La Commission nationale de l'informatique et des libertés,
Saisie par le ministre de l'intérieur d'une demande d'avis concernant un projet de décret portant modification du code du sport et des articles R. 312-80 et R. 312-81 du code de la sécurité intérieure relatif au fichier des interdits d'acquisition et de détention d'armes ;
Vu la convention n° 108 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel ;
Vu la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;
Vu le code de la sécurité intérieure, notamment ses articles L. 312-1 à L. 312-17 et R. 312-77 à R. 312-83 ;
Vu le code du sport, notamment ses articles L. 131-6, L. 131-14 et R. 131-1 ;
Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment ses articles 26-I et 30-II ;
Vu le décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 modifié pris pour l'application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;
Vu le décret n° 2011-374 du 5 avril 2011 modifié portant création du Fichier national des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA) ;
Vu le décret n° 2014-445 du 30 avril 2014 relatif aux missions et à l'organisation de la direction générale de la sécurité intérieure ;
Vu la délibération n° 2010-455 du 9 décembre 2010 portant avis sur un projet de décret en Conseil d'Etat portant création d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes » ;
Vu le dossier et ses compléments ;
Sur la proposition de M. Jean-François CARREZ, commissaire, et après avoir entendu les observations de M. Jean-Alexandre SILVY, commissaire du Gouvernement,
Emet l'avis suivant :
La Commission nationale de l'informatique et des libertés a été saisie pour avis par le ministre de l'intérieur d'un projet de décret en Conseil d'Etat portant modification du code du sport et des articles R. 312-80 et R. 312-81 du code de la sécurité intérieure relatif au fichier des interdits d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA).
Le FINIADA a pour objet de permettre la mise en œuvre et le suivi au niveau national des interdictions d'acquisition et de détention d'armes. Ce fichier national automatisé recense les personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes ainsi que les personnes condamnées à une peine d'interdiction de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation ou condamnées à la confiscation d'une ou de plusieurs armes dont elles sont propriétaires ou dont elles ont la libre disposition. Il relève à ce titre de l'article 26-I de la loi du 6 janvier 1978 modifiée.
L'article L. 312-16 du CSI prévoit que la nature des informations enregistrées dans le FINIADA, la durée de leur conservation ainsi que les autorités et les personnes qui y ont accès sont déterminées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
Le FINIADA a donc été autorisé par le décret du 5 avril 2011 susvisé, pris après l'avis de la commission du 9 décembre 2010. Il est prévu d'apporter des modifications à ce décret, lesquelles visent, d'une part, à introduire une nouvelle disposition dans le code du sport afin de pouvoir refuser de délivrer ou de retirer la licence de tir sportif délivrée à une personne inscrite au FINIADA et, d'autre part, à modifier certaines dispositions réglementaires relatives à ce même fichier.
A titre liminaire, la commission rappelle que la consultation du FINIADA a pour objectifs opérationnels d'améliorer l'effectivité de l'application de la législation relative à l'acquisition et à la détention d'armes, de faciliter les vérifications opérées par les services préfectoraux dans le cadre des déclarations d'acquisition ou de détention d'armes ainsi que de faciliter les vérifications opérées par les forces de l'ordre ou par les services des douanes.
Elle relève ainsi qu'outre les agents des services précités et dûment habilités pouvant consulter le FINIADA, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, les armuriers et représentants de la Fédération nationale des chasseurs (ou « utilisateurs extérieurs ») sont destinataires du statut des personnes enregistrées dans ce fichier, conformément aux dispositions de l'article R. 312-81 du CSI.
L'article 1er du projet de décret vise à modifier les dispositions du code du sport applicables à certaines fédérations sportives, afin de leur permettre de refuser de délivrer ou de retirer la licence de tir sportif délivrée à une personne inscrite au FINIADA.
Aux termes du projet d'article R. 131-2 dudit code, il est ainsi prévu que « La licence de tir peut être refusée ou retirée par la fédération sportive ayant reçu délégation du ministre chargé des sports au titre de l'article L. 131-14 aux personnes inscrites au fichier national automatisé nominatif des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes mentionné à l'article L. 312-16 du code de la sécurité intérieure ».
