Annexe 5
Périmètre des mesures exceptionnelles et temporaires à exclure du solde structurel
Afin de traiter des mesures exceptionnelles qui modifient de manière temporaire les soldes publics, le Pacte de stabilité et de croissance a introduit, dès sa révision de 2005, la notion de mesures exceptionnelles et temporaires qui n'ont pas d'impact pérenne sur le déficit public, les one-offs. Ce concept visait à faire face à la multiplication d'événements de très grande ampleur qui brouillaient fortement la lecture de l'équilibre des finances publiques. Le solde structurel est ainsi défini comme le solde public corrigé des effets du cycle économique et de ces mesures.
I. - Une définition générale difficile à déterminer
Les finances publiques résultent d'une multitude d'évènements temporaires et exceptionnels. Il est donc malaisé de distinguer ce qui peut être considéré comme un élément one-off et ce qui relève du domaine de l'ordinaire.
Par exemple, beaucoup d'investissements publics sont par nature des dépenses « uniques » : la construction d'une route, d'une école ou d'une ligne à grande vitesse. Pour autant, il ne serait pas envisageable d'exclure les investissements du solde structurel dans la mesure où ils représentent chaque année un montant d'environ 4 % du PIB.
Cette problématique est plus générale en termes de finances publiques : les coûts des opérations extérieures (guerre, opération à l'étranger), les dépenses en cas de catastrophes naturelles, le déclenchement de garanties, peuvent représenter des montants importants, parfois temporaires, qu'il est difficile de caractériser.
Face à la difficulté de la définition générale du concept, la Commission européenne a progressivement développé une liste théorique de one-offs potentiels, qu'elle ne suit pas systématiquement.
Les textes européens ne contiennent pas de définition précise des one-offs :le pacte de stabilité et de croissance se contente de mentionner que les soultes, c'est-à-dire les transferts d'obligation de pension, en font partie. C'est le code de conduite du programme de stabilité qui essaie de préciser la notion, en la définissant comme des recettes ou dépenses ponctuelles « qui ne modifient pas la situation budgétaire des finances publiques à long terme ». Les exemples cités incluent notamment les dépenses exceptionnelles en cas de catastrophes naturelles ou d'événements exceptionnels (action militaire) et les soultes perçues lors de transferts d'engagements de retraites.
La Commission admet explicitement la difficulté inhérente à la manipulation de ce concept. Dans une publication de 2006 (24), elle souligne notamment qu'un one-off ne peut avoir qu'une influence temporaire sur le déficit, et ne doit pas être récurrent (25).
La liste de la Commission présente deux caractéristiques : elle est explicitement non exhaustive et non systématique. Il s'agit seulement d'une « liste indicative de catégories d'opérations qui peuvent être considérées comme des mesures exceptionnelles et temporaires » (26). A titre d'illustration, des mesures qui sont pourtant citées dans la liste indicative de la Commission n'ont pas été corrigées en one-offs :
- les ventes d'immobilier n'ont jamais été traitées en one-offs par la Commission dans le cas de la France ;
- en 2012, la décision de budget rectificatif européen pour 2012, qui a dégradé ex post le solde public en 2012 (le paiement ayant été fait en 2013), n'a pas non plus été classé en one-off par la Commission.
En pratique, face à cette absence de définition juridiquement contraignante des one-offs à l'échelon européen, la Commission adopte donc une approche au cas par cas.
II. - La doctrine proposée par le Gouvernement
Répondant à la demande du Haut Conseil des finances publiques, le Gouvernement propose un ensemble de critères permettant de mieux appréhender la notion de one-offs. Trois ensembles de one-offs peuvent être dégagés.
A. - Premier ensemble : les mesures one-offs systématiques. Elles doivent être définies au regard des cinq principes. En pratique, aucune mesure ne suit l'ensemble de ces principes en SEC 2010
(1) L'événement concerné ne doit pas être récurrent
Il convient de ne pas exclure systématiquement une catégorie particulière d'événements. Par exemple, les remises de dette aux Etats étrangers sont fréquentes en France, notamment dans le cadre du Club de Paris et de sa politique d'aide au développement. Exclure systématiquement de telles opérations viendrait biaiser la mesure du déficit. Une telle approche est également valable pour les dépenses liées aux catastrophes naturelles ou aux opérations extérieures. Des opérations qui relèvent de la gestion habituelle du patrimoine non financier de l'Etat (investissement public, cessions d'immeubles, gestion du patrimoine immatériel comme les fréquences hertziennes) n'ont pas non plus vocation à être systématiquement corrigées en one-offs. Seule une analyse au cas par cas permettrait de retirer celles dont l'ampleur brouille la lecture du déficit public.
(2) Pour une année donnée, le nombre de one-offs doit être limité pour éviter de biaiser la mesure du déficit public
Ce principe est un garde-fou face au grand nombre de « mesures exceptionnelles et temporaires » qui rythment l'évolution d'un solde budgétaire. Il permet d'éviter de traiter en one-offs un nombre important d'évènements, ce qui aurait pour effet de concentrer l'attention sur la classification en one-off plutôt que sur la trajectoire de finances publiques.
(3) L'événement concerné doit entraîner un impact budgétaire significatif
Il convient ainsi de n'envisager que des facteurs qui peuvent potentiellement représenter un montant important.
(4) Tout événement qui améliore le solde aujourd'hui pour le dégrader systématiquement dans le futur doit être considéré comme un one-off
Les évènements qui se qualifient spontanément pour un traitement en one-off sont en effet ceux qui correspondent à une recette importante qui se fait en contrepartie de dépenses futures : en SEC 95, c'était le cas des soultes liées à la reprise des obligations futures de paiement de retraite (les administrations récupèrent en une fois une compensation correspondant à la valeur actualisée des déséquilibres futurs). Néanmoins, depuis la publication des comptes en SEC 2010, les soultes n'améliorent plus le déficit en une seule fois mais sur de nombreuses années.
(5) Les mesures one-offs ne doivent pas concerner le mode de calcul de l'impôt
Le Gouvernement n'a pas repris l'approche de la Commission, qui corrige certaines mesures nouvelles quand elle juge leur rendement non pérenne : c'est par exemple le cas de recettes qui rapportent plus l'année de leur mise en place qu'en régime permanent.
La ligne de partage peut en effet être difficile à déterminer lorsqu'il y a de nombreuses mesures nouvelles chaque année.
En outre, un tel choix ne permet pas d'assurer de manière simple et transparente un traitement homogène entre les différentes mesures nouvelles. Par exemple, une hausse d'IS dont l'impact est plus fort la première année du fait de la mécanique de l'impôt peut être considérée par la Commission comme exceptionnelle et temporaire. A l'inverse, une hausse progressive de cotisation sociale à mi-année (avec une montée en charge sur deux ans) est traitée par la Commission de façon séquentielle.
Au total, alors que seules les soultes étaient auparavant incluses dans la liste de mesures toujours considérées comme one-off, en SEC 2010 plus aucune mesure ne doit être considérée systématiquement comme telle.