1. Considérant que les sénateurs et les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte ; qu'ils contestent la procédure d'adoption de cette loi ; que les députés requérants contestent la conformité à la Constitution de ses articles 1er, 6, 44, 73, 83, 91, 139, 173 et 187 ;
Sur la procédure d'adoption de la loi :
En ce qui concerne l'étude d'impact jointe au projet de loi :
2. Considérant que les députés requérants invoquent la méconnaissance des exigences de l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 ; que l'étude d'impact serait inconsistante en raison de l'insuffisance de l'examen des conséquences sociales, économiques et financières du 5° du paragraphe III de l'article 1er de la loi déférée et de l'article L. 311-5-5 du code de l'énergie introduit par son article 187 ;
3. Considérant qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article 39 de la Constitution : « La présentation des projets de loi déposés devant l'Assemblée nationale ou le Sénat répond aux conditions fixées par une loi organique. - Les projets de loi ne peuvent être inscrits à l'ordre du jour si la Conférence des présidents de la première assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues. En cas de désaccord entre la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l'assemblée intéressée ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de huit jours » ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 susvisée : « Les projets de loi font l'objet d'une étude d'impact. Les documents rendant compte de cette étude d'impact sont joints aux projets de loi dès leur transmission au Conseil d'Etat. Ils sont déposés sur le bureau de la première assemblée saisie en même temps que les projets de loi auxquels ils se rapportent » ; que, selon le premier alinéa de l'article 9 de la même loi organique, la Conférence des présidents de l'assemblée sur le bureau de laquelle le projet de loi a été déposé dispose d'un délai de dix jours suivant le dépôt pour constater que les règles relatives aux études d'impact sont méconnues ;
4. Considérant que le projet de loi a été déposé le 30 juillet 2014 sur le bureau de l'Assemblée nationale et que la Conférence des présidents de l'Assemblée nationale n'a été saisie d'aucune demande tendant à constater que les règles relatives aux études d'impact étaient méconnues ; que le grief tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 doit être écarté ;
En ce qui concerne la commission mixte paritaire :
5. Considérant que les sénateurs requérants contestent les conditions dans lesquelles se sont déroulés les travaux de la commission mixte paritaire qui s'est réunie le 10 mars 2015 pour élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ; qu'ils font valoir que l'absence de vote ou de consultation des membres de la commission par son président lors de cette réunion a porté gravement atteinte aux exigences de clarté et de sincérité des débats parlementaires ; qu'auraient ainsi également été méconnues les exigences de l'article 45 de la Constitution ;
6. Considérant qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, la commission mixte paritaire est « chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion » ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La loi est l'expression de la volonté générale » ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 3 de la Constitution : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants » ; que ces dispositions imposent le respect des exigences de clarté et de sincérité des débats parlementaires ;
8. Considérant qu'il ressort du rapport établi conjointement par les rapporteurs des deux assemblées à l'issue de la réunion de la commission mixte paritaire, d'une part, que la commission a constaté l'impossibilité de parvenir à l'adoption d'un texte commun, et, d'autre part, que ce constat n'a pas été contesté ; qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de contrôler pour quels motifs ou dans quelles conditions une commission mixte paritaire ne parvient pas à l'adoption d'un texte commun ; que ni les exigences constitutionnelles de l'article 45 de la Constitution ni celles de clarté et de sincérité des débats parlementaires n'ont été méconnues ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la loi déférée a été adoptée selon une procédure conforme à la Constitution ;
Sur l'article 1er :
10. Considérant que l'article 1er est relatif aux objectifs de la politique énergétique de l'Etat ; que ses paragraphes I à III modifient la rédaction des articles L. 100-1, L. 100-2 et L. 100-4 du code de l'énergie ; que l'article L. 100-1 énumère les sept objectifs devant être poursuivis par la politique énergétique ; que l'article L. 100-2 énonce des moyens devant être mis en œuvre par l'Etat, en cohérence avec les collectivités territoriales et en mobilisant les entreprises, les associations et les citoyens pour atteindre ces objectifs ; que l'article L. 100-4 fixe les objectifs quantitatifs assignés à la politique énergétique ;
