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Article AUTONOME (Avis n° 2019-05 de la Commission consultative des trésors nationaux)

Article AUTONOME (Avis n° 2019-05 de la Commission consultative des trésors nationaux)


La Commission régulièrement convoquée et constituée, réunie le 22 mai 2019,
Après en avoir délibéré,
Considérant que le bien pour lequel le certificat d'exportation est demandé constitue une remarquable page enluminée d'un livre d'heures, illustrant une Piéta entourée de Saint-Jean et des saintes femmes, dont la conception est attribuée à Jean Bourdichon (1457 ? -1521 ?), peintre successeur de Jean Fouquet auprès de Louis XI, puis peintre en titre de Charles VIII, Louis XII et François Ier ; que sa qualité d'exécution, le grand format des pages et ses caractéristiques stylistiques ont permis de relier cette image peinte à un ensemble de feuillets dispersés provenant d'un livre d'heures royal dépecé, les Heures de Louis XII, datable de 1498-1499 ; que ces Heures réalisées au début de son règne, puisque Louis XII (1462-1515) y est mentionné avec l'âge de 36 ans, ont peut-être été emportées par sa dernière épouse, Mary Tudor (1496-1533), sœur du roi Henri VIII, en Angleterre, où sont apparus dès le début du XVIIIe siècle les premiers feuillets détachés du manuscrit ; que seize feuillets de parchemin enluminés, en dehors de cette Piéta restée inédite, sont actuellement répertoriés comme issus de ce livre d'heures royal, dont deux sont conservés en France, l'Adoration des mages au musée du Louvre et l'Arrestation du Christ au musée Marmottan ; que cette Piéta, en pleine page et au verso vierge, formait à l'origine le feuillet de gauche du diptyque ouvrant les Heures de Louis XII, celui de droite représentant Louis XII en prières, aujourd'hui au Getty Museum de Los Angeles, selon le même principe et des modèles très proches réutilisés par la suite par Bourdichon pour le début des Grandes Heures d'Anne de Bretagne ; que cette scène avec la Vierge, accompagnée de saints, qui porte contre elle le corps du Christ présentant les plaies de la Passion, s'avère représentative de la facture raffinée et empreinte de douceur de Bourdichon, qui, pour autant, dans le contexte des pratiques d'atelier d'enluminure de l'époque, avait peut-être confié l'exécution à un enlumineur de son cercle ; que cette enluminure traduisant la dévotion du roi de France pour la Vierge de pitié, apparaît, par sa composition magistrale, comme un prototype du même sujet dans le chef-d'œuvre de Bourdichon, les Grandes Heures d'Anne de Bretagne, qu'il réalisa dans la première décennie du XVIe siècle, et représente un précieux vestige du livre de prières de Louis XII, qui ne pourra être reconstitué mais dont les éléments épars restent des témoins essentiels de l'art d'un des principaux peintres et enlumineurs de la Renaissance française ;
Qu'en conséquence, cette œuvre présente un intérêt majeur pour le patrimoine national du point de vue de l'histoire et de l'art et doit être considérée comme un trésor national,
Emet un avis favorable au refus du certificat d'exportation demandé.