1. Contexte
Les tarifs réglementés de vente en distribution publique de GDF Suez sont encadrés par l'article L. 445-3 du code de l'énergie et par le décret du 18 décembre 2009 susmentionné.
L'article 3 de ce décret dispose que « les tarifs réglementés de vente du gaz naturel couvrent les coûts d'approvisionnement en gaz naturel et les coûts hors approvisionnement. Ils comportent une part variable liée à la consommation effective et une part forfaitaire calculée à partir des coûts fixes de fourniture du gaz naturel (...) ».
L'article 5 dispose que pour chaque fournisseur, un arrêté des ministres chargés de l'économie et de l'énergie pris après avis de la CRE fixe les barèmes des tarifs réglementés de vente de gaz.
L'arrêté du 22 décembre 2011 a fixé les tarifs réglementés de vente en DP de GDF Suez ainsi que la formule permettant d'estimer l'évolution de ses coûts d'approvisionnement.
Les barèmes fixés par l'arrêté du 22 décembre 2011 sont restés inchangés jusqu'au 20 juillet 2012, date d'entrée en vigueur des barèmes fixés par l'arrêté du 18 juillet 2012.
Par décision du 2 octobre 2013, le Conseil d'Etat a annulé les dispositions des articles 3 et 4 de cet arrêté.
L'article 3 de l'arrêté susmentionné procédait à une distinction tarifaire entre locaux à usage d'habitation et locaux hors usage d'habitation. Le Conseil d'Etat a rappelé que le principe d'égalité de traitement supposait un traitement identique de situations identiques et, réciproquement, un traitement différencié de situations différentes. Il a également rappelé qu'il n'était possible de déroger à ce principe d'égalité que pour des motifs d'intérêt général, sous deux conditions : d'une part, que la différence de traitement soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et, d'autre part, que cette différence ne soit pas manifestement disproportionnée. En l'espèce, le Conseil d'Etat a considéré que l'article L. 445-3 du code de l'énergie n'interdisait pas au pouvoir réglementaire d'établir des différenciations tarifaires entre catégories d'utilisateurs mais a estimé que les utilisateurs résidentiels et non résidentiels de gaz naturel n'étaient pas placés dans des situations différentes et qu'aucun motif d'intérêt général ne justifiait un traitement différencié. Il a en conséquence conclu à la censure de l'article 3 de l'arrêté.
L'article 4 prévoyait le gel des barèmes jusqu'au 30 juin 2012 en prévoyant qu'« il ne pourra être fait application de l'article 6 du décret du 18 décembre 2009 », lequel autorise le fournisseur à répercuter dans ses barèmes les variations des coûts d'approvisionnement en gaz naturel telles qu'elles résultent de l'application de sa formule tarifaire.
Le Conseil d'Etat a considéré que cet article devait également être annulé car « entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que les ministres compétents n'invoquent aucun motif justifiant un tel gel des tarifs en réponse à l'analyse de l'association requérante, partagée par la Commission de régulation de l'énergie dans son avis du 20 décembre 2011, selon laquelle cette mesure a pour effet de perturber le bon fonctionnement du marché de la fourniture du gaz naturel ».
Le Conseil d'Etat a considéré que cette annulation impliquait nécessairement que soit pris un nouvel arrêté pour la période du 1er janvier au 19 juillet 2012. Il a en conséquence enjoint au ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, « de prendre dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, un nouvel arrêté fixant des barèmes de tarifs conformes aux principes énoncés par la présente décision ».
2. Observations
2.1. Description des barèmes envisagés
Le barème applicable pour la période du 1er janvier au 31 mars 2012 figurant en annexe de l'arrêté rétroactif a été élaboré en appliquant les étapes de construction ci-dessous :
― le barème n'est pas modifié pour les tarifs Base, B0 et B1 par rapport au barème de l'arrêté du 22 décembre 2011 annulé par le Conseil d'Etat car ceux-ci sont identiques pour les locaux à usage d'habitation et les locaux hors usage d'habitation ;
― le barème des tarifs B2I pour les locaux hors usage d'habitation est aligné sur le barème des tarifs B2I pour les locaux à usage d'habitation ;
― les barèmes des tarifs B2S, TEL et TEL Nuit sont déterminés de telle sorte que i) les tarifs pour les locaux à usage d'habitation et les locaux hors usage d'habitation sont identiques ; ii) l'augmentation de la part variable entre le barème de l'arrêté du 22 décembre 2011 et le barème de l'arrêté rétroactif est la même pour les trois tarifs en €/MWh pour les locaux à usage d'habitation ; et iii) le tarif moyen en distribution publique calculé à partir des barèmes figurant en annexe de l'arrêté rétroactif pour la période du premier trimestre 2012 est identique à celui calculé à partir des barèmes de l'arrêté du 22 décembre 2011 annulé par le Conseil d'Etat pour la même période.
Le barème en vigueur pour la période du 1er avril au 19 juillet 2012 répercute l'évolution des coûts d'approvisionnement de GDF Suez entre le 1er janvier et le 1er avril 2012 telle qu'estimée par la formule. L'augmentation des coûts d'approvisionnement de 0,77 €/MWh se traduit, pour des raisons d'arrondis, par une augmentation de 0,8 €/MWh des parts variables pour les tarifs Base, B0, B1 et B2I et par une augmentation de 0,71 €/MWh des parts variables pour les tarifs B2S, TEL et TEL Nuit.
2.2. Analyse des tarifs envisagés
La CRE constate que les barèmes figurant en annexe du projet d'arrêté ont pour effet de supprimer les différenciations entre les consommateurs résidentiels et non résidentiels au sein de chacun des tarifs dès le 1er janvier 2012 et de répercuter l'évolution des coûts d'approvisionnement tels qu'estimés par la formule tarifaire au 1er avril 2012.
En conséquence, ces barèmes sont conformes à la décision du Conseil d'Etat.
Par ailleurs, dans sa délibération du 20 décembre 2011 (1), la CRE n'avait « pas relevé d'éléments permettant de conclure que les tarifs envisagés ne couvriraient pas les coûts supportés par GDF Suez ». Le tarif moyen résultant des barèmes envisagés étant par construction identique à celui résultant des barèmes de l'arrêté du 22 décembre 2011, les conclusions de l'analyse menée par la CRE dans sa délibération du 20 décembre 2011 demeurent inchangées.
3. Conclusion
La CRE émet un avis favorable au projet d'arrêté qui lui a été soumis.
Par ailleurs, la CRE, qui adopte aujourd'hui sa délibération portant vérification de la conformité du barème des tarifs réglementés de vente de gaz en distribution publique proposé par GDF Suez au 1er janvier 2014 à la formule tarifaire fixée par l'arrêté du 27 juin 2013, rappelle que les motifs de la décision du Conseil d'Etat imposent de procéder dans les meilleurs délais à l'abrogation des dispositions de l'arrêté du 27 juin 2013 qui maintiennent une différenciation tarifaire entre locaux à usage d'habitation et locaux hors usage d'habitation.
Fait à Paris, le 20 décembre 2013.