Après en avoir délibéré le 27 juillet 2017,
Table des matières
1. Objet et contexte
2. Cadre juridique applicable
2.1. Le statut de « zone fibrée »
2.2. L'accès aux boucles locales optiques mutualisées
2.3. L'établissement et l'exploitation des réseaux par les collectivités territoriales
2.4. La levée de l'obligation d'équiper les bâtiments d'habitation neufs en lignes téléphoniques
3. Bénéfices liés à l'attribution du statut
3.1. Economiser l'installation d'un réseau en cuivre dans les bâtiments d'habitation neufs
3.2. Permettre la fermeture des infrastructures cuivre plus rapidement
3.3. Profiter d'un bénéfice d'image
3.4. Engager une dynamique collective
4. Obligations
1. Objet et contexte
L'article L. 33-11 du code des postes et communications électroniques (ci-après « CPCE »), dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, institue un statut de « zone fibrée » et définit les rôles respectifs du ministre chargé des communications électroniques et de l'ARCEP dans le cadre de l'attribution de ce statut.
En particulier, cet article dispose que « [l]e ministre chargé des communications électroniques fixe, sur proposition de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, les modalités et les conditions d'attribution du statut de “zone fibrée” ainsi que les obligations pouvant être attachées à l'attribution de ce statut » et que le statut « peut être obtenu dès lors que l'établissement et l'exploitation d'un réseau en fibre optique ouvert à la mutualisation sont suffisamment avancés pour déclencher des mesures facilitant la transition vers le très haut débit ».
La présente décision a pour objet de proposer au ministre chargé des communications électroniques, conformément à cet article, « les modalités et les conditions d'attribution du statut de “zone fibrée” ainsi que les obligations pouvant être attachées à l'attribution de ce statut » (nous soulignons).
Le statut de « zone fibrée » participe des « mesures facilitant la transition vers le très haut débit ». L'Autorité rappelle qu'une première mesure d'application de l'article L. 33-11 du CPCE a déjà été prise par l'adoption du décret n° 2016-1182 du 30 août 2016 modifiant les articles R. 111-1 et R. 111-14 du code de la construction et de l'habitation (ci-après « CCH »). A cet égard, le premier alinéa de l'article R. 111-14 du CCH dispose désormais que « [t]ous les bâtiments d'habitation doivent être pourvus des lignes téléphoniques nécessaires à la desserte de chacun des logements, à l'exception des bâtiments situés en “zone fibrée”, au sens de l'article L. 33-11 du code des postes et des communications électroniques, et sous réserve qu'ils soient pourvus de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique desservant chacun des logements ».
La possibilité de moduler le tarif du dégroupage de la boucle locale cuivre dans des zones où le réseau à très haut débit remplit les prérequis nécessaires à une migration de masse a également été évoquée par le Rapport de la Mission sur la transition vers les réseaux à très haut débit et l'extinction du réseau de cuivre présidée par Paul Champsaur, remis le 19 février 2015 au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique et à la secrétaire d'Etat chargée du numérique.
L'Autorité a instruit cette proposition, en procédant notamment à une consultation publique à l'été 2016. A la suite de cette consultation, l'Autorité considère que, de manière générale, les incitations favorables à l'investissement et à la migration vers les réseaux en fibre optique jusqu'à l'abonné FttH (Fibre to the Home) sont en place pour la période de la prochaine analyse de marché et, considérant l'étendue aujourd'hui limitée des zones du territoire où les réseaux en fibre optique seraient assez matures pour satisfaire aux conditions envisagées, l'Autorité estime préférable de ne pas mettre en œuvre, à ce stade, une telle évolution de la régulation tarifaire de la boucle locale cuivre.
