Après en avoir délibéré le 15 décembre 2015,
Table des matières
I. Introduction
I.a. Processus d'analyse des marchés
I.b. Durée d'application de la décision et territoire d'analyse
I.c. La diffusion de la télévision en France
I.c.1. Les différents modes de diffusion de la télévision en France
I.c.2. Le cadre légal de la diffusion et de la distribution de la télévision
I.d. Les marchés de gros de la diffusion audiovisuelle hertzienne terrestre
I.d.1. Le fonctionnement du marché de gros aval
I.d.2. Le fonctionnement du marché de gros amont
I.d.3. Le fonctionnement du marché du transport de signaux audiovisuels
I.e. Principaux éléments de bilan des cycles précédents
I.e.1. Sur l'évolution de la concurrence sur le marché de gros aval de la TNT
I.e.2. Sur l'évolution de la concurrence par les infrastructures
II. Définition du marché pertinent
II.a. Délimitation du marché des produits et services
II.a.1. Analyse de substituabilité entre les modes de diffusion de la télévision
II.a.2. Analyse de substituabilité entre les prestations de diffusion et de transport des signaux audiovisuels
II.a.3. Conclusion sur la délimitation du marché en termes de produits et de services
II.b. Délimitation du marché géographique
II.c. Analyse de la pertinence d'une régulation ex ante au travers du test des trois critères
II.c.1. Premier critère : existence de barrières élevées et non provisoires à l'entrée
II.c.2. Deuxième critère : évolution peu probable vers une situation de concurrence effective à l'horizon de la présente analyse
II.c.3. Troisième critère : insuffisance du droit de la concurrence pour remédier seul aux défaillances du marché
II.c.4. Conclusion sur le test des trois critères et la pertinence d'une régulation ex ante sur le marché des offres de gros de diffusion hertzienne terrestre de programmes télévisuels
III. Puissance de marché
III.a. Principes d'analyse de la puissance de marché des opérateurs de télédiffusion
III.b. Eléments conduisant à la présomption d'une puissance de TDF
III.b.1. Eléments quantitatifs clés
III.b.2. Indicateurs qualitatifs
III.b.3. Conclusion sur la puissance de marché
IV. Obligations
IV.a. Objectifs pour le cycle 2015-2018
IV.b. Obligations non tarifaires
IV.b.1. Obligation de non discrimination
IV.b.2. Obligations d'accès
IV.b.3. Obligation de transparence
IV.c. Obligations tarifaires
IV.c.1. Obligations de contrôle tarifaire
IV.c.2. Autres obligations tarifaires
IV.d. Obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts
IV.d.1. Cadre réglementaire
IV.d.2. Obligation de séparation comptable
IV.d.3. Périmètre de l'obligation de comptabilisation des coûts
Décide :
Annexe 1 : Eléments devant faire l'objet d'une publication via l'offre de référence de TDF pour la diffusion de la TNT
1. Etudes préalables de faisabilité et tarifs associés
2. Prestations d'hébergement des équipements radioélectriques
3. Prestations de diffusion HF
Annexe 2 : Eléments d'information générale devant faire l'objet d'une publication par TDF
1. Eléments génériques
2. Eléments de la prestation « DiffHF-TNT » (à l'exclusion des nouvelles configurations d'antenne)
Annexe 3 : Liste des sites réputés non réplicables
1. En France métropolitaine et en Corse
2. Outre-mer
Annexe 4 : Utilisation du modèle technico-économique pour la définition des tarifs sur les sites réputés non réplicables
1. Méthodologie
2. Résultats
Annexe 5 : Lettre d'engagement de TDF du 15 octobre 2015
I. - Introduction
I.a. Processus d'analyse des marchés
Conformément aux dispositions de l'article L. 32 du CPCE, les réseaux assurant la diffusion de services de communication audiovisuelle (qui comprennent les services de télévision et de radio), ou utilisés pour la distribution de ces derniers, sont considérés comme des réseaux de communications électroniques.
