A C C O R D
ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ET LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRATIVE DU BRÉSIL DANS LE DOMAINE DE LA LUTTE CONTRE L'EXPLOITATION AURIFÈRE ILLÉGALE DANS LES ZONES PROTÉGÉES OU D'INTÉRÊT PATRIMONIAL
Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil,
Ci-après dénommés « les Parties »,
Désireux de contribuer à la protection et à la conservation du patrimoine environnemental du plateau des Guyanes, notamment au moyen d'un partenariat renforcé entre les organes de gestion des parcs nationaux brésilien et français ;
Conscients des menaces que l'exploitation aurifère illégale fait peser, d'une part, sur la préservation et la protection du patrimoine environnemental et, d'autre part, sur la santé et la sécurité des populations tirant traditionnellement leurs moyens de subsistance de la forêt ;
Se référant à la Convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil signée à Paris le 28 mai 1996 ;
Se référant à l'Accord de partenariat et de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil en matière de sécurité publique conclu à Brasilia le 12 mars 1997 ;
Reconnaissant la nécessité de développer leur coopération pour la prévention et la répression de l'exploitation aurifère illégale,
Sont convenus des dispositions suivantes :
Article 1er
Définitions
Aux fins du présent accord, on entend par :
a) « zones protégées ou d'intérêt patrimonial » : les territoires classés en parc national et les territoires frontaliers de la Guyane et de l'Etat d'Amapá, situés dans une bande de 150 km de part et d'autre de la frontière, faisant l'objet de mesures d'identification, de protection ou de conservation des écosystèmes et des habitats naturels ;
b) « activités de recherche et d'extraction aurifères », toute activité consistant à extraire de l'or du milieu naturel, par quelque moyen que ce soit ;
c) « titre pour la recherche et l'exploitation aurifères » : autorisation administrative conférant à son titulaire des droits exclusifs sur un périmètre déterminé du territoire.
Article 2
Objet
Le présent accord a pour objet de renforcer la coopération entre les Parties pour la prévention et la répression des activités d'extraction aurifère illégale dans les zones protégées ou d'intérêt patrimonial.
Article 3
Réglementation et mesures nationales de prévention
1. Les Parties s'engagent à instituer et mettre en œuvre un régime interne complet de réglementation et de contrôle des activités de recherche et d'exploitation aurifères conduites dans les zones protégées ou d'intérêt patrimonial relevant de leurs juridictions respectives.
2. A cette fin, chaque Partie s'engage à :
a) soumettre à autorisation administrative préalable les activités de recherche et d'exploitation aurifères ;
b) soumettre à autorisation administrative l'exercice des activités de négoce d'or non transformé, notamment les activités de vente et de revente ;
c) soumettre les entreprises qui commercialisent des tables de granulométrie (broyeuses et moulins) ou du mercure, à déclaration de leur activité aux autorités administratives compétentes.
3. Les Parties s'engagent à soumettre à autorisation administrative préalable l'exercice, sur leur territoire, de la profession de transporteur fluvial de personnes ou de marchandises sur le bassin du fleuve Oyapock. Les Parties veillent à ce que cette autorisation ne soit délivrée qu'aux exploitants d'embarcations immatriculées auprès des autorités administratives compétentes.
4. Les Parties définissent dans leur droit interne les garanties matérielles, financières et professionnelles auxquelles elles subordonnent l'octroi de l'autorisation préalable d'exercice d'une activité de recherche et d'exploitation aurifères. Ces garanties doivent prévoir les conditions permettant d'assurer une exploitation aurifère techniquement correcte et respectueuse de l'environnement.
5. Les Parties veillent à ce que les entreprises et entrepreneurs gestionnaires exploitant un gisement minier aurifère sur leurs territoires respectifs soient astreints à l'obligation de tenir un registre de suivi des entrées et sorties d'or et de matériels utilisés pour les activités techniques.