Pour autant, l'Autorité entend rester vigilante à la dynamique de transition vers le très haut débit (THD) et une évolution significative de la situation pourrait amener l'Autorité à revoir sa position au cours du 5e cycle d'analyse des marchés fixes dont les projets de décisions ont été publiés pour consultation publique le 27 juillet 2017. Dans ce cadre, la mise en place du statut de « zone fibrée » prévue par la loi consacre une première étape de la transition vers le très haut débit, à même d'accélérer la commercialisation des services de communications électroniques en fibre optique jusqu'à l'abonné et de procurer un réel bénéfice aux opérateurs et aux collectivités territoriales qui en feraient la demande.
En effet, de par ses conditions et modalités d'attribution ainsi que les obligations qui lui sont attachées, le statut de « zone fibrée » est susceptible d'enclencher un cercle vertueux d'établissement et d'exploitation qualitatifs de réseaux en fibre optique jusqu'à l'abonné permettant de favoriser leur commercialisation. Par son bénéfice d'image et par les mesures concrètes telles que la levée de l'obligation d'installation des lignes téléphoniques de cuivre dans les bâtiments d'habitation neufs, le statut « zone fibrée » doit favoriser une dynamique collective sur le déploiement et la qualité des réseaux de boucle locale en fibre optique.
Par ailleurs, l'Autorité restera attentive à la possibilité de s'appuyer sur ce statut dès lors qu'elle déciderait de mettre en œuvre une modulation tarifaire à l'avenir. Elle le fera d'autant plus facilement que les conditions d'obtention du statut anticiperont les conditions nécessaires à la migration en masse vers les réseaux FttH en assurant une disponibilité large de ces réseaux et leur caractère pleinement opérationnel.
Enfin, comme indiqué dans ses principales conclusions des analyses des marchés du haut et très haut débit fixe publiées le 11 juillet 2017, « [l]'Autorité introduit par ailleurs [dans ses analyses de marché] la possibilité pour Orange de fermer ses infrastructures cuivre plus rapidement dans le cas où la présence d'un réseau de fibre optique jusqu'à l'abonné totalement déployé a été constatée par l'obtention du statut de “zone fibrée” ».
L'objectif général des modalités et conditions d'attributions proposées au ministre chargé des communications électroniques par l'Autorité est de mettre en œuvre un statut de « zone fibrée » clair et compréhensible aux yeux des utilisateurs finals (entreprises et particuliers) pour favoriser son appropriation. Dans cette perspective, et eu égard aux objectifs prévus par l'article L. 32-1 du CPCE (notamment ceux mentionnés aux 3° et 4° du II) l'attribution du statut doit correspondre à la disponibilité effective de services de communications électroniques basés sur un réseau très haut débit en fibre optique jusqu'à l'abonné pour l'ensemble des logements et des locaux professionnels d'une zone donnée.
Par ailleurs, afin de concrétiser les allégements des obligations désormais prévus par le CCH, il semble également important de pouvoir identifier très facilement si un logement ou un immeuble (1) se situe en « zone fibrée ». C'est le cas, par exemple d'un promoteur désirant savoir s'il est tenu ou non de réaliser un câblage vertical en cuivre, ou d'un bailleur souhaitant valoriser les services disponibles sur son parc de logements ou locaux à usage professionnel.
L'Autorité estime que le statut de « zone fibrée » pourrait devenir, pour les collectivités locales, un outil de valorisation de leur territoire. Il pourrait également servir aux opérateurs présents sur le territoire pour promouvoir leurs services sous certaines conditions (notamment que leurs services soient proposés sur l'ensemble de la zone).
Enfin, l'Autorité entend privilégier la mise en place de démarches d'attribution qui soient aussi simples que possible pour les demandeurs. Pour cela, l'Autorité envisage de s'appuyer autant que faire se peut sur la réutilisation des outils et données issus de la mise en œuvre du cadre réglementaire existant.
C'est dans ce contexte que s'inscrivent les propositions exposées par l'Autorité dans le document qui suit.
