Après en avoir délibéré le 17 décembre 2019,
L'article L. 36-5 du CPCE prévoit que l'Autorité est consultée sur les projets de loi, de décret ou de règlement relatifs au secteur des communications électroniques et participe à leur mise en œuvre.
Par un courrier en date du 13 décembre 2019, le directeur général des entreprises a sollicité l'avis de l'Autorité sur un projet d'arrêté fixant la quatrième liste des zones à couvrir par les opérateurs mobiles au titre du dispositif de couverture ciblée pour l'année 2019.
1. Contexte de la saisine
Dans le cadre du « New Deal mobile » intervenu en janvier 2018, les opérateurs ont pris des engagements qui ont été retranscrits, à leur demande, dans les autorisations d'utilisation de fréquences dans les bandes 900 MHz, 1 800 MHz et 2,1 GHz actuelles de Bouygues Telecom, Free Mobile, Orange et SFR, en tant qu'obligations ; ces obligations figurent également en substance dans les autorisations d'utilisation de fréquences délivrées en 2018 à la suite de la procédure d'attribution des fréquences des bandes 900 MHz, 1800 MHz et 2,1 GHz.
Parmi ces nouvelles obligations, le dispositif dit de « couverture ciblée » permet en particulier d'améliorer de manière localisée la couverture de zones dans lesquelles un besoin d'aménagement numérique du territoire est identifié.
Dans ce cadre, le ministre chargé des communications électroniques identifiera, à terme, jusqu'à 5 000 nouvelles zones à couvrir par opérateur participant. Sur chaque zone pour laquelle il a été désigné, l'opérateur participant a l'obligation de fournir des services de radiotéléphonie mobile et d'accès mobile à très haut débit, grâce à l'installation d'un nouveau site.
Pour les années 2018 et 2019, le ministre chargé des communications électroniques a adopté quatre arrêtés fixant les listes de zones à couvrir au titre du dispositif de couverture ciblée.
Le projet d'arrêté dont l'Arcep est saisie pour avis établit la quatrième liste des zones à couvrir par les opérateurs mobiles au titre du dispositif de couverture ciblée pour l'année 2019.
2. Observations de l'Arcep
2.1. Analyse des zones à couvrir
Au préalable, l'Arcep rappelle que le dispositif de couverture ciblée complète les obligations de couverture générales des opérateurs et vise à améliorer la couverture mobile sur des zones dans lesquelles un besoin aura été précisément identifié par les collectivités territoriales. Ainsi, il appartient bien aux collectivités territoriales, dans le respect du cadre mis en place par le gouvernement, d'identifier les zones à couvrir ainsi que de désigner les opérateurs concernés.
L'Autorité souligne les deux sujets suivants relatifs aux zones à couvrir dans le cadre du dispositif de couverture ciblée telles qu'elles figurent dans le projet d'arrêté.
2.1.1. Objectif de couverture par les quatre opérateurs et partage de réseau
Aux termes des autorisations d'utilisation de fréquences des opérateurs, pour chaque zone du dispositif de couverture ciblée « l'objectif est d'y apporter la couverture de tous les opérateurs ».
De plus, pour les zones à couvrir conjointement par deux opérateurs ou plus, les opérateurs concernés par une même zone sont tenus de mettre en œuvre conjointement a minima un partage des éléments passifs d'infrastructures. Pour les zones concernant les quatre opérateurs, lorsqu'à la date de publication de l'arrêté, aucun des opérateurs n'y fournit de service de radiotéléphonie mobile à un niveau de « bonne couverture » (1), les opérateurs sont tenus de mettre en œuvre conjointement une mutualisation de réseaux dans les conditions fixées par leurs autorisations d'utilisation de fréquences.
a) Prise en compte de l'objectif de couverture par les quatre opérateurs
Dans certaines zones, le projet d'arrêté ne désigne que certains opérateurs et n'a pas pour effet de conduire à la couverture des quatre opérateurs (cf. Annexe, qui recense les souhaits de modification de la part des opérateurs).
A ce sujet, l'Arcep rappelle que les observations qu'elle a formulées dans ses précédents avis (2) sur les conséquences liées au choix de ne pas désigner les quatre opérateurs pour couvrir une zone restent pertinentes. Une telle situation aboutirait à une couverture partielle (couverture des seuls clients de certains opérateurs sur une zone donnée) ou, à terme, pourrait conduire à une multiplication des sites ou des antennes des différents opérateurs (générant ainsi des surcoûts) qui n'apparaît pas efficace en termes de partage de réseaux.
Il paraît souhaitable, pour de telles situations, de demander la confirmation aux collectivités territoriales concernées de leur choix de désigner ou non des opérateurs pour couvrir ces zones du dispositif de couverture ciblée. En effet, il est essentiel que les collectivités territoriales soient éclairées sur les conséquences de leur choix visant à ne pas désigner les quatre opérateurs pour couvrir une zone - et notamment sur le fait que de telles zones pourraient rester durablement des zones grises.
b) Zones concernées par deux arrêtés distincts
Certaines zones apparaissent dans deux arrêtés distincts, avec des opérateurs différents pour chacun d'entre eux.