Ainsi, les réseaux de diffusion audiovisuelle hertzienne terrestre entrent dans le champ de compétence de régulation de l'ARCEP. Il convient toutefois de souligner que les services consistant à éditer ou distribuer des services de communications au public sont exclus du champ de la régulation des communications électroniques.
Le marché de gros amont de la diffusion audiovisuelle hertzienne terrestre, faisant l'objet d'une régulation ex ante de l'ARCEP depuis 2006, est inclus dans le marché de gros des services de radiodiffusion qu'avait listé la Commission européenne en annexe de sa recommandation n° 2003/311/CE en date du 11 février 2003 sur les marchés a priori pertinents pour une régulation ex ante. Il a été exclu des recommandations suivantes de la Commission européenne de 2007 (1) et de 2014 (2). Pour rappel, en 2007, la Commission européenne avait motivé le retrait de ce marché notamment par le fait que l'hétérogénéité des situations de marché dans les Etats membres et du développement de la concurrence entre plateformes ne permettait pas de définir une politique commune de régulation.
Après 2007, plusieurs autorités de régulation nationales, dont l'ARCEP, ont choisi de maintenir une régulation ex ante sur le marché de gros des services de radiodiffusion. Ces autorités ont alors notifié leurs projets de décision d'analyse du marché en démontrant la pertinence de la régulation ex ante, en s'appuyant systématiquement sur le test « des trois critères », défini par la Commission européenne, qui consiste en une vérification de :
- l'existence de barrières élevées et non transitoires à l'entrée sur le marché considéré ;
- l'absence de perspectives d'évolution vers une situation de concurrence effective ;
- l'insuffisance du droit de la concurrence seul pour remédier aux défaillances du marché.
L'ARCEP a ainsi été amenée à conduire un deuxième cycle de régulation, de 2006 à 2009, puis un troisième cycle qui a fait l'objet de la décision n° 2012-1137 du 11 septembre 2012 et touche à son terme.
Il incombe ainsi à l'Autorité d'étudier la nécessité d'une nouvelle régulation ex ante du marché des offres d'accès proposés par un opérateur de diffusion hertzienne. Conformément aux dispositions des articles L. 37-1 et suivants du CPCE, le processus d'analyse de marché consiste à :
- déterminer la liste des marchés du secteur dont les caractéristiques en termes de développement de la concurrence justifient l'imposition d'un dispositif de régulation spécifique ;
- désigner, le cas échéant, les opérateurs disposant sur ces marchés d'une influence significative ;
- fixer les obligations spécifiques, adaptées et proportionnées aux problèmes concurrentiels constatés.
Dans ce cadre, et conformément aux articles L. 37-3 et D. 301 du même code, l'ARCEP recueille l'avis de l'Autorité de la concurrence ainsi que celui du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) lorsque le périmètre du marché pertinent analysé inclut la diffusion de la radio ou de la télévision. Enfin, l'ARCEP soumet son projet de décision à consultation publique et le notifie à la Commission européenne et aux autorités de régulation nationales (ARN) des autres Etats membres.
La présente décision d'analyse du marché de gros amont des services de diffusion hertzienne terrestre de programmes télévisuels fait suite à une première consultation publique portant sur l'analyse de l'ARCEP du bilan et des perspectives de la régulation sur ce marché organisée en fin d'année 2014 et à une seconde consultation publique menée du 12 juin au 15 juillet 2015 portant son projet de décision. Elle tient également le plus grand compte des avis, sur le projet de décision, rendus par l'Autorité de la concurrence le 24 juillet 2015 et le CSA le 16 septembre 2015. Elle intègre également les observations de la Commission européenne du 25 novembre 2011 sur le projet de décision qui lui a été notifié le 26 octobre 2015.
