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Article AUTONOME (LOI n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (1))

Article AUTONOME (LOI n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (1))


Annexe 3. Périmètre des mesures ponctuelles et temporaires à exclure de la mesure du solde structurel


Afin de traiter des mesures ponctuelles qui modifient de manière temporaire les soldes publics, le Pacte de stabilité et de croissance a introduit, dès sa révision de 2005, la notion de mesures « ponctuelles et temporaires » (one-off en anglais) qui n'ont pas d'impact pérenne sur le déficit public. Ce concept vise à couvrir des événements de très grande ampleur qui brouillent la lecture de l'équilibre des finances publiques. Le solde structurel est ainsi défini comme le solde public corrigé des effets du cycle économique et de ces mesures ponctuelles et temporaires.


I. - La définition générale des mesures ponctuelles et temporaires doit être complétée par une analyse au cas par cas


L'évolution des finances publiques résulte d'une multitude d'évènements temporaires et exceptionnels. Il est donc malaisé de distinguer ce qui peut être considéré comme un élément exceptionnel et ce qui relève du domaine de l'ordinaire. Par exemple, beaucoup d'investissements publics sont par nature des dépenses « uniques » : la construction d'une route, d'une école ou d'une ligne à grande vitesse. Pour autant, il ne serait pas envisageable d'exclure les investissements du solde structurel. Cette problématique est générale en termes de finances publiques : les coûts des opérations extérieures (guerre, opération à l'étranger), les dépenses en cas de catastrophes naturelles, le déclenchement de garanties, peuvent représenter des montants importants, parfois temporaires, qu'il est difficile de caractériser.
La Commission Européenne a développé dans le rapport « Public Finance in the EMU 2015 » une doctrine concernant la classification de mesures en mesures ponctuelles et temporaires, reprise ensuite dans le « Vade Mecum on the Stability and Growth Pact » (édition 2016). La Commission Européenne donne 5 principes pour exclure une mesure du solde structurel (mesure dite one-off) :
1. La mesure est intrinsèquement non récurrente ;
2. Le caractère de one-off ne peut pas être décrété par la loi ou par une décision du gouvernement ;
3. Les composantes volatiles des recettes ou des dépenses ne doivent pas être considérées comme one-offs ;
4. Les mesures discrétionnaires conduisant à creuser le déficit public ne sont pas, sauf exception, des one-offs ;
5. Seules les mesures ayant un impact significatif sur le solde public (i.e. supérieur à 0,1 % du PIB) peuvent être traitées en one-off.
Le principe n° 4 introduit une asymétrie dans l'appréciation de la Commission sur les mesures one-off. En effet, la Commission présume que les mesures qui creusent le solde public ont plus souvent un caractère permanent que celles qui l'améliorent, et donc ne peuvent être exclues sauf exception de la mesure du solde structurel, sans apporter de justification de fond à cette différence. A partir de ces principes, la Commission dresse une liste non-exhaustive de mesures pouvant être classés en one-off, parmi lesquelles :


- Des recettes fiscales exceptionnelles liées à une mesure temporaire d'amnistie fiscale ;
- Des décisions consistant à décaler de manière permanente le calendrier d'encaissement de recettes fiscales, ou de manière temporaire certaines dépenses ;
- Des cessions importantes d'actifs non-financiers (immobilier par exemple) ;
- Des coûts temporaires associés à la réponse à des désastres naturels majeurs ou d'autres événements exceptionnels.


En tout état de cause, la Commission adopte cependant une approche au cas par cas et se réserve la décision de classer ou non une mesure donnée comme « ponctuelle et temporaire ».


