II-5. L'amélioration du parcours client
II-5.1. Une information préalable des abonnés entreprise
sur l'état de leur installation et de leur contrat
Le nouveau dispositif prévoit la mise à disposition par les opérateurs fixes entreprises de l'ensemble des informations nécessaires à la migration de leurs abonnés avec conservation des numéros fixes.
Sont ainsi mises à disposition, d'une part, des informations techniques (telles que la liste des numéros de sélection directe à l'arrivée associés aux numéros d'identification de leur installation, la liste des types d'accès support à la fourniture du service téléphonique ainsi que la liste des services additionnels liés au service téléphonique) et, d'autre part, des informations contractuelles.
Les informations contractuelles mises à la disposition des abonnés entreprises par leur opérateur portent sur la durée de leur contrat et sur les conditions de sortie.
En effet, l'Autorité considère que pour réussir un changement d'opérateur avec conservation de ses numéros fixes, une entreprise qui serait liée à son opérateur par un contrat conclu pour une durée initiale et reconductible tacitement à chaque échéance, doit être parfaitement informée sur la date d'échéance de son contrat et sur la durée du préavis de résiliation.
II-5.2. Une information harmonisée de l'abonné fixe grand public pendant tout le processus
L'Autorité souhaite encadrer l'information fournie par l'opérateur donneur à l'abonné, et, plus globalement, harmoniser l'ensemble des messages adressés par les opérateurs à l'abonné dans le cadre de la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe, à l'instar du dispositif d'information par SMS qui a été mis en place en 2011 pour la conservation du numéro mobile.
L'opérateur receveur, qui joue un rôle majeur dans le processus de simple guichet, reste le contact privilégié de l'abonné. Néanmoins, l'Autorité estime pertinent que l'opérateur donneur confirme à l'abonné la prise en compte de sa demande de conservation du numéro et de la résiliation du contrat en vigueur qui en découle, afin de l'assurer de la prise en compte de sa demande et de limiter les cas d'abus de portage.
Six courriels ou SMS différents sont ainsi prévus :
(1) L'opérateur receveur confirme à l'abonné, dès la souscription, la prise en compte de sa demande de conservation du numéro fixe, en reprenant le numéro objet de la demande et la date prévue pour le portage effectif, si une telle date a été convenue ;
(2) L'opérateur donneur lui confirme la prise en compte de sa demande de conservation du numéro fixe et de résiliation du contrat dès le retour d'éligibilité ;
(3) Dans le cas où l'abonné a demandé l'annulation de sa demande de conservation du numéro fixe, l'opérateur receveur lui confirme la prise en compte de sa demande d'annulation dans les meilleurs délais ;
(4) Dans le cas où l'opérateur donneur notifie un cas d'inéligibilité de la demande de conservation du numéro fixe, l'opérateur receveur l'informe dans les meilleurs délais, en lui précisant le motif d'inéligibilité opposé ;
(5) L'opérateur receveur lui confirme la date du portage la veille ou le matin de celui-ci, si une date de portage a été convenue entre l'opérateur receveur et l'abonné, lors de la souscription ;
(6) L'opérateur receveur lui confirme le portage dès qu'il est effectif.
Dans le cas où l'opérateur ne dispose pas de l'adresse électronique ou du numéro de mobile de contact de l'abonné, les messages (1) à (4) sont envoyés par voie postale en service d'envoi prioritaire à son adresse de facturation, au plus tard dans un délai de deux jours ouvrés. Dans ce dernier cas, les messages (5) et (6) ne sont pas envoyés.
Le contenu des messages, l'identité de l'opérateur émetteur et l'élément déclencheur de l'envoi sont détaillés dans l'annexe à la présente décision.
