Après en avoir délibéré le 16 décembre 2020,
1. Contexte
Dans sa décision n° 2020-1446 d'analyse du marché 3a, l'Autorité a considéré qu'Orange exerce une influence significative sur le marché de la fourniture en gros d'accès local en position déterminée. A ce titre, l'Autorité lui a imposé d'offrir « les prestations relatives aux offres de gros d'accès à la boucle locale de cuivre et à la sous-boucle de cuivre, ainsi que les ressources et services associés, à des tarifs reflétant les coûts correspondants, en respectant en particulier les principes et objectifs d'efficacité, de non-discrimination et de concurrence effective et loyale. […] Les modalités de mise en œuvre de cette obligation sont précisées par une décision complémentaire. […] » (1).
L'Autorité y rappelle que : « les coûts pris en compte doivent correspondre à ceux encourus par un opérateur efficace ; à cet égard, les coûts exposés par l'opérateur seront comparés, dans la mesure du possible et au moins sur la base des tarifs correspondants, à ceux d'autres opérateurs fournissant des prestations comparables. Des modélisations peuvent également être développées. » (2)
De même, dans sa décision n° 2020-1447 d'analyse du marché 3b, l'Autorité a considéré qu'Orange exerce une influence significative sur le marché pertinent des offres de gros d'accès central en position déterminée à destination du marché de masse livré au niveau infranational sur l'ensemble du territoire à l'exclusion des zones très denses telles que définies par la décision n° 2009-1106 en date du 22 décembre 2009 (3), modifiée par la décision n° 2013-1475 en date du 10 décembre 2013 (4). A ce titre, l'Autorité lui a imposé d'offrir, « dans la zone correspondant à l'ensemble des NRA où aucun opérateur tiers ne propose ou n'est susceptible de proposer rapidement des offres de gros d'accès central haut et très haut débit de masse, sur DSL sur la base du dégroupage ou sur câble coaxial ou fibre optique dans des conditions équivalentes, livré au niveau infranational », « les prestations de gros d'accès central en position déterminée à destination du marché de masse livré sur DSL au niveau infranational, ainsi que les ressources et services associés, à des tarifs reflétant les coûts correspondants, en respectant en particulier les principes et objectifs d'efficacité, de non-discrimination et de concurrence effective et loyale. Les modalités de mise en œuvre de cette obligation, s'agissant de la composante accès, seront précisées par une décision complémentaire […] » (5).
Lors des deux derniers cycles d'analyse des marchés, et toujours dans le souci de prendre en compte le contexte de transition technologique du réseau de cuivre vers les réseaux à très haut débit ainsi que les investissements importants qui l'accompagnent, l'Autorité a souhaité donner plus de prévisibilité aux opérateurs alternatifs sur l'évolution des tarifs du dégroupage total. Ceux-ci constituent en effet une part importante des coûts que ces opérateurs supportent, de sorte que leur variation peut avoir un impact significatif sur leur budget. En février 2016, l'Autorité a ainsi fixé un plafond tarifaire de l'accès à la boucle locale cuivre pour les deux années 2016 et 2017 (6), puis en décembre 2017, une décision fixant des plafonds pour les principaux tarifs de l'offre de dégroupage pour les trois années 2018 à 2020 (7). Notamment, le tarif récurrent mensuel maximum du dégroupage total a été fixé à 9,31 € pour 2018, 9,41 € pour 2019 et 9,51 € pour 2020, et le tarif récurrent mensuel maximum de l'accès activé sans service de téléphonie commutée monocanal a été fixé à 13,19 € pour 2018, 13,30 € pour 2019 et 13,41 € pour 2020.
Comme indiqué dans les décisions n° 2020-1446 (8) et n° 2020-1447 (9) d'analyse des marchés 3a et 3b, l'Autorité souhaite conserver ce principe d'encadrement tarifaire, sur toute la durée du nouveau cycle (2020-2023), et faire en sorte que les tarifs soient incitatifs à la transition technologique et à l'investissement. Cet objectif, mentionné au 3° du II et au 2° du IV de l'article L. 32-1 du CPCE et rappelé dans la recommandation « non-discrimination et méthodes de coûts » de la Commission européenne (10), revêt toujours une importance particulière dans le contexte de décisions d'investissements importants pour le très haut débit.
L'Autorité rappelle également qu'elle avait étudié, préalablement à la fixation du précédent encadrement tarifaire, la possibilité d'une modulation géographique du dégroupage (11), mais avait estimé « préférable de ne pas mettre en œuvre, à ce stade, une telle évolution de la régulation tarifaire de la boucle locale cuivre ». A la suite des consultations réalisées en 2019 sur le bilan et les perspectives puis en 2020 sur le projet d'analyse du marché 3a, l'Autorité a considéré qu'elle « ne dispose […] pas à ce stade d'éléments permettant de démontrer l'efficacité d'une éventuelle modulation géographique du tarif pour inciter à une migration vers la fibre ou au vidage du réseau cuivre », notant en particulier qu'Orange « n'a à ce stade présenté aucun plan concret de fermeture de son réseau cuivre dans lequel l'efficacité d'une incitation tarifaire sur le prochain cycle pour le vidage du réseau serait identifiée » (12). Néanmoins, l'Autorité se réserve la possibilité de reconsidérer sa position, y compris au cours du cycle d'analyse de marché, si la situation venait à évoluer ou en cas d'obtention de nouveaux éléments à ce sujet.
Dans ce contexte, la présente décision a pour objet de préciser les modalités de mise en œuvre de l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts imposée par les décisions n° 2020-1446 et n° 2020-1447 d'analyse des marché 3a et 3b. Par la présente décision, l'Autorité définit l'encadrement tarifaire pluriannuel sur la période 2021 - 2023 des principaux tarifs du dégroupage (total et partiel) et de la composante accès de l'accès activé (nu et non nu) à la boucle locale à destination du marché de masse sur la zone où Orange est soumis à une orientation vers les coûts, conformément à l'article D. 311 du CPCE, en détaillant la méthode d'appréciation des coûts pertinents retenue.
Conformément au cadre en vigueur, l'Autorité a consulté les acteurs du secteur sur un projet de décision du 11 septembre au 12 octobre 2020.
L'Autorité a ensuite notifié le 6 novembre 2020 à la Commission européenne, à l'ORECE et aux autorités réglementaires nationales des autres États membres les mesures envisagées, conformément à l'article 7 de la directive « cadre ». La Commission européenne a adressé ses observations le 4 décembre 2020.
2. Champ d'application
2.1. Prestations et tarifs visés par l'encadrement tarifaire
La présente décision constitue une modalité de mise en œuvre de l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts, prévue par l'article 44 de la décision n° 2020-1446 d'analyse du marché 3a, pour certaines des prestations relatives à l'accès dégroupé à la boucle locale et à la sous-boucle locale cuivre, et par l'article 28 de la décision n° 2020-1447 d'analyse du marché 3b, pour certaines prestations relatives à l'accès central en position déterminée à destination du marché de masse livré sur DSL au niveau infranational dans la zone définie par ce même article.
Concernant le dégroupage, de la même manière que lors du dernier cycle tarifaire (décision n° 2017-1570), le présent encadrement tarifaire porte sur les principaux tarifs de l'accès total et partagé à la boucle locale cuivre. Ces tarifs sont ceux qui relèvent de l'exploitation directe de la paire de cuivre pour la fourniture de l'accès dégroupé (accès total comme accès partagé), liés à des prestations commandées par l'opérateur à la suite d'un besoin explicite exprimé par l'utilisateur final :
- le tarif récurrent mensuel (13), qui engendre la part la plus importante du chiffre d'affaires lié à l'accès à la boucle locale cuivre ;
- les frais de mise en service (14) (FAS) ;
- les frais de résiliation (15) ;
- le tarif à l'acte de la prestation SAV+ (16).