I.b. Durée d'application de la décision et territoire d'analyse
Conformément aux dispositions de l'article D. 301 du CPCE, l'ARCEP peut déclarer un marché pertinent « pour une durée maximale de trois ans ». A l'issue de la présente analyse du marché de gros amont des services de diffusion hertzienne terrestre de programmes télévisuels, l'ARCEP adopte une décision qui s'appliquera pour une période de trois ans à compter du 17 décembre 2015, date à laquelle elle sera notifiée à l'opérateur ou aux opérateurs exerçant une influence significative sur le marché.
Le périmètre géographique considéré comprend l'ensemble du territoire métropolitain (y compris la Corse), des départements et régions d'outre-mer ainsi que les collectivités d'outre-mer dans lesquelles les dispositions des articles L. 37-1 et suivants du CPCE s'appliquent (Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy et Saint-Martin).
En tant que de besoin, par exemple en cas d'évolution significative de la structure du marché ou de ses acteurs, et conformément aux dispositions de l'article du CPCE D. 301, l'ARCEP pourra se donner la possibilité d'effectuer une nouvelle analyse avant la fin de la période envisagée et, le cas échéant, prendre de nouvelles décisions.
I.c. La diffusion de la télévision en France
A l'échelle européenne, une très grande diversité dans les modes de distribution et de diffusion des services audiovisuels est observée. L'objet de cette section, à caractère introductif, est de présenter le fonctionnement et les spécificités de la diffusion de la télévision en France.
I.c.1. Les différents modes de diffusion de la télévision en France
Les principales technologies de réception de la télévision numérique à disposition des téléspectateurs français sont présentées ici.
La télévision numérique terrestre
La télévision numérique terrestre (TNT) est un moyen de diffuser, en mode numérique, la télévision par voie hertzienne terrestre. Cette diffusion est réalisée à l'aide d'équipements situés au sol et permet la réception du signal via une antenne (3) râteau équipée d'un adaptateur.
A l'instar de ce qui était observé sur la télévision analogique terrestre, arrêtée en novembre 2011, les services audiovisuels de la TNT sont majoritairement gratuits pour les téléspectateurs ; ils sont fournis aussi bien par des chaînes publiques que privées. Une offre de TNT payante existe ; elle est composée de 6 chaînes et compte, selon le CSA (4), 0,9 million de foyers abonnés en 2013, ce qui représente 6 % du nombre total d'abonnés à une offre de télévision payante. Le CSA relève par ailleurs, dans son rapport annuel sur l'année 2014, que la TNT payante semble « engagée dans un mouvement de spirale négative qui pourrait à terme remettre en cause sa pérennité ».
Si les services audiovisuels actuellement disponibles sur la TNT sont principalement des services de télévision linéaire, c'est-à-dire dont l'horaire de diffusion est fixé par la chaîne de télévision, les services non linéaires, c'est-à-dire dont la diffusion est effectuée à la demande de l'utilisateur final, sont amenés à se développer. L'adoption de la norme HbbTV (« hybrid broadcast broadband TV »), un standard d'interactivité européen, déjà expérimenté par une douzaine de chaînes françaises, pourrait permettre d'améliorer l'offre de services interactifs disponibles sur la TNT, pour notamment proposer la télévision de rattrapage ou la vidéo à la demande (à condition de posséder un téléviseur compatible).
La TNT assure actuellement la couverture de 97 % de la population métropolitaine et de 95 % de la population ultramarine. Selon l'observatoire de l'équipement audiovisuel du CSA, en juin 2014, 59 % des foyers équipés d'au moins un téléviseur utilisent la TNT comme moyen de réception sur l'un de leurs postes de télévision.
La diffusion sur les réseaux cuivre et fibre
En 2002, les fournisseurs d'accès à internet (FAI) ont lancé, en France, les premières offres multiservices triple play qui incluent l'accès à l'internet, la téléphonie en voix sur large bande et l'accès à des services audiovisuels. Alors que les offres triple play sont longtemps restées la norme sur le marché haut et très haut débit, les stratégies commerciales des opérateurs ont évolué au cours des dernières années. A partir de l'année 2010, sont notamment apparues des offres double play pour lesquelles les services audiovisuels sont exclus de l'offre ou présentés en option, ainsi que des offres quadruple play qui intègrent, en plus des services fixes des offres triple play, des services de téléphonie mobile.