2. Cadre juridique applicable
2.1. Le statut de « zone fibrée »
Le statut de « zone fibrée » a été institué par l'article L. 33-11 du CPCE, créé par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. Il s'agit d'un amendement d'origine parlementaire introduit au Sénat, inspiré des recommandations figurant dans le Rapport de la Mission présidée par Paul Champsaur. Ce rapport, remis le 19 février 2015 au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique et à la secrétaire d'Etat chargée du numérique, envisage « la création d'un statut spécifique “zone fibrée” permettant de reconnaitre que le réseau de nouvelle génération a atteint les prérequis pour devenir le réseau de référence ».
Le nouvel article L. 33-11 du CPCE a ensuite été modifié et complété par la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique afin de clarifier les rôles respectifs du ministre chargé des communications électroniques et de l'ARCEP dans le cadre de l'attribution de ce statut. Il dispose ainsi que :
« Il est institué un statut de “zone fibrée”, qui peut être obtenu dès lors que l'établissement et l'exploitation d'un réseau en fibre optique ouvert à la mutualisation sont suffisamment avancés pour déclencher des mesures facilitant la transition vers le très haut débit. La demande d'obtention du statut est formulée par l'opérateur chargé de ce réseau et, le cas échéant, par la collectivité l'ayant établi au titre de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
« Le ministre chargé des communications électroniques fixe, sur proposition de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et dans un délai de trois mois à compter de la publication du décret mentionné au dernier alinéa du présent article, les modalités et les conditions d'attribution du statut de “zone fibrée” ainsi que les obligations pouvant être attachées à l'attribution de ce statut.
« Le statut de “zone fibrée” est attribué par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. La décision d'attribution précise les obligations pesant sur le demandeur. Elle est communiquée au ministre chargé des communications électroniques.
« Un décret en Conseil d'Etat, pris dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, détermine les modalités d'application du présent article, notamment les obligations réglementaires pouvant être adaptées en raison de l'attribution de ce statut ainsi que les dispositions facilitant la transition vers le très haut débit. »
L'article L. 33-11 du CPCE est destiné à favoriser l'investissement dans les réseaux en fibre optique ouverts à la mutualisation entre les opérateurs et s'insère dans le cadre législatif et réglementaire applicable en matière d'accès aux lignes des réseaux mutualisés à très haut débit en fibre optique jusqu'à l'abonné.
2.2. L'accès aux boucles locales optiques mutualisées
L'article L. 34-8-3 du CPCE dispose que « [t]oute personne établissant ou ayant établi dans un immeuble bâti ou exploitant une ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final fait droit aux demandes raisonnables d'accès à ladite ligne et aux moyens qui y sont associés émanant d'opérateurs, en vue de fournir des services de communications électroniques à cet utilisateur final ». Cet accès, qui fait l'objet d'une convention, doit être fourni dans des conditions transparentes et non discriminatoires en un point permettant le raccordement effectif d'opérateurs tiers, à des conditions économiques, techniques et d'accessibilité raisonnables et tout refus d'accès doit être motivé.
Les modalités d'accès ont été spécifiées dans trois décisions prises en application de l'article L. 34-8-3 du CPCE, qui donne compétence à l'Autorité pour préciser, de manière objective, transparente, non discriminatoire et proportionnée, les modalités de l'accès à une ligne à très haut débit en fibre optique. Ces décisions ont été complétées de plusieurs recommandations.
Tout d'abord, la décision n° 2009-1106 de l'Autorité du 22 décembre 2009 modifiée précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du CPCE, les modalités de l'accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et les cas dans lesquels le point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée, établit que l'obligation d'accès à la partie terminale du réseau doit se faire sous forme passive au niveau du point de mutualisation (PM) sur l'ensemble du territoire. Cette décision précise par ailleurs, s'agissant des zones très denses, constituées de 106 communes depuis la décision n° 2013-1475 du 10 décembre 2013, les conditions dans lesquelles le point de mutualisation peut être situé à l'intérieur de la propriété privée.