11. Considérant que les députés requérants soutiennent que les dispositions de l'article 1er ne sont pas normatives ; qu'eu égard à la multiplicité des objectifs fixés par cet article, à leur redondance et aux contradictions qu'ils recèlent, ces dispositions méconnaîtraient le principe d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ; que, selon eux, le vingt-neuvième alinéa de cet article, en ce qu'il prévoit une réduction de la part de l'énergie nucléaire dans la production d'électricité sans indemnisation juste et préalable de la société Areva, qui exerce une activité de retraitement des combustibles nucléaires, viole également le droit de propriété de cette société tel que garanti par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et porte une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre de celle-ci ; que ce même alinéa serait également contraire au principe de prévention prévu à l'article 3 de la Charte de l'environnement et à l'exigence de promotion du développement durable résultant de l'article 6 de cette même charte ;
12. Considérant qu'aux termes du vingtième alinéa de l'article 34 de la Constitution : « Des lois de programmation déterminent les objectifs de l'action de l'Etat » ; que les dispositions de l'article 1er de la loi déférée, y compris son vingt-neuvième alinéa, qui fixent des objectifs à l'action de l'Etat dans le domaine énergétique appartiennent à cette catégorie ; qu'il s'ensuit que le grief tiré d'un défaut de portée normative ne peut être utilement soulevé à leur encontre ; que ne sauraient davantage être invoqués les griefs tirés de ce que ces dispositions portent atteinte au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre, aux articles 3 et 6 de la Charte de l'environnement et à l'objectif d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 1er sont conformes à la Constitution ;
Sur l'article 6 :
14. Considérant qu'aux termes de l'article 6 : « À partir de 2030, les bâtiments privés résidentiels doivent faire l'objet d'une rénovation énergétique à l'occasion d'une mutation, selon leur niveau de performance énergétique, sous réserve de la mise à disposition des outils financiers adéquats. - Un décret en Conseil d'Etat précise le calendrier progressif d'application de cette obligation en fonction de la performance énergétique, étalé jusqu'en 2050 » ;
15. Considérant que les députés saisissants estiment que les dispositions de cet article méconnaissent le droit de propriété ;
16. Considérant que la propriété figure au nombre des droits de l'homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789 ; qu'aux termes de son article 17 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » ; qu'en l'absence de privation du droit de propriété au sens de cet article, il résulte néanmoins de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi ;
17. Considérant qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution, « la loi détermine les principes fondamentaux… du régime de la propriété » ; qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34 ;
18. Considérant, d'une part, que les dispositions contestées ne se bornent pas à déterminer un objectif de l'action de l'Etat mais fixent une obligation de rénovation énergétique des bâtiments privés résidentiels, « à l'occasion d'une mutation », applicable à partir de 2030 ; qu'elles n'ont pas le caractère de dispositions relevant d'une loi de programmation ;
19. Considérant, d'autre part, qu'en s'attachant à réduire la consommation énergétique des bâtiments résidentiels, le législateur a poursuivi un objectif d'intérêt général ; que, toutefois, en ne définissant ni la portée de l'obligation qu'il a posée, ni les conditions financières de sa mise en œuvre, ni celles de son application dans le temps, le législateur n'a pas suffisamment défini les conditions et les modalités de cette atteinte au droit de disposer de son bien ;
20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 6 sont contraires à la Constitution ;
Sur l'article 44 :
21. Considérant que l'article 44 impose aux entreprises ou groupements d'entreprises appartenant au secteur de la grande distribution d'établir au plus tard le 31 décembre 2016 un programme des actions qu'ils décident de mettre en œuvre ou auxquelles ils décident de contribuer afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques résultant du transport des marchandises qu'ils commercialisent sur le territoire national entre les sites de production et les points de destination finale ; que le dernier alinéa de cet article dispose que « le champ des entreprises » soumises à l'obligation d'établir ce programme et les modalités d'application de cet article sont précisés par décret ;
