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Article AUTONOME (Décision n° 2017-1488 du 14 décembre 2017 de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes définissant les conditions économiques de l'accès aux infrastructures de génie civil de boucle locale d'Orange)

Article AUTONOME (Décision n° 2017-1488 du 14 décembre 2017 de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes définissant les conditions économiques de l'accès aux infrastructures de génie civil de boucle locale d'Orange)


Après en avoir délibéré le 14 décembre 2017,


1. Contexte


Depuis près de dix ans, pour répondre notamment au développement croissant des usages sur internet, de nouveaux réseaux à très haut débit en fibre optique sont déployés jusqu'au domicile des abonnés. En dehors de Paris et de quelques autres communes disposant d'infrastructures alternatives comme les égouts visitables, le déploiement de ces nouveaux réseaux se fait principalement en utilisant le génie civil construit par Orange pour son réseau cuivré.
L'Autorité a imposé à Orange, dans sa décision n° 2008-0835 en date du 24 juillet 2008, de donner accès à son génie civil de boucle locale pour permettre aux opérateurs alternatifs de déployer leurs réseaux en fibre optique dans les mêmes conditions que celui-ci.
Le 20 septembre 2010, dans le cadre spécifique du déploiement des réseaux très haut débit en Europe, la Commission européenne a adopté la recommandation 2010/572/UE proposant une base réglementaire harmonisée pour le déploiement des réseaux de nouvelle génération. Elle vient préciser les obligations qu'il convient d'imposer à un opérateur qui serait déclaré comme exerçant une influence significative sur les marchés de la fourniture en gros d'accès physique à l'infrastructure du réseau (« marché 4 ») et de la fourniture en gros d'accès à haut débit (« marché 5 ») (1).
Elle précise en particulier que « lorsqu'il existe de la capacité disponible dans les fourreaux, les Autorités de Régulation Nationales (ARN) devraient rendre obligatoire l'accès à l'infrastructure de génie civil. L'accès devrait être fourni conformément au principe d'équivalence […] Les ARN devraient veiller à ce que l'accès à l'infrastructure de génie civil existante soit fourni à des tarifs orientés vers les coûts… ». Enfin, « lorsqu'il est introduit une demande d'offre de référence pour l'accès à l'infrastructure de génie civil, les ARN devraient rendre cette offre obligatoire aussi tôt que possible ».
La recommandation établit dans son annexe I les principes de mise en œuvre de l'obligation d'orientation vers les coûts. Ainsi, « les ARN devraient réglementer les tarifs d'accès à l'infrastructure de génie civil conformément à la méthode employée pour la tarification de l'accès dégroupé à la boucle locale en cuivre. Elles devraient veiller à ce que les tarifs d'accès reflètent les coûts effectivement supportés par l'opérateur PSM. […] Lorsqu'elles fixent le tarif d'accès à l'infrastructure de génie civil, les ARN devraient considérer que le profil de risque n'est pas différent de celui de l'infrastructure en cuivre, sauf si l'opérateur PSM a dû encourir des coûts de génie civil spécifiques - dépassant les coûts de maintenance normaux - pour déployer un réseau NGA. »
Le 9 novembre 2010, l'Autorité a adopté la décision n° 2010-1211 définissant les conditions économiques de l'accès aux infrastructures de génie civil de boucle locale en conduite d'Orange.
En 2017, l'Autorité a analysé le marché pertinent « de fourniture en gros d'accès local en position déterminée » correspondant au marché « numéro 3a » tel que figurant dans l'annexe de la recommandation de la Commission européenne 2014/710/UE du 9 octobre 2014 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante. Cette analyse de marché a succédé, au titre du cinquième cycle d'analyses, aux décisions n° 05-0275, n° 05-0277, n° 08-0835, n° 2011-0668 et n° 2014-0733. Elle a donné lieu à la décision n° 2017-1347 en date du 14 décembre 2017 portant sur la définition du marché pertinent de fourniture en gros d'accès local en position déterminée, sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché.
Aux termes de cette décision, Orange a été désigné comme exerçant une influence significative et s'est vu imposer des obligations, et plus particulièrement de :


- faire droit aux demandes raisonnables d'accès aux infrastructures de génie civil mobilisables pour le déploiement de boucles locales optiques et aux ressources et services qui y sont associés ;
- publier une offre de référence technique et tarifaire d'accès à ces infrastructures ;
- offrir les prestations relatives à cette offre ainsi qu'aux ressources et services associés à des tarifs reflétant les coûts correspondants, en respectant en particulier les principes et objectifs d'efficacité, de non-discrimination et de concurrence effective et loyale ;
- se soumettre à une obligation de comptabilisation des coûts de ces prestations ainsi qu'à une obligation de séparation comptable.


