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Article AUTONOME (Décision n° 2020-0355 du 23 avril 2020 de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse fixant l'évaluation définitive du coût net du service universel et les contributions définitives des opérateurs pour l'année 2018)

Article AUTONOME (Décision n° 2020-0355 du 23 avril 2020 de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse fixant l'évaluation définitive du coût net du service universel et les contributions définitives des opérateurs pour l'année 2018)


Après en avoir délibéré le 23 avril 2020,


1. Introduction
1.1. Sur le dispositif de financement du service universel


L'article L. 35-3 du CPCE définit le dispositif de financement du coût net imputable aux obligations de service universel.
Les méthodes de calcul de ce coût net sont fixées par les articles R. 20-31 à R. 20-39 du CPCE. Ces méthodes sont précisées par des règles qui, en application des dispositions de l'article R. 20-40 du CPCE, doivent être publiées par l'Autorité. Les règles employées pour le calcul du coût définitif du service universel pour l'année 2018 ont été adoptées par l'Autorité, à l'issue d'une consultation publique menée du 27 septembre au 18 octobre 2019, dans sa décision n° 2019-1665 du 14 novembre 2019.
La présente décision a pour objet d'évaluer le coût net définitif des obligations de service universel pour l'année 2018 pour la composante prévue au 1° de l'article L. 35-1 du CPCE.


1.2. Sur la procédure suivie par l'Autorité


Les informations nécessaires à l'évaluation du coût des composantes de service universel pour le calcul du coût définitif du service universel pour l'année 2018 ont été fournies par Orange.
La comptabilité de la société Orange utilisée pour le calcul du coût net des obligations de service universel a été auditée par un organisme indépendant désigné par l'Autorité dans la décision n° 2017-0645 en date du 23 mai 2017, en application du I de l'article L. 35-3 du CPCE. L'audit a porté sur les données de coûts et de recettes des services pris en compte pour l'évaluation du coût des obligations de service universel, ainsi que sur les méthodes de collecte des données relatives aux caractéristiques du réseau et aux trafics, issues du système d'information d'Orange. Le rapport d'audit correspondant a été remis à l'Autorité le 5 février 2020 et complété le 3 avril 2020.
Parallèlement à ces travaux, l'Autorité a réalisé une notice de déclaration du chiffre d'affaires pertinent pour le calcul des contributions définitives au fonds de service universel pour l'année 2018. Cette notice de déclaration a été adoptée dans la décision n° 2019-1387 du 26 septembre 2019.
Enfin, l'Autorité a fixé, dans sa décision n° 2017-0830 en date du 4 juillet 2017, la valeur du taux de rémunération du capital pour 2018 prévu par l'article R. 20-37 du CPCE. Celle-ci est fixée à 7,6 %.


2. Evaluation des coûts nets des composantes du service universel
2.1. Evaluation du coût net des obligations tarifaires correspondant aux obligations de péréquation géographique


Le coût net définitif des zones non rentables pour l'année 2018, conformément aux règles adoptées par l'Autorité dans la décision n° 2019-1665, avant prise en compte des avantages immatériels, s'élève à 0,7 million d'euros, représentant 43 499 lignes analogiques, soit 0,58 % du nombre de lignes principales analogiques, situées dans les zones locales ayant moins de 5,45 habitants au km2.


2.2. Evaluation du coût net de l'obligation d'offrir des tarifs spécifiques à certaines catégories d'abonnés en vue de leur assurer l'accès au service téléphonique