22. Considérant que les députés auteurs de la saisine soutiennent que ces dispositions sont dénuées de portée normative ; qu'ils estiment par ailleurs qu'elles méconnaissent le principe d'égalité devant la loi dès lors qu'elles s'imposent au seul secteur de la grande distribution et que la différence de traitement ainsi instaurée n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels ; qu'ils font également valoir qu'en laissant au pouvoir réglementaire le soin de déterminer les entreprises soumises à l'obligation édictée, les modalités d'application de cette obligation et les éventuelles sanctions en l'absence de respect de ces dispositions, le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence ; qu'enfin, ces dispositions porteraient atteinte au principe d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ;
23. Considérant qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution, « la loi détermine les principes fondamentaux … des obligations civiles et commerciales » ; qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34 ;
24. Considérant que les dispositions contestées imposent aux entreprises ou groupements d'entreprises appartenant au secteur de la grande distribution d'établir un programme d'actions afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques résultant du transport des marchandises qu'ils commercialisent sur le territoire national ; que le législateur a ainsi entendu prendre en compte la part importante des émissions nationales de gaz à effet de serre résultant du transport de marchandises par et pour le compte de la grande distribution ; que, toutefois, il n'a pas déterminé les entreprises du secteur de la grande distribution soumises à cette obligation ; qu'il s'est borné à renvoyer à un décret le soin de déterminer le « champ » de ces entreprises ; que le législateur n'a pas encadré le renvoi au décret et, en confiant au pouvoir réglementaire la compétence pour fixer le champ d'application de la loi, a reporté sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n'a été confiée par la Constitution qu'à la loi ; qu'il a ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ; que les dispositions de l'article 44 sont contraires à la Constitution ;
Sur l'article 73 :
25. Considérant que l'article 73 est relatif à l'interdiction de la mise à disposition d'ustensiles jetables de cuisine en matière plastique à compter du 1er janvier 2020 ; qu'il complète l'article L. 541-10-5 du code de l'environnement par un paragraphe III, dont le premier alinéa prévoit, à compter du 1er janvier 2020, la fin de la mise à disposition des « gobelets, verres et assiettes jetables de cuisine pour la table en matière plastique, sauf ceux compostables en compostage domestique et constitués, pour tout ou partie, de matières biosourcées » ; que le second alinéa du nouveau paragraphe III de l'article L. 541-10-5 renvoie à un décret le soin de fixer les modalités d'application du premier alinéa ;
26. Considérant que les députés requérants soutiennent qu'en interdisant la mise à disposition d'ustensiles de cuisine qui répondent à la qualification d'« emballage » au sens de la directive européenne du 20 décembre 1994 relative aux emballages et aux déchets d'emballages, l'article 73 méconnaît l'article 88-1 de la Constitution ; qu'ils reprochent également à cet article de méconnaître l'objectif d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ;
27. Considérant que les dispositions contestées n'ont pas pour objet de transposer une directive européenne ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 88-1 de la Constitution est inopérant ;
28. Considérant que les dispositions de l'article 73, qui ne sont pas inintelligibles et ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution ;
Sur l'article 83 :
29. Considérant que l'article 83 insère, après la première phrase du deuxième alinéa du paragraphe II de l'article L. 541-10 du code de l'environnement, une phrase ainsi rédigée : « Quand un éco-organisme est constitué sous forme de société, la majorité du capital social appartient à des producteurs, importateurs et distributeurs auxquels l'obligation susvisée est imposée par les dispositions de la présente section, représentatifs des adhérents à cet éco-organisme pour les produits concernés que ceux-ci mettent sur le marché français » ;