Concernant plus particulièrement ces deux dernières obligations, les précédentes décisions d'analyses de marché disposaient que les modalités en sont précisées par la décision de l'Autorité n° 2010-1211 du 9 novembre 2010.
Au regard du rôle croissant de l'accès au génie civil d'Orange pour le déploiement des réseaux fibre depuis l'adoption de la décision n° 2010-1211 du 9 novembre 2010, des évolutions de la régulation intervenues depuis lors et du retour d'expérience de l'application de cette décision, l'Autorité a engagé des réflexions concernant sa révision.
A cet effet, et conformément au cadre en vigueur, en particulier le V de l'article L. 32-1 du CPCE, l'Autorité a lancé un processus de consultation des acteurs du secteur. Une première consultation publique s'est ainsi tenue du 9 février 2017 au 22 mars 2017, présentant l'ensemble des options envisagées par l'Autorité. Une seconde consultation publique s'est tenue du 11 mai 2017 au 12 juin 2017, proposant un projet de décision.
L'Autorité a ensuite notifié le 27 octobre 2017 à la Commission européenne, à l'ORECE et aux autorités réglementaires nationales des autres Etats membres les mesures envisagées, conformément à l'article 7 de la directive « cadre ». La Commission européenne a répondu le 24 novembre 2017, ne formulant pas d'observations.


2. Comptabilisation des coûts pour l'accès au génie civil de boucle locale
2.1. L'assiette de coûts pertinents
2.1.1. Le génie civil de boucle locale


Le réseau d'Orange peut être vu comme comportant deux parties principales : la boucle locale, ou réseau d'accès, qui correspond à la ligne d'abonné (c'est-à-dire, sur un réseau téléphonique fixe, la partie du réseau située entre le répartiteur et l'abonné final) et le cœur de réseau, également appelé réseau général, qui correspond à l'ensemble des supports de transmission et de commutation à partir du répartiteur. Le génie civil d'Orange se répartit entre ces deux parties principales.
Le réseau d'accès a été déployé massivement par Orange (anciennement France Télécom) durant les années 1970 et dessert l'ensemble du territoire. Il comporte environ 30 millions de lignes de cuivre actives à ce jour, reliant les 19 400 répartiteurs (situés dans les nœuds de raccordement d'abonnés, NRA) d'Orange aux locaux des abonnés. Ces lignes sont physiquement des câbles à paires symétriques (les « paires de cuivre »).
Pour déployer ce réseau, Orange a eu recours au génie civil souterrain et à l'aérien.
S'agissant du génie civil souterrain, deux modalités de pose existent : la pose dite en conduite et la pose dite en pleine terre. Le génie civil aérien comprend les poteaux et assimilés dont Orange est propriétaire et, d'autre part, les appuis communs sur lesquels Orange n'est propriétaire que des traverses accueillant ses câbles.
Le génie civil visé par l'obligation d'accès imposée à Orange, ainsi que par les obligations tarifaires afférentes, est composé de la part utilisée pour la boucle locale du génie civil en conduite ainsi que du génie civil aérien (ci-après désignés ensemble « génie civil de boucle locale » (2) sauf précision contraire).


2.1.2. L'assiette de coûts pertinents


Les coûts pertinents de génie civil de boucle locale d'Orange correspondent aux coûts de génie civil de boucle locale d'Orange, tels qu'issus de sa comptabilité réglementaire, retraités des acquisitions à titre gratuit.
Le génie civil de boucle locale fait partie des actifs visés par la décision n° 05-0834 du 15 décembre 2005, qui dispose que ces coûts sont valorisés selon la méthode des coûts courants économiques.
Le génie civil de boucle locale est un actif unique qui, sur un même lieu, peut être utilisé par des câbles de cuivre ou être mis à disposition des opérateurs pour y tirer leurs fibres optiques. Il apparait dès lors difficile de considérer que la valeur, l'âge, l'amortissement diffèrent au regard de la finalité d'usage, ce qui conduit à retenir une méthode unique pour la valorisation de cet actif. La recommandation sur les réseaux d'accès de nouvelle génération de la Commission européenne du 20 septembre 2010 préconise qu'une méthode de valorisation unique soit utilisée pour la valorisation des actifs de génie civil en boucle locale. Compte tenu de ces éléments et afin notamment de garantir une stabilité des règles et de la visibilité pour les acteurs du marché, l'Autorité estime qu'il convient de continuer d'appliquer la méthodologie fixée par les décisions n° 05-0834 du 15 décembre 2005 et n° 2012-0007 du 17 janvier 2012.