Les autres services et prestations associés au dégroupage et soumis à l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts prévue par l'article 44 de la décision n° 2020-1446, tels que, par exemple, la fourniture d'informations préalables ou les prestations d'hébergement des équipements des opérateurs au sein des nœuds de raccordement d'abonnés (NRA) d'Orange, ne sont pas visés par l'encadrement tarifaire objet de la présente décision.
S'agissant des offres d'accès activé, de même que pour le précédent encadrement tarifaire (décision n° 2017-1570), le présent encadrement tarifaire porte uniquement sur les principaux tarifs de la composante accès dans la zone correspondant à l'ensemble des NRA où aucun opérateur tiers ne propose ou n'est susceptible de proposer rapidement des offres de gros d'accès central haut et très haut débit de masse, sur DSL sur la base du dégroupage ou sur câble coaxial ou fibre optique dans des conditions équivalentes, livré au niveau infranational. Il ne concerne en revanche pas les composantes de collecte, dont les tarifs continueront à être déterminés annuellement. En effet, comme l'Autorité le rappelle dans la décision d'analyse du marché 3b, l'incertitude sur l'évolution des coûts unitaires de cette composante est trop importante sur les trois prochaines années au regard notamment de l'incertitude sur l'évolution des débits sur cette période.
Ainsi, les tarifs concernés par le présent encadrement tarifaire sont :
- en ce qui concerne l'offre d'accès activé avec service de téléphonie commutée (« DSL Access ») : les frais de mise en service et le tarif récurrent mensuel (différencié pour les profils de lignes « mono VC » et « bi VC ») (17) ;
- en ce qui concerne l'offre d'accès activé sans service de téléphonie commutée (« DSL Access Only ») : les frais de mise en service et le tarif récurrent mensuel (différencié pour les profils de lignes « mono VC » et « bi VC ») (18) ;
- le tarif à l'acte de la prestation SAV+ (19) pour les deux offres ci-dessus (« DSL Access » et « DSL Access Only »).
2.2. Modalités d'application
L'article 37 de la décision n° 2020-1446 d'analyse du marché 3a dispose que « toute évolution décidée par Orange des offres techniques et tarifaires d'accès mentionnées aux articles suivants : Article 33, Article 34, Article 35 et Article 36 de la présente décision fait l'objet d'un préavis de trois mois (ramené à un mois en cas de baisse tarifaire ou en cas d'amélioration des processus opérationnels), sauf décision contraire de l'Autorité […] ».
De même, l'article 21 de la décision n° 2020-1447 d'analyse du marché 3b dispose que « toute évolution de l'offre technique et tarifaire de gros d'accès central en position déterminée à destination du marché de masse sur DSL livré au niveau infranational décidée par Orange fait l'objet d'un préavis de trois mois (ramené à un mois en cas de baisse tarifaire ou d'amélioration des processus opérationnels), sauf décision contraire de l'Autorité […] ».
En application de ces dispositions, et par exception aux préavis qui y sont spécifiés, les tarifs de la société Orange listés en section 2.1 devront respecter les plafonds fixés par la présente décision à compter du 1er janvier 2021.
3. Approche générale
La mise en place d'un encadrement tarifaire pluriannuel comme modalité de mise en œuvre de l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts impose de réaliser une estimation des coûts des prestations concernées pour les années 2021 à 2023.
La transition technologique du réseau cuivre vers les réseaux en fibre optique nécessite de s'interroger sur la méthode de tarification de l'accès à la boucle locale cuivre.
Il convient de rappeler que les dispositions du II de l'article D. 311 du CPCE prévoient que « [p]our la mise en œuvre des obligations prévues au 4° de l'article L. 38, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes précise, en tant que de besoin, les mécanismes de recouvrement des coûts, les méthodes de tarification et les méthodes de comptabilisation des coûts, qui peuvent être distinctes de celles appliquées par l'opérateur.
[…]
L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes veille à ce que les méthodes retenues promeuvent l'efficacité économique, favorisent une concurrence durable et optimisent les avantages pour le consommateur. Afin d'encourager l'opérateur à investir notamment dans les infrastructures de nouvelle génération, elle tient compte des investissements réalisés par l'opérateur et elle veille également à assurer une rémunération raisonnable des capitaux employés, compte tenu du risque spécifiquement lié à un nouveau projet d'investissement particulier ».
La recommandation n° 2013/466/UE de la Commission européenne « non-discrimination et méthodes de coûts » invite quant à elle à prendre en compte « de façon appropriée et cohérente, l'incidence de la baisse des volumes provoquée par la transition des réseaux en cuivre aux réseaux NGA, c'est-à-dire éviter l'augmentation artificielle des tarifs de gros d'accès par le cuivre qui, autrement, serait observée du fait de la migration de la clientèle vers le réseau NGA », afin de « disposer de tarifs de gros d'accès par le cuivre stables et prévisibles sur la durée, qui évitent les fluctuations et chocs trop importants ». Elle préconise, pour la fixation des tarifs d'accès à la boucle locale cuivre, « une méthode de calcul des coûts ascendante LRIC + consistant à estimer le coût courant qu'un opérateur efficace hypothétique encourrait pour construire un réseau moderne efficace ».
A la suite du premier cycle d'analyse des marchés du haut débit et après consultation du secteur, l'Autorité a adopté le 15 décembre 2005 la décision n° 05-0834 définissant la méthode de valorisation des actifs de boucle locale ainsi que la méthode de comptabilisation des coûts applicable au dégroupage total.
En 2011, les prémices de la transition technologique de la boucle locale cuivre vers les boucles locales optiques ont conduit l'Autorité à réexaminer la pertinence de cette méthode, en concertation avec les acteurs du marché. A l'issue de cette démarche, l'Autorité a décidé de conserver cette méthode en en modifiant certains paramètres. Elle a ainsi adopté le 17 janvier 2012 la décision n° 2012-0007 qui porte progressivement la durée d'amortissement des actifs de génie civil en conduite de quarante à cinquante ans et réduit la durée d'amortissement des actifs de câbles en cuivre de vingt-cinq à treize ans.
Si cette méthode a permis d'obtenir, depuis 2005, un signal tarifaire stable et prévisible s'agissant de la tarification du dégroupage, les projections réalisées tant par l'Autorité que par Orange sur la base de cette méthode montrent que cela pourrait ne plus être le cas dans un contexte de transition technologique où le vidage du réseau cuivre vers les réseaux très haut débit s'accélère.
L'Autorité estime dès lors justifié de prendre en compte pour la tarification de l'accès à la boucle locale cuivre la transition technologique du cuivre vers la fibre, ce qui a plusieurs implications :
- les acteurs du marché font face à des décisions d'investissements importants par leur ampleur mais aussi stratégiques parce qu'ils dessinent le marché de gros de l'accès fixe de demain. Pour favoriser ces investissements, il est souhaitable, ainsi que le recommande également la Commission européenne, de fournir aux acteurs, d'une part, de la prévisibilité et, d'autre part, davantage de stabilité sur le niveau tarifaire du dégroupage, qui demeure l'élément le plus structurant du marché actuel de l'accès local en position déterminée. Si le principe même d'un encadrement tarifaire permet de donner de la prévisibilité à court et moyen terme, il importe de maîtriser à plus long terme d'éventuelles variations erratiques du tarif de dégroupage ;
- la boucle locale optique mutualisée, en cours de déploiement en France, devrait être l'infrastructure de référence d'accès fixe local comme l'est aujourd'hui encore la boucle locale cuivre.
Dans la continuité de la réflexion menée par l'Autorité lors du précédent cycle, afin de prendre en compte ces éléments, et comme indiqué dans la décision d'analyse du marché 3a, l'Autorité estime justifié de s'appuyer pour le présent cycle sur des références indépendantes des coûts unitaires du dégroupage tels que calculés dans le modèle réglementaire des coûts d'Orange. L'objectif consiste à retenir comme signal de long terme la future infrastructure de référence.