30. Considérant que les députés requérants soutiennent qu'en s'abstenant de fixer les critères de détermination des personnes admises à détenir des parts dans les éco-organismes constitués sous forme de société, cet article est entaché d'incompétence négative et méconnaît l'objectif d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ; qu'ils reprochent en outre à cet article de porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété protégé par l'article 2 de la Déclaration de 1789 et à la liberté d'entreprendre, d'une part, en interdisant à un associé ou un actionnaire d'un éco-organisme existant constitué sous forme de société de céder ses parts à la personne de son choix et, d'autre part, en limitant le droit de toute personne à acquérir des parts d'un éco-organisme constitué sous forme de société ;
31. Considérant qu'il est loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre qui découle de l'article 4 de la Déclaration de 1789 des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi ;
32. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ;
33. Considérant qu'il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions ; que, ce faisant, il ne saurait toutefois priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ; qu'en particulier, il ne saurait, sans motif d'intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations ;
34. Considérant que, pour mettre en œuvre le principe de « responsabilité élargie du producteur », le paragraphe II de l'article L. 541-10 du code de l'environnement, dans sa rédaction antérieure à la loi déférée, permet d'obliger les producteurs, importateurs et distributeurs de produits à pourvoir ou à contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ; que les producteurs, importateurs et distributeurs ainsi visés par cette obligation peuvent s'en acquitter soit de manière individuelle, soit en mettant en place collectivement des éco-organismes, auxquels ils versent une contribution financière et transfèrent leur obligation et dont ils assurent la gouvernance ;
35. Considérant qu'en adoptant l'article 83, le législateur a entendu, pour favoriser la diminution de la production de déchets, éviter que les éco-organismes ne soient contrôlés par des entreprises de traitement des déchets qui, contrairement aux entreprises soumises au principe de « responsabilité élargie du producteur », n'ont pas intérêt à voir diminuer le volume des déchets à la source ; qu'il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général ;
36. Considérant, toutefois, que, si les dispositions contestées pouvaient imposer que la majorité du capital d'un éco-organisme constitué sous forme de société soit détenue par des producteurs, importateurs et distributeurs représentatifs des adhérents à cet éco-organisme pour les produits concernés, elles ne pouvaient imposer une telle obligation nouvelle aux sociétés et à leurs associés et actionnaires sans que soient prévues des garanties de nature à assurer la protection du droit de propriété et de la garantie des droits, qui ne sauraient relever du décret en Conseil d'Etat prévu par le paragraphe X de l'article L. 541-10 du code de l'environnement dans lequel les dispositions contestées s'insèrent ; qu'il en résulte une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à la garantie des droits ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, l'article 83 est contraire à la Constitution ;
Sur certaines dispositions de l'article 91 :
37. Considérant que l'article 91 est relatif à l'extension du champ d'application de la « responsabilité élargie du producteur » sur les papiers ;
38. Considérant que le a du 2° du paragraphe I de l'article 91 donne une nouvelle rédaction du deuxième alinéa du paragraphe IV de l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement pour étendre le champ de la contribution due au titre de la responsabilité élargie des producteurs de papier instituée par le premier alinéa du paragraphe I de cet article L. 541-10-1, d'une part, aux publications de presse au sens de l'article 1er de la loi du 1er août 1986 susvisée et conformes aux dispositions du premier alinéa et des 1°, 2°, 3° et 5° de l'article 72 de l'annexe III au code général des impôts, sous réserve de ne pas constituer une des publications désignées aux a, c, d et e du 6° du même article 72 et, d'autre part, aux encartages publicitaires accompagnant une publication de presse à condition qu'ils soient annoncés au sommaire de cette publication ; que cette contribution « peut être versée en tout ou partie sous forme de prestations en nature prenant la forme d'une mise à disposition d'encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier. Un décret précise les conditions selon lesquelles cette contribution en nature est apportée, en fonction des caractéristiques des publications » ; qu'en vertu du paragraphe II de l'article 91, ces nouvelles dispositions entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2017 ;
