Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République ; qu'ils contestent la conformité à la Constitution de certaines dispositions de son article 59, relatives aux modalités de répartition des sièges de conseiller de la métropole du Grand Paris attribués à la commune de Paris et au mode d'élection de ces conseillers métropolitains ;
2. Considérant que les députés et les sénateurs requérants font valoir que les dispositions du 9° du paragraphe II et celles du paragraphe XX de l'article 59 portent atteinte au principe d'égalité devant la loi en introduisant des règles de répartition des sièges de conseiller métropolitain pour la commune de Paris qui diffèrent de celles applicables aux autres communes sans que cela soit justifié par un motif d'intérêt général ; qu'il en irait de même pour le mode d'élection des conseillers métropolitains par les conseillers de Paris de l'arrondissement prévu à titre transitoire par le paragraphe XX de l'article 59 ; que la combinaison de deux modes de scrutin à la représentation proportionnelle dans le cadre de l'arrondissement, en amplifiant la représentation majoritaire au sein de chaque arrondissement, conduirait à une méconnaissance du principe d'égalité devant le suffrage, de l'exigence de pluralisme des courants d'idées et d'opinions ainsi que du principe d'égal accès aux dignités, places et emplois publics ; que, selon les sénateurs requérants, il en résulte également une méconnaissance de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ; qu'enfin, selon les députés requérants, en modifiant les règles de désignation des membres du conseil de la métropole du Grand Paris par la commune de Paris postérieurement aux élections municipales de 2014, le législateur a porté atteinte à l'exigence de clarté et de loyauté du scrutin ;
Sur le dernier alinéa du 9° du paragraphe II de l'article 59 :
3. Considérant que le 9° du paragraphe II de l'article 59 modifie l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales ; que le troisième alinéa de l'article L. 5219-9 ainsi modifié par le dernier alinéa du 9° est relatif à la répartition des sièges attribués à la commune de Paris au conseil métropolitain du Grand Paris ;
4. Considérant que, selon le premier alinéa de l'article 72 de la Constitution : « les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi » ; que le troisième alinéa du même article dispose que ces collectivités « s'administrent librement par des conseils élus » dans les conditions prévues par la loi ; que selon le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, le suffrage « est toujours universel, égal et secret » ; que l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ;
5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, dès lors que des établissements publics de coopération entre les collectivités territoriales exercent en lieu et place de ces dernières des compétences qui leur sont dévolues, leurs organes délibérants doivent être élus sur des bases essentiellement démographiques ; qu'il s'ensuit notamment que les personnes représentant une commune au sein de l'organe délibérant d'un établissement public de coopération, lorsqu'elles sont désignées au sein de circonscriptions électorales internes à la commune, doivent être élues sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges et une délimitation des circonscriptions internes à la commune respectant au mieux l'égalité devant le suffrage ; qu'il peut toutefois être tenu compte, dans une mesure limitée, d'autres considérations d'intérêt général ;
6. Considérant que les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales prévoient une répartition des sièges de conseiller métropolitain attribués à la commune de Paris entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne ; qu'elles prévoient également que chaque arrondissement dispose d'au moins un siège ;
7. Considérant qu'en prévoyant une répartition des sièges de conseiller métropolitain de Paris par arrondissement, le législateur a entendu assurer une représentation de chaque arrondissement de Paris au sein du conseil du Grand Paris ; que, toutefois, compte tenu du nombre de sièges à répartir et de la population respective de chaque arrondissement, en appliquant une règle de répartition à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne combinée à un minimum d'un siège par arrondissement, ces dispositions conduisent à ce que, dans les Ier, IIe, IVe, Ve, VIe, VIIe et IXe arrondissements, le rapport du nombre des conseillers métropolitains à la population de l'arrondissement s'écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs à l'encontre de ces dispositions, le troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant du dernier alinéa du 9° du paragraphe II de l'article 59 de la loi déférée, qui méconnaît le principe d'égalité devant le suffrage, est contraire à la Constitution ;
Sur le paragraphe XX de l'article 59 :
8. Considérant que les dispositions des trois premiers alinéas du paragraphe XX de l'article 59 de la loi déférée ont pour objet de répartir les sièges attribués à la commune de Paris au conseil du Grand Paris jusqu'au prochain renouvellement général des conseils municipaux suivant la création de la métropole du Grand Paris ; qu'elles prévoient l'attribution d'un siège pour le conseil de Paris puis une répartition des autres sièges de conseiller métropolitain entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne ; qu'elles prévoient également que chaque arrondissement dispose d'au moins un siège ; que le quatrième alinéa du même paragraphe XX prévoit que les conseillers métropolitains de chaque arrondissement de Paris sont élus, au scrutin de liste à un tour, avec répartition des sièges à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, par les conseillers de Paris de l'arrondissement parmi ces conseillers ;
9. Considérant que, nonobstant l'attribution d'un siège pour le conseil de Paris, la règle de répartition des autres sièges de conseiller métropolitain de la commune de Paris entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne combinée à un minimum d'un siège par arrondissement, a des conséquences similaires à celles résultant des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales ; que le rapport du nombre des conseillers métropolitains à la population de l'arrondissement s'écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée dans les Ier, IIe, IVe, Ve, VIIe, IXe et Xe arrondissements ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, les dispositions des trois premiers alinéas du paragraphe XX de l'article 59, qui méconnaissent le principe d'égalité devant le suffrage, sont contraires à la Constitution ;
10. Considérant que les dispositions du dernier alinéa du paragraphe XX de l'article 59, qui sont relatives au mode d'élection des conseillers métropolitains de Paris, exigent pour leur application une répartition des sièges de conseiller métropolitain entre les arrondissements ; que, par suite, ces dispositions sont inséparables de celles des trois premiers alinéas du paragraphe XX, déclarées contraires à la Constitution ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, elles sont également contraires à la Constitution ;
11. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution,
Décide :