Un nombre toujours élevé de dossiers traités par professionnel
102. Comme les années passées, l'Autorité s'est penchée sur le temps moyen consacré par dossier par chaque avocat aux Conseils libéral (101). Sur la période 2017-2021, le nombre moyen de dossiers traités par an et par associé (375 avec les offices créés depuis 2017 et 400 en les excluant) est proche de celui-ci observé sur la période 2015-2019 (392). Ainsi, en moyenne, un associé traite toujours environ 1,5 dossier par jour ouvré alors que, selon l'Ordre, le temps de traitement d'un dossier serait d'environ deux jours et demi par collaborateur (102).
103. De plus, 10 % des professionnels traitent toujours plus de 800 dossiers par an (103). Comme lors des exercices précédents, l'Autorité relève que l'un d'entre eux traite près de 1 550 dossiers par an, soit près de 6 dossiers par jour ouvré. Il convient de rappeler, à ce titre, que les justifications traditionnellement données au monopole des avocats aux Conseils et la rareté de leurs offices, qui sont à l'origine des niveaux de rémunération très élevés constatés dans cette profession, tiennent d'une part à la nécessité d'une intervention personnelle de ces professionnels dans chaque dossier de cassation en raison de leur haut degré de spécialisation et, d'autre part, à l'obligation de « déconseil » qui s'impose à eux pour éviter, dans un souci de bonne administration de la justice, que les hautes juridictions soient surchargées de pourvois n'ayant aucune chance de prospérer. Qu'un même avocat aux Conseils puisse traiter personnellement autant de dossiers de cassation soulève à tout le moins quelques interrogations. En outre, ce constat indique que les collaborateurs, dont la plupart ne sont pas titulaires du CAPAC, sont à l'origine de l'essentiel du travail réalisé et qu'ils maîtrisent donc les techniques de rédaction devant les cours suprêmes.
Un recours toujours important aux collaborateurs libéraux
104. Pour le traitement des dossiers, les offices d'avocats aux Conseils s'appuient sur des collaborateurs, le plus souvent extérieurs et rémunérés par des rétrocessions d'honoraires variables. On note, en effet, que le nombre d'avocats aux Conseils salariés demeure faible (il n'a pas dépassé 3 depuis la création de ce statut en 2014).
105. Les collaborateurs travaillent fréquemment pour plusieurs offices d'avocats aux Conseils ou bien ont une autre activité professionnelle par ailleurs. Ils sont chargés d'analyser les dossiers et de rédiger les écritures de la partie représentée par l'office, même si seul l'avocat aux Conseils a la capacité juridique de signer et présenter ces mémoires devant la juridiction concernée. L'article 45 du règlement général de déontologie prévoit même que « la mention du nom d'un collaborateur de son cabinet ne peut apparaître dans une pièce de procédure ou une correspondance officielle relevant de l'activité professionnelle de l'avocat aux Conseils ».
106. Comme l'Autorité l'avait constaté dans ses précédents avis, les collaborateurs sont principalement des avocats à la Cour (85 %), des universitaires (7 %) et des juristes (7 %).
107. Pour l'année 2021, les 61 offices ayant transmis leurs données à l'Autorité ont eu recours à 358 équivalents temps plein (ci-après « ETP ») en termes de collaborateurs. Cela représente une moyenne de 6 ETP par office, un niveau assez stable depuis 2017. En excluant les offices créés, qui ont très peu recours aux collaborateurs, à ce stade de leur développement, la moyenne passe à 7 ETP par office. En outre, il existe une grande disparité entre les structures : le nombre d'ETP varie de 0 à 24, avec un niveau médian de 3,5 collaborateurs par office.
108. Il y a 38 offices pour lesquels les données sont disponibles et qui ont eu recours à des collaborateurs sur la période 2019-2021. Ces données indiquent qu'ils y ont un peu moins fait appel dans le contexte de la crise sanitaire : le nombre d'ETP a baissé de 7 % en 2020 et augmenté de 2 % en 2021. De plus, les rétrocessions d'honoraires et le chiffre d'affaires de ces offices ont varié dans les mêmes proportions en 2020 et 2021 (une baisse d'environ 10 %, suivie d'une hausse du même ordre), de sorte que les rétrocessions d'honoraires ont représenté 23 % de leur chiffre d'affaires sur l'ensemble de la période 2019-2021. Au contraire, le rapport entre la masse salariale et le chiffre d'affaires a légèrement augmenté sur la période, passant de 19 % à 21 %.
109. En conséquence, la liberté tarifaire permet, dans une certaine mesure, de lisser les revenus en fonction du flux d'affaires, tandis que le recours à des collaborateurs extérieurs rémunérés au dossier, c'est-à-dire par des rétrocessions d'honoraires variables (104) plutôt que par un salaire fixe, confère une grande flexibilité aux offices, notamment en cas de diminution du volume de contentieux. Ce constat avait déjà été fait dans les précédents avis de l'Autorité (105).
c) La situation des offices créés depuis 2017
110. L'analyse qui suit concerne les offices pour lesquels l'Autorité dispose d'au moins une année complète d'exercice, soit les 8 offices créés en 2017 et 2019. A l'exception de deux offices qui ont deux, voire trois associés, ils sont composés d'un avocat aux Conseils unique.
111. Depuis leur création, ces offices ont eu peu recours aux collaborateurs (moins d'un ETP par office), mais une majorité d'entre eux déclare des rétrocessions d'honoraires qui représentent entre 7 % et 10 % de leur chiffre d'affaires. De plus, seuls deux offices (un office créé en 2017 et un en 2019) ont déclaré avoir recours à des salariés non collaborateurs sur la période de 2017 à 2021. La masse salariale correspondante ne dépasse pas 3 % de leur chiffre d'affaires.
112. En 2021, les offices récemment créés ont traité une moyenne de 93 dossiers par avocat libéral (contre 400 pour les offices pré-existants), ce qui correspondrait à la période de deux jours et demi consacrée à chaque dossier, évoquée plus haut. La répartition de leurs dossiers entre les différentes juridictions est similaire au reste de la profession, même s'ils semblent traiter proportionnellement plus de dossiers en matière pénale (15 % en 2021 contre 9 % pour l'ensemble de la profession).
113. Dans les huit offices créés, le chiffre d'affaires moyen par avocat libéral était de 208 428 euros en 2021 (contre plus d'un million d'euros pour l'ensemble de la profession), mais sa progression est remarquable (+ 38 % sur 2019-2021).
114. De plus, en 2021, le taux de marge des deux vagues d'offices créés dépasse celui de l'ensemble de la profession de plus de 10 points de pourcentage. Cela peut s'expliquer par une structure de coûts plus légère que les offices « historiques », avec notamment un moindre recours aux collaborateurs et des charges fixes moins élevées.
Figure 7. - Evolution du taux de marge entre 2017 et 2021
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Source : Ordre des avocats aux Conseils, traitement par l'Autorité de la concurrence.