2.2. Les coûts de patrimoine de génie civil de boucle locale en conduite


Deux allocations successives sont nécessaires pour passer des coûts de génie civil souterrain aux coûts de génie civil de boucle locale en conduite. Premièrement, il s'agit de répartir les coûts de génie civil d'Orange entre génie civil en conduite et génie civil en pleine terre et, dans un deuxième temps, il s'agit d'allouer les coûts en génie civil en conduite entre le génie civil en conduite de boucle locale et le génie civil en conduite utilisé par le réseau général et les autres usages.


2.2.1. L'allocation des coûts de génie civil entre génie civil en conduite et génie civil en pleine terre


La chronique d'investissement en génie civil d'Orange ne fait pas de distinction entre les investissements en génie civil en conduite et les investissements en génie civil en pleine terre. Les investissements en génie civil enregistrés au sein du système comptable d'Orange sont alloués entre le génie civil en conduite et le génie civil en pleine terre en fonction des kilomètres d'alvéoles.
L'utilisation des fourreaux d'Orange pour les déploiements en fibre optique n'a pas d'impact sur le nombre d'alvéoles présents dans les fourreaux. Ainsi, dans la continuité de la décision n° 2010-1211 du 9 novembre 2010, les investissements en génie civil enregistrés au sein du système comptable d'Orange sont alloués entre le génie civil en conduite et le génie civil en pleine terre en fonction des kilomètres d'alvéoles.


2.2.2. L'allocation des coûts de génie civil en conduite entre boucle locale et réseau général


Les coûts de génie civil (et notamment les coûts de génie civil en conduite) sont répartis entre, d'une part, le réseau général et les autres usages (3) et, d'autre part, la boucle locale en fonction des kilomètres totaux de câbles déployés.
Afin de neutraliser l'effet sur cette clé de la coexistence temporaire de câbles de cuivre et de fibre, les coûts du génie civil en conduite sont alloués entre boucle(s) locale(s) et réseau général en tenant compte des longueurs de câbles d'une seule boucle locale, ce qui conduit à ne pas considérer les longueurs de câbles pour les réseaux FttX tant qu'ils dupliquent des câbles cuivre encore présents.


2.3. L'allocation des coûts de génie civil de boucle locale entre cuivre et fibre
2.3.1. Le cas du génie civil en conduite


En construction, le coût du génie civil en conduite dépend relativement peu du volume du nombre de câbles ou de fourreaux qu'il est censé héberger alors qu'il est fortement dépendant de la longueur de génie civil, elle-même dépendante du nombre et de la dispersion des abonnés sur le territoire.
Les coûts de génie civil sont aujourd'hui en grande majorité échus, les coûts liés à son utilisation provenant des annuités des investissements effectués par Orange au cours des années 70 et 80 lors du déploiement massif du téléphone.
Ainsi, en l'absence d'inducteurs de coûts évidents, le choix de l'allocation des coûts de génie civil en conduite entre la boucle locale cuivre et les boucles locales fibre doit être réalisé au regard d'autres critères (par exemple, équité entre opérateurs, efficacité de l'usage de la ressource…) et en fonction de l'unité d'œuvre permettant de donner un bon signal économique au cours de la transition entre ces deux technologies.
Une transition de long terme est en cours durant laquelle les réseaux d'accès, aujourd'hui en très grande majorité en cuivre, vont être progressivement remplacés par des réseaux en fibre optique.
La décision n° 2010-1211 du 9 novembre 2010 retenait une méthode consistant à allouer le coût du génie civil de boucle locale en conduite entre le cuivre et la fibre optique en fonction du nombre d'accès utilisant le génie civil en conduite commercialisés sur le marché de détail dans chaque technologie.
Plus précisément, les accès actifs (4) sur le marché de détail utilisés pour réaliser cette allocation sont définis comme les accès actifs, à la fois résidentiels, entreprise et autres équipements d'accès (BTS, etc.) desservis d'une part en cuivre et d'autre part en fibre dans le cadre d'une offre d'accès issue de la décision d'analyse du marché 3a. Les accès desservis en fibre incluent également les accès d'autres technologies d'accès filaires, constitués au moins en partie de fibre utilisant le génie civil de boucle locale en conduite dans le cadre d'une offre d'accès établie en application de la décision précitée.
Une telle méthode d'allocation, liée à l'adoption de la fibre optique par le marché de détail, semble être en mesure de bien refléter la transition de long terme entre cuivre et fibre. De plus, elle permet une montée en charge progressive des coûts alloués à la fibre optique, cohérente avec les revenus tirés des marchés de détail par les opérateurs. Par ailleurs, par construction, une telle méthode permet de conserver les équilibres actuels sur les produits utilisant le cuivre. Cette méthode donne lieu, à annuité de génie civil constante, à une augmentation progressive de la facture totale des opérateurs empruntant le génie civil de boucle locale d'Orange, proportionnelle au nombre de clients ayant adopté la fibre. A terme, lorsque tous les accès cuivre sur le marché de détail auront migré vers le FttX, les boucles locales fibre supporteront l'intégralité des coûts de génie civil en conduite.
La décision n° 2010-1211 du 9 novembre 2010 prévoyait que s'il est aisé pour un opérateur de prévoir ses déploiements réseau, établir des prévisions d'adoption par le marché de détail est beaucoup plus délicat, en particulier pour une technologie en phase de démarrage. Compte tenu du risque d'erreur, l'Autorité avait jugé pertinent que les accès actifs utilisés pour cette allocation soient constatés et non estimés.
Dans sa consultation publique du 9 février 2017, l'Autorité a invité les acteurs à se prononcer sur l'opportunité du passage de l'utilisation d'accès actifs constatés à l'utilisation d'accès actifs prévisionnels. Les acteurs qui ont répondu sont très majoritairement opposés à cette évolution, soulignant que le marché est toujours en phase de démarrage. Ils souhaitent que les méthodes d'allocation des coûts soient stables et qu'elles minimisent les incertitudes.
Dès lors, l'Autorité considère que cette méthode d'allocation des coûts de génie civil en conduite entre boucle locale cuivre et boucle locale fibre est toujours pertinente et qu'il est important d'en assurer la stabilité afin de garantir une continuité et une meilleure prévisibilité des tarifs des offres d'accès au génie civil de boucle locale d'Orange.