Ensuite, la décision n° 2010-1312 de l'Autorité du 14 décembre 2010, précisant les modalités de l'accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l'ensemble du territoire à l'exception des zones très denses, précise que le point de mutualisation doit en principe regrouper au moins un millier de logements ou de locaux à usage professionnel existants au jour de son installation.
Sur l'ensemble du territoire national, l'accès est proposé sous forme d'un cofinancement, ab initio ou a posteriori, ou d'une location à la ligne.
Enfin, sur les aspects opérationnels, la décision n° 2015-0776 de l'Autorité du 2 juillet 2015 sur les processus techniques et opérationnels de la mutualisation des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique a pour objet d'anticiper l'industrialisation de ces processus en renforçant et en améliorant leur standardisation et en prévenant les risques de discrimination.
Par ailleurs, la recommandation du 14 juin 2011 de l'Autorité relative aux modalités de l'accès aux lignes à très haut débit en fibre optique pour certains immeubles des zones très denses, notamment ceux de moins de 12 logements, présente les modalités de déploiement et de mutualisation des réseaux de fibre optique jusqu'à l'abonné pour ces petits immeubles et pour les immeubles situés dans les poches de basse densité des zones très denses, en complément de la décision de l'Autorité n° 2009-1106 du 22 décembre 2009. Elle a été complétée par la recommandation du 21 janvier 2014 de l'Autorité relative aux modalités de l'accès aux lignes à très haut débit en fibre optique pour les immeubles de moins de 12 logements ou locaux à usage professionnel des zones très denses, qui vise les mêmes objectifs. Enfin, la recommandation du 7 décembre 2015 de l'Autorité relative à la mise en œuvre de l'obligation de complétude des déploiements des réseaux en fibre optique jusqu'à l'abonné en dehors des zones très denses vise à préciser, en particulier dans les zones où l'habitat est peu dense et dispersé, l'obligation de complétude des déploiements énoncée à l'article 3 de la décision n° 2010-1312 et imposant à l'opérateur le déploiement d'un réseau « permettant de raccorder l'ensemble des logements et locaux à usage professionnel de la zone arrière à proximité immédiate de ces logements ».
2.3. L'établissement et l'exploitation des réseaux par les collectivités territoriales
L'article L. 1425-1 du code général de collectivités territoriales (CGCT) encadre les modalités d'intervention des collectivités territoriales dans le secteur des communications électroniques. Il dispose que « […] les collectivités territoriales et leurs groupements […] peuvent, […] établir et exploiter sur leur territoire des infrastructures et des réseaux de communications électroniques au sens du 3° et du 15° de l'article L. 32 du code des postes et communications électroniques. […] Ils peuvent mettre de telles infrastructures ou réseaux à disposition d'opérateurs ou d'utilisateurs de réseaux indépendants ». Le 3° de l'article L. 32 du CPCE définit la notion de réseau ouvert au public, comme « tout réseau de communications électroniques établi ou utilisé pour la fourniture au public de services de communications électroniques ou de services de communication au public par voie électronique ». Le 15° de l'article L. 32 du CPCE définit la notion d'opérateur comme « toute personne physique ou morale exploitant un réseau de communications électroniques ouvert au public ou fournissant au public un service de communications électroniques ».
