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Article AUTONOME (Avis n° 2015-AV-0244 de l'Autorité de sûreté nucléaire du 12 novembre 2015 sur le projet de décret autorisant le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) à créer une installation nucléaire de base dénommée DIADEM sur le site de Marcoule, dans la commune de Chusclan (Gard))

Article AUTONOME (Avis n° 2015-AV-0244 de l'Autorité de sûreté nucléaire du 12 novembre 2015 sur le projet de décret autorisant le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) à créer une installation nucléaire de base dénommée DIADEM sur le site de Marcoule, dans la commune de Chusclan (Gard))


Saisie par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie d'un projet de décret autorisant le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) à créer une installation nucléaire de base dénommée DIADEM sur le site de Marcoule, dans la commune de Chusclan (Gard) ;
Ayant entendu le 29 octobre 2015 les représentants du CEA et de la Commission locale d'information de Marcoule-Gard ;
Considérant que la stratégie de gestion des déchets radioactifs du CEA est fondée sur la mutualisation des moyens de traitement et d'entreposage des déchets solides et liquides de ses différents centres ;
Considérant que l'installation DIADEM a été notamment conçue pour permettre l'entreposage de déchets solides de moyenne activité à vie longue (MA-VL) hautement irradiants ; que ce sont des déchets ultimes au sens de l'article L. 542-1-1 du code de l'environnement et qu'ils ne peuvent être stockés en surface pour des raisons de sûreté nucléaire et de radioprotection ; qu'en application de l'article L. 542-1-2 du code de l'environnement, ces déchets sont destinés - après entreposage - à un stockage en couche géologique profonde ;
Considérant que cette installation a été également conçue pour permettre l'entreposage de déchets solides de faible et moyenne activité à vie courte (FMA-VC) dont les caractéristiques - et notamment le débit de dose - ne permettent pas l'acceptation en l'état dans une installation de stockage de surface ; que, après un entreposage pendant plusieurs années, ces déchets pourront être acceptés dans une telle installation ; qu'ils sont donc destinés à être stockés dans le centre de stockage de l'Aube (INB n° 149) ou une installation équivalente ;
Considérant ainsi que cette installation complète les fonctionnalités de l'installation nucléaire de base n° 164 (CEDRA), également exploitée par le CEA, dédiée à l'entreposage de déchets solides de moyenne activité à vie longue (MA-VL), faiblement et moyennement irradiants ;
Considérant en conséquence que cette installation joue un rôle important dans la stratégie de gestion des déchets radioactifs solides de moyenne activité à vie longue (MA-VL) et de faible et moyenne activité à vie courte (FMA-VC) du CEA et que, à ce titre, sa création et sa mise en service permettront de mener à bien les opérations de reprise et conditionnement de déchets anciens qu'il détient (en particulier sur le centre de Fontenay-aux-Roses) et de démantèlement de certaines de ses installations, en particulier la centrale PHENIX (INB n° 71) ;
Considérant que le CEA a annoncé par le courrier du 16 juin 2015 susvisé son intention de déposer le dossier de demande d'autorisation de mise en service de l'installation DIADEM au plus tard au premier semestre 2019, nonobstant le délai de mise en service de dix ans dont il a demandé l'inscription dans le décret d'autorisation de création ;
Considérant qu'un éventuel retard de ce dépôt pourrait remettre en cause le calendrier de réalisation des opérations susmentionnées et qu'il appartiendrait au CEA de prendre alors des mesures compensatoires ;
Considérant que les colis de déchets radioactifs qui seront entreposés dans cette installation devront respecter des spécifications d'acceptation pour l'entreposage qui seront définies par le CEA en application du III de l'article 8.4.2 de l'arrêté du 7 février 2012 susvisé ; que le projet de décret définit au IV-2 de son article 2 certaines caractéristiques que ces spécifications devront préciser pour assurer la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1 du code de l'environnement ;
Considérant que cette installation n'est pas conçue pour réaliser les opérations de reconditionnement de colis de déchets radioactifs au cours de leur entreposage qui pourraient s'avérer nécessaires si le programme de surveillance identifie des cas de dégradation de leurs propriétés ; que la sûreté de cet entreposage repose donc également sur la disponibilité d'une installation autorisée à réaliser ces opérations ; que le projet de décret prévoit à son article 3 et au IV-3 de son article 2 des dispositions permettant de s'assurer de cette disponibilité ;