2.3.2. Le cas du génie civil aérien


La chronique d'investissement en génie civil d'Orange fait bien la distinction entre les investissements en génie civil souterrain et les investissements en génie civil aérien. Une seule allocation est ainsi nécessaire afin de parvenir au périmètre de coûts relatifs au génie civil de boucle locale en aérien utilisé par la fibre. Il s'agit d'allouer les coûts en génie civil aérien entre la boucle locale cuivre et la boucle locale fibre.
Dans ses consultations publiques du 9 février 2017 et du 11 mai 2017, l'Autorité a proposé que la clé d'allocation pour la répartition des coûts de génie civil aérien entre cuivre et fibre soit la même que pour les coûts de génie civil en conduite, c'est-à-dire au nombre d'accès commercialisés utilisant le génie civil de boucle locale d'Orange.
Les acteurs qui ont répondu à la consultation publique sont majoritairement favorables à l'allocation des coûts de génie civil aérien entre cuivre et fibre au nombre d'accès commercialisés. Certains d'entre eux ont cependant suggéré que ce nombre d'accès devait être celui des accès utilisant le génie civil aérien d'Orange et non le nombre total d'accès commercialisés utilisant le génie civil d'Orange.
La mise en place d'une telle méthode doit se faire dans le respect de l'objectif de simplicité poursuivi par l'Autorité. Aussi, l'Autorité exclut de demander aux opérateurs une transmission annuelle de leur nombre d'accès cuivre et fibre utilisant du génie civil aérien d'Orange en raison de la charge supplémentaire de collecte d'informations que cela occasionnerait pour les acteurs. Dès lors, une telle solution ne saurait selon l'Autorité être mise en œuvre que via une solution estimative comme celle proposée par Orange dans sa réponse à la consultation publique du 9 février 2017. Orange propose d'estimer, parmi les accès fibre commercialisés, la part de ces accès qui utilisent du génie civil aérien. Cette méthode consiste à calculer le taux d'accès utilisant du génie civil aérien parmi les FttH raccordables (estimé à partir de la part des raccordements aériens sur cuivre et des logements raccordables au FttH par zone de déploiement FttH), d'appliquer ce taux au nombre d'accès fibre commercialisés utilisant du génie civil d'Orange et de comparer le résultat au nombre d'accès cuivre commercialisés utilisant du génie civil aérien d'Orange.
Cette solution présente l'inconvénient d'être bien moins lisible et prévisible pour les acteurs, dans la mesure où elle fait appel au taux de pénétration de la fibre optique dans trois zones du territoire (zone très dense, zone moins dense d'investissement privé, zone d'investissement public). A long terme, cette clé devrait par ailleurs tendre vers la clé utilisée pour répartir les coûts de génie civil de boucle locale en conduite entre cuivre et fibre. Par ailleurs, la masse de coûts du génie civil aérien est significativement inférieure à celle du génie civil de boucle locale en conduite. Compte tenu de ces éléments, l'Autorité considère que les coûts de génie civil aérien doivent être alloués entre boucle locale cuivre et boucle locale fibre en fonction des accès commercialisés utilisant du génie civil de boucle locale, en conduite ou aérien, d'Orange.