L'article L. 1425-1 du CGCT dispose également que « les collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent fournir des services de communications électroniques aux utilisateurs finals qu'après avoir constaté une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs finals et en avoir informé l'Autorité de régulation des communications électroniques./L'insuffisance d'initiatives privées est constatée par un appel public à manifestation d'intentions déclaré infructueux ayant visé à satisfaire les besoins concernés des utilisateurs finals en services de communications électroniques. »
Enfin, le VI de l'article L. 1425-1 du CGCT encadre spécifiquement les modalités tarifaires d'accès aux infrastructures et réseaux établis ou exploités par les collectivités territoriales et leurs groupements. L'accès doit être fourni « dans des conditions tarifaires objectives, transparentes, non discriminatoires et proportionnées et qui garantissent le respect du principe de libre concurrence sur les marchés des communications électroniques ainsi que le caractère ouvert de ces infrastructures et de ces réseaux ». De plus, les conditions tarifaires de cet accès doivent prendre en compte « l'apport d'aides publiques de manière à reproduire les conditions économiques d'accès à des infrastructures et à des réseaux de communications électroniques comparables établis dans d'autres zones du territoire en l'absence de telles aides ». Ce paragraphe VI impose également aux collectivités de transmettre à l'Autorité les conditions tarifaires d'accès à leurs réseaux à très haut débit en fibre optique au moins deux mois avant leur entrée en vigueur. En vertu du quatrième alinéa du VI de l'article L. 1425-1 du CGCT, l'Autorité, « [l]orsqu'elle estime que les conditions tarifaires soulèvent des difficultés au regard du présent VI, […] émet un avis, qui peut être rendu public, invitant la collectivité territoriale ou le groupement concerné à les modifier. Elle le communique sans délai au ministre chargé des communications électroniques ».
2.4. La levée de l'obligation d'équiper les bâtiments d'habitation neufs en lignes téléphoniques
A ce jour, le statut de « zone fibrée » prévu à l'article L. 33-11 du CPCE a été pris en compte par le décret n° 2016-1182 du 30 août 2016 modifiant les articles R. 111-1 et R. 111-14 du CCH. Comme indiqué précédemment, le premier alinéa de l'article R. 111-14 du CCH dispose désormais que « [t] ous les bâtiments d'habitation doivent être pourvus des lignes téléphoniques nécessaires à la desserte de chacun des logements, à l'exception des bâtiments situés en “zone fibrée”, au sens de l'article L. 33-11 du code des postes et des communications électroniques, et sous réserve qu'ils soient pourvus de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique desservant chacun des logements » (2).
3. Bénéfices liés à l'attribution du statut
En vertu de l'article L. 33-11 du CPCE, l'Autorité est chargée de proposer au ministre chargé des communications électroniques les modalités et conditions d'attribution du statut ainsi que les obligations pouvant y être attachées. Ces propositions figurent en annexe à la présente décision.
Au-delà de ces éléments, l'économie générale du statut génère des bénéfices qui peuvent s'avérer importants pour les différents acteurs, qu'il convient de rappeler, à titre informatif.
3.1. Economiser l'installation d'un réseau en cuivre dans les bâtiments d'habitation neufs
L'article R. 111-14 du CCH évoqué au chapitre 2.4 a levé l'obligation de pourvoir en lignes téléphoniques en cuivre nécessaires à la desserte de chacun des logements les nouveaux bâtiments d'habitation construits dans les territoires disposant du statut de « zone fibrée » et à condition que chaque logement du bâtiment soit doté d'une ligne à très haut débit en fibre optique.
3.2. Permettre la fermeture des infrastructures cuivre plus rapidement
Dans son projet de décision d'analyse du marché 3a mis en consultation publique le 27 juillet 2017, l'Autorité a rappelé la capacité du statut de « zone fibrée » à valoriser la présence d'un réseau en fibre optique suffisamment avancé. En conséquence, l'Autorité envisage (en section 4.2.2.i de son projet de décision) la possibilité pour Orange de réduire le délai de prévenance avant une fermeture du réseau cuivre dans les zones ayant notamment obtenu le statut de « zone fibrée » :
« Les réseaux de fibre optique jusqu'à l'abonné sont en cours de déploiement, en parallèle du réseau de boucle locale de cuivre d'Orange. Il est ainsi anticipé que, lorsqu'une majorité des locaux de la zone est raccordée en fibre optique, les opérateurs tiers migrent progressivement leurs accès en dégroupage vers la fibre optique.
