Après en avoir délibéré le 22 novembre 2022,
1. Contexte de la saisine
L'article L. 36-5 du CPCE prévoit que l'ARCEP est consultée sur les projets de loi, de décret ou de règlement relatifs au secteur des communications électroniques, et participe à leur mise en œuvre.
Par courrier en date du 26 janvier 2022, le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale a sollicité l'avis de l'ARCEP sur les dispositions d'un projet de décret portant application du II de l'article L. 33-3-1 du CPCE. Cette saisine a donné lieu à l'avis de l'ARCEP n° 2022-0520 en date du 10 mars 2022 susvisé.
Par un nouveau courrier enregistré le 31 octobre 2022, le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale a saisi l'ARCEP pour avis sur un nouveau projet de décret portant application du II de l'article L. 33-3-1 du code des postes et des communications électroniques et relatif au brouillage des aéronefs circulant sans personne à bord représentant une menace.
L'analyse de l'ARCEP sur les dispositions qui lui ont été soumises se concentre exclusivement sur ce qui pourrait avoir un impact, d'une part, sur le bon fonctionnement des réseaux et des services de communications électroniques et sur les acteurs qu'elle régule et, d'autre part, sur la sécurité juridique dont doivent bénéficier les opérateurs dans la mise en œuvre des dispositifs envisagés.
L'article 24 de la loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021 relative à la prévention d'actes de terrorisme et au renseignement a complété le II de l'article L. 33-3-1 du CPCE pour prévoir que « L'utilisation par les services de l'Etat de dispositifs destinés à rendre inopérant l'équipement radioélectrique d'un aéronef circulant sans personne à bord est autorisée, en cas de menace imminente, pour les besoins de l'ordre public, de la défense et de la sécurité nationales ou du service public de la justice ou afin de prévenir le survol d'une zone en violation d'une interdiction prononcée dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 6211-4 du code des transports. »
Le projet de décret objet du présent avis vise à déterminer « les modalités de mise en œuvre de ces dispositifs, afin de garantir leur nécessité et leur proportionnalité au regard des finalités poursuivies, ainsi que les autorités compétentes pour y procéder. »
2. Observations de l'ARCEP
L'objet principal du projet de texte soumis pour avis est ainsi de définir la mise en place, pour les services de l'Etat concourant à.la sécurité intérieure, à la défense nationale et au service public de la justice, des dispositifs de type brouillages destinés à rendre inopérant l'équipement radioélectrique d'un aéronef circulant sans personne à bord représentant une menace imminente.
Tout d'abord, comme elle l'avait fait dans son avis en date du 10 mars 2022 susvisé, l'ARCEP constate le renforcement du cadre juridique fondant l'utilisation de tels dispositifs. En cela, le présent projet de décret s'inscrit dans la continuité des dispositions de la loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021 relative à la prévention d'actes de terrorisme et au renseignement. A l'avenir, un renforcement identique pourrait être souhaitable s'agissant d'autres techniques de brouillage, à l'image de celles intervenant de façon pérenne dans les établissements pénitenciers.
Le présent projet de décret prévoit ainsi de soumettre le recours aux techniques de brouillage des aéronefs circulant sans personne à bord à une autorisation délivrée à la suite d'une demande préalable précisant notamment les incidences de l'opération de brouillage sur les affectataires, au regard d'une étude d'impact coordonnée par l'Agence nationale des fréquences (ANFR), après consultation des administrations et autorités affectataires de fréquences concernées, la durée de validité de cette dernière ne pouvant excéder trois ans. Aussi, le projet de décret prévoit que la durée ·de validité de l'autorisation ne saurait, excéder la date de fin de validité de l'étude d'impact. Un arrêté du Premier ministre précisera les modalités d'application de ces dispositions.
L'ARCEP relève que les observations soumises dans son avis n° 2022-0520 susvisé ont été prises en compte dans ce nouveau projet de décret en ce qui concerne :
- d'une part, la consultation des différentes administrations et autorités affectataires de fréquences concernées, dans le cadre de l'élaboration de l'étude d'impact menée par l'ANFR ; comme c'est le cas aujourd'hui ; et
- d'autre part, la durée de validité de l'autorisation qui ne saurait excéder la date de fin de validité de l'étude d'impact en tout état de cause.
En outre, l'ARCEP souligne également que ces opérations de brouillage doivent demeurer nécessaires, adaptées et proportionnées au but poursuivi et en particulier au caractère imminent de la menace. A ce titre, l'appréciation du caractère proportionné du brouillage doit nécessairement prendre en compte sa durée, son périmètre géographique, ainsi que son incidence sur les affectataires de fréquences.
Enfin, l'ARCEP invite à ce qu'une attention particulière soit portée à la formation des personnes chargées, dans le cadre de l'autorisation délivrée, de mettre en œuvre ces dispositifs de brouillage.
Le présent avis sera transmis au secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale et sera publié au Journal officiel de la République française.