D'un point de vue technique, les signaux audiovisuels sont transportés, en multidiffusion (5) (en anglais multicast), du cœur de réseau des FAI jusqu'aux répartiteurs à partir desquels le signal est ensuite transmis jusqu'à la box du client final, avec le protocole IPTV, sur des boucles locales en cuivre ou en fibre optique utilisant les technologies DSL et FttH (Fibre to the Home). La diffusion de la télévision par DSL nécessite, entre autres (6), que le débit disponible sur la ligne cuivre soit suffisant (environ 4 Mbit/s) pour acheminer les flux de données des services audiovisuels. Pour la diffusion par FttH, les contraintes liées aux caractéristiques de la ligne sont quasi inexistantes.
A ce jour, même si les débits disponibles diffèrent, les services audiovisuels proposés par les FAI ne sont cependant pas encore, en principe, significativement différents entre les offres haut et très haut débit. Ils incluent généralement :
- l'accès à un bouquet dit « de base » distribué par le FAI et regroupant une centaine de chaînes, dont les chaînes diffusées sur la TNT ;
- l'accès, par des options payantes, à des chaînes ou groupes de chaînes à la carte, distribuées directement par le FAI ;
- l'accès à un ou plusieurs bouquets de télévision payante distribués par des tiers, comme Canal+ Le Bouquet ou CanalSat ;
- des offres de vidéo à la demande ou de télévision de rattrapage.
Ces différents services peuvent, selon les caractéristiques de la ligne considérée (débits notamment), être proposés avec des programmes en haute définition.
En outre, certains FAI offrent à leurs clients la possibilité de regarder certaines chaînes sur leur écran d'ordinateur ou leur tablette en plus de leur écran de télévision (on parle alors de service « multiposte »), ou sur plusieurs écrans de télévision différents (on parle alors de service « multi TV »).
A long terme, le très haut débit pourrait notamment répondre à de nouvelles attentes des consommateurs en favorisant le développement de services enrichis, comme une diffusion haute définition d'excellente qualité ou encore la diffusion de programmes en 3D.
Au 31 décembre 2014, seules 72 % (7) des lignes sont éligibles à des services de télévision sur DSL sur un poste de télévision en considérant, d'une part, qu'elles sont reliées à un NRA sur lequel des services de télévision sur DSL sont ouverts et, d'autre part, qu'elles disposent d'un débit minimal nécessaire de 4 Mbit/s. Dans la mesure où chaque téléviseur raccordé à la télévision sur DSL utilise son propre flux de données, l'éligibilité décroît en fonction du nombre de téléviseurs à raccorder. Ainsi, seules 56 % (8) des lignes sont éligibles à un service de télévision sur DSL sur deux postes de télévision. Or, selon le CSA (9), 49 % des foyers français disposent d'au moins deux téléviseurs en 2013.
Au 31 décembre 2014, 4,1 millions de logements étaient éligibles à une offre très haut débit FttH, ce qui correspond à une hausse de 37 % en un an. Ainsi, le taux de couverture du FttH peut être estimé à 15 % (10) des foyers.
En juin 2014, selon l'observatoire de l'équipement audiovisuel du CSA, 44 % des foyers (disposant d'au moins un téléviseur) étaient équipés d'un mode de réception de la télévision par ADSL ou fibre optique.
La diffusion par câble
En France, le déploiement du câble a été réalisé à l'initiative des pouvoirs publics dans le cadre du Plan Câble adopté en 1982 avec l'objectif de déployer un réseau national à large bande sur une durée de douze ans, avant que ce plan ne soit progressivement abandonné à partir de 1986. Aujourd'hui, même s'il existe encore des réseaux câblés exploités par des collectivités, Numericable-SFR est le seul câblo-opérateur à dimension nationale.