L'offre de tarifs spécifiques prévue par l'article R. 20-34 du CPCE a été mise en œuvre le 1er juillet 2000. Jusqu'à l'année 2017 incluse, les bénéficiaires potentiels recevaient à ce sujet un courrier d'information envoyé par leur organisme social (Caisse nationale d'allocations familiales, Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce ou Caisse centrale de mutualité sociale agricole). En 2018, à la suite de démarches menées par Orange dans le but de diminuer le ratio entre les coûts de gestion et le montant de la réduction tarifaire, les organismes sociaux ont arrêté d'envoyer des courriers d'information aux bénéficiaires potentiels (1) et n'ont ainsi pas refacturé cette prestation à Orange.
La réduction sur la facture téléphonique consentie par Orange s'élève, en 2018, à 9,56 euros hors taxes par mois et par bénéficiaire. Dans le cadre de l'évaluation du coût net du service universel, le montant pris en compte pour la compensation d'Orange est de 4,21 euros hors taxes par mois et par bénéficiaire sur l'année 2018, conformément à l'arrêté susvisé du ministre chargé de l'industrie auprès de la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi en date du 19 février 2010.
En décembre 2018, 55 390 allocataires bénéficiaient de la réduction tarifaire téléphonique. En décembre 2017, 79 126 allocataires bénéficiaient de cette réduction. Le montant de la compensation d'Orange pour l'année 2018 est de 3,4 millions d'euros.
Les coûts de gestion du dispositif de réduction sociale tarifaire s'élèvent à 1,2 million d'euros en 2018, en baisse de 2,8 millions d'euros par rapport à 2017. Cette baisse est principalement due à la fin de l'envoi des courriers d'information à destination des bénéficiaires potentiels du service universel.
Au total, au titre du coût définitif pour l'année 2018, le coût net des tarifs sociaux, avant prise en compte des avantages immatériels, s'élève à 4,7 millions d'euros. Ce coût net ne dépasse pas le plafond fixé à 0,8 % du chiffre d'affaires du service téléphonique au public de l'année, conformément à l'article R. 20-34 du CPCE.


2.3. Evaluation du coût net des obligations correspondant à la fourniture d'un service de renseignements et d'un annuaire d'abonnés sous forme imprimée et électronique


Conformément aux règles adoptées par la décision n° 2019-1665 de l'Autorité précitée, aucun coût n'est calculé pour la composante « fourniture d'un service de renseignements et d'un annuaire d'abonnés » au titre de l'année 2018.


3. Evaluation des avantages induits par le fait d'être opérateur de service universel


En application de l'article R. 20-37-1 du CPCE, les avantages immatériels comprennent :


- le bénéfice technique et commercial résultant de l'étendue du réseau, par rapport à un opérateur agissant dans les conditions du marché, pour le raccordement de nouveaux abonnés (ubiquité) ;
- le bénéfice lié à l'amélioration dans le temps des capacités économiques d'abonnés bénéficiant du service universel (cycle de vie) ;
- le bénéfice tiré de l'exploitation des données relatives aux abonnés (connaissance du marché) ;
- le bénéfice tiré de l'image de marque associée à la position d'opérateur de service universel.


L'Autorité a mené des travaux sur les avantages immatériels depuis 1998 :


- elle a, en particulier, défini en 1999 une méthode permettant d'évaluer l'avantage lié à l'image de marque ;
- à la suite de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes C-146 / 00 en date du 6 décembre 2001, elle a évalué l'ensemble des avantages immatériels pour chaque exercice définitif à compter de l'exercice 1998 ;
- elle a commandé, en 2006 et en 2010, deux études à un consultant indépendant afin de mettre à jour les résultats obtenus pour la valorisation des avantages immatériels ;
- elle a enfin commandé en 2014 une nouvelle étude à un consultant indépendant afin d'évaluer l'évolution du surprix dont bénéficierait Orange au titre de ses missions de service universel.


Les avantages immatériels, prévus par l'article R. 20-37-1 du CPCE ont été évalués conformément aux règles susvisées, et portent sur la composante « service téléphonique » du service universel.


3.1. Le bénéfice technique et commercial résultant de l'étendue du réseau (effet lié à l'ubiquité)


Conformément aux règles adoptées par la décision n° 2019-1665 de l'Autorité précitée, le bénéfice technique et commercial résultant de l'étendue du réseau (effet lié à l'ubiquité) est nul pour l'année 2018.


3.2. Le bénéfice lié à l'amélioration dans le temps des capacités économiques d'abonnés bénéficiant du service universel (effet lié au cycle de vie)


L'effet lié au cycle de vie dans l'évaluation du coût du service téléphonique en 2018 se limite à la valeur du bénéfice tiré de l'offre sociale du service téléphonique. Celle-ci est calculée en fonction du nombre de clients précédemment éligibles à l'offre sociale et bénéficiaires de l'offre qui ne sont plus éligibles et souscrivent à une offre du même opérateur.
Pour 2018, l'Autorité estime à 19 983 euros le bénéfice correspondant au cycle de vie pour la composante « service téléphonique » du service universel.