L'introduction du statut de “zone fibrée” constitue une première étape en vue de permettre l'extinction à terme du réseau de cuivre en fixant des critères pertinents. En effet, ce statut, inscrit à l'article L. 33-11 du code des postes et des communications électroniques, dans sa rédaction issue de la loi pour une République numérique, permet de définir des standards exigeants afin de déployer une infrastructure FttH complète, susceptible de remplacer le réseau cuivre pour l'ensemble des offres et des services, ainsi que de valoriser les déploiements effectués. […]
Lorsqu'un tel processus de migration est amplement engagé au niveau de la zone arrière d'un NRA donné, Orange tient à être en mesure d'annoncer la fermeture à terme de ce NRA. […] Dès lors, et comme l'ARCEP l'avait fait dans la précédente analyse de marché, il convient de définir les conditions sous lesquelles Orange pourrait annoncer la date prévue de fermeture d'un NRA donné, ce qui suppose de définir éventuellement une date intermédiaire à partir de laquelle plus aucun accès ne peut être commandé en dégroupage.
[…]
En l'absence d'un accord conclu entre Orange et les opérateurs utilisateurs des offres de gros en question quant à un processus approprié de migration, il apparaît raisonnable à ce stade de prévoir un délai de prévenance de 5 ans pour la fermeture d'un NRA ou d'un sous-répartiteur, à compter du moment où au moins un réseau de fibre optique a été intégralement déployé sur la partie horizontale pour couvrir l'ensemble de la zone arrière du NRA ou du sous-répartiteur concerné, en permettant de desservir l'ensemble des utilisateurs et des sites qui pouvaient être atteints par la boucle locale de cuivre.
[…]
Le délai de prévenance de cinq ans mentionné ci-dessus pourrait être réduit dès lors que la présence d'un réseau de fibre optique jusqu'à l'abonné totalement déployé aurait été constatée par l'obtention du statut de zone fibrée et dès lors qu'il existerait sur ce réseau des offres de gros avec qualité de service renforcée au moins équivalentes à celles qu'est tenu de fournir Orange dans le cadre de la présente analyse de marché. Le caractère raisonnable de la réduction du délai de préavis s'apprécierait alors au regard de la maturité du marché local des offres de gros basées sur le réseau en fibre optique. Les critères permettant d'évaluer cette maturité comprendront le nombre d'opérateurs tiers commercialisant des offres de détail sur fibre optique sur la plus grande partie des logements et locaux à usage professionnel situés dans la zone arrière du NRA et le taux de pénétration des offres sur le réseau en fibre optique. Ces critères pourront être précisés par l'Autorité dans le cadre d'une recommandation. »
3.3. Profiter d'un bénéfice d'image
Une marque relative à la « zone fibrée » a été déposée au nom de l'Etat auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI). Cette marque devrait être composée d'un logo et s'accompagner d'un règlement d'usage inscrit au Registre national des marques afin de conférer à la marque un caractère collectif. Dès lors, une fois le statut attribué par l'Autorité au bénéfice d'un territoire à la suite de la demande de l'opérateur chargé du réseau (conjointement avec la collectivité le cas échéant), l'Autorité propose que la marque « zone fibrée » puisse être utilisée par différentes personnes dans les conditions suivantes, qui seraient traduites dans le règlement d'usage de la marque.
Les acteurs locaux souhaitant par exemple promouvoir leur territoire pourraient communiquer sur l'attribution du statut à ce territoire et, le cas échéant, utiliser le logo qui y sera associé. Pour faciliter le repérage et l'information des différents utilisateurs, un site internet dédié sera mis en place avec la liste des territoires ayant obtenu le statut de « zone fibrée » ainsi que les opérateurs attributaires du statut, tenue à jour, ainsi qu'un outil de cartographie de ces zones.
