2.1.3. Analyse du marché de gros des services de diffusion hertzienne terrestre de programmes télévisuels
Dès lors que les chaînes de télévision disposent d'une diversité de moyens de diffusion pour mettre à disposition des ménages français leurs services audiovisuels, le degré de substituabilité entre les offres de gros de diffusion de programmes télévisuels sur différentes technologies (TNT, DSL, câble, fibre optique et satellite) doit être analysé.
Les éléments présentés ci-après montrent qu'à l'horizon de la présente analyse, les autres réseaux de distribution ne peuvent être considérés comme parfaitement substituables à la TNT.
Une place toujours importante de la plateforme TNT dans les foyers français
Comme le relève l'Autorité dans la section précédente, la plateforme TNT conserve une place importante au sein des foyers français. Selon l'observatoire de l'équipement audiovisuel des foyers de France métropolitaine du CSA (60), au deuxième trimestre 2021, parmi les 91,3 % de foyers équipés d'au moins un téléviseur, 46,3 % utilisent la TNT comme moyen de réception sur l'un de leurs postes de télévision (au côté d'autres modes de réception). Elle est par ailleurs le mode de réception unique pour 21,2 % des foyers et le mode de réception sur le téléviseur principal pour 37,4 % des foyers (61) au deuxième trimestre 2021. La TNT, comme le satellite, conserve un avantage sur les plateformes filaires en ce qu'elle est capable de couvrir dès à présent des zones du territoire national pour lesquels le déploiement des réseaux fixes n'est pas achevé et permet encore à une part importante de la population d'accéder aux contenus des éditeurs TNT.
Le niveau de couverture actuelle de la plateforme TNT permet aux chaînes de télévision d'atteindre une audience qu'elles ne pourraient pas couvrir via les plateformes filaires.
Ce niveau de couverture est par ailleurs imposé par les obligations de couverture minimale de la population. L'article 96-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée prévoit que les chaînes de télévision nationales assurent la diffusion de leurs services par voie hertzienne terrestre en mode numérique auprès d'au moins 95 % de la population du territoire métropolitain, selon des modalités établies par le CSA. Il précise par ailleurs que le CSA est compétent pour fixer une couverture minimale de la population de chaque département par voie hertzienne terrestre en mode numérique. L'obligation de couverture départementale imposée par le CSA aux chaînes gratuites dans le cadre du déploiement de la TNT est fixée à 91 % de la population au minimum ; elle est de de 85 % pour les chaînes payantes.
Comme rappelé par certains acteurs dans leurs réponses aux consultations publiques organisées par l'ARCEP sur son document de bilan et perspectives et sur son projet de décision, il est aujourd'hui impossible pour les chaînes de télévision de recourir localement à d'autres plateformes techniques de diffusion pour répondre à cette obligation de couverture. Ainsi, les chaînes de télévision ont pris, auprès du CSA, des engagements de couverture au niveau national qui ne leur permettent pas de quitter partiellement, la plateforme TNT au profit d'une autre plateforme de diffusion en cas d'augmentation des tarifs de diffusion sur la TNT.
Compte tenu de ce qui précède, il paraît difficile, à l'horizon de la présente analyse, que les chaînes de télévision (et par voie de conséquence, leurs groupements que constituent les multiplex) puissent quitter la plateforme TNT au profit d'autres modes de diffusion (comme les réseaux filaires ou le satellite).
Les obligations de reprise des chaînes de la TNT leur assurent une exposition sur les autres plateformes techniques de diffusion
La présence sur la TNT garantit aux chaînes gratuites de la TNT des droits de reprise sur les autres plateformes de diffusion. L'analyse du cadre légal réalisée en section 1.3.2 tend à montrer que, si elles n'étaient pas diffusées sur la TNT, la présence des chaînes sur les autres modes diffusion ne serait pas garantie puisqu'elle dépendrait de l'issue des négociations commerciales menées entre les chaînes de télévision, d'une part, et les FAI et les distributeurs d'offres de télévision par satellite, d'autre part. Dans la mesure où ces acteurs peuvent avoir des intérêts divergents, de telles négociations pourraient s'avérer difficiles. Il peut notamment être relevé que certains FAI et distributeurs satellitaires disposent de liens capitalistiques avec des chaînes de télévision. En outre, à considérer que les chaînes parviennent à obtenir leur diffusion sur ces réseaux alternatifs à la TNT, des incertitudes existent sur ce que pourraient être les tarifs de diffusion.
Au vu de ces éléments, la diffusion par voie hertzienne terrestre ne peut être aujourd'hui considérée comme parfaitement substituable aux autres modes de diffusion de la télévision pour les chaînes de télévision (et donc leurs multiplex).
(60) CSA, Observatoire de l'équipement audiovisuel des foyers de France métropolitaine, résultats des 1er et 2e trimestres 2021 pour la télévision.
(61) L'IPTV étant, ici aussi, la plateforme la plus plébiscitée pour la réception des services audiovisuels sur le poste principal.