39. Considérant que les députés requérants soutiennent que les dispositions du a du 2° du paragraphe I de l'article 91 méconnaissent le principe d'égalité devant la loi dès lors que la possibilité de verser la contribution sous forme de prestations en nature n'est pas ouverte à toutes les publications de presse ; que, selon eux, les dispositions contestées sont entachées d'incompétence négative dès lors qu'elles renvoient à un décret le soin de définir les conditions dans lesquelles la contribution pourra être versée en nature alors qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ; qu'ils soutiennent, pour le même motif, que les dispositions contestées méconnaissent le principe d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ;
40. Considérant, en premier lieu, que, d'une part, la contribution instituée par le premier alinéa du paragraphe I de cet article L. 541-10-1 ne constitue pas une imposition de toutes natures ; que, d'autre part, le a du 2° du paragraphe I de l'article 91 confie seulement au décret le soin de définir les conditions dans lesquelles la contribution en nature est apportée pour s'assurer que la mise à disposition d'encarts publicitaires soit d'une valeur équivalente à celle de la contribution financière ; qu'ainsi, le législateur n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 34 de la Constitution doit être écarté ;
41. Considérant, en second lieu, qu'en adoptant les dispositions du a du 2° du paragraphe I de l'article 91, le législateur a prévu que l'ensemble des publications de presse désormais soumises à la contribution pourront s'acquitter de tout ou partie de cette contribution sous forme de prestation en nature ; qu'il n'a donc pas institué de différence de traitement entre les catégories de publications de presse ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la Déclaration de 1789 doit être écarté ;
42. Considérant que les dispositions du a du 2° du paragraphe I de l'article 91, qui ne sont pas inintelligibles et ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution ;
Sur l'article 139 :
43. Considérant que l'article 139 modifie le dernier alinéa de l'article L. 553-1 du code de l'environnement, relatif aux autorisations d'exploiter les installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent dont la hauteur des mâts dépasse cinquante mètres ; qu'il prévoit que la distance d'éloignement entre ces installations et les constructions à usage d'habitation, les immeubles habités et les zones destinées à l'habitation définies dans les documents d'urbanisme, au respect de laquelle est subordonnée la délivrance de l'autorisation d'exploiter, est au minimum de cinq cents mètres et doit être appréciée au regard de l'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 du même code ;
44. Considérant que les députés requérants font valoir que l'article 139 méconnaît le principe de participation du public garanti par l'article 7 de la Charte de l'environnement ainsi que le principe d'égalité devant la loi dès lors qu'il supprime l'enquête publique préalable à la délivrance de l'autorisation d'exploiter une éolienne ;
45. Considérant qu'en faisant référence à l'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 du code de l'environnement, les dispositions contestées n'ont ni pour objet ni pour effet de supprimer l'obligation de réaliser une enquête publique à laquelle est subordonnée toute autorisation prévue par l'article L. 512-1 du même code ; que le grief manque en fait ;
46. Considérant que les dispositions de l'article 139, qui ne méconnaissent ni le principe de la participation du public aux décisions ayant une incidence sur l'environnement ni aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution ;
Sur certaines dispositions de l'article 173 :
47. Considérant que l'article 173 est relatif à la stratégie nationale de développement à faible intensité de carbone et aux schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie ; que le paragraphe VI de l'article 173 complète l'article L. 533-22-1 du code monétaire et financier afin d'imposer aux entreprises d'assurance et de réassurance régies par le code des assurances, aux mutuelles ou unions régies par le code de la mutualité, aux institutions de prévoyance et à leurs unions régies par le code de la sécurité sociale, aux sociétés d'investissement à capital variable, à la Caisse des dépôts et consignations, aux institutions de retraite complémentaire régies par le code de la sécurité sociale, à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques et à l'établissement public gérant le régime public de retraite