Schéma illustratif des investissements et du patrimoine d'Orange dans son réseau et des successions d'allocations pour la comptabilisation des coûts de l'accès au génie civil de boucle locale



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2.4. Les coûts d'exploitation et de maintenance du génie civil de boucle locale


En sus des coûts de patrimoine, les coûts de génie civil de boucle locale comprennent des coûts d'exploitation et de maintenance qui constituent les coûts opérationnels encourus par Orange pour exploiter son infrastructure en génie civil.
Les coûts d'exploitation et de maintenance comprennent notamment les coûts de personnel, les coûts des matériels, les coûts des achats externes qui correspondent aux opérations d'exploitation ou de maintenance sous-traitées par Orange, les redevances de toute nature (en particulier celles visées aux articles R. 20-51 et suivants du CPCE).
Les coûts d'exploitation et de maintenance du génie civil de boucle locale en conduite d'une part et ceux du génie civil aérien d'autre part sont répartis entre cuivre et fibre selon la même clé que les coûts de patrimoine de ces deux actifs.


2.5. Les autres coûts


Les coûts pertinents pour l'accès au génie civil de boucle locale doivent également couvrir d'autres postes de coûts :


- les coûts spécifiques liés à la fourniture de l'accès au génie civil de boucle locale ;
- la contribution aux coûts communs et à la fiscalité de l'entreprise.


2.5.1. Les coûts spécifiques liés à la fourniture de l'accès à l'infrastructure de génie civil de boucle locale


Les coûts spécifiques de l'offre de location de l'infrastructure de génie civil de boucle locale constituent les coûts encourus par Orange pour fournir une offre d'accès à son infrastructure en génie civil.
Ces coûts incluent notamment les coûts de gestion opérationnelle de l'offre, de commercialisation et de facturation, les coûts du service après-vente, les coûts de sous-tubage et les coûts de vérification de la conformité des déploiements aux règles d'ingénierie.
Ces coûts sont alloués uniquement à la fibre.
a) Les coûts de gestion opérationnelle de l'offre, de commercialisation et de facturation
Les coûts d'Orange Wholesale France, en charge de la commercialisation des offres de gros aux opérateurs alternatifs et de la gestion opérationnelle de l'accès des opérateurs - y compris Orange - au génie civil, sont les coûts relatifs aux entités en charge de recueillir et traiter les demandes d'accès à l'infrastructure de génie civil de boucle locale. Ces entités sont également en charge de recueillir les demandes de rénovation et de réparation de génie civil de boucle locale.
Les coûts d'Orange Wholesale France incluent, le cas échéant, les coûts de vérification des parcs d'accès FttX actifs empruntant au moins en partie le génie civil de boucle locale d'Orange dans le cadre d'une offre d'accès issue de la décision d'analyse du marché 3a.
b) Les coûts de service après-vente
Les coûts de service après-vente liés à la fourniture de l'accès à l'infrastructure de génie civil de boucle locale sont définis comme les coûts encourus par Orange pour recueillir les demandes d'intervention des opérateurs sur son génie civil (service après-vente d'accueil) et les coûts encourus par Orange pour les interventions sur son génie civil de boucle locale effectués par ses « unités d'intervention ».
c) Les coûts de sous-tubage
Les coûts de sous-tubage, tels que décrits dans la décision n° 2014-0733 du 26 juin 2014, sont considérés comme des coûts spécifiques liés à la fourniture de l'accès à l'infrastructure de génie civil de boucle locale, dans la mesure où ils ont été encourus en vertu d'une obligation réglementaire.
Dans sa décision d'analyse de marché n° 2017-1347, l'Autorité estime qu'il est raisonnable de lever l'obligation de sous-tubage, qu'il n'est pas pertinent de faire supporter les coûts du sous-tubage à l'ensemble des opérateurs utilisateurs de l'offre de génie civil et considère en conséquence nécessaire de mettre fin à l'obligation pour Orange de rembourser ces opérations. Les coûts provenant d'opérations de sous-tubage réalisées postérieurement à la levée de l'obligation ne doivent ainsi pas être intégrés à la base de coûts pour l'application de la présente décision (5).
d) Les coûts de vérification de la conformité des déploiements aux règles d'ingénierie
Des contrôles sont effectués pour vérifier que l'utilisation du génie civil est conforme aux règles d'ingénierie. Ces coûts sont considérés comme des coûts spécifiques liés à la fourniture de l'accès à l'infrastructure de génie civil de boucle locale.