A ce titre et au vu du choix conjoint des opérateurs et de la puissance publique de s'orienter, sur le territoire français, vers le déploiement massif de boucles locales optiques jusqu'à l'abonné, l'Autorité a ainsi introduit dans le cadre de la décision d'encadrement tarifaire 2018 - 2020 la prise en compte d'une modélisation ascendante d'un réseau moderne équivalent reposant sur une boucle locale optique mutualisée. Cette modélisation développée par l'Autorité a fait l'objet d'une consultation publique du 7 avril au 19 mai 2017 (20). Dans le cadre de la préparation de la présente décision, cette modélisation a fait l'objet d'une nouvelle consultation publique, menée du 10 avril au 7 mai 2020 (21).
Par ailleurs, ce même contexte de transition technologique du cuivre vers la fibre amène l'Autorité à considérer qu'il n'est désormais plus pertinent que les coûts des frais d'accès au service du réseau cuivre soient en partie recouvrés par le tarif récurrent mensuel du dégroupage total, comme cela avait été prévu dans les précédents encadrements tarifaires. Ainsi, les tarifs de mise en service des lignes devraient désormais, pour permettre le recouvrement des coûts correspondants, être ajustés à la hausse.
L'objectif de l'encadrement tarifaire pluriannuel est d'offrir de la prévisibilité au secteur sur l'évolution des tarifs, conformément aux décisions d'analyses des marchés 3a et 3b et à la recommandation n° 2013/466/UE de la Commission européenne. L'Autorité rappelle toutefois que dans le cadre du suivi de l'exécution de ses décisions, elle garde la faculté de modifier son analyse, et le cas échéant, si les circonstances le rendent nécessaire, de prendre de nouvelles décisions y compris au cours du cycle d'encadrement tarifaire.
Dans le cadre de cette approche, la section 4 détaille les modalités d'appréciation des coûts de l'accès à la boucle locale cuivre, et la section 5 les modalités d'encadrement tarifaire retenues.
4. L'appréciation des coûts de l'accès à la boucle locale cuivre
4.1. Les coûts tels qu'issus de la modélisation ascendante de boucle locale optique mutualisée développée par l'Autorité
4.1.1. Précisions sur la modélisation et son usage pour la tarification du dégroupage
L'Autorité a consulté les acteurs du secteur du 10 avril au 7 mai 2020 sur la mise à jour de la modélisation qu'elle a développée et l'utilisation qu'elle souhaite en faire pour la tarification du dégroupage (22). Elle a publié à cette occasion les fichiers sources de sa modélisation et des unités d'œuvre détaillées (23) du réseau modélisé. À la suite des retours des acteurs, l'Autorité a procédé à un certain nombre de modifications de l'algorithme et d'ajustements des données d'entrée (coûts unitaires, durées de vie, paramètres d'ingénierie), détaillés dans les documents accompagnant la publication du modèle actualisé joint à la consultation relative à la présente décision (24). Par ailleurs, le taux de rémunération du capital retenu est désormais celui fixé par la décision n° 2020-1163 du 22 octobre 2020 fixant le taux de rémunération du capital employé pour la comptabilisation des coûts et le contrôle tarifaire des activités fixes et mobiles régulées à compter de l'année 2021.
Au vu des réponses reçues, l'Autorité souhaite rappeler la philosophie générale de construction et d'utilisation du modèle : son but est de fournir une estimation cohérente et pertinente de long terme des coûts de reconstruction à neuf d'un réseau de boucle locale optique mutualisée desservant seul et sans période transitoire l'ensemble de la demande d'accès fixe sur son empreinte.
Par ailleurs, si ce modèle représente le réseau d'un opérateur déployant ses infrastructures en respectant le cadre symétrique défini par l'Autorité pour la fibre optique, le besoin de comparabilité avec les coûts du dégroupage conduit à opérer un certain nombre d'ajustements. On notera en particulier que :
- l'opérateur hypothétique considéré dans le modèle déploie suffisamment de fibres en transport optique et prépare ses points de mutualisation (PM) afin de pouvoir accueillir un nombre raisonnable d'opérateurs commerciaux au niveau de ses nœuds de raccordement optique (NRO), aucun d'entre eux n'étant supposé chercher à déployer de la fibre en propre jusqu'aux PM ;
- le périmètre du réseau modélisé correspond à celui d'un accès passif avec continuité optique, tel que déployé par un opérateur d'infrastructure et vendu à un opérateur commercial. Ainsi, les coûts des équipements actifs aux extrémités de la boucle locale (25) ne sont pas modélisés. Ce périmètre est ainsi comparable avec celui du dégroupage, où les coûts des équipements actifs (DSLAM et modem) sont supportés par les opérateurs commerciaux.
4.1.2. Grandeurs caractérisant le réseau modélisé
Dans sa consultation publique du 10 avril 2020, l'Autorité avait présenté en tableau les grandeurs caractérisant le réseau modélisé. Les principales modifications effectuées ainsi que les résultats modifiés sont décrits dans la présente section.
a) Principales modifications depuis la consultation publique du 10 avril 2020
4.1.2.a.1 Regroupement des NRA
Le principe général de l'algorithme de regroupement des NRA en NRO, qui consiste en un système de files de priorité, n'a pas été modifié. En revanche, des corrections ont été apportées, notamment à certains traitements qui conduisaient à ne pas regrouper des NRA pourtant bien intégrés dans le réseau de collecte. Les modifications apportées à l'algorithme sont décrites précisément dans le document « Liste des modifications apportées à la modélisation » joint à la consultation relative à la présente décision. Ces corrections permettent de réduire le nombre de NRO modélisés, comme le montre le Tableau 2.
4.1.2.a.2 Demande cible
Lors de la consultation publique du 10 avril 2020, il était précisé que la demande cible par zone était estimée à partir des dernières données pertinentes publiées par l'INSEE à date. Ces données brutes consistaient en un nombre de locaux résidentiels et professionnels par commune. Elles étaient aussi utilisées par l'observatoire des marchés des communications électroniques de l'Autorité pour mesurer l'avancement des déploiements FttH.
Depuis cette consultation publique, le référentiel des locaux de cet observatoire a évolué. Il retient, depuis la publication du 1er trimestre 2020, sur les communes où ils sont disponibles, les fichiers « IPE » des opérateurs d'infrastructure FttH, qui sont spécifiquement destinés à permettre la commercialisation des réseaux FttH déployés.
Ce référentiel, constitué à partir des recensements des opérateurs, permet une estimation plus pertinente du nombre de locaux à rendre raccordables par commune. En outre, ce nouveau référentiel présente une estimation davantage actualisée que les derniers millésimes publiés par l'INSEE, qui présentaient des statistiques datant de 2015 et 2016.
Il est donc pertinent de faire évoluer l'estimation de la demande cible pour utiliser les données les plus récentes de l'observatoire.
La demande cible est ainsi désormais évaluée par le référentiel de locaux de la publication du 1er trimestre 2020 de l'observatoire HD-THD. Celui-ci est proposé en open data à la maille communale (26).
