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Article AUTONOME (Délibération n° 2013-119 du 16 mai 2013 portant avis sur un projet de décret modifiant le code de l'entrée et du séjour des étrangers, le décret n° 2011-638 du 8 juin 2011 relatif à l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France et aux titres de séjour et aux titres de voyage des étrangers et le décret n° 2007-255 du 27 février 2007 fixant la liste des titres sécurisés relevant de l'Agence nationale des titres sécurisés (demande d'avis n° 13011639))

Article AUTONOME (Délibération n° 2013-119 du 16 mai 2013 portant avis sur un projet de décret modifiant le code de l'entrée et du séjour des étrangers, le décret n° 2011-638 du 8 juin 2011 relatif à l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France et aux titres de séjour et aux titres de voyage des étrangers et le décret n° 2007-255 du 27 février 2007 fixant la liste des titres sécurisés relevant de l'Agence nationale des titres sécurisés (demande d'avis n° 13011639))



La Commission nationale de l'informatique et des libertés a été saisie, par le ministère de l'intérieur, d'une demande d'avis concernant un projet de décret modifiant les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) concernant l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF2).
Rappel sur le traitement AGDREF2 :
Le traitement AGDREF2, dont les conditions de mise en œuvre sont définies aux articles R. 611-1 à R. 611-7-4 du CESEDA, constitue le fichier principal de gestion administrative des étrangers et concerne environ sept millions de personnes.
Il permet notamment la gestion par les préfectures des dossiers de ressortissants étrangers et la fabrication des titres de séjour, la gestion des mesures d'éloignement et permet aux agents habilités à examiner la situation des étrangers au regard du séjour en France d'effectuer les vérifications nécessaires. Il comporte une base centralisée de données biométriques (les dix empreintes digitales et la photographie des personnes concernées) relatives aux demandeurs de titre de séjour, aux personnes en situation irrégulière et aux personnes faisant l'objet d'une mesure d'éloignement et permet la délivrance de titres biométriques de séjour et de voyage des étrangers. L'accès aux données enregistrées dans ce traitement est enfin ouvert, dans la limite du besoin d'en connaître, à tous les services de l'Etat et organismes rattachés intervenant dans la gestion administrative des étrangers.
Le ministère chargé de l'immigration projette de modifier à nouveau les dispositions réglementaires du CESEDA relatives au traitement AGDREF2 afin de prendre en compte la création de la carte de frontalier dans le cadre du régime de circulation transfrontalière temporaire entre l'Etat de l'Amapá, au Brésil, et la région française de la Guyane ainsi que l'entrée en vigueur de la loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012 susvisée, qui a notamment créé une nouvelle procédure administrative de « retenue pour vérification du droit au séjour ». Ces modifications entraînent l'enregistrement de nouvelles données dans le traitement et l'ajout de nouveaux destinataires.
En application des dispositions de l'article L. 611-5 du CESEDA et des articles 27-I (2°) et 30-II de la loi du 6 janvier 1978 modifiée, ces modifications nécessitent un décret en Conseil d'Etat pris après avis motivé et publié de la Commission.
Sur les nouvelles données enregistrées dans le traitement :
A la suite de la déclaration conjointe des présidents français et brésilien du 11 décembre 2012, a été créé un nouveau régime de circulation transfrontalière entre l'Etat de l'Amapá, au Brésil, et la région française de la Guyane. Une exemption de visa bénéficiera ainsi aux Brésiliens souhaitant entrer sur le territoire de la Guyane et y circuler pour une période n'excédant pas 72 heures d'affilée. Le droit de circuler des bénéficiaires sera matérialisé par une carte de frontalier, éditée par l'application AGDREF2. Cette carte comportera, tout comme les titres de séjour et autres documents de voyage des étrangers édités par cette application, un composant électronique contenant deux empreintes digitales de l'intéressé. De même, les empreintes digitales des dix doigts de leur titulaire seront enregistrées dans la base AGDREF2.
Les articles 3, 4, 7 (2°) et 8 du projet de décret soumis à la commission modifient en conséquence les dispositions réglementaires du CESEDA relatives au traitement AGDREF2. L'article R. 611-1 (1°) dudit code est modifié afin de prévoir la fabrication par le traitement de l'ensemble des documents de circulation des ressortissants étrangers, et non des seuls ressortissants étrangers mineurs. Le projet d'article R. 611-2 (1°) du CESEDA prévoit expressément l'enregistrement des données personnelles des étrangers demandeurs d'une carte de frontalier et l'annexe 6-4 du même code, qui précise l'ensemble des données enregistrées dans le traitement AGDREF2, est modifiée afin de mentionner cette nouvelle catégorie de personnes concernées. Enfin, l'article R. 611-6 est modifié afin de prévoir que les cartes de frontalier sont dotées d'un composant électronique, auquel peuvent accéder, dans les mêmes conditions, les agents déjà autorisés à consulter les données enregistrées dans les composants électroniques des titres de séjour et de voyage édités par cette application.