2.5.2. Les coûts communs et la fiscalité


En cohérence avec l'architecture générale du modèle comptable réglementaire d'Orange, le taux de coûts communs pertinent dans le cadre de la fourniture de l'accès à l'infrastructure de génie civil de boucle locale est celui applicable à l'ensemble des offres d'Orange et renseigné dans la « fiche des coûts communs », transmise par Orange à l'Autorité dans le cadre de ses restitutions comptables prévisionnelles. A ces coûts, s'ajoute la fiscalité, sur la base des éléments comptables prévisionnels transmis par Orange.


2.6. Comptabilisation des coûts de l'accès au génie civil de boucle locale d'Orange


Pour la mise en œuvre de sa comptabilité réglementaire conformément à la décision n° 06-1007 du 7 décembre 2006, les coûts pertinents pour l'accès au génie civil de boucle locale d'Orange résultent de l'agrégation des coûts décrits aux précédentes sections :


- la part affectée à la fibre des coûts de patrimoine de génie civil de boucle locale telle que décrite dans les sections 0 et 0 ;
- la part affectée à la fibre des coûts d'exploitation et de maintenance associés telle que décrite dans la section 0 ;
- les coûts spécifiques liés à la fourniture de l'accès à l'infrastructure de génie civil de boucle locale (0) ;
- la contribution aux coûts communs et la fiscalité (0).


Les coûts et produits liés aux offres d'accès faisant l'objet de la présente décision font l'objet d'un compte d'exploitation produit au sens de la décision précitée, et sont à ce titre communiqués annuellement à l'Autorité dans le cadre de son suivi du respect de ses obligations réglementaires par l'opérateur historique.


3. Tarification de l'accès au génie civil de boucle locale d'Orange


Dans la précédente partie, les coûts pertinents pour l'accès au génie civil de boucle locale alloués à la fibre ont été définis. L'objet de cette partie est de décrire la construction des tarifs d'accès au génie civil de boucle locale d'Orange.


3.1. La méthode de tarification


e) La méthode de tarification de la décision n° 2010-1211
La décision n° 2010-1211 retenait que la tarification doit tenir compte des volumes déployés pour favoriser un usage efficace par les opérateurs du génie civil de boucle locale dès lors que ceux-ci sont amenés à déployer des infrastructures concurrentes. Considérant notamment que les besoins en volume pour les déploiements FttX sont très différents sur les segments de transport et de distribution, l'Autorité avait retenu un traitement tarifaire distinct du transport et de la distribution au sens de l'architecture du cuivre (respectivement amont et aval des sous-répartiteurs). La répartition des coûts entre ces deux segments était faite en longueur d'artères avec 25 % pour le transport et 75 % pour la distribution.
L'Autorité avait également retenu un traitement tarifaire distinct de la « zone mutualisée » et de la « zone non-mutualisée », c'est-à-dire respectivement des volumes déployés en aval d'un point de mutualisation optique et des autres volumes déployés.
En effet, pour les déploiements mutualisés, il n'apparaissait pas prioritaire d'introduire une incitation à limiter les volumes déployés compte tenu de la présence d'une unique boucle locale optique dans le génie civil de boucle locale d'Orange. Au contraire, pour les déploiements non-mutualisés, plusieurs boucles locales optiques peuvent être déployées dans le génie civil d'Orange. Ainsi, sur ce segment, la tarification doit tenir compte des volumes déployés pour favoriser un usage efficace du génie civil par les opérateurs.
L'Autorité avait donc retenu une méthode de tarification au volume pour l'occupation du génie civil de boucle locale pour les déploiements non-mutualisés, et une tarification fonction de la taille du point de mutualisation pour les déploiements mutualisés.
f) Les méthodes mises en consultation
Dans sa consultation publique du 9 février 2017, l'Autorité a évoqué plusieurs modifications par rapport à la méthode en vigueur dans la décision n° 2010-1211.
Tout d'abord, dans un objectif de simplicité, elle a invité les acteurs à se prononcer sur la suppression de la distinction entre transport et distribution au sens de l'architecture cuivre pour l'établissement des tarifs d'accès au génie civil de boucle locale d'Orange.
L'offre de référence d'Orange prévoit actuellement des frais d'accès aux installations aval PM de 6,13 € par accès raccordable à terme en aval du point de mutualisation. Ces frais, qui ne sont pas décrits dans la décision n° 2010-1211 du 9 novembre 2010, ont été mis en place pour financer les remboursements forfaitaires de 93 € par désaturation d'appui aérien prévus dans cette même offre de référence. La consultation publique proposait aux acteurs de se prononcer sur la suppression de ces frais tout en garantissant la récupération des coûts correspondants par Orange.
Cette consultation portait également sur l'opportunité :