TABLEAU 1
DEMANDE CIBLE RETENUE PAR L'AUTORITÉ (27)
Zone |
Total France |
ZTD |
ZMD privée |
ZMD publique |
---|---|---|---|---|
Demande cible |
39,9 M |
7,2 M |
15,9 M |
16,8 M |
b) Grandeurs caractérisant le réseau modélisé
A la suite de ces modifications, le réseau modélisé se caractérise par les grandeurs suivantes :
TABLEAU 2
GRANDEURS PHYSIQUES NATIONALES PAR ZONE (FRANCE ENTIÈRE27)
Grandeurs par zone |
Total |
ZTD |
ZMD privée |
ZMD publique |
---|---|---|---|---|
Nombre de lignes |
39,9 M |
7,2 M |
15,9 M |
16,8 M |
Nombre de NRO |
8 187 |
289 |
2 030 |
5 868 |
Nombre de lignes par NRO |
4 878 |
24 841 |
7 854 |
2 866 |
Nombre de PM extérieurs |
127 441 |
29 584 |
45 188 |
52 669 |
Nombre de PM extérieurs par NRO |
16 |
102 |
22 |
9 |
Nombre de lignes extérieures par PM extérieur |
291 |
148 |
353 |
319 |
Longueur moyenne de transport par PM |
1 382 m |
1 122 m |
1 574 m |
2 246 m |
Longueur moyenne de distribution horizontale par ligne extérieure |
820 m |
188 m |
492 m |
1296 m |
Longueur de GC en transport |
63 011 km |
10 195 km |
13 369 km |
39 447 km |
Longueur de GC en distribution |
750 182 km |
24 295 km |
193 546 km |
532 342 km |
4.1.3. Précisions sur les résultats issus de la modélisation du réseau
A la suite des réponses des acteurs à la consultation publique sur la mise à jour de la modélisation ascendante d'un réseau de boucle locale optique mutualisée pour la tarification du dégroupage, l'Autorité a jugé pertinent de retenir, pour un certain nombre de paramètres, non pas une valeur unique, mais une valeur basse et une valeur haute. Les paramètres en question ont été précisés en annexe 3 de la consultation relative à la présente décision.
Les deux jeux de paramètres d'entrées du modèle conduisent ainsi à établir une borne basse et une borne haute des coûts du réseau modélisé. Ci-dessous sont présentés les facteurs ayant le plus d'impact sur l'estimation des coûts de ce réseau.
a) Modalités de reconstruction du génie civil en pleine terre
La modélisation de l'Autorité reconstruit systématiquement le génie civil en pleine terre d'Orange, puisque ce dernier n'est par définition pas réutilisable pour le déploiement des boucles locales optiques. L'opérateur modélisé a le choix entre reconstruire du génie civil en conduite ou du génie civil aérien.
Dans la consultation publique relative à la mise à jour du modèle, l'ensemble du génie civil de pleine terre était reconstruit en aérien (choix le moins coûteux), à l'exception de celui accueillant des fibres de transport, reconstruit en souterrain. Au vu des réponses apportées, l'Autorité considère les règles suivantes :
- dans le scénario de coûts bas, 50 % des linéaires de génie civil reconstruits en zone privée le sont en aérien, ainsi que 35 % des linéaires en zone publique ; toutes les arêtes à reconstruire accueillant des fibres de transport le sont en souterrain ;
- dans le scénario de coûts hauts, 40 % des linéaires de génie civil reconstruits en zone privée le sont en aérien, ainsi que 25 % des linéaires en zone publique ; par ailleurs, toutes les arêtes accueillant des fibres de transport sont en génie civil souterrain, soit préexistant, soit reconstruit, y compris lorsqu'elles préexistaient en génie civil aérien.
b) Coût du service après-vente
La modélisation du service après-vente (SAV), qui représente le principal coût d'exploitation, repose sur quatre paramètres différents : le taux d'incidents par ligne sur le réseau cuivre, le ratio des taux d'incidents entre les réseaux fibre et cuivre, le temps d'intervention par incident ainsi que le coût horaire du technicien (incluant le mark-up lié aux coûts joints). Les éléments à la disposition de l'Autorité, et en particulier les réponses des acteurs, font état d'un écart important entre les références basses et hautes de certains paramètres (en particulier s'agissant du ratio des taux d'incidents entre les deux réseaux et du temps d'intervention par incident).
c) Modélisation des dépenses d'investissement (CAPEX)
La modélisation des dépenses d'investissement (CAPEX) fait appel notamment à des coûts unitaires des actifs du réseau modélisé. Les actifs qui ont un impact plus particulièrement notable entre le scénario bas et haut du fait de l'écart observé sur les coûts unitaires sont les boîtiers, les câbles aériens ainsi que le coût linéaire de reconstruction de génie civil en conduite.
Le taux de surcoût lié à la conception et à la planification du réseau constitue un autre facteur prépondérant de variabilité des CAPEX modélisés.
Selon les scénarios retenus, les dépenses d'investissement modélisées s'établissent comme suit :
TABLEAU 3
CAPEX TOTAL PAR ZONE DES LIGNES À CONSTRUIRE SUR LE SEGMENT NRO-PBO
Zone |
National |
ZTD |
ZMD privée |
ZMD publique |
---|---|---|---|---|
Scénario bas |
18,1 Md€ |
2,0 Md€ |
5,2 Md€ |
10,9 Md€ |
Scénario haut |
26,1 Md€ |
2,7 Md€ |
7,4 Md€ |
16,0 Md€ |
4.1.4. Précisions sur certaines variables supplémentaires à prendre en compte dans la modélisation pour la tarification de l'accès à la boucle locale
Au-delà de la modélisation proprement dite du réseau, certains aspects méthodologiques doivent être précisés afin d'utiliser la modélisation en vue de la tarification de l'accès à la boucle locale cuivre.
a) Empreinte géographique des coûts à prendre en compte
Une référence de coût pertinente donnant un signal stable de long terme pour la tarification du dégroupage total serait celle d'un actif moderne équivalent sur la quasi-totalité du territoire national. Comme rappelé en section 3, l'Autorité a fait le choix, au vu du contexte national de déploiement des nouveaux réseaux, de modéliser un réseau de boucle locale optique mutualisée, considéré comme le réseau de référence des prochaines années en lieu et place du réseau cuivre.
Il semble toutefois raisonnable, ainsi que plusieurs acteurs l'ont indiqué en réponse à la consultation publique sur la mise à jour du modèle de BLOM, de penser qu'un opérateur privé efficace mette en place, en-dessous d'un certain seuil de densité, une ou des technologie(s) alternative(s) au(x) coût(s) par ligne inférieur(s) à celui de la boucle locale optique mutualisée, permettant ainsi de limiter la hausse des coûts unitaires dans les zones les moins denses observée sur les réseaux FttH.
Quelles que soient les valeurs exactes de ce seuil et des coûts de technologie(s) alternative(s), la moyenne nationale des coûts de la fibre jusqu'à l'abonné donne une estimation haute du coût moyen de l'actif moderne équivalent (le choix de technologie(s) alternative(s) ayant précisément pour but de diminuer les coûts). Au regard de la couverture actuelle du territoire par le réseau en cuivre d'Orange ainsi que de l'empreinte croissante des déploiements FttH, comme en témoignent les projets s'inscrivant dans le cadre des appels à manifestation d'engagements locaux (AMEL), l'Autorité estime néanmoins pertinent de retenir ce coût moyen.
b) Prise en compte des coûts du raccordement final
L'Autorité a interrogé les acteurs sur la nécessité d'intégrer tout ou partie des coûts du raccordement final aux coûts issus de la modélisation ascendante.
Un des arguments avancés est que le choix de la fibre optique jusqu'à l'abonné implique le déploiement du raccordement final, ce qui justifierait la prise en compte des coûts correspondants.
Toutefois, compte tenu de la structure de comptabilisation des coûts et de tarification de l'accès à la boucle locale cuivre, l'Arcep considère qu'un tel choix serait susceptible de générer un double recouvrement des coûts au profit d'Orange et au détriment des opérateurs alternatifs.
En effet, comme indiqué dans la décision n° 05-0834, les coûts de branchement du réseau cuivre ne sont pas immobilisés et donnent lieu, dans la comptabilité d'Orange, à des dépenses d'exploitation. De façon cohérente, les coûts de construction des lignes cuivre pour une année donnée sont recouvrés l'année en question, via le tarif des frais d'accès au service (lequel inclut également les coûts des mises en service sans construction).
