseils. Le rapport du consultant a été publié en même temps que la consultation publique du 23 juillet 2023 sur le site de la CRE.
Après audit de la demande des opérateurs, l'auditeur a recommandé plusieurs fourchettes de CMPC en fonction des actifs auxquels elles s'appliquent. Pour les actifs historiques, l'auditeur a recommandé une fourchette de CMPC, nominal avant impôts, comprise entre 3,72 % et 4,14 % soit une fourchette de CMPC réel avant impôt comprise entre 2,51 % et 2,93 %. Pour les nouveaux actifs, l'auditeur a recommandé une fourchette de CMPC, nominal avant impôts, comprise entre 5,69 % et 6,21 % soit une fourchette de CMPC réel avant impôt comprise entre 2,74 % et 4,23 %.


3.1.4.1.3. Analyse de la CRE


La méthode de détermination par la CRE du coût moyen pondéré du capital est fondée sur un CMPC à structure normative assurant une rémunération appropriée des capitaux investis. Jusqu'à présent, elle s'appuyait sur la moyenne des taux observée sur les dix dernières années, reflétant la durée de vie longue des infrastructures de réseau de gaz. Cette méthode, qui a très peu évolué depuis trois périodes tarifaires, a permis de maintenir l'attractivité des infrastructures d'énergie en France, tout en prenant en compte la tendance d'évolution des taux, observée à la baisse depuis 10 ans.
Après cette longue période de baisse, les taux d'intérêt sont repartis rapidement à la hausse depuis environ un an. Face à cette situation nouvelle, la CRE fait évoluer la méthode de calcul du CMPC pour prendre mieux en compte la dynamique de court terme des taux d'intérêt.
Dans la consultation publique de juillet 2023, la CRE a indiqué qu'elle envisageait un CMPC dans une fourchette comprise entre 2,9 % et 4,2 % (réel avant impôts), sur la base d'une pondération d'un taux de long terme selon la méthode utilisée pour l'ATRT7, et d'un taux de court terme fondé sur l'analyse de paramètres de plus court terme et en retenant une pondération de 80/20 respectivement entre les deux termes. Cette fourchette était en baisse par rapport au CMPC du tarif ATRT7 (4,25 %). En taux nominal avant impôts, la fourchette ressortait à 4,4 % - 5,5 %.
Dans ce cadre et en tenant compte des retours à la consultation publique (voir partie 2.2.2.3), la CRE décide pour la période tarifaire ATRT8 de faire évoluer la méthode de calcul du coût moyen pondéré du capital en pondérant deux taux :


- un taux déterminé selon la méthode utilisée pour l'ATRT7 et les tarifs précédents, fondée sur l'analyse de paramètres de long terme, qui s'établit à 3,7 % réel, avant impôts (soit 4,9 % nominal avant impôts, dont est retraitée l'inflation moyenne de 1,2 % constatée ces dix dernières années) ;
- un taux fondé sur la prise en compte de données économiques plus récentes qui s'établit à 5,5 % réel, avant impôts (soit 7,6 % en nominal avant impôts, dont est retraitée l'inflation prévisionnelle moyenne de 2,0 % sur la période tarifaire ATRT8).


La pondération retenue par la CRE repose sur une répartition normative de la part respective des nouveaux actifs et des anciens actifs, évaluée au cours de la période tarifaire à venir pour un opérateur gazier, et s'établit pour la période tarifaire considérée à 80 % pour le taux basé sur des données de long terme, et 20 % pour le taux basé sur des données plus récentes.
Pour rappel, le CMPC est calculé par application des formules suivantes :


CMPC nominal avant IS = [(TSR + spread de dette) × (1 - déductibilité des charges financières × IS) / (1 - IS)] × g + (TSR + β × PRM) / (1 - IS) × (1 - g)
CMPC réel avant IS = (1 + CMPC nominal avant IS) / (1 + inflation) - 1


Pour le tarif ATRT8, la CRE retient la valeur de 4,1 % (réel, avant impôts) comme CMPC pour rémunérer les actifs dits « historiques » de la BAR des GRT de gaz. Pour les actifs dits « nouveaux actifs », la CRE retient un CMPC de 5,4 % (nominal, avant impôts). Les valeurs arrondies retenues par la CRE pour chacun des paramètres figurent dans le tableau ci-dessous :