- d'abolir la distinction entre déploiements mutualisés et non-mutualisés (via une tarification unique au volume pour l'accès à l'ensemble du génie civil de boucle locale d'Orange) ;
- de créer deux forfaits (dont un pour les faibles utilisations du génie civil d'Orange) pour la tarification des déploiements mutualisés ;
- de remplacer la tarification à la taille du point de mutualisation (nombre d'accès raccordables à terme) pour les déploiements mutualisés par une tarification au nombre d'accès effectivement raccordables ;
- de la création d'un tarif forfaitaire à l'accès « aval point de raccordement distant mutualisé » (ou, alternativement, « aval nœud de raccordement optique »).


g) La méthode de tarification retenue
En raison du choix des principaux opérateurs de déployer désormais en point à multipoint, la préoccupation que les besoins en volume pour les déploiements FttX pourraient être très différents sur les segments de transport et de distribution ne semble aujourd'hui plus d'actualité. Par ailleurs, cette distinction entre transport et distribution étant inhérente à l'architecture cuivre du réseau d'Orange, elle est étrangère aux modes de raisonnement et aux préoccupations des acteurs déployant des réseaux en fibre optique, et entraîne ainsi des difficultés pratiques pour certains de ces acteurs pour fournir l'information sur la répartition de leur occupation entre ces deux segments. Compte tenu de ces éléments, de l'objectif de simplification poursuivi, et des réponses des acteurs à la consultation publique, l'Autorité estime que les tarifs des offres d'accès au génie civil de boucle locale d'Orange doivent désormais être indépendants du segment transport ou distribution au sens de l'architecture cuivre.
L'Autorité considère également qu'il n'y a plus lieu qu'Orange facture les frais d'accès aux installations aval PM et que les coûts de réparation et de renforcement de poteaux supportés par Orange, y compris lorsque ce dernier indemnise les opérateurs pour leurs interventions, devraient désormais être intégrés à la masse des coûts de génie civil d'Orange et recouvrés de la même façon. Cette évolution est cohérente avec le projet d'analyse du marché « 3a » qui prévoit une harmonisation des principes de rénovation et de réparation du génie civil, et recueille l'avis favorable de la majorité des répondants.
S'agissant des quatre autres propositions précitées mises en consultation publique, l'Autorité considère, à la suite des différentes réponses reçues, que leurs inconvénients en termes de complexité et/ou d'effets négatifs l'emportent sur leurs avantages, qui ne concernent en général qu'un nombre restreint d'opérateurs, ceux-ci ayant des situations hétérogènes. L'Autorité ne souhaite donc pas y donner suite dans la présente décision. L'Autorité réaffirme a contrario le principe d'une tarification forfaitaire pour les déploiements mutualisés, à même, grâce à la péréquation géographique qu'elle induit, de favoriser le déploiement de la fibre sur l'ensemble du territoire.
S'agissant de la question, évoquée par certains répondants, des accès très ponctuels au génie civil de boucle locale d'Orange pour les déploiements mutualisés, qui fait l'objet dans la présente décision d'une tarification à la taille du point de mutualisation, l'Autorité estime a priori qu'une offre sur mesure devrait être à même de répondre à ces besoins très spécifiques.


3.2. Mise en œuvre de la tarification


Le tarif pour l'accès au génie civil de boucle locale d'Orange permet le recouvrement des coûts alloués à la fibre décrits aux précédentes sections.
Le mécanisme de tarification prévu par la présente décision consiste à allouer ces coûts entre les déploiements mutualisés et les déploiements non-mutualisés en fonction des volumes de câbles déployés dans ces deux segments :


- les déploiements mutualisés correspondent aux déploiements mutualisés effectués en aval des points de mutualisation (6) ;
- les déploiements non-mutualisés correspondent aux autres déploiements (7).


Ensuite, les coûts alloués aux déploiements non-mutualisés sont recouvrés sur la base d'une tarification au volume alors que les coûts alloués aux déploiements mutualisés sont recouvrés sur la base d'une tarification en fonction de la taille des points de mutualisation.
Le schéma ci-dessous récapitule le mécanisme de tarification.


Schéma récapitulatif du mécanisme de tarification du génie civil de boucle locale d'Orange



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Par exception à ce mécanisme, certains des coûts spécifiques décrits au 0 peuvent être alloués directement au niveau de la « quote-part allouée aux déploiements mutualisés » ou de la « quote-part allouée aux déploiements non-mutualisés » plutôt qu'au niveau des « coûts alloués aux boucles locales optiques », dans le cas où cela serait rendu nécessaire par le principe de pertinence prévu par l'article D. 312 du CPCE.


