ANNEXE
OBSERVATIONS
Demandée le 8 avril 2021 en application du quatrième alinéa de l'article 217 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 par 25 membres du congrès de la Nouvelle-Calédonie, cette troisième consultation a été fixée au dimanche 12 décembre 2021 par le décret n° 2021-866 du 30 juin 2021 portant convocation des électeurs et organisation de la consultation sur l'accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie.
Elle s'est déroulée dans un contexte particulier à plusieurs titres par rapport aux deux précédentes consultations des 4 novembre 2018 et 4 octobre 2020.
D'une part, les circonstances sanitaires ont évolué par rapport à la dernière consultation puisque la Nouvelle-Calédonie, jusqu'à présent exempte de covid-19, a dû faire face à la circulation du virus sur le territoire à compter du début du mois de septembre 2021.
D'autre part, les partis indépendantistes ont demandé au Gouvernement un report de la date de la consultation. Le refus opposé à cette demande a été suivi d'une saisine du juge des référés du Conseil d'Etat sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative tendant au report au 2 octobre 2022 de la troisième consultation. Par son ordonnance n° 459131 du 7 décembre 2021, le juge des référés du Conseil d'Etat a rejeté la demande aux motifs suivants qui répondaient à l'argumentation de la requête :
- « … si la Nouvelle-Calédonie a été confrontée à une flambée épidémique sans précédent au mois de septembre 2021 avec un taux d'incidence atteignant jusqu'à 1 200 contaminations au virus SARS-CoV-2 pour 100 000 habitants, et déplore 279 victimes à ce jour de la covid-19, la situation épidémiologique s'est depuis nettement améliorée… » (étant précisé par la commission de contrôle que le taux d'incidence était au 12 décembre de 45 contaminations pour 100 000 habitants d'après le tableau de bord Covid édicté par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie) ;
- « … les mesures de protection sanitaire encore maintenues ne font pas obstacle au déroulement de la campagne référendaire… » ;
- « … la date du 12 décembre 2021 intervient en période de… deuil d'un an décrété par le sénat coutumier… cette circonstance ne saurait caractériser, par elle-même, une atteinte à une liberté fondamentale de nature à justifier que le juge des référés, saisi sur le fondement du L. 521-1 du code de justice administrative, ordonne le report du scrutin… » ;
- « … si les requérants soutiennent que jusqu'à 2 000 électeurs inscrits sur les listes électorales des communes de Bélèp, de l'île des Pins, de Lifou, de Maré et d'Ouvéa n'auraient pu… s'inscrire dans des bureaux de vote délocalisés à Nouméa ainsi que le permet le décret du 30 mai 2018…, il ne ressort pas de l'instruction que la procédure d'inscription prévue par ce décret aurait été entravée par le contexte sanitaire… »
Par une décision n° 456139 du 10 novembre 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a également rejeté une requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 30 juin 2021 portant convocation des électeurs et organisation de la consultation sur l'accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie.
Enfin, en raison du non-report de la date de consultation les partis et groupements indépendantistes ont pris l'initiative d'appeler les électeurs à ne participer au vote du 12 décembre.
Sur la campagne électorale
Cet appel s'est traduit par la non-participation de ces partis à la campagne officielle, qu'il s'agisse de la diffusion des documents de propagande (affiches et circulaires prévues aux articles R. 27 et R. 29 du code électoral) et de l'utilisation des antennes de la société nationale chargée du service public de la communication audiovisuelle outre-mer prévue au IV de l'article 219 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.
Sur l'exercice par la commission de contrôle de son pouvoir de faire procéder aux rectifications prévues par les articles L. 38 et L. 39 du code électoral en vue d'assurer la régularité de la liste des électeurs admis à participer à la consultation
Le jour du scrutin la commission a examiné la situation de 131 personnes.
Elle a prononcé :
- 13 décisions d'inscription ;
- 88 rejets de demande d'inscription ;
- 22 réorientations d'électeurs vers le bon bureau de vote ;
- 1 décision de changement de bureau de vote ;
- 7 refus de changement de bureau de vote.
Sur la régularité et la sincérité du scrutin
En ce qui concerne le déroulement des opérations électorales
La commission estime que le scrutin s'est, dans l'ensemble, déroulé dans de bonnes conditions matérielles et d'organisation.
La situation générale a été calme. Les cas d'irrégularités susceptibles de perturber le bon déroulement du scrutin ont été très circonscrites dans l'espace et dans le temps et, à l'échelle du territoire, peu nombreuses.