II. - La doctrine proposée par le Gouvernement pour la LPFP 2018-2022


Tout en reconnaissant que le caractère ponctuel et temporaire des mesures doit être apprécié au cas par cas, le Gouvernement propose un ensemble de critères permettant de mieux appréhender la notion de one-offs, regroupés en trois ensembles.
A. - Premier ensemble : les mesures définies comme one-off en amont de la programmation, au regard de leur effet ponctuel et temporaire sur les finances publiques : seule la réforme du CICE entre dans cette catégorie.
Ces mesures sont sélectionnées à la lumière de 4 principes.
(1) L'événement concerné ne doit pas être récurrent
Aucune catégorie d'événements récurrents ne peut être exclue par principe de la mesure du solde structurel. Par exemple, les remises de dette aux Etats étrangers sont fréquentes en France, notamment dans le cadre du Club de Paris et de sa politique d'aide au développement. Exclure systématiquement de telles opérations viendrait biaiser la mesure du déficit. De même, les dépenses liées aux catastrophes naturelles ou aux opérations militaires extérieures, bien qu'irrégulières, sont récurrentes. Enfin, des opérations qui relèvent de la gestion habituelle du patrimoine non financier de l'Etat (investissement public, cessions d'immeubles, gestion du patrimoine immatériel comme les fréquences hertziennes) n'ont pas non plus vocation à être systématiquement corrigées en one-off. Seule une analyse au cas par cas permettrait de retirer celles dont l'ampleur complique la lecture du déficit public.
(2) Une année donnée, le nombre de one-offs doit être limité pour éviter de biaiser la mesure du déficit public
Ce principe pose un garde-fou face au grand nombre de mesures ponctuelles qui rythment en pratique l'évolution du solde des administrations publiques (investissements exceptionnels par exemple), pour éviter un recours trop systématique à la classification en one-off qui biaiserait le calcul du solde structurel.
(3) L'événement concerné doit entraîner un impact budgétaire significatif
Il convient ainsi de n'envisager que des facteurs qui peuvent potentiellement représenter un impact budgétaire positif ou négatif important.
(4) Toute mesure qui améliore le solde public aujourd'hui pour le dégrader systématiquement dans le futur doit être considéré comme un one-off
Suivant les règles du Système Européen des Comptes 1995 (SEC 95), c'était le cas des soultes liées à la reprise des obligations futures de paiement de retraite (les administrations récupèrent en une fois une compensation correspondant à la valeur actualisée des déséquilibres futurs). Néanmoins, depuis la publication des comptes suivant les règles du SEC 2010, les soultes reçues en contrepartie d'engagement de retraites n'améliorent plus le déficit en une seule fois mais sur de nombreuses années, ce qui supprime la nécessité de les classer en one-off.
Au total, suivant ces critères, seules les réformes du CICE et du CITE prévues toutes les deux en 2019 doivent être qualifiées ex-ante de one-off.
Le CICE est un avantage accordé sur la masse salariale versée par les entreprises. La réforme proposée n'en modifie ni le niveau, ni le fait générateur économique. La transformation du CICE en baisse de cotisations sociales au 1er janvier 2019 permet de conserver inchangé l'avantage auxquelles les entreprises ont droit sur leur masse salariale. Alors que la masse salariale versée courant 2018 permet d'obtenir un droit au CICE (6 % de la MS < ; 2,5 SMIC), la masse salariale versée courant 2019 est soumise à des réductions de cotisations équivalentes : il n'y a donc ni interruption ni modulation de la réduction du coût du travail entre 2018 et 2019. Seule la date de paiement est avancée, avec un changement de calendrier aboutissant à un double coût en 2019.
La fraction de la baisse de cotisation venant en plus de l'ancien CICE (qui correspond à une extension de champ) constitue une mesure supplémentaire, indépendante de la problématique de la bascule.
Le double coût en 2019 est dû à une modification pérenne du calendrier de versement de l'avantage équivalent au CICE. En comptabilité nationale, des modifications non-pérennes du calendrier de paiement de certains impôts ou de dépenses de subventions doivent être corrigées, afin de ne pas perturber la mesure du solde public pour des raisons purement budgétaires (5). En revanche, dans le cas de transferts dont le montant final n'est établi avec certitude que dans une période comptable ultérieure à leur fait générateur économique, comme c'est le cas des crédits d'impôts (6), les modifications pérennes ne sont pas corrigées et peuvent conduire à des pics temporaires de recettes ou de dépenses (7).
Le double coût en 2019 doit être exclu de la mesure sur solde structurel car il est ponctuel et temporaire. Le changement de date de versement du CICE intervient en effet en une seule fois et son effet sur le solde public ne porte que sur une année.
Ensemble 1 : Mesures considérées comme one-off en amont de la programmation au regard de leur impact ponctuel et temporaire
LPFP 2014-2017 (SEC 2010) : Aucune.
LPFP 2018-2022 : Réforme du CICE.
B. - Deuxième ensemble : les événements dont l'impact budgétaire est substantiel mais dont la temporalité est incertaine.
Au moment de la programmation pluriannuelle, il convient de traiter de manière spécifique les éléments connus ex ante, pour lesquels l'incertitude entourant les montants concernés ou les dates d'occurrence ou d'imputation est importante. Cette logique prévaut dans le traitement en one-off des contentieux fiscaux de série (ou « de masse ») dont l'instruction est en cours. Cette incertitude ne vient pas biaiser la mesure du solde structurel, puisque les montants sont déjà provisionnés dans la trajectoire initiale.
Ensemble 2 : Evénements importants financièrement mais incertains en termes de temporalité, considérées comme one-off en amont des lois de programmation.
LPFP 2014-2017 : contentieux fiscaux de masse.
LPFP 2018-2022 : contentieux fiscaux de masse.
C. - Troisième ensemble : dans le cadre du contrôle ex post, des événements imprévus ayant un impact unique sur le solde public peuvent être traités en one-off.
Le traitement des événements imprévus dans le cadre du contrôle ex post doit être apprécié au regard des règles organiques relatives au mécanisme de correction des écarts.
Si, en cours de mise en œuvre de la programmation, des événements d'impact très important apparaissent, qui n'avaient pu être anticipés ex ante et qui ne modifient pas la trajectoire de moyen terme, il serait inutile de prendre des mesures pour corriger la déviation compte tenu de leur caractère temporaire. Du point de vue des règles organiques, il est alors pragmatique de les traiter en one-off pour éviter de déclencher inutilement le mécanisme de correction. Les critères de taille et de non pérennité sont essentiels pour juger des mesures à inclure dans cette catégorie.
Ensemble 3 : Evénements imprévus à intégrer en tant que one-offs ex post :
LPFP 2014-2017 : Changement de temporalité dans l'enregistrement en comptabilité nationale des budgets rectificatifs de l'Union Européenne fin 2014.
LPFP 2018-2022 : Aucune information à ce stade. Exceptionnel et non anticipé par nature.