D'un point de vue technique, les réseaux câblés constitués en grande partie de câbles coaxiaux ont été conçus historiquement pour diffuser des services de télévision. Leur modernisation, qui s'appuie notamment sur le remplacement par de la fibre optique d'une partie des câbles coaxiaux situés sur le domaine public, a permis d'améliorer rapidement les débits disponibles sur les réseaux câblés. Ces derniers permettent ainsi, depuis plusieurs années, d'offrir également des services de téléphonie et d'accès à l'internet.
Plusieurs offres et services de télévision sont disponibles sur le câble :
- le « service antenne », qui est proposé en application de l'article 34-1 de la loi du 30 septembre 1986, permet à de nombreux immeubles sans antennes râteaux, raccordés par le câble, de recevoir les chaînes de la TNT diffusées dans la zone, moyennant le versement de frais de maintenance (souvent intégrés aux charges collectives) et le paiement d'un abonnement par chaque foyer souhaitant utiliser le service (11) ;
- les offres de télévision payante distribuées sur le câble permettent d'avoir accès à des bouquets thématiques de chaînes de télévision. Au troisième trimestre 2014, Numericable déclarait 239 000 clients d'une offre de télévision seule ;
- les offres multiservices triple play ou quadruple play, comme décrit ci-avant, incluent des services audiovisuels. Au troisième trimestre 2014, Numericable déclarait un parc de 1,1 million de clients pour ses offres multiservices.
Au quatrième trimestre 2014, dans son observatoire des services fixes haut et très haut débit, l'ARCEP comptabilisait 8,6 millions de logements éligibles à une offre très haut débit sur câble coaxial, soit un taux de couverture de 31 % des foyers (10).
Selon le CSA, en juin 2014, seulement 8,4 % des foyers français disposant d'un téléviseur recevaient la télévision par câble.
La diffusion par satellite
Le satellite permet de diffuser la télévision par voie hertzienne à l'aide d'équipements situés en orbite et permet la réception du signal via une parabole équipée d'un démodulateur satellite et d'une carte d'accès.
Le satellite permet d'accéder aux chaînes de la TNT ainsi qu'à des bouquets de chaînes payantes. Le groupe Canal Plus, qui a lancé Canal Satellite en 1992, le premier bouquet de télévision par satellite en France, concentre les offres dominantes. D'autres offres, comme le bouquet BIS TV commercialisé par AB Groupe, restent moins développées. Certains fournisseurs d'accès à internet proposent par ailleurs une desserte par satellite aux clients ADSL dont la ligne ne permet pas de recevoir la télévision.
Plusieurs distributeurs de télévision par satellite proposent également, en France métropolitaine, de recevoir les chaînes de la TNT gratuitement. Sur la base des chiffres publiés par le CSA (12), il peut être estimé que, à fin 2013, environ 13 % des foyers français équipés d'un téléviseur utilisaient le satellite uniquement pour recevoir les chaînes gratuites de la TNT.
Les services audiovisuels disponibles sur le satellite correspondent principalement à des services linéaires car ce mode de diffusion ne dispose pas de voie de retour, c'est-à-dire que l'utilisateur final ne peut pas renvoyer un signal à la chaîne émettrice. Ainsi, s'il souhaite utiliser les services interactifs ou de vidéo à la demande proposés par les distributeurs d'offres de télévision par satellite, le client final doit disposer d'une connexion à internet pour y raccorder son démodulateur satellite.
D'un point de vue technique, le satellite assure la couverture de plus de 99 % de la population française. Néanmoins, son développement est limité par la réglementation de l'urbanisme et le fonctionnement des copropriétés, qui conduisent, souvent en zones urbaines, à l'interdiction d'installer des paraboles, et par le coût des équipements incombant aux utilisateurs finals pour recevoir la télévision via le satellite.
Ainsi, le taux de pénétration de la télévision par satellite reste limité. Selon le CSA, fin juin 2014, 24,7 % des foyers français disposant d'un téléviseur utilisaient une réception satellitaire.