La commission relève que l'article L. 312-4 du CSI et les dispositions réglementaires du même code relatives à l'acquisition et détention des armes prévoient expressément que l'acquisition et la détention d'armes, d'éléments d'armes et de munitions de catégorie B sont soumises à autorisation. Ces dispositions prévoient notamment la présentation de la copie d'une licence de tir en cours de validité délivrée par une fédération sportive ayant reçu délégation du ministre chargé des sports au titre de l'article L. 131-14 du code du sport.
Elle prend acte que la possibilité, pour les fédérations précitées, de refuser de délivrer ou de retirer la licence de tir sportif délivrée à une personne inscrite au FINIADA, doit permettre de renforcer le dispositif de contrôle de l'accès aux armes à feu nécessaire au maintien de l'ordre et de la sécurité publics en s'assurant qu'une personne n'est effectivement pas interdite d'acquisition ou de détention d'armes.
Dans ces conditions, la commission considère qu'il est légitime, pour ces fédérations, d'être destinataires du statut d'interdit d'acquisition et de détention d'armes d'une personne.
Une telle possibilité nécessite néanmoins une modification des conditions de mise en œuvre du FINIADA.
L'article 2 du projet de décret vise dès lors à modifier l'article R. 312-81 du CSI afin de mentionner les fédérations sportives ayant reçu délégation du ministre chargé des sports au titre des destinataires de certaines des informations contenues dans ce traitement.
La commission relève que cette communication répond aux mêmes conditions que celles qui entourent la transmission du statut des personnes enregistrées dans le FINIADA à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, aux armuriers ainsi qu'aux représentants de la Fédération nationale des chasseurs.
A cet égard, l'accès au FINIADA sera subordonné à la présentation, par les fédérations concernées, d'une requête individuelle comportant le nom, le prénom et la date de naissance de la personne dont l'inscription ou la non-inscription au FINIADA est vérifiée.
Les fédérations délégataires ne pourront par ailleurs être destinataires que de l'information selon laquelle une personne est enregistrée ou non dans le FINIADA. Elles devront se rapprocher de la préfecture compétente aux fins d'obtenir plus d'informations au sujet de cette personne.
En outre, elle rappelle que la transmission à ces fédérations du statut des personnes enregistrées dans le FINIADA doit s'effectuer de manière sécurisée, après authentification de ces nouveaux « utilisateurs extérieurs ». S'il s'agit de recourir à une application extranet comme c'est actuellement le cas pour les personnels habilités mentionnés à l'article R. 312-81 en vigueur, la commission rappelle, conformément à ses précédentes recommandations, l'importance de définir une durée de vie limitée des mots de passe et une robustesse suffisante ainsi que la nécessité de mettre en place un blocage de l'accès à un compte après trois tentatives infructueuses de connexion.
Elle relève également que, en application de l'article R. 312-81 du CSI actuellement en vigueur, cette transmission est subordonnée au strict respect du « besoin d'en connaître ». A cet égard, la commission rappelle que toutes les demandes d'accès au FINIADA doivent faire l'objet de mesures de traçabilité, afin notamment de s'assurer que les « utilisateurs extérieurs » n'agissent que dans le cadre de leurs attributions légales.
La commission relève enfin que l'article 2 du projet de décret vise à tenir compte de la nouvelle organisation de la direction générale de la sécurité intérieure prévue par le décret n° 2014-445 du 30 avril 2014 susvisé. Ces dispositions visent à modifier le 1° de l'article R. 312-80 du CSI afin de substituer à la référence au « directeur général de la police nationale », désormais obsolète, celle du « directeur général dont ils relèvent ».
Enfin, si le présent projet de décret ne prévoit aucune modification des autres conditions de mise en œuvre du FINIADA, lesquelles demeurent donc inchangées, la commission rappelle qu'elle avait demandé à être rendue destinataire du descriptif des mesures permettant « d'accéder par tous moyens techniques mobiles aux données du fichier ». Elle demande dès lors au ministère de l'intérieur de lui transmettre ce descriptif dans les meilleurs délais.