Après en avoir délibéré le 15 décembre 2015,
I. - Contexte
En application du 5° de l'article L. 5-2 du CPCE, l'Autorité « émet un avis public sur les aspects économiques des tarifs visés au deuxième alinéa de l'article L. 4, préalablement à leur homologation par les ministres chargés des postes et de l'économie ». Les tarifs visés au deuxième alinéa de l'article L. 4 sont les tarifs des prestations offertes à la presse au titre du service public du transport et de la distribution de la presse, soumises au régime spécifique prévu par le CPCE. La structure tarifaire de ces prestations a pour objectif de favoriser le pluralisme, notamment celui de l'information politique et générale.
L'article R. 1-1-17 du CPCE prévoit que : « La Poste soumet son projet de tarifs à l'approbation des ministres chargés des postes et de l'économie. Le ministre chargé des postes saisit l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes qui dispose d'un mois pour rendre son avis sur les aspects économiques du projet. Sauf décision contraire des ministres dans le délai de deux mois suivant la réception du projet, les tarifs sont réputés approuvés ». L'ARCEP a été saisie pour avis par courrier daté du 14 décembre 2015 du ministre chargé des postes sur le dossier transmis par La Poste et relatif aux propositions d'évolutions tarifaires pour l'année 2016 des prestations offertes à la presse au titre du service public du transport et de la distribution de la presse et soumises au régime spécifique prévu par le CPCE.
Une mission, confiée en 2008 à M. Marc Schwartz concernant l'acheminement des abonnements de presse par postage ou par portage, avait conduit à la signature d'un protocole d'accord le 23 juillet 2008. Ces accords portaient sur une période de sept ans, de janvier 2009 à décembre 2015 et arrêtaient un plan de revalorisation tarifaire fondé sur des paliers de hausses annuelles. Ils concernaient l'ensemble des publications admises au bénéfice du régime de la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) et prévoyaient une revalorisation annuelle des tarifs postaux selon une trajectoire résultant, d'une part, d'une hausse tarifaire en pourcentage et, d'autre part, de l'application d'un terme d'inflation (hors tabac) évalué à la date du mois de juin de l'année n - 1. Leur effet a pris fin en 2015.
Le ministère de la culture et de la communication a annoncé en juin 2015 le lancement d'une réforme des aides à la presse, concernant notamment la diffusion postale de la presse.
La ministre de la culture et de la communication, le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique et le ministre des finances et des comptes publics ont demandé, le 19 juin 2015, à l'Autorité, en complément des missions déjà confiées à l'Autorité par l'article L. 5-2 du CPCE, un avis portant sur la comptabilité réglementaire de La Poste appliquée au compte presse. Parallèlement, le Gouvernement a chargé M. Emmanuel Giannesini d'une mission sur les différents scénarios pour la période s'ouvrant à l'expiration du protocole d'accord « Schwartz ».
Dans son avis n° 2015-0831, en date du 7 juillet 2015, relatif à la demande du Gouvernement sur les coûts de l'offre de transport et de distribution de la presse de La Poste, l'Autorité avait relevé que « les comptes de la presse de service public révèlent en 2014 un déficit brut, de 506 millions d'euros (…). La compensation versée par l'Etat, de 150 millions d'euros en 2014, reste très inférieure à ce déficit ». Après avoir testé la sensibilité de ce déficit à certains paramètres de la comptabilité et simulé l'utilisation de règles alternatives, l'Autorité avait conclu que ces analyses de sensibilité et ces simulations ne conduisaient pas « à une évolution sensible du montant du déficit brut du compte presse constaté en 2014, qui resterait très significatif. Par voie de conséquence, elles ne conduisent pas à des effets tarifaires concrets ».
Le compte rendu du conseil des ministres du 2 décembre 2015 mentionne qu'en 2016 « La Poste appliquera une augmentation hors inflation de 0 % pour les titres à faibles ressources publicitaires, 1 % pour la presse d'information politique et générale et de 3 % pour les autres titres ». Il mentionne également que « les tarifs de La Poste pour la période 2017/2022 n'augmenteraient pas au-delà de l'inflation pour les titres à faibles ressources publicitaires, qu'ils augmenteraient - hors inflation - de 1 % pour la presse d'information politique et générale, de 3 % pour la presse de la connaissance et du savoir et de 5 % enfin pour la presse de loisirs et de divertissements. »
II. - Revalorisation de la grille tarifaire
Le projet soumis à l'avis de l'Autorité porte sur les évolutions tarifaires de l'année 2016.