La télévision en mobilité
Depuis 2005, des services audiovisuels linéaires et non linéaires sont accessibles sur les terminaux mobiles compatibles UMTS ou EDGE, puis 4G. Les résultats de l'étude réalisée par le CREDOC (13) pour le compte de l'ARCEP et du CGEIET montrent un engouement toujours modéré pour la télévision en mobilité. A la fin d'année 2014, seulement 10 % des personnes interrogées affirment avoir regardé, au cours des douze derniers mois, la télévision en direct sur leur téléphone mobile ; ce chiffre constitue un majorant de l'utilisation des réseaux mobiles pour la diffusion de la télévision car la télévision diffusée en direct sur internet peut également être visionnée sur un téléphone mobile connecté en Wi-Fi. Ce mode de diffusion se révèle toutefois très consommateur de bande passante, avec des risques de saturation des réseaux mobiles, notamment aux heures de pointe. Ces offres sont également fortement desservies par les limitations de capacité des forfaits internet mobiles actuels puisque visionner en direct sur son mobile une chaîne de télévision en simple ou en haute définition induit une consommation de données respectivement de 300 Mo/heure et 600 Mo/heure.
La diffusion sur internet
Après avoir développé des solutions de vidéos de rattrapage sur leurs sites web, les chaînes de télévision ont élargi à la diffusion en direct le périmètre des services interactifs disponibles en ligne. A l'exception des chaînes de télévision payante, ce service est fourni gratuitement par les chaînes de la TNT. Si la réception de la télévision sur internet a progressé au cours des dernières années, l'étude menée par le CREDOC (14) montre une stabilisation en 2014 (en 2014 comme en 2013, 22 % des personnes interrogées affirmaient par exemple avoir regardé la télévision en direct sur un ordinateur au cours des douze derniers mois).
Il convient de souligner que l'un des inconvénients de la diffusion sur internet est que l'offre télévisuelle est morcelée entre les pages web de chaque groupe audiovisuel. Plusieurs interfaces, sites web et applications, ont été développés pour regrouper et présenter l'ensemble de l'offre télévisuelle disponible sur internet, en direct ou en rattrapage. Toutefois, les sociétés impliquées ont pu rencontrer des difficultés (15) d'ordre juridique relatives notamment aux dispositions du code de la propriété intellectuelle.
I.c.2. Le cadre légal de la diffusion et de la distribution de la télévision
La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication prévoit les principales modalités d'organisation de la diffusion audiovisuelle en France.
Le rôle du CSA
Cette loi définit les missions du CSA, l'autorité publique indépendante en charge de la régulation de l'audiovisuel, et notamment de la gestion des ressources radioélectriques. Il conclut une convention avec les chaînes de télévision et les services de radio dès lors que le budget annuel de ceux-ci dépasse un certain seuil. Lorsque des services de communication audiovisuelle sont diffusés sur des fréquences affectées à la radiodiffusion, il délivre aux éditeurs ou aux distributeurs les autorisations d'émettre, dans lesquelles il assigne les fréquences, conformément aux dispositions des articles 22 et 25 de la loi du 30 septembre 1986.
La place spécifique de la TNT en France
La loi du 30 septembre 1986 confère une place spécifique à la TNT. Elle prévoit par exemple qu'une chaîne diffusée sur la TNT dispose de droits de reprise sur les autres plateformes.
En effet, d'une part, l'article 34-2 de cette loi consacre que les distributeurs de services sur l'ensemble des réseaux autres que la TNT (câble, satellite, ADSL) sont tenus de mettre gratuitement à disposition de leurs abonnés les chaînes de télévision publique, à savoir les chaînes nationales de France Télévisions diffusées sur la TNT, les chaînes Arte et TV5. L'article 45-3 impose aux distributeurs la même obligation à l'égard de La Chaîne parlementaire. Si le service de télévision est distribué en mode numérique, l'ensemble des services fournis en mode numérique par ces chaînes publiques doivent être repris. De même, si ce service intègre des chaînes des services en haute définition, les chaînes publiques doivent être reprises en haute définition. L'article 34-2 précité précise que le droit de reprise sur les réseaux filaires est gratuit pour les chaînes concernées, les coûts de transport et de distribution restant à la charge du distributeur.
