Après en avoir délibéré le 28 novembre 2017,
1. Contexte
1.1. Cadre juridique
En application du 5° de l'article L. 5-2 du CPCE, l'Autorité « émet un avis public sur les aspects économiques des tarifs visés au deuxième alinéa de l'article L. 4, préalablement à leur homologation par les ministres chargés des postes et de l'économie ». Les tarifs visés au deuxième alinéa de l'article L. 4 sont les tarifs des prestations offertes à la presse au titre du service public du transport et de la distribution de la presse, soumises au régime spécifique prévu par le CPCE. La structure tarifaire de ces prestations a pour objectif de favoriser le pluralisme, notamment celui de l'information politique et générale.
L'article R. 1-1-17 du CPCE prévoit que : « La Poste soumet son projet de tarifs à l'approbation des ministres chargés des postes et de l'économie. Le ministre chargé des postes saisit l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes qui dispose d'un mois pour rendre son avis sur les aspects économiques du projet. Sauf décision contraire des ministres dans le délai de deux mois suivant la réception du projet, les tarifs sont réputés approuvés. »
1.2. Les orientations fixées en 2016
Une mission, confiée en 2008 à M. Marc Schwartz concernant l'acheminement des abonnements de presse par postage ou par portage, avait conduit à la signature d'un protocole d'accord le 23 juillet 2008. Cet accord portait sur une période de sept ans, de janvier 2009 à décembre 2015 et arrêtait un plan de revalorisation tarifaire fondé sur des paliers de hausses annuelles.
Dans le prolongement de l'accord précité, une décision interministérielle en date du 5 septembre 2016 a fixé le niveau des augmentations tarifaires ainsi que le montant des compensations accordées par l'Etat à La Poste pour la période 2017-2020. Aux termes de cette décision, il est prévu une augmentation annuelle hors inflation de 0 % pour les titres à faibles ressources publicitaires, de 1 % pour la presse d'information politique et générale et de 3 % pour la presse magazine. L'application d'évolutions tarifaires différenciées à partir de 2017 entre la catégorie dénommée « presse de la connaissance et du savoir » et la catégorie dénommée « presse de loisirs et de divertissements » est abandonnée.
Lors de la conférence des éditeurs qui a eu lieu le 3 octobre 2016, la ministre de la culture et de la communication avait par ailleurs annoncé :
- d'une part, qu'il n'y aurait pas de rattrapage du moratoire résiduel lié à la décision de 2009 de différer d'une année les évolutions tarifaires prévues par les accords Schwartz pour la presse d'intérêt publique et général ;
- d'autre part, que, dans un souci d'équité, tous les suppléments de la presse d'information politique et générale verraient, de façon lissée et sur quatre ans, leur tarif postal s'aligner sur celui des magazines dont le contenu est similaire.
1.3. Les évolutions intervenues en 2017
La Poste a mis en place, après l'avis n° 2017-0869 de l'ARCEP datant du 11 juillet 2017, une offre de distribution J + 2. Celle-ci s'adresse à la généralité des publications inscrites sur les registres de la CPPAP. Elle n'est pas déclinée sur le régime tarifaire spécifique dont bénéficient la presse d'information politique et générale et les quotidiens à faibles ressources de publicité compte tenu des modalités particulières de tarification de ces familles de presse.
L'offre de distribution à J + 2 est assortie d'un engagement de qualité de service de 95 % d'objets distribués en J + 2.
Cette nouvelle offre répond à la recommandation formulée en 2015 par l'ARCEP dans son avis n° 2015-0831 au Gouvernement sur les coûts de la presse que La Poste engage « une diversification de l'offre de postage par une offre en J + 2, qui pourrait intéresser certains éditeurs tout en procurant à La Poste des économies, répercutées sur les tarifs. ».
Par ailleurs, dans le prolongement des travaux réalisés en 2015 et à la suite de la consultation publique menée entre le 26 juin et le 26 juillet 2017, l'ARCEP a adopté le 19 septembre 2017 la décision n° 2017-1100 modifiant les règles d'allocation des coûts fixes de distribution selon la catégorie de poids-format. Cette décision a pour effet d'alléger le compte presse et de réduire son déficit.
2. Le dossier tarifaire de La Poste pour l'année 2018
La Poste a transmis à la Direction générale des entreprises son dossier portant sur les propositions d'évolutions tarifaires pour l'année 2018 des prestations offertes à la presse au titre du service public de transport et de distribution de la presse et soumises au régime spécifique prévu par le CPCE.
Conformément à l'article R. 1-1-17 du CPCE, le ministre chargé des postes a saisi le 15 novembre 2017 l'ARCEP pour avis sur les aspects économiques du dossier tarifaire soumis par La Poste.