Paramètres du CMPC ATRT8 (valeurs arrondies)

Données
de long terme

Données
de court terme

Valeur pondérée
(80 % - 20 %)

Taux sans risque nominal (TSR)

1,3 %

3,8 %

1,8 %

Spread de dette

1,1 %

0,5 %

1,0 %

Bêta de l'actif

0,47

Bêta des fonds propres (β)

0,82

Prime de risque de marché (PRM)

5,2 %

Levier (dette/(dette+fonds propres)) (g)

50 %

Taux d'impôts sur les sociétés (IS)

25,83 %

Coût de la dette (nominal, avant IS)

2,4 %

4,3 %

2,8 %

Coût des fonds propres (nom., après IS)

5,5 %

8,1 %

6,0 %

CMPC (nominal, avant IS)

4,9 %

7,6 %

5,4 %

Inflation

1,2 %

2,0 %

1,3 %

CMPC (réel, avant IS)

3,7 %

5,5 %

4,1 %


Par rapport aux valeurs prises en compte pour définir le CMPC du tarif ATRT7, les principales modifications, en cohérence avec l'évolution des données macro-économiques et financières, portent notamment sur l'évolution du taux sans risque, du bêta des actifs et de la fiscalité.
Le taux sans risque s'établit à 1,8 % et est déterminé sur l'observation des rendements des obligations de l'Etat français (« OAT »), considérées comme les placements les moins risqués. Ce taux est déterminé comme la pondération entre la moyenne sur 10 ans de l'OAT de maturité 15 ans et la moyenne des quatre taux à terme implicites des années 2024 à 2027 d'une OAT de maturité 15 ans. La pondération retenue est de 80/20 pour la période tarifaire considérée comme exposé ci-dessus. Pour la détermination du taux sans risque, la CRE a retenu l'observation des rendements des OAT non plus d'une maturité de 10 ans comme cela était le cas jusqu'à présent, mais d'une maturité de 15 ans.
Le spread de dette s'établit à 1,0 % et est déterminé sur l'observation des rendements obligataires moyens iBoxx EUR NF 10+ BBB' ; pour les données de long terme sur une moyenne sur 10 ans et pour les données de court terme sur une moyenne de 1 an. La pondération retenue entre ces deux valeurs est également de 80/20 pour la période tarifaire considérée comme exposé ci-dessus.
Par rapport à la période tarifaire précédente, le bêta de l'actif est abaissé de 0,50 à 0,47. La CRE appuie sa décision sur les observations de marché et les bêtas de l'activité des opérateurs gaziers en Europe. Cette baisse est également justifiée par le niveau de protection apporté par le cadre de régulation du tarif ATRT8, qui protège davantage les opérateurs notamment contre les variations des prix de l'énergie. Par ailleurs, le cadre de régulation a montré sa forte résilience pendant les crises successives du Covid et de l'énergie. Dans l'ensemble, la CRE considère que le cadre de régulation est cohérent avec une baisse mesurée du bêta de l'actif à 0,47. En effet, les risques sur l'avenir des infrastructures gazières persistent, ce qui justifie de retenir un bêta plus élevé que celui des réseaux d'électricité.
La CRE prend également en compte la baisse de taux normal d'imposition sur les sociétés à 25,0 %, combinée à la contribution sociale correspondant à 3,3 % du montant de l'IS, soit un taux d'imposition de 25,83 %.
Conformément à ce qui est exposé au paragraphe 2.2.2.4 les immobilisations en cours (IEC) sont rémunérées au coût de la dette nominal avant impôt, soit 2,8 % dans le cadre du tarif ATRT8.