3.3. Le bénéfice tiré de l'exploitation des données relatives aux abonnés (connaissance du marché)


Conformément aux règles adoptées par la décision n° 2019-1665, l'Autorité estime qu'il ne peut être attribué à Orange aucun bénéfice tiré de l'exploitation des données relatives aux abonnés.


3.4. Le bénéfice tiré de l'image de marque associée à la position d'opérateur de service universel


L'Autorité a estimé, dans les règles adoptées par la décision n° 2019-1665, qu'Orange ne peut tirer des composantes « service téléphonique » du service universel un bénéfice en termes d'image de marque significativement différent de zéro en 2018.


3.5. Bilan des avantages immatériels par composante


Au total, les avantages immatériels se répartissent comme indiqué dans le tableau ci-dessous :


Avantages immatériels

(en euros)

Composante

Service téléphonique

Ubiquité

0

Cycle de vie

19 983

Connaissance du marché

0

Image de marque

0

Total des avantages immatériels

19 983


Le montant global des avantages immatériels s'élève ainsi à 19 983 euros pour l'année 2018.


4. Synthèse du coût net du service universel, avantages immatériels déduits


Le tableau ci-dessous présente le coût du service universel par composante, avant et après prise en compte des avantages immatériels :


Coût net définitif 2018 du service universel (en euros)

Coût net avant avantages immatériels
(1)

Avantages immatériels
(2)

Coût net après avantages immatériels
(1)-(2)

Service téléphonique

5 335 154

19 983

5 315 171


Le coût définitif du service universel, avantages immatériels déduits, s'élève à environ 5,3 millions d'euros en 2018. Il est en baisse par rapport à celui de 2017 (environ 11 millions d'euros), sous l'effet de la diminution du coût des obligations de péréquation géographique, de la diminution du nombre d'allocataires bénéficiant de la réduction tarifaire téléphonique et de la suppression de l'envoi des courriers d'information à destination des bénéficiaires potentiels du service universel.


5. Frais de gestion


Le coût du service universel est à augmenter des frais de gestion de la Caisse des dépôts, qui s'élèvent à 48 672,74 euros, montant validé par le comité de contrôle du fonds de service universel le 18 octobre 2019.


6. Appréciation du caractère excessif de la charge


Conformément à l'article R. 20-37-1 du CPCE, l'Autorité a réalisé le calcul du coût net du service universel pour l'année 2018 en tenant compte des avantages immatériels, ce qui conduit à un coût en 2018 de 5,3 millions d'euros pour la composante « service téléphonique ». Ce coût net apparaît non seulement significatif en valeur absolue mais également excessif, une fois rapporté à la situation de l'opérateur prestataire, étant donné la situation concurrentielle sur le marché français.
L'Autorité a évalué si le coût net de la composante « service téléphonique » présentait un caractère excessif pour Orange au regard de sa capacité à le supporter compte tenu de ses caractéristiques propres, notamment du niveau de ses équipements, de sa situation économique et financière ainsi que de sa part de marché. Cette composante du service universel représente un coût net de 5,3 millions d'euros pour l'année 2018.
L'Autorité constate que ce montant est notamment comparable aux montants de litiges mentionnés dans le document de référence 2018 d'Orange ainsi qu'aux seuils d'examen de certains dossiers par les instances de gouvernance du groupe.
Elle considère dans ce contexte que le coût net du service universel pour l'année 2018 présente un caractère excessif pour Orange et qu'il y a lieu de mettre en œuvre le mécanisme de compensation conformément à l'article L. 35-3 III du CPCE au travers du fonds de service universel.


