4.3. La coopération industrielle
La coopération industrielle, essentiellement à une échelle européenne, répond à un double objectif pour l'Etat : favoriser la réalisation de programmes d'armement en partageant les coûts de développement et asseoir le maintien de certaines compétences existantes ou le développement de nouvelles sur une base plus large, permettant de faire face, dans les deux cas, à la complexité croissante des équipements et des technologies maîtrisées.
Dans cet esprit, la présente loi s'attache à préserver l'essentiel des programmes d'équipement réalisés en coopération européenne. Ceux-ci touchent des secteurs essentiels de l'activité des forces, hors la dissuasion nucléaire proprement dite : renseignement spatial, transport aérien, bâtiments navals, aéromobilité, missiles, drones de combat... Aucun programme européen n'est, en l'occurrence, supprimé. La France, tout en tirant avec ses partenaires les leçons des erreurs qui ont affecté la vie et le financement de certains programmes en raison des lourdeurs de la coopération, encouragera ces projets concrets. En outre, sur un plan politique, elle défendra les orientations suivantes :
― le partage des activités de développement et de production doit désormais être organisé selon un strict principe d'efficacité industrielle et de performance économique en tenant compte des contributions de chacun ;
― les potentialités de l'Agence européenne de défense (AED) et de l'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) doivent être exploitées. A cette fin, des moyens humains et matériels suffisants doivent être mis à la disposition de l'AED ;
― la France veillera que l'industrie européenne joue tout son rôle s'agissant des initiatives de l'OTAN en matière d'acquisition.
Au niveau européen, la France veillera à la mise en place de cadres communs pour le soutien des capacités technologiques et industrielles partagées, en s'appuyant, notamment, sur l'expérience franco-britannique dans le domaine des missiles, fondée sur un principe d'interdépendances librement consenties.
La réussite d'une démarche de partage efficace des coûts et de répartition des technologies passe aussi par la définition de mécanismes de transfert de technologies optimisés et fluides au sein des groupes industriels, construits avec nos partenaires. Différentes initiatives en cours s'inscrivent dans cette démarche, dans le domaine des missiles ou pour la préparation des futurs drones de combat (UCAV). Cette approche devra viser, pour chacun des domaines de compétences et des technologies, existants ou en développement, une cible de juste niveau de maîtrise industrielle qu'il faut que la France conserve.
La dispersion et la fragmentation actuelles de l'industrie de défense en Europe sont une source de duplications inutiles et coûteuses et un facteur de faiblesse sur le plan de la compétitivité économique comme sur le plan politique par les divisions qu'elles entraînent. La politique industrielle doit aussi favoriser la réussite d'opérations de consolidation industrielles européennes, qui renforceront la pérennité de l'appareil européen dans ce domaine.
4.4. La politique d'exportation
Le soutien aux exportations de défense constituera un volet majeur de la politique industrielle du Gouvernement, allant de pair avec une pratique exigeante du contrôle.
Les exportations d'armement représentent en effet plus de 30 % des 15 milliards d'euros de chiffre d'affaires du secteur de l'industrie de défense dans l'économie française et sont donc à la fois un signe et un facteur de sa compétitivité. Elles passeront de plus en plus par la mise en œuvre de coopérations industrielles et techniques au service de partenariats stratégiques et des relations globales de défense que la France entend développer. En s'engageant dans des relations d'armement avec la France, notamment par la signature de grands contrats, ces pays renforcent durablement nos liens tant au niveau militaire qu'au niveau politique, économique et industriel et deviennent ainsi de véritables partenaires. En maintenant des compétences en matière de recherche et de développement au sein des bureaux d'études et en alimentant les chaînes de production, les commandes à l'exportation contribuent à la pérennité de nos entreprises ainsi qu'à notre autonomie stratégique. Les contraintes budgétaires et le coût croissant des systèmes d'armes les rendent indispensables comme complément du marché intérieur, réduisant la dépendance des entreprises à l'évolution des commandes de l'Etat et renforçant leurs capacités d'autofinancement.
La stratégie d'exportation d'armement s'inscrira pleinement dans le cadre de la Charte des Nations unies, qui reconnaît, dans son article 51, à tout Etat membre le droit de la légitime défense, individuelle ou collective. Elle s'appuiera sur l'application de normes internationales interdisant ou réglementant l'usage de certaines armes, tout en luttant contre la prolifération et les trafics illicites. La France continuera de s'impliquer dans l'élaboration de normes internationales rigoureuses, comme les traités visant à interdire certaines armes frappant sans discrimination des populations civiles, le traité sur le commerce des armes, signé le 3 juin 2013 à New York, et les outils internationaux et européens de contrôle des flux de matériels sensibles.
Il sera régulièrement rendu compte des résultats de la stratégie d'exportation au Parlement, par les rapports annuels réalisés à cette fin et le débat devant les commissions parlementaires auxquels ils donnent lieu.
Conformément aux conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, des propositions seront rapidement présentées afin de renforcer les différentes procédures de contrôle des exportations sensibles. Ces propositions pourraient viser à rassembler sous une même autorité nos différents instruments de contrôle des technologies civiles et militaires à usage de défense et de sécurité.
5. Les ressources financières
Le périmètre de la présente loi de programmation porte sur l'ensemble de la mission « Défense », hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions » et dans la structure de la loi de finances pour 2013 (22).
Le Président de la République a fait le choix du maintien d'un effort de défense significatif, afin de donner à la France les moyens de mettre en œuvre un modèle d'armée ambitieux à l'horizon 2025. Cet effort s'élèvera à 190 milliards d'euros courants (179,25 Md€ 2013) sur la période 2014-2019.
Durant les trois premières années de la programmation, le montant des crédits sera préservé au niveau de la loi de finances initiale pour 2013. Il s'agit d'un effort équilibré, permettant de conjuguer souveraineté stratégique et souveraineté budgétaire.