Concernant les titres admis au bénéfice du régime de la CPPAP (hors presse d'information politique et générale et quotidiens à faibles ressources et de petites annonces), le dossier prévoit qu'une revalorisation de 3,0 % sera appliquée sur les tarifs de chacun des quatre niveaux d'urgence en sus du terme d'inflation de 0,66 %, valeur de l'évolution de l'indice des prix à la consommation hors tabac entre juin 2016 (100,64) et juin 2017 (101,3). La hausse globale de 3,68 % sera appliquée sur le tarif pivot de la « liasse directe code postal ».
Concernant la presse d'information politique et générale ainsi que les quotidiens à faibles ressources publicitaires, les revalorisations tarifaires s'élèveront respectivement en 2018 à 1,0 % et 0,0 %, soit des hausses globales de 1,67 % et 0,66 % sur le tarif pivot en tenant compte de l'inflation.
Les tarifs applicables selon les niveaux d'urgence, le degré de préparation des envois, le caractère mécanisable ou non du produit de presse au regard des spécifications techniques émises par La Poste et les options disponibles s'en déduisent par l'application des coefficients présentés en annexe.
S'agissant de la tarification des suppléments de la presse d'information politique et générale, La Poste propose que cette tarification fasse l'objet d'un abattement dégressif correspondant à une fraction du différentiel entre le tarif urgent des titres admis au bénéfice du régime de la CPPAP et le tarif actuel de la PIPG. Cet abattement était de 75 % en 2017, il sera de 50 % en 2018 et de 25 % en 2019. Ainsi, à partir de 2020, les tarifs appliqués aux suppléments convergeront vers ceux des titres admis au bénéfice du régime de la CPPAP.
3. Analyse de l'Autorité
Les augmentations tarifaires de base hors inflation prévues par La Poste dans son dossier tarifaire sont conformes à celles fixées par le Gouvernement. Elles correspondent à une hausse hors inflation de 3,0 % pour les titres admis au bénéfice du régime de la CPPAP, de 1 % pour la presse d'information politique et générale et 0 % pour les quotidiens à faibles ressources publicitaires. L'inflation de référence utilisée est calculée selon la même méthode que celle employée les années précédentes et correspond à l'évolution annuelle de l'indice des prix à la consommation hors tabac entre juin 2016 et juin 2017. Pour l'année 2018 l'inflation retenue sera de 0,66 %.
La Poste continue d'appliquer le mécanisme de convergence permettant d'appliquer à horizon 2020 des tarifs équitables entre les suppléments de la presse d'information politique et générale et les tarifs des titres admis au bénéfice du régime de la CPPAP.
Dans un contexte de baisse des volumes postaux la décision de l'ARCEP n° 2014-0841, modifiée par la décision n° 2017-1101, a fixé l'évolution moyenne annuelle hors inflation des tarifs des prestations du service universel à 3,5 % sur la période 2015-2018. Au regard de ces évolutions, la hausse moyenne des tarifs des prestations de transport et de distribution de la presse en 2018, s'élevant à 2,4 % hors inflation, parait modérée. Cette évolution est par ailleurs proche de celle observée en 2017 (2,5 %) et 2016 (2,4 %) et sensiblement plus faible que celles observées les années précédentes (7,3 % en 2015 et 8,7 % en 2014).
Enfin, l'Autorité relève qu'en 2016 le compte de la presse de service public présente un déficit brut à hauteur de 485 millions d'euros, ce qui compte tenu de la compensation de 119 millions d'euros versée par l'Etat conduit à un déficit net de 366 millions d'euros. Ces déficits auront vocation à se réduire, sans toutefois disparaitre, avec l'application complète, en 2018, des nouvelles règles d'allocations des coûts.
4. Conclusion
Dans un contexte de baisse des volumes postaux, les évolutions tarifaires proposées en 2018 sont modérées et proches de celles observées en 2016 et 2017. Ces évolutions sont conformes à celles annoncées par le Gouvernement.
Ces évolutions ne permettent pas aux tarifs de refléter les coûts sous-jacents. Ce constat n'est pas remis en cause par la décision de l'ARCEP n° 2017-1100 du 19 septembre 2017, modifiant les règles d'allocation des coûts fixes de distribution selon la catégorie de poids-format.
Enfin, l'alignement tarifaire pour les suppléments de la presse d'information politique et générale sur les tarifs de la presse CPPAP va dans le sens d'une plus grande équité et logique économique.
Le présent avis sera transmis au ministre chargé des postes. Il sera publié au Journal officiel de la République française.