En outre, d'autres modifications mineures sont apportées à l'annexe 6-4 du CESEDA afin de mentionner de nouvelles informations concernant les actes de procédures enregistrés dans l'application AGDREF2.
Dans la mesure où les données enregistrées dans le traitement concernant les demandeurs d'une carte de frontalier sont identiques à celles concernant les autres ressortissants étrangers demandeurs d'un titre de séjour ou de voyage, ces modifications n'appellent pas d'observation particulière de la commission.
Sur l'ajout de nouveaux destinataires :
En premier lieu, il est prévu de modifier les dispositions des articles R. 611-4 à R. 611-6 du CESEDA afin de prendre en compte l'entrée en vigueur de la loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012 susvisée, qui a notamment créé une nouvelle procédure administrative de « retenue pour vérification du droit au séjour ».
Cette procédure a été créée afin de combler le vide juridique résultant de décisions de la Cour de justice de l'Union européenne et de la Cour de cassation, interdisant de punir de peines d'emprisonnement le seul séjour irrégulier de ressortissants étrangers et, par voie de conséquence, leur placement en garde à vue. La loi du 31 décembre 2012 a ainsi créé une nouvelle mesure de retenue administrative, prévue à l'article L. 611-1-1 du CESEDA, plus brève que la garde à vue mais plus longue que la simple vérification d'identité, et explicitement destinée à vérifier le droit au séjour de la personne appréhendée.
En pratique, si l'étranger n'est pas en mesure de justifier de son droit de circuler ou de séjourner en France, il est conduit au poste de police ou de gendarmerie et y est retenu par un officier de police judiciaire aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français. Si l'étranger ne fournit pas d'éléments permettant d'apprécier sa situation, les opérations de vérification peuvent donner lieu, après information du procureur de la République, à la prise d'empreintes digitales ou de photographies « lorsque celle-ci constitue l'unique moyen d'établir à situation de cette personne ».
Afin de permettre l'application de ces nouvelles dispositions législatives, et notamment la consultation du traitement AGDREF2 aux fins d'identifier les personnes dont les empreintes digitales sont relevées dans le cadre de cette nouvelle mesure de retenue administrative, il est prévu d'ajouter de nouveaux destinataires à ce traitement dans le cadre de la nouvelle procédure administrative de « retenue pour vérification du droit de séjour ».
Ainsi, l'article R. 611-4 du CESEDA est modifié pour que les agents des services déconcentrés de la police et de la gendarmerie nationales puissent directement accéder au traitement AGDREF2 dans le cadre de leur mission de vérification du droit au séjour ou à la circulation sur le territoire. Les articles R. 611-5 et R. 611-6 du même code doivent également être modifiés afin de permettre l'accès des services de police et de gendarmerie habilités à réaliser cette mission, en simple consultation, aux données enregistrées dans le traitement, y compris aux empreintes digitales et aux informations contenues dans le composant électronique du titre de séjour, de voyage ou de circulation de l'étranger concerné.
La commission considère dès lors que ces nouveaux accès au traitement AGDREF2 sont nécessaires à l'accomplissement de leur mission dans le cadre de la nouvelle procédure administrative de retenue pour vérification du droit au séjour.
En second lieu, de manière plus générale, de nouveaux destinataires sont prévus. L'article 6 du projet de décret vise à modifier l'article R. 611-6 du CESEDA afin de prévoir l'accès en simple consultation au traitement AGDREF2 par les agents du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) et les agents de la douane judiciaire.
A titre liminaire, la commission relève qu'une procédure de désignation individuelle et d'habilitation spéciale par leur supérieur hiérarchique à être destinataire de ces données est prévue pour ces deux catégories d'agents.
Les agents du CNAPS auront ainsi accès, dans la limite du besoin d'en connaître et à l'exclusion des empreintes digitales et des données contenues dans le composant électronique des titres, aux données relatives au droit au séjour et aux éventuelles mesures d'éloignement concernant des étrangers postulants à des activités de sécurité privée. La commission relève que ces accès leur permettront ainsi d'exercer leur mission de contrôle a priori dans le cadre de la délivrance d'agréments, d'autorisations et de cartes professionnelles prévue à l'article L. 632-1 du code de la sécurité intérieure.
L'ajout des agents de la douane judiciaire à la liste des destinataires du traitement AGDREF2 a pour objet de leur permettre le même accès que les autres agents habilités à effectuer des missions de police judiciaire, dans les conditions prévues à l'article R. 611-5 (7°) du CESEDA. Il n'appelle donc pas d'observation particulière de la part de la commission.
La Commission considère que l'ensemble de ces nouveaux accès sont donc justifiés au regard des finalités du traitement AGDREF2.