Considérant qu'environ le quart des déchets destinés à l'installation sont déjà produits, pré-conditionnés et entreposés dans des installations existantes et que les autres déchets seront issus du démantèlement d'installations et seront donc produits dans les années à venir ; que les exigences sur la qualité du conditionnement de ces déchets à produire peuvent être renforcées par rapport à celles portant sur des déchets déjà pré-conditionnés ;
Considérant que le CEA a retenu, pour l'ensemble des conteneurs de déchets radioactifs destinés à l'installation, un mode de conditionnement sans blocage afin de pouvoir adapter, à l'issue de la période d'entreposage, le conditionnement des déchets aux spécifications d'acceptation des installations de stockage destinatrices mentionnées au 5° de l'article L. 542-12 du code de l'environnement ; que l'installation DIADEM n'est pas conçue pour permettre ces opérations de conditionnement ; que les conteneurs entreposés dans l'installation devront donc être transférés dans une autre installation ; qu'il convient donc de prescrire la réalisation d'études sur les modalités de conditionnement qui seront mises en œuvre ; que le résultat de ces études pourra conduire à adapter les modalités de conditionnement des futurs colis destinés à DIADEM ; que le programme des études à réaliser devra être transmis avant la mise en service de l'installation ;
Considérant que le dimensionnement de l'installation au regard des agressions internes et externes est, à ce stade de l'instruction, considéré conforme aux exigences attendues par l'ASN sur des installations neuves ; que cette conformité sera à nouveau examinée avant la mise en service de l'installation sur la base d'études approfondies faites par l'exploitant tenant compte notamment de l'installation telle que construite ;
Considérant que, concernant la prise en compte du risque de chute d'avion, la démonstration de sûreté du CEA est compatible avec les dispositions de la règle fondamentale de sûreté du 7 octobre 1992 susvisée ; que les conclusions de cette évaluation ont conduit à dispenser le CEA d'apporter la démonstration du dimensionnement de son installation à la chute d'avion en application de la règle fondamentale susmentionnée ; que, toutefois, le CEA n'a pas tenu compte, dans son évaluation probabiliste de ce risque, d'une extension possible des bâtiments d'entreposage bien que des dispositions aient été prises à cet effet au niveau de la conception du génie civil ;
Considérant en conséquence que, dans l'hypothèse où il souhaiterait procéder à une extension substantielle des capacités d'entreposage de l'installation, le CEA devrait - sans préjudice de l'application des procédures de modifications prévues à l'article L. 593-14 du code de l'environnement - réévaluer les probabilités susmentionnées et, le cas échéant, apporter la démonstration de la prise en compte du risque de chute d'avion dans le dimensionnement de son installation y compris son extension ;
Considérant que l'enjeu principal de l'installation consiste à maintenir la qualité de confinement des conteneurs de déchets radioactifs, surveiller les conteneurs et pouvoir les reprendre à tout moment ;
Considérant, à la suite à l'audition du CEA du 29 octobre 2015, que la population de conteneurs de déchets dont l'évolution du contenu est à surveiller peut être précisée au a) du 1° du II.1 de l'article 2 du projet de décret, afin de ne viser que les conteneurs de déchets radioactifs potentiellement dégradables, en particulier organo-halogénés,
Rend un avis favorable au projet de décret dans sa rédaction annexée au présent avis et propose les modifications suivantes :


- remplacer au a) du 1° du II.1. de l'article 2 les mots : « selon la catégorie des déchets qu'ils contiennent » par les mots : « de déchets radioactifs potentiellement dégradables, en particulier organo-halogénés » ;
- ajouter, à la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l'article 4, les mots : « en tenant compte de l'évolution potentielle des déchets entreposés et des résultats de la surveillance mentionnée au a) du 1° du II.1. de l'article 2 » ;
- remplacer la dernière phrase de l'article 4 par : « A l'occasion de la mise en service de l'installation prévue à l'article L. 593-11 du code de l'environnement, l'exploitant remet un programme des études à réaliser. A l'occasion de chaque réexamen périodique prévu à l'article L. 593-18 du même code, l'exploitant remet un bilan d'avancement des études menées. »


Le collège de l'Autorité de sûreté nucléaire (*),


(*) Commissaires présents en séance.