7. Impayés


L'article R. 20-39 du CPCE précise qu'« en cas de défaillance d'un opérateur, et si les sommes dues par cet opérateur ne sont pas recouvrées dans un délai d'un an à compter de la défaillance telle que mentionnée à l'article R. 20-43, elles sont imputées lors de l'exercice suivant cette constatation sur les comptes des autres opérateurs au prorata de la part de chacun calculée de la manière décrite ci-dessus, et payées en même temps que le solde définitif suivant ».
A la demande de l'Autorité, la Caisse des dépôts et consignations lui a adressé un récapitulatif, pour l'exercice 2017, des montants restant à verser par le fonds à chacun des opérateurs créditeurs et des montants restant à payer par le fonds à chacun des opérateurs débiteurs.
Compte tenu du montant de la trésorerie du fonds résultant du solde des exercices antérieurs, il n'apparaît pas opportun d'ajouter la mutualisation des impayés de l'exercice 2017 au coût du service universel 2018. Il est alors possible de clôturer l'exercice 2017 en comptabilité.


8. Répartition des contributions entre les opérateurs


L'intégralité du coût du service universel pour l'exercice 2018, soit la somme des coûts nets, après avantages immatériels de chaque composante, et des frais de gestion de la Caisse des dépôts, est financée par les opérateurs de communications électroniques tels que définis par l'article L. 32 (15°) du CPCE : « toute personne physique ou morale exploitant un réseau de communications électroniques ouvert au public ou fournissant au public un service de communications électroniques ».
Le chiffre d'affaires pertinent pour déterminer la contribution de chaque déclarant est obtenu à partir des déclarations des opérateurs réalisées conformément aux règles fixées par la notice de déclaration adoptée par l'Autorité (décision n° 2019-1387 de l'Autorité en date du 26 septembre 2019). Conformément à l'article R. 20-39 du CPCE, « pour le calcul de la contribution, il est pratiqué un abattement de 100 millions d'euros sur le chiffre d'affaires annuel ».
L'Autorité constate que la quasi-totalité des opérateurs dont le chiffre d'affaire est supérieur à 50 millions d'euros ont transmis leur déclaration et que les déclarations qui n'ont pas été effectuées correspondent à des opérateurs dont le chiffre d'affaires pertinent est très vraisemblablement inférieur au montant de l'abattement. Ce constat ne préjuge toutefois pas des éventuelles décisions que la formation de règlement des différends, de poursuite et d'instruction (formation RDPI) de l'ARCEP pourrait adopter.
Le coût intégral du service universel (5 315 171 euros) rapporté au total du chiffre d'affaires de référence (après abattement, soit 20,5 milliards d'euros) représente un taux de prélèvement d'environ 0,03 % en 2018, soit un taux en baisse par rapport à 2017 (0,05 %).
La contribution nette d'un opérateur, positive ou négative, est égale à sa contribution brute diminuée, le cas échéant, du coût net de la fourniture des prestations de service universel qu'il assure.
Pour l'année 2018, Orange est crédité du montant du coût net du service universel calculé en 4e partie concernant les composantes « service téléphonique », soit un montant de 5 315 171 euros.
L'annexe jointe définit les contributions établies au titre de la présente décision, après publication, le cas échéant, d'une règle d'arrondi au centime d'euros supérieur.
A noter que la société « NC Numéricable », RCS 400 461 950, code opérateur UPCF, a changé de dénomination en « SFR Fibre SAS » à compter du 22 mars 2018, modification notifiée à l'Autorité le 28 mai 2018.


9. La régularisation


Tout écart entre les valeurs définitives et les valeurs provisionnelles du coût net des obligations de service universel donne lieu à régularisation, selon les règles susvisées. Celle-ci peut se traduire, pour un contributeur particulier, soit par un solde de contribution à verser (régularisation nette débitrice), soit par le remboursement d'un trop perçu (régularisation nette créditrice).
Cette régularisation est notifiée aux contributeurs concernés.
Pour les contributeurs ayant une régularisation nette débitrice, la notification qui leur est envoyée en précise l'échéance. Tout retard de paiement est porteur d'intérêts légaux qui viennent majorer la somme initialement notifiée, indépendamment des procédures en application de l'article L. 36-11 du CPCE prévues pour non-respect de l'obligation de financement du service universel.
Les contributeurs ayant une régularisation nette créditrice reçoivent leur quote-part des sommes perçues des autres contributeurs dans les conditions fixées par l'article R. 20-42 du CPCE.
Décide :