Au surplus, dans le cas du réseau cuivre, une part des branchements a été déployée par des tiers (promoteurs immobiliers par exemple).
Enfin, la logique d'actif moderne équivalent implique, comme ci-dessus, de choisir une technologie alternative dans les zones où son coût serait démesuré.
Au vu de ces éléments, l'Autorité estime pertinent de ne pas retenir les coûts de création du raccordement final. En revanche, la création de génie civil d'adduction, lorsqu'il est manquant, est prise en compte, tout comme le remplacement des actifs du raccordement final au bout de leur durée de vie, pour un total estimé à 0,49 € par accès et par mois, d'après les éléments relatifs aux dépenses d'investissement portés à la connaissance de l'Autorité et en retenant une annualisation sur 20 années.
c) IFER
La fiscalité spécifique aux réseaux de télécommunication fixes est un paramètre exogène, qui influence l'assiette de coûts prise en compte pour fixer les tarifs soumis à l'obligation de refléter les coûts. L'encadrement tarifaire défini par la présente décision a ainsi été établi au regard de la fiscalité en vigueur à sa date d'adoption.
Cette fiscalité spécifique de la paire de cuivre consiste actuellement en une imposition forfaitaire annuelle sur les entreprises de réseaux (ou IFER) relative aux répartiteurs principaux de la boucle locale cuivre et aux réseaux de communications électroniques en fibre optique et en câble coaxial, prévue à l'article 1599 quater B du code général des impôts.
L'Autorité estime que les coûts correspondants doivent être supportés par Orange et par les opérateurs dégroupeurs dans la même mesure. Le calcul du montant pris en compte au titre de l'IFER dans le tarif du dégroupage est détaillé à la section 4.2.5, et s'élève ainsi à 1,45 € par accès et par mois.
Dans le cas d'une évolution de la fiscalité portant sur la paire de cuivre, l'Autorité adoptera, en tant que de besoin, une décision venant fixer de nouveaux tarifs. L'Autorité considère en effet qu'il ne serait pas justifié, en cas de modification notable de la fiscalité, qu'Orange supporte seul les conséquences d'une hausse ou bénéficie seul d'une baisse.
d) Remplissage du réseau
Comme indiqué en section 4.1.2.a.2, le modèle construit un réseau pour desservir une demande cible sur l'ensemble du territoire national, fixée sur la base du référentiel le plus récent disponible, conduisant à retenir environ 40 millions de locaux à rendre raccordables au réseau FttH.
Comme soulevé par Orange dans sa réponse à la consultation publique sur la mise à jour de la modélisation ascendante d'un réseau de boucle locale optique mutualisée pour la tarification du dégroupage, les réseaux d'accès fixe ne sont toutefois jamais remplis à leur maximum. Ainsi, diviser le coût de construction du réseau par le total d'accès à desservir pourrait conduire à un sous-recouvrement des coûts. Cela conduit à introduire un nouveau paramètre, le taux de remplissage du réseau modélisé, pour calculer le nombre d'accès auxquels rapporter le coût total du réseau et en déduire un coût unitaire.
Pour estimer ce taux de remplissage aux fins de la présente décision, l'Autorité a pris en compte différents éléments :
- le total d'accès fixes actuellement commercialisés, toutes technologies confondues, donnant une estimation de la demande pour un réseau moderne équivalent ;
- le cahier des charges du plan « France Très Haut Débit » (28), définissant une pondération de commercialisation par type de local (résidence principale, résidence secondaire, local professionnel) ;
- les données de pénétration cibles retenues pour la tarification FttH en zone moins dense (modèle de référence publié par l'Arcep ou projections d'opérateurs).
Compte tenu de ces différents éléments, l'Autorité retient un taux de remplissage du réseau modélisé sur le territoire national de 85 %.
Ce taux de remplissage s'applique notamment au montant total des coûts de patrimoine ainsi qu'à la majorité des coûts d'exploitation, à l'exception des coûts de SAV et des coûts de commercialisation pour lesquels il est considéré qu'une ligne sans client ne génère pas de coûts.
4.1.5. Conclusion sur la référence de coût issue de la modélisation ascendante retenue par l'Autorité
Compte tenu des éléments qui précèdent, l'Autorité a calculé un coût mensuel moyen de l'accès en dégroupage total de 8,12 € dans le scénario de coûts bas et de 10,90 € dans le scénario de coûts hauts. Ces deux valeurs incluent 1,45 € de coûts d'IFER et de coûts communs afférents.
4.2. L'estimation des coûts de l'accès à la boucle locale cuivre à partir de la comptabilité réglementaire d'Orange
Les coûts de l'accès à la boucle locale en cuivre à partir de la comptabilité réglementaire d'Orange ont également été estimés sur la base d'éléments fournis par Orange. Cette méthodologie, utilisée dans le précédent cycle d'analyse des marchés et présentée par Orange dans le cadre de la consultation publique sur le projet de décision d'analyse du marché 3a, a fait l'objet d'une analyse de l'Autorité afin notamment d'en apprécier la pertinence pour le présent cycle. Elle continue par ailleurs d'offrir une référence pertinente pour certaines des prestations d'accès à la boucle locale cuivre.
4.2.1. Méthode
La méthode utilisée est inchangée par rapport à celle décrite dans la précédente décision d'encadrement tarifaire n° 2017-1570 (section 3.2.1).
Orange identifie dans sa comptabilité les coûts du dégroupage total, les coûts du dégroupage partiel, les frais de mise en service et de résiliation du dégroupage total, ainsi que les coûts liés aux « prestations connexes associées au dégroupage », ces dernières n'étant pas concernées par l'encadrement tarifaire qui fait l'objet de la présente décision. Orange identifie également dans sa comptabilité les coûts de la composante accès de l'accès activé avec service de téléphonie commutée, ainsi que les coûts de la composante accès de l'accès activé sans service de téléphonie commutée sur le périmètre géographique sur lequel s'applique l'obligation d'orientation des tarifs vers les coûts.
L'Autorité dispose à ce jour des coûts réglementaires constatés audités jusqu'à 2019 et des coûts prévisionnels audités pour 2020. Des projections ont été réalisées s'agissant des coûts 2021, 2022 et 2023 à partir des éléments connus. Cet exercice se fonde notamment sur les paramètres structurants détaillés dans les sections suivantes.
4.2.2. Taux de rémunération du capital
Orange a présenté des calculs basés sur une prolongation du taux de rémunération du capital réglementaire en vigueur actuellement, soit 7,6 %. Il convient de tenir compte, à compter de l'année 2021, du taux de rémunération du capital nominal fixé par la décision n° 2020-1163 du 22 octobre 2020, à savoir 4,8 %. Le taux de rémunération du capital réel est déduit du taux de rémunération du capital nominal et de taux d'inflation prévisionnels.
4.2.3. Evolution du parc de détail des accès en cuivre
L'évolution du parc de détail d'accès fixes et de ses différentes composantes est un paramètre important pour l'estimation des coûts unitaires du dégroupage dans cette méthode, dans la mesure où une part non négligeable des coûts la boucle locale d'Orange est constituée de coûts fixes répartis sur un parc de paires de cuivre en service en baisse désormais très substantielle. Des prévisions de nombre d'accès des différentes technologies de fourniture d'accès fixe (cuivre, câble coaxial, fibre) ont été réalisées, concluant à une baisse très substantielle du nombre de paires de cuivre actives sur le marché de détail sur la période 2021 - 2023.
4.2.4. Investissements et coûts d'exploitation hors fiscalité spécifique portant sur la boucle locale cuivre
Pour estimer ses investissements futurs dans les boucles locales, Orange distingue les investissements dans les câbles en cuivre et les investissements dans le génie civil (souterrain et aérien), en supposant que les premiers seront proportionnels au parc de paires de cuivre en service et que les seconds seront constants aux niveaux attendus pour 2020 (hors génie civil spécifique aux déploiements FttH d'Orange).