II-6. Le droit à l'indemnisation de l'abonné
La directive n° 2009/136/CE susvisée prévoit également le droit à l'indemnisation de l'abonné en cas de retard ou d'abus dans la mise en œuvre de la conservation des numéros : « [...] Les Etats membres veillent à ce que des sanctions appropriées soient prévues à l'encontre des entreprises, notamment l'obligation d'indemniser les abonnés en cas de retard à réaliser le portage ou d'abus du portage par ces entreprises ou en leur nom. »
L'article L. 44 du CPCE a été modifié en conséquence : « Tout retard ou abus dans la prestation de conservation du numéro donne lieu à indemnisation de l'abonné. [...] »
Par ailleurs, l'article D. 406-18 du CPCE a été complété par un alinéa, ainsi rédigé : « Les contrats de services de communications électroniques prévoient les compensations ou formules de compensations applicables lorsque la prestation de conservation du numéro n'a pas été réalisée dans les conditions prévues aux précédents alinéas. »
Compte tenu des dispositions rappelées ci-dessus et des objectifs fixés par le droit de l'Union européenne, l'Autorité souhaite préciser, comme elle l'a fait dans le contexte de la conservation des numéros mobiles, certaines situations pouvant être considérées comme des cas de retard ou d'abus dans la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe et pouvant donner lieu à indemnisation auprès des opérateurs fixes. En cas de désaccord avec l'opérateur sur les modalités d'indemnisation, les abonnés peuvent faire appel au médiateur des communications électroniques ou aux juridictions de droit commun.
Un abonné fixe est fondé à demander une indemnisation dans les situations où il constate, notamment :
― la reprogrammation d'un portage planifié, qui ne résulte ni d'une inéligibilité de la demande, ni d'un souhait explicite de sa part, ni d'une indisponibilité de l'accès ;
― une incapacité à émettre ou recevoir des communications au lendemain du portage ;
― la non-prise en compte de la demande de conservation du numéro fixe formulée auprès de l'opérateur receveur.
En cas de retard dans la mise en œuvre de la conservation de son numéro fixe, l'abonné s'adresse à son nouvel opérateur (opérateur receveur) afin de formuler sa réclamation et de faire valoir son droit à indemnisation. L'opérateur receveur met en œuvre tous les moyens permettant de résoudre l'incident en collaboration avec l'ensemble des opérateurs impliqués. Il peut ensuite s'adresser à l'opérateur responsable du retard pour une compensation correspondant aux frais occasionnés par la résolution du problème de l'abonné et son indemnisation.
La notion d'abus dans la prestation de conservation du numéro fixe doit s'entendre comme la perte, pour l'abonné fixe, de l'usage de son numéro à la suite d'un portage qu'il n'a pas sollicité.
S'il constate un abus de portage, l'abonné s'adresse à son opérateur habituel (opérateur donneur) pour lui notifier qu'il n'a pas formulé de demande de conservation. L'opérateur de l'abonné met alors en œuvre tous les moyens pour rétablir la ligne de l'abonné dans les meilleurs délais et dédommager l'abonné. Il peut ensuite s'adresser à l'opérateur receveur pour une compensation correspondant aux frais occasionnés par le rétablissement de la ligne de l'abonné et son indemnisation. Cette procédure pourrait s'inspirer de la modalité existant pour les abonnés grand public victimes de changement de ligne non sollicité, mis en place par la FFT et les principaux opérateurs fixes résidentiels.
Ce processus vise à faire porter la charge de l'indemnité versée à l'abonné sur l'opérateur ayant la relation contractuelle avec cet abonné. Un tel processus présente l'avantage pour l'abonné d'avoir un interlocuteur unique auprès duquel il obtient l'indemnisation sans avoir à rechercher l'opérateur responsable du retard ou de l'abus.
L'Autorité souhaite, en outre, réaliser un bilan du dispositif d'indemnisation à l'issue de la première année de sa mise en place par les opérateurs, afin de revoir, le cas échéant, ses modalités pratiques. Pour cela, l'Autorité souhaite que les opérateurs lui fournissent les données statistiques suivantes :
― volume d'abonnés fixes indemnisés à la suite :
― de la reprogrammation d'un portage planifié ;
― de l'incapacité de l'abonné fixe à émettre ou recevoir des communications au lendemain du portage ;
― de l'absence de prise en compte de la demande formulée par l'abonné fixe ;
― d'un abus de portage ;
― montant moyen de l'indemnisation versée.
Ce bilan pourrait être réalisé par le biais d'une de satisfaction ponctuelle, auprès d'un échantillon représentatif d'abonnés récemment portés. Les modalités de cette enquête seront définies dans le cadre de travaux multilatéraux, sous l'égide de l'Autorité.
A l'occasion de la consultation publique susvisée, un opérateur a estimé qu'il serait souhaitable d'adopter, sous l'égide de l'APNF, une approche commune au sujet des modalités d'indemnisation en cas d'abus ou retard dans la prestation de conservation des numéros fixes, à l'instar des travaux réalisés dans le cadre de la FFT au sujet des changements de lignes non sollicités.