6. Les Parties veillent à ce que les entreprises et entrepreneurs qui commercialisent des tables de granulométrie ou du mercure, ou qui exercent des activités de négoce d'or non transformé, notamment les activités de vente et de revente, soient astreints à l'obligation de tenir un registre des transactions.
7. Les Parties veillent à ce que les registres visés aux paragraphes 5 et 6 soient tenus à la disposition des autorités nationales compétentes et que ces autorités puissent les consulter sur demande.
Article 4
Mesures pénales
1. Les Parties veillent à mettre en œuvre, conformément à leurs législations respectives, les mesures nécessaires pour prévenir et réprimer les activités suivantes :
a) toute activité d'exploitation illégale, dans les zones protégées ou d'intérêt patrimonial ;
b) toute activité de transport, détention, vente ou cession de mercure, effectuée sans autorisation ou en violation des conditions imposées par la législation nationale ;
c) toute activité de négoce d'or non transformé sans autorisation, notamment les activités de vente et de revente.
2. Les Parties veillent à sanctionner les infractions visées au paragraphe 1, en conformité avec leurs législations nationales respectives et dans le cadre de la coopération judiciaire bilatérale en matière pénale.
3. Les Parties veillent à mettre en œuvre, conformément à leurs législations nationales respectives, les mesures nécessaires pour permettre :
a) la saisie et la confiscation du produit des infractions établies conformément au paragraphe 1 ;
b) la saisie, la confiscation et en dernière instance la destruction, sur les sites d'exploitation ou lors de leur transport en zone protégée ou d'intérêt patrimonial, des biens, matériels et instruments utilisés pour commettre les infractions établies conformément au paragraphe 1.
4. Les Parties adoptent, conformément aux principes fondamentaux de leur droit interne, les outils procéduraux permettant de combattre efficacement les infractions mentionnées au paragraphe 1.
Article 5
Dispositions de coopération
1. Les Parties s'engagent à coopérer en vue de définir les méthodes admissibles et les standards communs exigés en matière de recherche et d'exploitation aurifères.
2. A cette fin, les Parties coopèrent afin de mettre en place et de développer des formations professionnelles communes au profit des entreprises françaises et brésiliennes impliquées dans des activités de recherche et d'exploitation aurifères dans les zones protégées ou d'intérêt patrimonial.
Article 6
Relations avec d'autres accords bilatéraux
1. Les Parties veillent à s'accorder mutuellement la coopération judiciaire la plus large possible, conformément à la Convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil, signée à Paris le 28 mai 1996, dans toute procédure visant les infractions mentionnées au paragraphe 1 de l'article 4.
2. Les dispositions de l'Accord de partenariat et de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil, signé à Brasilia le 12 mars 1997, sont applicables à la coopération relative aux infractions mentionnées au paragraphe 1 de l'article 4.
Article 7
Entrée en vigueur
1. Le présent accord entrera en vigueur trente (30) jours après la seconde notification d'accomplissement des procédures légales exigées par le droit interne de chaque Partie.
2. Le présent accord est conclu pour une durée indéterminée.
Article 8
Règlement des différends
Tout différend qui pourrait survenir dans l'interprétation ou la mise en œuvre du présent Accord sera réglé par négociation directe entre les Parties par la voie diplomatique.
Article 9
Dénonciation et amendements
Chacune des Parties peut à tout moment dénoncer le présent accord en adressant à l'autre une notification de dénonciation par voie diplomatique. La dénonciation prendra effet six mois après la date de réception de la notification.
Fait à Rio de Janeiro, le 23 décembre 2008, en deux exemplaires originaux, en langues française et portugaise, les deux textes faisant également foi.
Pour le Gouvernement
de la République française :
Bernard Kouchner
ministre des affaires étrangères
et européennes
Pour le Gouvernement
de la République fédérative
du Brésil :
Celso Amorim
ministre
des relations extérieures