Les hypothèses de projections suivantes ont été retenues par Orange sur la période 2021 - 2023 pour l'évolution des différents postes de coûts d'exploitation de la paire de cuivre (hors fiscalité spécifique), avant effet de l'inflation : le total des coûts d'exploitation du génie civil de boucle locale est fixe et alloué entre cuivre et fibre optique selon la clé définie dans la décision n° 2017-1488 relative à la tarification du génie civil ; le total des coûts d'intervention sur les câbles cuivre est fixe en l'absence de démontage du réseau ; une partie des coûts (coûts d'études et de conception, et redevances) évoluent principalement proportionnellement au nombre de paires de cuivre en service ; les coûts totaux de support réseau alloués à la boucle locale cuivre évoluent proportionnellement aux coûts directs d'exploitation de la paire de cuivre.
4.2.5. Fiscalité spécifique portant sur la boucle locale cuivre
A ce jour, le tarif de l'IFER (cf. section 4.1.4c)) est de 14,08 € par ligne en service au 1er janvier 2020. Au regard du mécanisme de réévaluation prévu par le III de l'article 112 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 et de des prévisions d'évolution du nombre de paires de cuivre actives mentionnées ci-dessus, une projection du tarif de l'imposition par ligne en service de l'IFER de respectivement de 14,33 €, 14,58 € et 14,84 € est retenue pour les années 2021, 2022 et 2023.
Cette imposition par ligne permet de calculer le montant total payé par Orange chaque année, augmenté de 3 % par application de l'article 1641 du code général des impôts. De cette charge totale annuelle est alors déduit le montant unitaire mensuel par paire de cuivre, à partir du nombre moyen de paires en service pendant l'année en question, ce qui aboutit à 1,45 € en moyenne sur la période 2021 - 2023.
4.2.6. Coûts spécifiques à la fourniture du dégroupage
Les coûts spécifiques à la fourniture du dégroupage sont des coûts d'exploitation correspondant au service après-vente (SAV), à la commercialisation (facturation et relations avec les opérateurs dégroupeurs) et à la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises. Une augmentation progressive du taux d'intervention de SAV est prise en compte du fait d'une déformation du parc qui comportera proportionnellement de plus en plus d'accès en service dans les zones peu denses rurales, dont les réseaux sont caractérisés par une plus grande fragilité. Quant aux autres coûts spécifiques à la fourniture du dégroupage, un montant unitaire par paire constant (hors inflation) est retenu sur la période 2021 - 2023.
4.2.7. Les coûts spécifiques à la fourniture de la composante accès d'un accès activé
Les coûts spécifiques à la fourniture de la composante accès d'un accès activé sont des coûts de patrimoine et d'exploitation relatifs aux DSLAM (29) nécessaires à l'activation des lignes et des coûts d'exploitation correspondants à la commercialisation (facturation et relations avec les opérateurs tiers), au service après-vente et à la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises. Des coûts unitaires constants (hors inflation) sont projetés sur la période 2021 - 2023 pour les coûts spécifiques à la fourniture de la composante accès d'un accès activé à l'exception d'une tendance croissante des coûts de service après-vente et de la prise en compte d'une hausse des coûts de l'électricité.
4.2.8. Cas particulier du dégroupage partiel et de l'accès activé avec abonnement au service de téléphonie commutée
En application de l'article 44 de décision d'analyse du marché 3a, les coûts de patrimoine et d'exploitation de la boucle locale cuivre ne font pas partie des coûts pertinents de l'accès partagé à la boucle locale cuivre puisqu'ils sont alloués au service de téléphonie commutée fourni sur les lignes correspondantes. Il en va de même pour l'accès activé avec abonnement au service de téléphonie commutée. Comme ces deux prestations sont des produits en fin de vie (moins de 290 000 accès en dégroupage partiel et moins de 7 000 accès activés vendus avec service de téléphonie commutée en zone régulée au 31 décembre 2019), les faibles volumes d'unité d'œuvres engendrent une incertitude importante sur l'allocation en comptabilité descendante des coûts spécifiques, qui représentent dans ces cas particuliers la quasi-totalité de l'ensemble des coûts. Par ailleurs, les tarifs de ces deux prestations sont peu élevés et elles ne constituent donc pas un enjeu économique important. Dès lors, et compte tenu des derniers éléments à sa disposition, l'Autorité ne retient pas d'évolution significative des coûts qui l'amènerait à modifier les plafonds tarifaires fixés par la décision n° 2017-1570 pour ces deux prestations.
4.2.9. Observations sur les résultats de la méthode
S'agissant des coûts récurrents, cette méthode conduit à des projections de coûts des produits d'accès à la boucle locale cuivre en hausse très sensible par rapport au niveau de l'encadrement tarifaire 2018 - 2020.
4.3. Conclusion sur l'appréciation des coûts de l'accès à la boucle locale cuivre
L'Autorité a présenté aux sections 4.1 et 4.2 les deux méthodes à sa disposition pour estimer les coûts du dégroupage total :
- les coûts tels qu'issus de la modélisation ascendante de la boucle locale optique mutualisée développée par l'Autorité ;
- la projection des coûts tels qu'issus de la projection de la comptabilité réglementaire d'Orange, notamment caractérisée par des coûts de patrimoine en coûts courants économiques.
Dans la décision d'analyse du marché 3a, l'Autorité indique que, s'agissant de l'encadrement tarifaire de l'accès à la boucle locale cuivre, elle considère l'alternative suivante :
- poursuivre l'utilisation conjointe du modèle réglementaire des coûts d'Orange et de la modélisation ascendante de la boucle locale optique mutualisée ;
- ou bien, adopter une référence de coûts entièrement fondée sur la modélisation ascendante de la boucle locale optique mutualisée.
Compte tenu des éléments qui précèdent, il apparaît à l'Autorité, au regard des objectifs qu'elle poursuit rappelés en section 3 et de la recommandation « non-discrimination et méthode de coûts » de la Commission européenne, que :
- la modélisation ascendante développée par l'Autorité, qui vise à estimer les coûts de reconstruction d'un réseau à neuf, permet d'obtenir une référence de coûts stable, aux effets près du progrès technique et de l'inflation, apportant donc des garanties fortes de prévisibilité et de robustesse à la transition technologique. Elle a par ailleurs bénéficié d'améliorations depuis les premières versions publiées en 2017 et son paramétrage a été amélioré grâce aux informations fournies par les opérateurs d'infrastructure notamment, forts d'une expérience de trois années supplémentaires dans le déploiement du FttH ;
- à l'inverse, la comptabilité réglementaire descendante, quoique fiabilisée par une longue pratique, conduit à des variations très significatives du signal de coûts de la boucle locale en cuivre du fait du vidage du réseau au profit du FttH et ne permet ainsi plus d'offrir une référence de coûts stable et la prévisibilité nécessaire.
Au regard de ces éléments, l'Autorité considère justifié, pour apprécier les coûts 2021 - 2023 de l'accès à la boucle locale cuivre pour les prestations de dégroupage total, de se fonder sur les coûts de la boucle locale optique mutualisée (BLOM) estimés par le biais d'une modélisation ascendante, afin de répondre aux besoins de prévisibilité pour les acteurs et de stabilité sur le niveau tarifaire du dégroupage.
Par cohérence, l'Autorité retient la même approche pour apprécier les coûts 2021 - 2023 de la composante accès de l'accès activé sans abonnement au service téléphonique commuté, s'agissant des coûts de la paire de cuivre, qui sont partagés avec ceux du dégroupage total. S'agissant des coûts spécifiques à l'accès activé, la comptabilité réglementaire d'Orange continue d'offrir une référence pertinente.