Concernant les titres admis au bénéfice du régime de la CPPAP (hors presse d'information politique et générale et quotidiens à faibles ressources et de petites annonces), le dossier prévoit qu'une revalorisation de 3,0 % sera appliquée sur les tarifs de chacun des trois niveaux d'urgence en sus du terme d'inflation de 0,26 %, valeur de l'évolution de l'indice des prix à la consommation hors tabac entre juin 2014 (126,22) et juin 2015 (126,55). La hausse globale de 3,3 % sera appliquée sur le tarif pivot de la « liasse directe code postal ».
Concernant la presse d'information politique et générale ainsi que les quotidiens à faibles ressources et de petites annonces, les revalorisations tarifaires s'élèveront respectivement à 1,0 % et 0,0 %, soit des hausses globales de 1,3 % et 0,3 % sur le tarif pivot en tenant compte de l'inflation.
Les tarifs applicables selon les niveaux d'urgence, le degré de préparation des envois, le caractère mécanisable ou non du produit de presse au regard des spécifications techniques émises par La Poste et les options disponibles s'en déduisent par l'application des coefficients présentés en annexe.
III. - Analyse de l'Autorité
Les augmentations tarifaires hors inflation prévues par La Poste sont conformes à celles annoncées dans le compte rendu du conseil des ministres du 2 décembre. Elles correspondent à une hausse moyenne hors inflation de 2,1%, sensiblement plus faible que celles observées les années précédentes (8,7% en 2014 et 7,3% en 2015).
L'inflation de référence utilisée est calculée selon la même méthode que celle employée les années précédentes et correspond à l'évolution annuelle de l'indice des prix à la consommation hors tabac entre juin 2014 et juin 2015.
Aux termes du 5° de l'article L. 5-2 du CPCE, l'analyse de l'Autorité porte sur les « aspects économiques » des tarifs des prestations offertes à la presse au titre du service public du transport et de la distribution de la presse.
L'Autorité estime à cet égard, en ligne avec son avis n° 2015-0831 en date du 7 juillet 2015 relatif au coût de l'offre de transport et de distribution de la presse, que la tarification des envois de presse au titre du service public du transport et de la distribution de la presse devrait, à terme, refléter les coûts, de manière à ce que les tarifs des envois de presse transmettent un signal économiquement pertinent à l'ensemble du marché. Les tarifs de cette offre spécifique devraient ainsi converger vers ceux de l'offre à la presse relevant du service universel postal.
A ce jour, et comme l'illustre le tableau ci-dessous, les tarifs des prestations offertes à la presse au titre du service public du transport et de la distribution de la presse restent significativement inférieurs aux tarifs relevant du service universel postal qui s'appliquent aux publications périodiques ne bénéficiant pas de l'agrément de la CPPAP (1).
ÉCART PAR RAPPORT AUX TARIFS DE L'OFFRE À LA PRESSE RELEVANT DU SERVICE UNIVERSEL |
2014 |
2015 |
2016 |
---|---|---|---|
Titres admis au bénéfice du régime de la c ommission paritaire des publications et agences de presse (hors presse d'information politique et générale et quotidiens à faibles ressources et de petites annonces) |
- 39,5 % |
- 38,4 % |
- 38,8 % |
Presse d'information politique et générale |
- 65,4 % |
- 65,3 % |
- 66,2 % |
Quotidien à faibles ressources publicitaires |
- 86,5 % |
- 86,7 % |
- 87,1 % |
Total |
- 51,7 % |
- 51,0 % |
- 51,7 % |
IV. - Conclusion
La hausse de 2016 est plus faible que celles observées les années précédentes. Elle s'inscrit dans le schéma d'évolution tarifaire annoncée par le Gouvernement le 2 décembre 2015 pour la période 2016-2022. L'Autorité se félicite de la visibilité ainsi donnée à l'ensemble des acteurs du secteur.
Ce schéma n'est cependant pas de nature à assurer rapidement une convergence entre les tarifs des prestations offertes au titre du service public de transport et de distribution de la presse et ceux de l'offre à la presse relevant du service universel.
L'Autorité note toutefois la nécessité pour le Gouvernement de trouver un compromis convenable entre cet objectif économique et l'exigence résultant de l'article L. 4 du CPCE de « favoriser le pluralisme, notamment celui de l'information politique et générale ».
Au regard de ces considérations l'Autorité émet un avis favorable.
Le présent avis sera transmis au ministre chargé des postes. Il sera publié au Journal officiel de la République française.