D'autre part, l'article 34-4 de la même loi prévoit pour les chaînes hertziennes gratuites de la TNT, un droit de reprise sur l'ensemble des supports (câble, satellite, ADSL) dans des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires.
Ce même article prévoit également que les plateformes autres que la TNT doivent assurer la reprise des chaînes TNT en respectant l'ordre de numérotation qui prévaut sur la TNT.
En outre, l'article 34-1 prévoit que, notamment, les câblo-opérateurs distribuent, auprès des gestionnaires d'immeubles qui le souhaitent, une offre d'accès à la télévision communément appelée « service antenne », qui intègre les chaînes nationales gratuites de la TNT à vocation nationale et les chaînes locales diffusées sur la TNT dans la zone considérée.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, la plateforme TNT constitue, à ce jour, une plateforme privilégiée pour les chaînes de télévision française par rapport aux autres plateformes existantes.
I.d. Les marchés de gros de la diffusion audiovisuelle hertzienne terrestre
Dans ses précédentes analyses, l'ARCEP a distingué, au sein du marché de gros de la diffusion :
- un « marché de gros aval », correspondant au marché sur lequel les diffuseurs proposent des offres de diffusion aux chaînes de télévision (regroupées en multiplex) ;
- un « marché de gros amont », correspondant à un marché entre diffuseurs sur lequel un « diffuseur nouvel entrant » souscrit des prestations d'accès ou de diffusion à l'infrastructure d'un « diffuseur historique ».
Par ailleurs, les diffuseurs et les multiplex interagissent sur un marché distinct mais lié aux marchés présentés ci-dessus : il s'agit du marché de la vente de prestations de transport qui permettent d'acheminer les signaux audiovisuels de la tête de réseau de chaque multiplex jusqu'aux sites de diffusion.
I.d.1. Le fonctionnement du marché de gros aval
I.d.1.i. Les multiplex et les chaînes de télévision
Le regroupement des chaînes de télévision au sein de multiplex
Un multiplex correspond à un ensemble des chaînes utilisant la même bande de fréquences hertziennes (ou canal), la numérisation du signal sur la TNT permettant de diffuser simultanément plusieurs chaînes. Lorsqu'un multiplex est lancé, le CSA organise un appel à candidature de manière à pouvoir sélectionner les chaînes qui présentent les meilleurs engagements (programmation, diffusion, assise financière, etc.). A titre d'exemple, pour les multiplex R7 et R8, le CSA avait décidé le 18 octobre 2011 de lancer un appel à candidature pour la diffusion de six chaînes en haute définition dans la norme de diffusion DVB-T et avec le format de compression MPEG-4. Une fois toutes les chaînes d'un multiplex sélectionnées, un gestionnaire du multiplex est désigné (par les chaînes qui le composent). Ce gestionnaire est généralement le groupe audiovisuel qui possède le plus de chaînes dans le multiplex ; il est en charge de la négociation des contrats de diffusion hertzienne terrestre de l'ensemble des chaînes du multiplex.
Le bouquet de chaînes de la TNT diffère entre la métropole et l'outre-mer.
En métropole, des chaînes gratuites et payantes sont réparties sur huit multiplex métropolitains (R1 à R8) dont la composition est présentée sur le tableau suivant.
Figure 1. - Composition des multiplex de la TNT en métropole au 21 janvier 2015
Vous pouvez consulter l'image dans le fac-similé du JO
nº 0028 du 03/02/2016, texte nº 89
Source : ARCEP, CSA.
Nota. - En blanc sont présentées les chaînes gratuites en simple définition, en violet les chaînes payantes en simple définition, en bleu les chaînes gratuites en haute définition et en hachuré violet/bleu la chaîne payante en haute définition.