Après avoir entendu, le 6 novembre 2014, successivement :
1. Conjointement :
- le ministre chargé de l'économie, représenté par Mme Astrid MILSAN, directrice générale adjointe de l'Agence des participations de l'Etat, et M. Olivier FROMENT ;
- la société GDF Suez, représentée par MM. Michel LE BOEDEC, directeur des ressources humaines, Dirk RAEMAEKERS, Marc ROMANINI, Pascal RAYER et Mme Valentine de COLOMBEL, et assistée de son conseil juridique, le cabinet Clifford Chance, représenté par Me Anne LEMERCIER, avocate à la Cour ;
2. Le ministre chargé de l'économie, représenté comme ci-dessus,
Emet l'avis suivant :
I. - Par lettre en date du 5 novembre 2014, le ministre chargé de l'économie a saisi la commission, en application de l'article 1er du décret n° 2014-1084 du 25 septembre 2014 susvisé, des modalités du projet de GDF Suez de procéder à une augmentation de capital réservée aux salariés du groupe.
Cette opération regroupe deux offres :
- une offre aux salariés dans le cadre du plan d'épargne d'entreprise du groupe, régie par les dispositions susvisée du code du travail et autorisée par la quinzième résolution de l'assemblée générale mixte de GDF Suez ;
- une offre aux salariés de certains pays (notamment les Etats-Unis d'Amérique) où la formule précédente ne peut légalement être proposée, autorisée par la seizième résolution de l'assemblée générale mixte de GDF Suez. Cette offre est une augmentation de capital avec renonciation au droit préférentiel de souscription selon les règles de droit commun (art. L. 225-138 du code de commerce).
Les caractéristiques de l'opération ont été arrêtées par le conseil d'administration de GDF Suez lors de sa séance du 28 avril 2014.
L'opération porte sur un maximum de 25 millions d'actions. Elle est de nature à entraîner une dilution de la participation de l'Etat dans GDF Suez qui s'élève aujourd'hui à 33,6 %. Cette participation serait susceptible, en cas de souscription maximale, de descendre à 33,26 %.
II. - L'opération soumise à la commission s'inscrit dans la politique générale du groupe GDF Suez visant à favoriser l'actionnariat salarié. Le groupe retient comme objectif un niveau de 3 % en 2015. Au 31 décembre 2013, l'actionnariat salarié s'élevait à 2,35 % du capital de GDF Suez, notamment grâce à l'offre réalisée en 2010, à la suite de la fusion de GDF et de Suez, et sur laquelle la commission avait émis la décision du 8 juillet 2010 susvisée.
L'Etat ayant procédé à une cession sur le marché de titres de GDF Suez en juin dernier, une offre sera par ailleurs proposée dans les prochains mois aux salariés en accompagnement, conformément aux dispositions légales alors applicables (ancien art. 26 de la loi du 9 août 2004 susvisée).
III. - Deux formules sont proposées aux salariés avec les mêmes caractéristiques financières pour les deux offres (PEE et salariés de certains pays) et avec les adaptations juridiques nécessaires. Le prix de référence a été fixé à la moyenne des cours des vingt derniers jours de Bourse au 11 novembre 2014, soit 18,34 euros par action et un prix de souscription de 14,68 euros par action après décote.
Une formule dénommée « Link Classic » permet au souscripteur d'acquérir des actions au prix de souscription moins une décote de 20 %. Le souscripteur bénéficiera d'un abondement versé par l'entreprise sous forme de titres avec un maximum de 20 actions gratuites : le souscripteur recevra une action gratuite pour une souscrite pour les dix premières actions souscrites puis une action gratuite pour quatre actions souscrites. Les titres doivent être conservés pendant cinq ans, sauf dans les cas de déblocage légalement prévus pour les plans d'épargne entreprise. L'investissement maximal est limité conformément à l'art. 3332-10 du code du travail.
