1.1.5. Les facteurs d'évolutions
Les forêts sont partie intégrante des grands enjeux contemporains portés au niveau mondial, européen et national. Différents facteurs (écologiques, humains, technologiques) impactent sur son devenir.
Changement climatique
30 % de la forêt française est menacée ou fragilisée par le changement climatique. Les épisodes de chaleur et de sécheresse extrêmes ont généré un affaiblissement des arbres, plus de 300 000 hectares dépérissent (21). Ces phénomènes qui ont sévi, particulièrement, dans les années 2018 à 2020 ont entrainé un affaiblissement des massifs surtout dans le Nord et l'Est de la France. La sécheresse a, par ailleurs, rendu les arbres plus vulnérables aux agents pathogènes et aux ravageurs (scolytes notamment). L'IGN constate une accélération de l'augmentation des arbres morts : plus 30 % du stock d'arbres morts sur pied de moins de cinq ans en 2018 et 2019.
Sous l'effet du changement climatique les risques d'incendie et de propagation du feu s'intensifient, 72 000 hectares de forêts ont brûlé en 2022. La surface et l'intensité du feu varient avec le manque d'eau, la sécheresse des végétaux, les températures hautes, le bas niveau d'humidité et le vent ; de ce fait la majorité des surfaces détruites par les feux de forêt sont localisées dans le grand Sud. Toutefois, à l'heure actuelle le risque incendie s'étend partout en France (y compris plus au nord et vers l'ouest). La répartition géographique des feux de l'été 2022 confirme cet état de fait (90 départements ont été concernés par un évènement significatif en 2022).
L'augmentation de la température génère un allongement de la saison de végétation intensifiant ainsi les besoins en eau donc le stress hydrique notamment pour les espèces méridionales.
La rapidité du réchauffement actuel du climat ne permet pas la migration géographique naturelle des essences qui s'inscrit dans un temps long. L'ensemble de ces événements climatiques peuvent avoir un effet sur le prix du bois.
Les plans nationaux, les programmes de recherche et développement (génétique, écosystèmes, rôle de l'eau…) et le transfert des connaissances vers l'enseignement et les acteurs de la gestion forestière visent à préserver et développer la forêt dans le cadre de ce changement.
Gestion forestière durable
La gestion durable des forêts, nécessaire, est assurée par la mise en œuvre de plans et de règlements spécifiques. Toutefois, une démarche volontaire aux systèmes de certification est possible. En 2021, alors que la surface certifiée PEFC stagne, celle certifiée FSC gagne 27 % par rapport à 2020 (22). Selon les données de ces marques et pour l'année 2023, 101 271 hectares de forêts sont certifiés FSC en France métropolitaine et 5 659 917 ha pour PEFC. Pour cette dernière, on note 1 143 exploitants forestiers et entrepreneurs de travaux forestiers possédant une certification individuelle ou de groupe (23). Un référentiel d'engagement des entreprises de travaux forestiers « ETF Gestion durable de la forêt » peut-être aussi délivré par QualiTerritoires au travers duquel l'entreprise s'engage à respecter les conditions d'exécution des travaux conformément aux règles de gestion durable de la forêt telles que retenues par PEFC France. L'ONF a rédigé deux cahiers nationaux des prescriptions qui s'impose à tous intervenants en forêts publiques : le Cahier national des prescriptions d'exploitation forestière (CNPEF) et le Cahier national des prescriptions des travaux et services forestiers (CNPTSF). Reconnus par PEFC France, ces cahiers prennent en compte les évolutions réglementaires et la politique environnementale de l'ONF.
Au travers de leur politique RSE, les entreprises prennent aussi en compte les enjeux environnementaux, sociaux, économiques et éthiques dans leurs activités.
Des chaînes de contrôle des approvisionnements ont été instaurées dans un nombre important d'entreprises de la filière bois.
La part de bois mis en marchés issus de forêts certifiées a fortement augmenté. En 2002 elle représentait 2 % du volume total de bois commercialisé pour atteindre 55 % à partir de 2016. Ce pourcentage se répartissait en 2021 de la façon suivante : 54 % du bois d'œuvre, 60 % du bois d'industrie et 49 % du bois de feu (24).
Résistances sociales et récolte de bois
La forêt est l'objet d'une demande sociale croissante, les attentes des citoyens sont diverses : lieu de préservation de la biodiversité, paysage de qualité, espace de loisirs, source de richesse économique et de création d'emplois sur le territoire, source d'approvisionnement en bois-énergie et en matériaux biosourcés, fourniture de services écosystémiques.
L'articulation de ces différents usages repose, dans les faits, sur les acteurs économiques de la filière.
La multifonctionnalité de la forêt est aujourd'hui remise en cause dans le débat public par certains acteurs qui priorisent les fonctions environnementales et récréatives de la forêt. En effet, les forêts catalysent des enjeux et intérêts souvent divergents, pour lesquels il est délicat de « construire du commun ». La conciliation entre l'exploitation économique et le besoin d'une forêt d'agrément préservant la biodiversité est complexe en ce sens qu'elle engendre une mise en dialogue de différents modèles de pensée.
De plus, malgré les efforts déployés par les professionnels, les activités d'abattage, de débardage et de stockage du bois ont nécessairement des conséquences visibles qui sont mal acceptées par la population.
La mise en place de PRFB tenant compte des spécificités et enjeux de chaque territoire vise à garantir la multifonctionnalité des forêts (actions de sensibilisation des citoyens, projets territoriaux de développement durable participatifs notamment…).
Nouvelles technologies
L'informatique embarquée et le GPS contribuent à l'augmentation de la productivité pour la plupart des engins forestiers. La télédétection se positionne aussi comme une solution pour identifier les gisements potentiels mais des améliorations sont attendues en matière de caractérisation de l'accessibilité des bois, et de connaissance du réseau de desserte, pour optimiser l'approvisionnement des entreprises.
Au niveau de l'abattage manuel, le bûcheron utilise le GPS pour se situer, localiser le chantier de manière courante. Les autres évolutions concernent les machines manuelles qui gagnent en légèreté réduisant ainsi la pénibilité du travail et les equipements de protection individuels (EPI) qui sont plus résistants mais aussi mieux adaptés à l'activité du bûcheron.
La filière forêts-bois, au cours des prochaines décennies, sera donc amenée à contribuer à la création d'emplois de qualité, à l'atténuation du changement climatique par la mobilisation du bois, à la préservation de la biodiversité dans son activité, à la transition énergétique et à l'aménagement du territoire.
(21) Article : Forêts françaises : quel avenir face au changement climatique ? - Site https://www.vie-publique.fr.
(22) Agreste GRAPH'AGRI 2022.
(23) Statistique PEFC France - 31 mars 2023.
(24) Indicateurs - https://foret.ign.fr.