5. Tarification
5.1. Tarifs du dégroupage total
5.1.1. Frais d'accès au service et frais de résiliation
Les frais d'accès au service du dégroupage total couvrent les coûts relatifs à la mise en service par Orange de l'accès aux paires de cuivre de la boucle locale.
Dans sa décision d'encadrement tarifaire pour les années 2016-2017 (30), l'Autorité a estimé qu'il convenait de fixer à 50 € par acte le tarif maximum des frais d'accès au service pour les années 2016 et 2017, soit un tarif inférieur au coût moyen de cette prestation, afin de préserver la dynamique concurrentielle sur le segment du haut débit. Pour l'encadrement tarifaire 2018-2020, elle a estimé pertinent de maintenir le tarif maximum applicable à cette prestation à ce même niveau.
Les frais de résiliation ne sont pas payés par les opérateurs dégroupeurs si la ligne est reprise par Orange ou un autre opérateur dégroupeur concomitamment à la résiliation. L'Autorité a fixé à 5 € par acte le tarif maximum applicable aux frais de résiliation pour les années 2018 à 2020.
Comme indiqué en section 3, dans le contexte de transition technologique du cuivre vers la fibre, l'Autorité estime qu'il n'est désormais plus pertinent de faire recouvrer une partie des coûts relatifs aux mises en service via le tarif récurrent mensuel du dégroupage et qu'ainsi les tarifs des prestations de mise en service et de résiliation doivent désormais permettre le recouvrement global des coûts correspondants.
Au regard de ce qui précède, l'Autorité estime qu'il convient de fixer à 70 € par acte pour les frais d'accès au service et à 5 € par acte pour les frais de résiliation les plafonds tarifaires applicables pour les années 2021 à 2023.
5.1.2. Tarif récurrent mensuel du dégroupage total
a) Plafond du tarif récurrent mensuel du dégroupage total déterminé par l'Autorité
Comme indiqué en section 4.3, l'Autorité estime pertinent, pour le présent encadrement tarifaire, d'utiliser comme référence la modélisation de la boucle locale optique mutualisée. L'ensemble des éléments exposés ci-avant et la méthodologie retenue dans la présente décision conduisent l'Autorité à établir une fourchette de coûts de 8,12 € à 10,90 € concernant le tarif récurrent mensuel du dégroupage total.
La décision 2017-1570 avait fixé les plafonds du tarif récurrent mensuel du dégroupage total pour les trois années 2018, 2019 et 2020 respectivement à 9,31 €, 9,41 € et 9,51 € par mois.
Pour fixer le tarif applicable à la période 2021-2023, l'Autorité estime pertinent de prendre en compte plusieurs paramètres, notamment :
- l'objectif de tarifs stables et prévisibles, comme rappelé en sections 3 et 4.3 ;
- l'augmentation du plafond tarifaire applicable aux frais d'accès au service par rapport au précédent encadrement tarifaire, passant de 50 € à 70 € (cf. section 5.1.1).
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, l'Autorité estime que le tarif récurrent mensuel de l'accès en dégroupage total ne saurait excéder 9,65 € par mois sur la période 2021 - 2023.
b) Clause de révision en cas d'accélération de la fermeture du réseau cuivre
Comme rappelé dans les décisions n° 2020-1446 d'analyse du marché 3a et n° 2020-1447 d'analyse du marché 3b, conformément notamment à l'article D. 311 du CPCE, l'Autorité veille à ce que les méthodes de coûts utilisées pour la tarification promeuvent l'efficacité économique. Or, alors que le développement des réseaux en fibre optique a fortement progressé, la coexistence et l'exploitation simultanée sur une grande partie du territoire de deux boucles locales, l'une en cuivre et l'autre en fibre, présentent un caractère inefficace pour le secteur en présence de coûts fixes et devraient rester limitée dans le temps, tout en garantissant néanmoins une migration des clients dans de bonnes conditions - en particulier, la fermeture du réseau cuivre doit être conditionnée à la disponibilité de la nouvelle infrastructure en fibre optique sur la zone en question. Orange a d'ailleurs annoncé le 4 décembre 2019, dans le cadre de son plan stratégique à l'horizon 2025, la fermeture de son réseau cuivre sur la période 2023 - 2030 (31).
Orange a prévu de procéder à des fermetures commerciales à la maille de l'adresse dès le deuxième trimestre de l'année 2021 en utilisant les possibilités prévues par les projets de décisions d'analyse des marchés 3a et 3b relatives à la fermeture commerciale dite « rapide » du réseau, dans les cas où les opérateurs commerciaux d'envergure nationale investissant pour être présents sur les réseaux de boucle locale FttH au niveau des points de mutualisation sur l'ensemble du territoire national, et ne disposant pas eux-mêmes d'une autre boucle locale filaire déployée sur la zone, sont déjà présents au niveau du point de mutualisation FttH (ce qui correspond à la maille de l'immeuble dans les zones très denses). A partir de la fermeture commerciale de ses offres de gros, Orange ne donnera plus suite aux demandes de mises en service d'accès cuivre sur le marché de gros pour des accès grand public.
La mise en œuvre du processus de fermeture « rapide » à la maille de l'adresse fait l'objet d'échanges entre les opérateurs, les collectivités et l'Arcep dans le cadre de groupes de travail et ateliers relatifs à la fermeture du réseau cuivre organisés sous l'égide de cette dernière.
S'agissant de la fermeture technique du réseau, éventuellement précédée d'une fermeture commerciale plus systématique, le plan reste à définir. Orange devra notifier un programme de fermeture à l'Arcep conformément aux projets de décisions d'analyse des marchés 3a et 3b. A ce jour, Orange a indiqué avoir prévu des projets d'expérimentation de l'arrêt du cuivre sur des zones tests en Île-de-France, sur trois communes présentant des caractéristiques différentes, se déroulant respectivement en 2020, 2021 et 2022. Orange a également mentionné avoir lancé le programme national de décommissionnement du cuivre avec une directrice de programme dédiée.
En prenant en compte cet objectif d'efficacité économique, l'Autorité estime pertinent, dans un objectif d'incitation vis-à-vis d'Orange, que le niveau du tarif puisse être ajusté à la hausse, y compris au cours du cycle 2021-2023, en cas de présentation concrète par Orange d'un plan de fermeture du réseau cuivre et en fonction des garanties qu'il présenterait quant à la rapidité de la transition entre cuivre et fibre.
c) Les tarifs du dégroupage dans d'autres pays comparables
L'Autorité constate que les niveaux tarifaires ainsi déterminés ne sont pas dépositionnés par rapport aux niveaux pratiqués au sein des pays européens :
Figure 1. - tarif récurrent mensuel du dégroupage total en Europe au 1er octobre 2020, en € HT/mois (source : Cullen International)
Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page
L'Autorité note par ailleurs que parmi les principaux autres pays européens (Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Espagne), la fourchette des niveaux tarifaires se situe entre 8,50 €/mois et 11,19 €/mois.
TABLEAU 4
SITUATION DES MARCHÉS FIXES DANS LES PAYS EUROPÉENS COMPARABLES (SOURCES : OCDE (32), BEREC (33), COMMISSION EUROPÉENNE (34), ET CULLEN INTERNATIONAL (35))
France |
Allemagne |
R.-U. |
Italie |
Espagne |
|
---|---|---|---|---|---|
Parc d'accès fixe haut débit |
29,8 M |
35,1 M |
26,8 M |
17,5 M |
15,3 M |
Part de marché de l'opérateur historique |
40 - 45 % |
61 % |
34 % |
44 % |
40 % |
Part de marché du xDSL |
67 % |
72 % |
77 % |
72 % |
17 % |
PIB par habitant (UE : base 100) |
106 |
121 |
105 |
95 |
91 |
Tarif récurrent du dégroupage (€/mois) |
9,46 € |
11,19 € |
8,50 € (7,54 £) |
8,79 € |
8,60 € |
5.1.3. Tarifs des options
a) Tarif à l'acte de la prestation SAV+
La prestation SAV+ permet d'apporter une qualité de service supérieure au client final en cas de défaut non-franc de la ligne et est source de gains d'efficacité pour l'ensemble des acteurs par la baisse du volume d'interventions de SAV qu'elle induit. En l'absence d'éléments nouveaux sur cette prestation par rapport à la décision n° 2017-1570, l'Autorité estime qu'il convient de maintenir à 105 € le tarif à l'acte maximum applicable à la prestation de SAV+ pour les années 2021 à 2023.
b) Abonnements aux options de GTR
Dans le prolongement de la décision n° 2017-1570, l'Autorité ne souhaite pas encadrer un par un dans cette décision les tarifs des abonnements aux options de GTR (ainsi que l'option de SAV+ spécifique aux options de GTR 4H), qui répondent à des besoins spécifiques du marché entreprises. L'Autorité s'assurera néanmoins que toute évolution éventuelle de ces tarifs soit dûment justifiée par Orange.