3.1.4.2. Investissements
3.1.4.2.1. GRTgaz


La trajectoire des dépenses d'investissements prévue par GRTgaz sur la période ATRT8 est en légère hausse en euros courants, avec des dépenses moyennes d'environ 460 M€ par an sur cette période, alors qu'elles étaient de 419 M€ par an au cours de la période ATRT7.
En particulier, GRTgaz prévoit :


- une hausse des dépenses liées aux raccordements et prestations pour tiers (+ 142 M€ sur la période, soit + 50 %), majoritairement liée à l'accélération du nombre de rebours réalisés (+ 112 M€ sur la période) ;
- une hausse des dépenses liées à l'obsolescence (+ 67 M€ sur la période, soit + 22 %). Cela comprend le projet de rénovation de la station de compression de la Bégude à partir de 2025 pour 78 M€, ainsi que 43 M€ de provisions sur la période, correspondant à des projets non identifiés à ce stade ;
- une hausse des dépenses de sécurité (+36 M€ sur la période soit + 10 %), de celles liées à l'environnement (+ 21 M€ sur la période soit + 33 %, en raison des programmes de réduction des émissions de méthane et de traitement de la présence d'amiante sur ses installations), et de celles liées aux véhicules et à l'immobilier (+ 22 M€ sur la période, soit + 22 %, notamment afin de prendre en compte les obligations liées au décret tertiaire) ;
- une baisse des dépenses de continuité d'acheminement et qualité gaz (- 102 M€, soit - 38 %), en raison de la fin de grands projets, comme le renforcement du réseau en Bretagne ;
- une baisse des dépenses liées au système d'information (- 31 M€, soit - 11 %), avec la fin de certains grands projets de refonte du SI métier, mais une hausse des dépenses liées à la cybersécurité (+ 40 M€ sur la période).


Analyse de la CRE
Le principal poste en forte hausse est celui des dépenses liées au biométhane, en augmentation de 50 % par rapport à l'ATRT7. Le reste des dépenses suit une trajectoire stable et correspond à un cycle d'investissement sans renforcement majeur ou développement important du réseau.
Conformément au dispositif de régulation incitative des dépenses d'investissements (cf. paragraphe 2.4.3), certains projets pourront faire l'objet d'audits pour définir un budget-cible. C'est le cas notamment d'au moins trois projets (phase 2 du programme Telester, renouvellement de la station de compression la Bégude, liaison Gournay-Cuvilly), dont les budgets estimés sont supérieurs à 20 M€ par GRTgaz et qui sont éligibles au dispositif de régulation incitative des grands projets.
Les dépenses hors réseaux sont stables par rapport à la période précédente et représentent 91 M€ par an en moyenne, soit 20 % des dépenses sur la période. Elles sont éligibles à la régulation incitative des investissements hors-infrastructures (cf. paragraphe 2.4.3.3).
La CRE n'apporte pas de modification à la trajectoire d'investissements prévue par GRTgaz. Elle considère cependant que dans le contexte de la baisse structurelle de la consommation de gaz et du risque de hausse du coût unitaire d'acheminement associé, les dépenses d'investissement des opérateurs doivent être maitrisées au mieux. La CRE veillera au respect de la maîtrise de ces dépenses lors de l'approbation annuelle des investissements des GRT, prévue par les dispositions des articles L. 134-3 et L. 431-6 du code de l'énergie.
En conséquence, la CRE retient la trajectoire de dépenses d'investissements demandée par GRTgaz pour la période tarifaire ATRT8 :


En M€ courants

2024

2025

2026

2027

Moyenne
annuelle
ATRT8

Moyenne
annuelle
ATRT7 (*)

Continuité d'acheminement et qualité gaz

47,9

39,5

38,2

37,4

40,7

66,2

Développement du réseau principal

8,9

7,1

20,8

4,0

10,2

8,3

Raccordements, extensions, prestation pour tiers

79,3

91,6

119,2

136,9

106,8

71,3

Environnement

23,5

20,7

21,2

19,1

21,1

15,9

Sécurité

107,2

93,9

94,1

94,0

97,3

88,4

Obsolescence

78,2

86,0

101,4

104,2

92,5

75,6

SI

62,0

56,0

56,0

56,0

57,5

69,0

Hors réseau hors SI

40,8

35,2

28,6

28,8

33,3

24,2

TOTAL

447,9

430,1

479,5

480,4

459,5

418,9


(*) Moyenne des programmes d'investissements réalisés 2020, 2021, 2022 et estimé 2023.