additionnel obligatoire de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales la mention dans leur rapport annuel et la mise à la disposition de leurs souscripteurs d'une information sur les modalités de prise en compte dans leur politique d'investissement des critères relatifs au respect d'objectifs sociaux, environnementaux et de qualité de gouvernance et sur les moyens mis en œuvre pour contribuer à la transition énergétique et écologique ; qu'en particulier, en matière de prise en compte d'objectifs environnementaux, les informations doivent prendre en compte l'exposition aux risques climatiques ainsi que la contribution au respect de l'objectif international de limitation du réchauffement climatique et à l'atteinte des objectifs de la transition énergétique et écologique ; que, le cas échéant, doivent être expliquées les raisons pour lesquelles la contribution des institutions susmentionnées est « en deçà de ces cibles indicatives pour le dernier exercice clos » ;
48. Considérant que les députés requérants contestent l'atteinte excessive à la liberté d'entreprendre résultant de ces obligations d'information et de justification ; qu'ils soutiennent également que ces dispositions sont incompatibles avec le droit de l'Union européenne et, en particulier, contradictoires avec la liberté d'investissement garantie aux entreprises d'assurance par la directive européenne du 25 novembre 2009 sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice ;
49. Considérant, en premier lieu, que les dispositions contestées sont uniquement relatives aux informations qui doivent figurer dans les rapports annuels et être mises à disposition des souscripteurs des institutions susmentionnées ; qu'une telle obligation d'information ne saurait, en elle-même, méconnaître la liberté d'entreprendre ;
50. Considérant, en second lieu, que les dispositions contestées n'ont pas pour objet de transposer une directive européenne ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 88-1 de la Constitution est inopérant ;
51. Considérant que le paragraphe VI de l'article 173, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la Constitution ;
Sur certaines dispositions de l'article 187 :
52. Considérant que l'article 187 est relatif aux autorisations administratives d'exploitation des installations de production d'électricité ; que le 3° de l'article 187 complète le chapitre Ier du titre Ier du livre III du code de l'énergie par des nouveaux articles L. 311-5-1 à L. 311-5-7 ;
53. Considérant que l'article L. 311-5-5 interdit la délivrance d'une autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité d'origine nucléaire lorsqu'elle aurait pour effet de porter la capacité totale autorisée de production d'électricité d'origine nucléaire au-delà de 63,2 gigawatt ; qu'il précise que, pour apprécier la capacité totale autorisée, l'autorité administrative prend en compte les abrogations prononcées par décret à la demande du titulaire d'une autorisation ;
54. Considérant que l'article L. 311-5-6 prévoit que, pour les installations de production d'électricité soumises au régime des installations nucléaires de base, la demande d'autorisation d'exploiter doit être déposée au plus tard dix-huit mois avant la date de mise en service et en tout état de cause au plus tard dix-huit mois avant l'expiration du délai fixé pour la mise en service de l'installation lors de la délivrance de l'autorisation de création ;
55. Considérant que les députés requérants soutiennent que le plafond fixé par le nouvel article L. 311-5-5 du code de l'énergie, inférieur à la somme des puissances résultant des autorisations accordées à ce jour, en contraignant la société titulaire de ces autorisations à renoncer à certaines d'entre elles, porte atteinte au droit de propriété de cette société, en méconnaissance des exigences de l'article 17 de la Déclaration de 1789 ; que cette atteinte au droit de propriété serait aggravée par la combinaison du plafonnement de la capacité nucléaire installée et des dispositions du nouvel article L. 311-5-6 du code de l'énergie, relatives au délai de dépôt de la demande d'autorisation d'exploiter, dans la mesure où la date de mise en service des installations nucléaires est elle-même très antérieure à la date à laquelle l'électricité produite peut être livrée au réseau ; que le législateur aurait également méconnu le principe d'égalité en instaurant un délai dérogatoire entre le dépôt d'une demande d'autorisation d'exploiter relative à une installation nucléaire de base et la mise en service de cette exploitation ; qu'enfin, ces dispositions seraient incompatibles avec le droit de l'Union européenne et, en particulier, contraires à l'obligation de mise en place de conditions non discriminatoires pour le marché de l'électricité prévue par la directive européenne du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité ;