5.2. Tarifs du dégroupage partiel
Au vu des éléments mentionnés en section 4.2.8, l'Autorité estime que le tarif récurrent mensuel du dégroupage partiel pour les années 2021 à 2023 ne saurait excéder son niveau actuel, soit 1,77 € par accès et par mois. De même, l'Autorité estime qu'il convient de maintenir respectivement à 66 €, 35 € et 105 € par acte les frais maximums de mise en service, de résiliation et de SAV+ pour le dégroupage partiel.
5.3. Tarif de l'accès activé sans service de téléphonie commutée
De même que pour le dégroupage total, l'Autorité estime désormais que l'intérêt de faire recouvrer une partie des coûts des mise en service via le tarif récurrent mensuel de l'accès activé a décru. Ainsi, les frais maximums de mise en service et de l'accès activé sans service de téléphonie commutée sont fixés à 70 € par acte pour les années 2021 à 2023 (36), niveau identique à celui fixé pour le dégroupage total, au lieu de 61 € pour les années 2018 à 2020.
La modélisation ascendante d'un réseau de boucle locale optique mutualisée utilisée par l'Autorité pour établir le tarif récurrent de l'accès dégroupé à la boucle locale en cuivre d'Orange ne porte pas sur l'accès activé et, en particulier, n'inclut pas de modélisation des coûts d'activation. La comptabilité réglementaire d'Orange continue de son côté d'offrir une référence de coûts relativement stable et pertinente s'agissant des surcoûts spécifiques aux accès activés.
Par cohérence avec le calcul du plafond tarifaire du dégroupage total, l'Autorité entend utiliser ici les coûts issus de la modélisation ascendante d'un réseau de boucle locale optique mutualisée et y ajouter les surcoûts descendants (comptables) projetés pour la partie des coûts spécifiques à l'accès activé par rapport à un accès en dégroupage total.
Compte tenu des éléments détaillés en section 4 et ci-dessus, l'Autorité estime que le tarif récurrent mensuel de l'accès activé sans service de téléphonie commutée ne saurait excéder 13,13 € par mois pour l'accès « mono VC » et 13,23 € par mois pour l'accès « bi VC » en 2021, puis 13,37 € par mois pour l'accès « mono VC » et 13,47 € par mois pour l'accès « bi VC » en 2022 et, enfin, 13,53 € par mois pour l'accès « mono VC » et 13,63 € par mois pour l'accès « bi VC » en 2023.
En outre, l'Autorité estime pertinent de maintenir le plafond du tarif à l'acte de la prestation SAV+ (commune aux accès activés avec et sans service de téléphonie commutée) à son niveau actuel de 135 € pour les années 2021 à 2023.
5.4. Tarif de l'accès activé avec service de téléphonie commutée
Au vu des éléments mentionnés en 4.2.8, l'Autorité estime que le tarif récurrent mensuel du dégroupage partiel pour les années 2021 à 2023 ne saurait excéder son niveau actuel, soit 4,79 € par mois pour l'accès « mono VC » et 4,89 € par mois pour l'accès « bi VC ». De même, l'Autorité estime qu'il convient de maintenir à respectivement 56 € et 135 € par acte les frais maximums de mise en service et de SAV+.
6. Observations de la Commission européenne
En application de l'article 7 de la directive « cadre » 2002/21/CE modifiée, l'Arcep a notifié à la Commission européenne, à l'Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) et aux autorités compétentes des autres États membres de l'Union européenne, le 6 novembre 2020, le projet de décision fixant un encadrement tarifaire de l'accès à la boucle locale cuivre pour les années 2021 à 2023. A la suite de cette notification, la Commission européenne a adressé ses observations le 4 décembre 2020.
La Commission émet d'abord une observation sur l'estimation des coûts à partir de la modélisation ascendante. Ainsi, elle « se félicite de l'approche de l'ARCEP consistant à calculer le plafond tarifaire pour le réseau en cuivre à partir de la modélisation ascendante d'un réseau FttH, conformément à la recommandation sur la non-discrimination et la méthode de calcul des coûts » mais « observe cependant que le nouveau modèle de coûts aboutit à une fourchette de prix sensiblement plus élevée que celle de l'estimation précédente (hausse d'environ 16 %) pour l'accès dégroupé à la boucle locale en cuivre » et que « cette hausse des coûts est compensée par un nouveau CMPC moins élevé (4,8 % au lieu de 7,6 %), pour aboutir finalement à des prix stables. » « Bien que la comparaison directe des résultats des modèles (entre le modèle précédent et le modèle actuel) soit impossible en raison du changement d'approche de la modélisation, la Commission invite l'ARCEP à vérifier si la hausse significative des coûts modélisés (c'est-à-dire indépendamment du CMPC) reflète effectivement le coût réel du déploiement de l'infrastructure concernée ».
Dans le cadre de l'élaboration de la présente décision, l'Arcep a veillé à élaborer la meilleure estimation des coûts dans le cadre de la modélisation ascendante qu'elle a développée. Ainsi, l'évolution des coûts modélisés, hors effet du CMPC, découle de la prise en compte des meilleures informations récentes disponibles, fournies en particulier dans le cadre des consultations publiques, sur le coût de déploiement de l'infrastructure. Cette modélisation pourra être encore affinée à l'avenir avec la connaissance croissante des coûts de déploiement des réseaux FttH.
Par ailleurs, la Commission « note également que l'ARCEP prévoit déjà la possibilité d'augmenter le plafond du tarif mensuel du dégroupage avant la fin de la période de validité de la présente décision si Orange présente un plan détaillé pour la fermeture de son réseau en cuivre. L'ARCEP explique que cet ajustement à la hausse serait un moyen d'inciter Orange à promouvoir l'efficacité économique en éliminant la nécessité d'exploiter simultanément deux réseaux. ». Sur ce point, la Commission « rappelle que les prix doivent refléter les coûts et que le CMPC doit refléter les coûts du capital. Dans son projet de décision notifié, l'ARCEP fait valoir, explications à l'appui, que les coûts estimés ont augmenté juste assez pour compenser la baisse du CMPC. A cet égard, compte tenu de l'intention de l'ARCEP de modifier les plafonds tarifaires notifiés, la Commission lui rappelle que toute modification éventuelle des prix (avant la fin de la période pour laquelle les prix sont fixés, c'est-à-dire pour la période 2021-2023 et d'une manière générale) doit faire l'objet d'une notification à la Commission et être justifiée par une analyse complète des coûts sous-jacents et de l'incidence de ce changement sur les conditions de concurrence. »
L'Arcep confirme que, dans le respect du cadre juridique national et européen, une telle modification de la décision d'encadrement tarifaire ferait en effet l'objet d'une consultation publique et un nouveau projet de décision serait ensuite notifié à la Commission européenne, à l'ORECE et aux autres autorités de régulation nationales préalablement à l'adoption d'une nouvelle décision.
Décide :