En revanche, les opérateurs de communications électroniques souhaitant par exemple promouvoir leurs services à très haut débit en fibre optique, que ceux-ci soient à destination du grand public ou des acteurs économiques, sur un territoire pourraient utiliser l'attribution du statut à ce territoire dans leur communication, seulement à la condition qu'ils commercialisent ces services sur l'ensemble des logements et locaux usage professionnel du territoire concerné. A cet égard, tous les logements ou locaux à usage professionnel des immeubles présents sur la « zone fibrée » concernée devraient être éligibles à l'offre à très haut débit en fibre optique proposée par l'opérateur souhaitant utiliser la marque. Ces conditions pourront en particulier être contrôlées a posteriori dans le cadre de contrôles de l'utilisation de la marque relative à la « zone fibrée », conformément au règlement d'usage de la marque.
3.4. Engager une dynamique collective
De par ses conditions et modalités d'attribution ainsi que les obligations qui lui sont attachées, le statut de « zone fibrée » est susceptible d'enclencher un cercle vertueux d'établissement et d'exploitation qualitatifs de réseaux en fibre optique jusqu'à l'abonné permettant de favoriser leur commercialisation. En particulier le renforcement des conditions de complétude et de mesure de l'exploitation du réseau est de nature à permettre l'atteinte de cet objectif.
De plus, l'attribution est susceptible de créer un effet d'entrainement sur l'ensemble des acteurs du territoire (utilisateurs finaux, collectivités locales, opérateurs d'infrastructures et opérateurs commerciaux), produisant ainsi une émulation favorable à l'atteinte des exigences du statut.
4. Obligations
L'attribution du statut de « zone fibrée » fait peser des obligations sur l'opérateur attributaire. Ces obligations correspondent aux conditions qui doivent être atteintes pour l'attribution du statut, et qui devront être ensuite maintenues dans la durée.
Ces obligations seront inscrites dans la décision attribuant le statut. Elles s'appliqueront à compter de la date de la décision de l'Autorité attribuant le statut. Elles sont détaillées au chapitre 2 de l'annexe à la présente décision et synthétisées ci-dessous :
- respect des dispositions législatives et réglementaires pertinentes : l'attributaire doit respecter dans le temps les dispositions législatives et règlementaires relatives à l'accès aux lignes à très haut débit en fibre optique. Il s'oblige également à tenir le plus grand compte des recommandations adoptées en application de ces dispositions ;
- complétude effective des déploiements : l'attributaire doit, directement ou indirectement :
- rendre raccordable tout logement ou local à usage professionnel situé dans un immeuble déclaré « raccordable à la demande », dans un délai ne pouvant excéder 6 mois à compter d'une demande d'un opérateur concernant ce logement ou local à usage professionnel ;
- rendre raccordable dans un délai ne pouvant excéder 6 mois, ou éventuellement raccordable à la demande immédiatement, tout logement ou local à usage professionnel d'un immeuble non encore fibré, dès lors qu'une demande en ce sens est formulé par un opérateur, le promoteur de l'immeuble ou une collectivité territoriale concernée ;
- adduction des nouveaux points de mutualisation dans les zones très denses : dans les zones très denses, l'attributaire doit raccorder chaque point de mutualisation intérieur ou extérieur non encore raccordé par lui ;
- disponibilité effective d'une offre de service sur l'ensemble de la zone : l'attributaire s'assure du maintien dans le temps de l'éligibilité à une offre de détail FttH de l'ensemble des logements et locaux à usage professionnel du territoire ayant obtenu le statut de « zone fibrée » ;
- disponibilité sur le marché de gros d'une option de qualité de service améliorée : l'attributaire doit assurer, directement ou indirectement, la fourniture d'une option de qualité de service améliorée aux offres de gros d'accès passif à la boucle locale optique permettant de répondre aux besoins de la clientèle entreprise sur infrastructure FttH ;
- fourniture d'indicateurs de qualité de service : l'attributaire est tenu de fournir trimestriellement des indicateurs de qualité d'exploitation du réseau ;
- information de l'Autorité en cas de transfert du statut et des obligations associées à un opérateur tiers.
Décide :