56. Considérant, en premier lieu, que les autorisations d'exploiter des installations de production d'électricité accordées par l'autorité administrative ne sauraient être assimilées à des biens objets pour leurs titulaires d'un droit de propriété ; que, par suite, les dispositions contestées n'entraînent ni une privation de propriété au sens de l'article 17 de la Déclaration de 1789 ni une atteinte à ce droit en méconnaissance de l'article 2 de cette déclaration ;
57. Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 593-7 du code de l'environnement subordonne la création d'une installation nucléaire de base à la délivrance d'une autorisation de création ; qu'en application de l'article L. 593-11 du même code, la mise en service de cette installation est autorisée par l'Autorité de sûreté nucléaire ; qu'en vertu de l'article L. 593-13 du même code, à défaut d'une mise en service dans le délai fixé par l'autorisation de création, il peut être mis fin à l'autorisation de l'installation après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire ; que les dispositions de l'article L. 311-5-5 du code de l'énergie plafonnent à 63,2 gigawatts la capacité totale autorisée pour la délivrance des autorisations d'exploiter des installations nucléaires de base ; que le total des capacités de production d'électricité d'origine nucléaire aujourd'hui utilisées s'élève à ce montant ; que, toutefois, la somme des capacités de production utilisées et des capacités relatives à des installations ayant déjà fait l'objet d'une autorisation de création sans être encore mises en service excède ce plafond de 1,65 gigawatt ; qu'il en résulte une atteinte aux effets qui peuvent légitimement être attendus de situations légalement acquises ;
58. Considérant, d'une part, qu'il résulte de la combinaison des articles L. 311-5-5 et L. 311-5-6 que le respect du plafond de la capacité totale autorisée de production d'électricité d'origine nucléaire est apprécié à la date de mise en service de l'installation et non à la date du dépôt de la demande d'autorisation d'exploiter ; que, par suite, l'article L. 311-5-5 n'impose pas l'abrogation immédiate d'une autorisation d'exploiter ; qu'il laisse également le titulaire des autorisations d'exploiter libre de choisir, en fonction des perspectives d'évolution du parc des installations nucléaires, les autorisations d'exploiter dont il pourra demander l'abrogation afin de respecter les nouvelles exigences fixées par la loi ; qu'il ressort des travaux préparatoires de la loi déférée qu'en plafonnant la somme des puissances autorisées par des autorisations d'exploiter une installation nucléaire de base, le législateur a entendu promouvoir la diversification des sources d'énergie et la réduction de la part de l'électricité d'origine nucléaire ; qu'il a ainsi poursuivi des objectifs d'intérêt général ; que l'atteinte portée aux effets qui peuvent légitimement être attendus de situations légalement acquises est justifiée par des motifs d'intérêt général suffisants et proportionnée aux buts poursuivis ;
59. Considérant, d'autre part, que les dispositions contestées ne font pas obstacle à ce que les titulaires d'autorisations de création d'installations nucléaires de base déjà délivrées au jour de l'entrée en vigueur de la loi déférée, privés de la possibilité de demander une autorisation d'exploiter une installation pour laquelle ils disposent d'une telle autorisation de création ou contraints de demander l'abrogation d'une autorisation d'exploiter afin de respecter le plafonnement institué par l'article L. 311-5-5, puissent prétendre à une indemnisation du préjudice subi ;
60. Considérant que, dans ces conditions, la garantie des droits des titulaires d'autorisations relatives à des installations nucléaires de base n'est pas méconnue par les dispositions contestées ;
61. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions de l'article L. 311-5-6 exigent un dépôt de la demande d'autorisation d'exploiter une installation nucléaire de base au moins dix-huit mois avant la mise en service de cette installation et au plus tard dix-huit mois avant l'expiration du délai de mise en service fixé par l'autorisation de création de l'installation ; qu'ainsi qu'il résulte des travaux préparatoires, le législateur a entendu donner un temps suffisant à l'autorité administrative pour instruire des demandes d'une complexité particulière ; qu'en prévoyant un tel délai avant la mise en service pour les demandes d'autorisation d'exploiter une installation nucléaire, qui diffère de celui prévu pour les demandes d'autorisation d'exploiter d'autres installations de production d'électricité, le législateur a traité différemment des situations différentes ; que cette différence de traitement est en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit ; que les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe d'égalité devant la loi ;