Une formule dénommée « Link Multiple » permet au souscripteur, dans la limite de 2,5 % de sa rémunération annuelle brute, de bénéficier du financement de 9 actions pour 1 payée par l'apport personnel. La formule est accompagnée d'un mécanisme de garantie, géré par un établissement bancaire qui assume le risque financier de l'opération. Le souscripteur a la garantie de recevoir au bout de cinq ans la totalité de son apport personnel et une partie de la plus-value éventuelle sur le total des actions souscrites (avec un minimum de 2 % de rendement sur l'apport personnel). Les titres sont achetés au prix de l'offre publique diminué de 20 % et l'entreprise n'octroie pas d'abondement.
IV. - L'opération s'adresse à 204 000 ayants droit dans 32 pays, soit les salariés des sociétés dont GDF Suez détient directement ou indirectement la majorité du capital ou qui sont consolidées par intégration globale, et les retraités en France.
Les ayants droit ont été appelés à souscrire pendant la période du 22 septembre au 14 octobre 2014. Les résultats de cette souscription ont été communiqués à la commission. 32 000 ayants droit ont effectivement souscrit, sans connaissance du prix.
Les souscripteurs ont la possibilité, au vu du prix définitif de souscription, de rétracter leur offre pendant la période du 14 au 17 novembre.
Sur la base des souscriptions enregistrées, le coût des avantages consentis aux ayants droit est évalué à environ 90 millions d'euros pour une souscription nette de 315 millions.
V. - L'évolution des résultats, des cours de Bourse et des perspectives de GDF Suez jusqu'en juin dernier a été analysée dans l'avis de la commission du 23 juin 2014 susvisé.
Depuis lors, le groupe a publié ses résultats du premier semestre 2014. Par rapport à la période comparable de 2013, le chiffre d'affaires est en recul de 6,3 %, l'EBITDA de 14,2 % et le résultat opérationnel courant de 14,4 %. Ces chiffres résultent pour l'essentiel, d'une part, de conditions climatiques défavorables sur la période (contexte hydrologique en Amérique latine, climat doux en France) et, d'autre part, des arrêts techniques de centrales nucléaires en Belgique. Le résultat net, part du groupe, est par contre en forte hausse, le premier semestre 2013 ayant été marqué par des dépréciations comptables sur actifs et écarts d'acquisition (« goodwills »). A l'occasion de la publication de ces résultats, le groupe a confirmé ses objectifs financiers pour l'exercice 2014.
Depuis le mois de juin où il cotait au-dessus de 20 €, le cours de Bourse de l'action GDF Suez s'est inscrit en baisse, impacté en particulier par l'incertitude sur le calendrier du redémarrage des centrales nucléaires d'Electrabel. Globalement, il a toutefois réalisé une performance proche de celle de l'indice CAC 40 et in fine de ses comparables européens. Après la baisse technique enregistrée lors du versement de l'acompte de 0,5 € sur dividende le 13 octobre, le cours s'est redressé à un niveau proche de 19 €.
VI. - La commission note que l'offre dans le cadre du plan d'épargne d'entreprise est réalisée sur la base des dispositions mentionnées à l'art. 23, 1° de l'ordonnance du 20 août 2014 susvisée et que l'offre aux salariés de certains pays est inférieure à 0,5 % du capital. La commission est ainsi consultée à titre facultatif.
La commission observe que la dilution de la participation de l'Etat résultant de l'opération sera d'un montant limité et que les conditions des offres proposées aux ayants droit sont usuelles et voisines de celles de l'opération de 2010.
Il n'apparaît pas par ailleurs que le cours de Bourse de GDF Suez ait été affecté d'une sous-évaluation manifeste durant la période de calcul du prix de souscription.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, et au vu des informations qui lui ont été communiquées, la commission estime qu'il n'apparaît pas que les conditions de l'opération soient défavorables aux intérêts patrimoniaux du secteur public.
Adopté dans la séance du 12 novembre 2014 où siégeaient MM. Bertrand SCHNEITER, président, Pierre ACHARD, Daniel DEGUEN, Philippe MARTIN, Mme Inès-Claire MERCEREAU et M. Jean SÉRISÉ, membres de la commission.
Le président,
B. Schneiter