4. Précisions sur la mise en œuvre
4.1. Références pour les clés d'allocation


Les clés prévisionnelles d'allocation du génie civil entre conduite et pleine terre, puis du génie civil en conduite entre boucle locale et réseau général (cf. 0 et 0) font l'objet d'une transmission annuelle par Orange à l'Autorité, décrite en annexe a).
La clé d'allocation entre fibre et cuivre du génie civil de boucle locale se fonde quant à elle sur les parcs d'accès actifs respectifs des deux technologies (8) desservis par le génie civil de boucle locale mis à disposition dans les offres de gros d'Orange issues de la décision d'analyse du marché 3a. Cette clé est calculée sur la base des parcs d'accès constatés et non prévisionnels (cf. 2.3.1).


4.2. Transmission d'informations par Orange et par les opérateurs clients


Pour des raisons d'une part de confidentialité des données commerciales des opérateurs et d'autre part de difficulté pour Orange à estimer l'utilisation prévisionnelle de son génie civil de boucle locale par les opérateurs clients dans la phase actuelle de déploiement de la fibre, la tarification nécessite également la transmission de données constatées et prévisionnelles par Orange et par les opérateurs clients :
1. S'agissant de la clé d'allocation entre cuivre et fibre mentionnée à la section 0, il semble toujours nécessaire, afin de garantir des conditions de concurrence loyale, qu'Orange n'ait pas accès aux données individuelles confidentielles concernant les parcs sur le marché de détail des autres opérateurs. Pour cette raison, Orange et l'ensemble des opérateurs clients des offres d'accès au génie civil d'Orange transmettront à l'Autorité les parcs d'accès FttX desservis par eux grâce à l'utilisation d'une offre d'accès au génie civil de boucle locale d'Orange régie par la présente décision. L'Autorité transmettra alors cette donnée agrégée à Orange pour l'établissement des coûts prévisionnels.
2. S'agissant des volumes totaux prévisionnels d'une part et des tailles prévisionnelles de zones arrière de points de mutualisation d'autre part utilisées pour la tarification comme décrit en section 0, l'établissement de prévisions par Orange est difficile en raison de la phase actuelle de déploiement et de la multiplicité des acteurs souscrivant les offres de génie civil traitées par la présente décision. Pour cette raison, Orange et l'ensemble des opérateurs clients des offres d'accès au génie civil transmettront leurs prévisions individuelles pour ces paramètres. L'Autorité transmettra alors ces données agrégées à Orange pour l'établissement des coûts prévisionnels.
Une transmission annuelle de données de la part des opérateurs est ainsi mise en place pour ces différents éléments, décrite dans les annexes b), c) et d).
Pour la mise en œuvre de cette transmission, certains opérateurs pourront être amenés à aménager leurs systèmes d'informations ou à réaliser certaines estimations. Les opérateurs doivent s'attacher à la qualité, la pertinence et la fiabilité des éléments transmis tant constatés que prévisionnels et documenter leurs transmissions et les éventuelles estimations réalisées le cas échéant. Ils devront notamment répondre diligemment aux éventuelles questions de l'Autorité sur les éléments transmis.
Le cas échéant et en tant que de besoin, l'Autorité effectuera des vérifications des systèmes de déclarations et de la cohérence des données transmises par les opérateurs afin de garantir la fiabilité des tarifs. Ces vérifications pourront se faire sous la forme d'audits.


4.3. Calcul annuel des tarifs


Pour l'établissement des coûts unitaires servant à la formation de ses tarifs de l'année n conformément aux principes décrits dans les sections précédentes et notamment au 0, Orange prendra notamment en compte :


- les coûts prévisionnels de patrimoine décrits au 0 et les clés d'allocation prévisionnelles décrites au 0 ;
- les coûts prévisionnels d'exploitation et de maintenance décrits au 0 ;
- les valeurs prévisionnelles des autres coûts décrits au 0 ;
- le nombre d'accès commercialisés constatés au 31 décembre de l'année n-2 en cuivre et en fibre utilisant le génie civil de boucle locale d'Orange, sur la base de la valeur agrégée transmise par l'Autorité selon la méthode décrite au 0 ;
- les volumes prévisionnels de câbles, sur la base des valeurs agrégées transmises par l'Autorité comme décrit au 0 ;
- la taille prévisionnelle des zones arrière de points de mutualisation, sur la base de la valeur agrégée transmise par l'Autorité comme décrit au 0.


Orange devra procéder à une révision annuelle de ses tarifs au 1er mars de chaque année sur la base de coûts unitaires prévisionnels. La publication de ces tarifs devra intervenir au plus tard le 1er février de cette même année. Conformément à l'article 32 de la décision n° 2017-1347 et eu égard au processus particulier de fixation de ces tarifs, ces évolutions tarifaires font l'objet d'un préavis réduit à un mois, même en cas de hausse tarifaire.
Pour la comptabilisation des coûts constatés, Orange se fondera, pour ses données, sur le même périmètre que celui des coûts prévisionnels.
Décide :