Ainsi, notamment
- L'absence du président de bureau de vote (BV) à l'ouverture a été constatée au BV1 de Bélep et au BV5 de Ponérihouen, mais elle a été rapidement résolue ;
- Il y a eu des retards de l'ouverture de certains bureaux de vote et des assesseurs manquants dans dix-sept bureaux de vote sur trois cent sept, mais ces irrégularités ont pu être corrigées en début de matinée au plus tard : Belep BV 1, Poum BV3, Ouvéa, BV 5, Canala, BV1, Yaté, BV4, Houaïlou, BV3, BV4 et BV 8, Lifou BV9 et BV 19, Pouebo, BV4 et BV5, Mont d'Or - Ile-Ouen, BV7, Ouvéa, BV4, Hienghène, BV4 et BV 10, Mare BV4 ; Nouméa, BV25, Ouegoa : BV4 ;
- Un électeur a voté deux fois (BV 5 et BV 46 à Nouméa) et la vérification de l'identité des électeurs a été aléatoire dans un BV (BV 24 à Dumbéa) ;
Ont également été très circonscrits dans l'espace et dans le temps, et peu nombreux, les troubles à l'ordre public et agissements susceptibles de dissuader des électeurs de se déplacer ou pouvant être regardés comme constitutifs de pressions sur les électeurs, notamment :
- Dans l'Ile des Pins trois barrages routiers ont été formés entre Kuto et Vao qui ont été levés à 9 heures et, à Paita route N'Dé, une chicane a été installée ralentissant la circulation, qui a été levée un peu avant 13 heures ;
- A Nouméa des drapeaux indépendantistes ont été arborés pendant une durée limitée devant le BV 50 et devant un restaurant de l'Anse Vata des drapeaux tricolores ont été brandis par les passagers de deux véhicules circulant dans le centre-ville en fin de matinée puis en début d'après-midi ; un bateau à coque rouge arborant un pavillon indépendantiste a navigué dans la rade ; des banderoles appelant à ne pas voter ont été installées dans l'après-midi devant les BV 28 et 29 de Nouméa et à la Briquetterie au Mont-Dore.
La commission souligne que les troubles et agissements similaires qui avaient marqué le scrutin du 4 octobre 2020, et qu'elle avait constatés dans ses observations publiées au Journal officiel de la République française et au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie, étaient, sans commune mesure, de bien plus grande ampleur.
En ce qui concerne l'abstention
Dans le contexte décrit ci-dessus la commission relève pour ce scrutin du 12 décembre 2012 l'existence d'une forte abstention des électeurs : 56,13 %, contre 14,31 % le 4 octobre 2020 et 18,99 % le 4 novembre 2018.
La commission s'est interrogée sur les conséquences de cette abstention sur la régularité et la sincérité du scrutin.
En premier lieu les règles applicables à ce scrutin ni ne prévoient de vote obligatoire ni ne subordonnent la validité du résultat du scrutin à un seuil de participation minimale.
En deuxième lieu, suivant la jurisprudence la plus récente du Conseil d'Etat un niveau d'abstention élevé est, par lui-même, sans incidence sur la régularité et la sincérité du scrutin en l'absence de circonstances relatives au déroulement de la campagne électorale ou du scrutin qui montreraient, en particulier, qu'il aurait été porté atteinte au libre exercice du droit de vote ou à l'égalité entre les candidats soit, en l'espèce, à l'égalité entre les partis et groupements politiques concernés, c'est-à-dire notamment ceux habilités, à leur demande, à participer à la campagne officielle par la décision de la commission du 19 septembre 2021.
Pour la commission il apparaît qu'aucune des circonstances, agissements, situations et irrégularités relevés dans les présentes observations ou portés à sa connaissance ne permet de caractériser de telles atteintes.
Dans ces conditions, la commission considère que l'abstention constatée n'affecte pas la régularité et la sincérité du scrutin du 12 décembre 2021.
Aussi, sous réserve de l'appréciation souveraine du Conseil d'Etat dans le cas où il serait saisi d'un recours contre les résultats du référendum du 12 décembre 2021, cette consultation est la troisième et dernière des consultations du processus d'autodétermination engagé par l'accord de Nouméa du 5 mai 1998, défini au point 5 du document d'orientation de cet accord, et organisé par les articles 216 et suivants du TITRE IX : LA CONSULTATION SUR L'ACCESSION À LA PLEINE SOUVERAINETÉ de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie en application de l'article 77 de la Constitution.