Dès lors que deux arrêtés sont publiés à des dates rapprochées (quelques mois d'écart) portant sur des mêmes zones, l'Arcep considère que les opérateurs désignés pour couvrir ces zones devraient mettre en œuvre, conjointement, les dispositions relatives au partage de réseau, en vue d'une mise en œuvre efficace des déploiements du dispositif de couverture ciblée.
Pour autant, afin d'éviter la complexité liée à une telle situation, il serait souhaitable que les opérateurs concernés par une même zone soient tous désignés de manière concomitante.
Dans le même esprit, il serait souhaitable que le gouvernement publie dans les plus brefs délais le premier arrêté fixant la liste des zones à couvrir au titre de 2020, s'il contient des zones figurant aussi dans le dernier projet d'arrêté de 2019.
c) Nombre de zones pour lesquelles Free Mobile est désigné au titre de 2019
Le projet d'arrêté soumis à l'avis de l'Arcep porte à 731 le nombre de zones à couvrir par Free Mobile au titre de l'année 2019. Free Mobile a confirmé formellement, par un courrier du 6 décembre 2019 adressé au directeur de la Mission France Mobile, son accord pour que le quota de 700 zones fixé dans les AUF pour l'année 2019 soit dépassé.
Dès lors qu'il reçoit l'accord de l'opérateur, ce dépassement n'appelle pas de remarque de la part de l'Arcep.
L'Arcep souligne que l'ensemble de ces zones seront soumises aux dispositions prévues dans les autorisations de fréquences notamment en termes d'obligation de fourniture de services, de délais de mise en œuvre, d'obligation de mutualisation, etc.
2.1.2. Articulation entre le projet d'arrêté, objet du présent avis, et le projet d'arrêté définissant la première liste des zones à couvrir par Orange et SFR au titre du dispositif d'extension de la couverture en « 4G fixe » en attente de publication
L'Arcep a rendu un avis sur le projet d'arrêté définissant la première liste des zones à couvrir par Orange et SFR au titre du dispositif d'extension de la couverture en « 4G fixe » (3).
Dans cet avis, l'Autorité avait souligné que les déploiements qui découleront de l'arrêté « 4G fixe » devront permettre de fournir un tel service à des locaux supplémentaires, et considéré que « ne seront pas couverts par la notion de « locaux supplémentaires » des locaux qui […] seront couverts par le réseau mobile à très haut débit de l'opérateur concerné en application de ses autres obligations, dont notamment les obligations […] de participation au dispositif de couverture ciblée. »
Or, l'Arcep relève au moins un cas (point d'intérêt lié au site 2019_LOT3_ZG_43_005_S2) de zone prévue par le projet d'arrêté soumis à l'avis de l'Arcep, à proximité immédiate d'une zone du projet d'arrêté « 4G fixe », et invite le gouvernement à s'assurer de la bonne articulation entre ces dispositifs pour éviter la superposition des obligations.
2.2. Autres observations
Concernant les délais de mise en œuvre et au suivi des déploiements par l'Arcep, l'Autorité rappelle que les observations qu'elle a formulées dans ses précédents avis (4) restent pertinentes.
Elle souligne à nouveau qu'il est indispensable que les opérateurs transmettent, conformément aux dispositions de leurs autorisations, aux collectivités territoriales et au ministre chargé des communications électroniques les cartes de couverture prévisionnelles des sites permettant de couvrir les zones identifiées par arrêté, dès que leur emplacement exact est connu. Cela répond à un besoin de visibilité des élus locaux et des acteurs chargés de proposer de nouvelles zones à couvrir.
3. Conclusion
L'Arcep émet un avis favorable sur le projet d'arrêté établissant la quatrième liste des zones à couvrir par les opérateurs mobiles au titre de leur obligation de participation au dispositif de couverture ciblée pour l'année 2019, prévue par leurs autorisations d'utilisation de fréquences actuelles dans les bandes 900 MHz, 1 800 MHz et 2,1 GHz.
Les années 2018 et 2019 ont vu l'initialisation de la mise en œuvre opérationnelle du dispositif de couverture ciblée, qui a pu dans certains cas conduire à l'entretien de « zones grises » de couverture. Le gouvernement y a répondu par des mesures ponctuelles. Pour l'avenir, l'Arcep estime préférable de privilégier, dès l'identification initiale des zones, la désignation de l'ensemble des opérateurs n'y apportant pas de couverture mobile.
Le présent avis sera transmis au directeur général des entreprises du ministère de l'économie et des finances et publié au Journal officiel de la République française.