62. Considérant, en dernier lieu, que les dispositions contestées n'ont pas pour objet de transposer une directive européenne ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 88-1 de la Constitution est inopérant ;
63. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les articles L. 311-5-5 et L. 311-5-6 du code de l'énergie dans leur rédaction résultant du 3° de l'article 187 sont conformes à la Constitution ;
Sur certaines dispositions de l'article 9 :
64. Considérant que l'article 9 complète l'article L. 142-1 du code de la construction et de l'habitation relatif au centre scientifique et technique du bâtiment ; que le nouveau deuxième alinéa prévoit que le président du conseil d'administration de ce centre est nommé en conseil des ministres, pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois, « après audition par les commissions permanentes compétentes du Parlement » ;
65. Considérant que le principe de la séparation des pouvoirs fait obstacle à ce que, en l'absence de disposition constitutionnelle le permettant, le pouvoir de nomination par une autorité administrative ou juridictionnelle soit subordonné à l'audition par les assemblées parlementaires des personnes dont la nomination est envisagée ;
66. Considérant qu'en imposant l'audition par les commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat de la personne dont la nomination comme président du conseil d'administration du centre scientifique et technique du bâtiment est envisagée, les dispositions de l'article 9 ont méconnu les exigences qui résultent de la séparation des pouvoirs ; que, par suite, les mots : « après audition par les commissions permanentes compétentes du Parlement » figurant au deuxième alinéa de l'article L. 142-1 du code de la construction et de l'habitation dans sa rédaction résultant du deuxième alinéa de l'article 9 sont contraires à la Constitution ;
Sur la place d'autres dispositions dans la loi déférée :
67. Considérant qu'il ressort de l'économie de l'article 45 de la Constitution et notamment de son premier alinéa aux termes duquel : « Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement dans les deux assemblées du Parlement en vue de l'adoption d'un texte identique », que les adjonctions ou modifications qui peuvent être apportées après la première lecture par les membres du Parlement et par le Gouvernement doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion ; que, toutefois, ne sont pas soumis à cette dernière obligation les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d'examen ou à corriger une erreur matérielle ;
68. Considérant que le paragraphe II de l'article 103 prévoit l'introduction d'informations relatives à la lutte contre le gaspillage alimentaire dans le rapport sur la responsabilité sociale et environnementale des entreprises ; que son paragraphe III complète l'article L. 312-17-3 du code de l'éducation pour intégrer dans le parcours scolaire la lutte contre le gaspillage alimentaire ; que son paragraphe IV crée une sous-section dans le code de l'environnement comprenant les articles L. 541-15-3 à L. 541-15-5, consacrée à la prévention des déchets alimentaires ; que son paragraphe V modifie l'article 1386-6 du code civil relatif à l'assimilation à un producteur pour l'application des dispositions relatives à la responsabilité du fait des produits défectueux ; que son paragraphe VI prévoit l'entrée en vigueur de certaines dispositions créées par le paragraphe IV ; que son paragraphe VII institue une amende et une peine complémentaire d'affichage ou de diffusion à l'encontre d'un distributeur du secteur alimentaire qui rend délibérément impropres à la consommation les invendus alimentaires encore consommables ;
69. Considérant, en l'espèce, que les amendements dont sont issues les dispositions susmentionnées ont été introduits en nouvelle lecture ; que ces adjonctions n'étaient pas, à ce stade de la procédure, en relation directe avec une disposition restant en discussion ; qu'elles n'étaient pas non plus destinées à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d'examen ou à corriger une erreur matérielle ; qu'il s'ensuit que les paragraphes II à VII de l'article 103 ont été adoptés selon une procédure contraire à la Constitution ; qu'ils sont contraires à cette dernière ;
70. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution,
Décide :