L'Autorité considère également qu'une approche sectorielle sur le sujet pourrait être adaptée. Celle-ci pourrait prendre la forme d'un chantier piloté par l'APNF, visant à expliciter les modalités précises d'indemnisation des abonnés, dans le respect du cadre général défini par la présente décision.
II-7. Les autres évolutions
II-7.1. Clarification du périmètre de la résiliation à la suite du portage du numéro fixe
L'article D. 406-18 du CPCE, tel que modifié par le décret n° 2012-488, prévoit que « [...] Le portage effectif du numéro entraîne la résiliation du contrat qui lie l'opérateur donneur à l'abonné en ce qu'il concerne les services fournis depuis l'accès associé au numéro porté. [...] » Par ailleurs, cet article prévoit qu'« Une décision de l'Autorité [...] précise les modalités d'application du présent article, en tenant compte de la faisabilité technique et de la nécessité d'assurer la continuité du service fourni à l'abonné ».
Ainsi, sur le marché grand public, la conservation du numéro fixe entraîne la résiliation de tous les services de communications électroniques liés à l'accès fixe associé au numéro fixe porté ; par exemple, la téléphonie, l'accès à l'internet ou encore la télévision sur IP. Dans le cas des contrats « quadruple play » présentant une composante mobile, la résiliation n'impacte pas toutefois les services liés à l'accès mobile, sauf demande expresse de l'abonné.
La situation sur le marché entreprise est différente. En effet, les contrats de communications électroniques fixes sur le marché entreprise prévoient, généralement, la fourniture du service téléphonique sur plusieurs dizaines de numéros éventuellement répartis sur plusieurs sites distincts. Dès lors, les abonnés sont susceptibles de vouloir maintenir une partie de leur installation et de leurs numéros auprès de leur opérateur, tout en souscrivant à l'offre d'un nouvel opérateur avec conservation d'une autre partie de leurs numéros. La conservation d'une partie des numéros fixes attachés à un contrat pour un abonné entreprise est considérée comme une exception au principe de simple guichet propre à la conservation des numéros fixes, dans la mesure où elle nécessite un copilotage des relations avec l'abonné conjointement par l'opérateur receveur et l'opérateur donneur. En effet si l'abonné souhaite maintenir une partie de son installation avec son opérateur, l'opérateur receveur n'est pas en mesure de traiter lui-même les modifications contractuelles et techniques relatives à l'installation restante pour le compte de l'opérateur donneur.
Enfin, l'article L. 44 du CPCE modifié précise, dorénavant, que « le portage effectif du numéro entraîne de manière concomitante la résiliation du contrat qui lie cet opérateur à l'abonné » alors qu'auparavant la résiliation du contrat pouvait avoir lieu entre la date du portage effectif du numéro et au plus tard dans un délai de dix jours calendaires, correspondant au délai maximum de mise en œuvre du portage.
II-7.2. Obligation de qualité de service de l'acheminement des appels
à destination des numéros fixes portés
L'Autorité rappelle l'importance de la généralisation du mode de routage « direct » des communications à destination des numéros fixes portés. Ce mode de routage consiste à acheminer les communications directement vers les équipements de l'opérateur exploitant le numéro porté (opérateur receveur technique). La mise en œuvre du routage direct permet de réduire le nombre d'acteurs impliqués dans le routage des appels, rendant ainsi le routage plus efficace et moins dépendant d'opérateurs tiers. Ce mode de routage s'oppose au routage « indirect », consistant en un transit systématique par l'opérateur attributaire du numéro ou un opérateur de routage direct, sans insertion préalable du préfixe de routage associé au numéro porté.
Le développement du routage direct à destination des numéros fixes portés est facilité par la centralisation des informations relatives aux numéros portés (notamment le préfixe de portabilité), par le biais de la base de données de référence des numéros fixes portés, mise à disposition par l'APNF.
L'Autorité souhaite rappeler que l'acheminement des communications à destination des numéros portés fixes doit se faire dans les mêmes conditions de qualité de service que pour les communications à destination des numéros fixes non portés, sous réserve du délai maximum d'interruption de service lié à la mise en œuvre du portage, qui est fixé à quatre heures.
Par conséquent, les opérateurs ayant recours au routage direct à destination des numéros fixes portés doivent être en mesure de mettre à jour les informations de routage juste après la diffusion par l'opérateur receveur de la confirmation que le portage a été mis en œuvre, afin d'assurer la même qualité de service de l'acheminement des appels au départ de leurs réseaux, à destination des numéros fixes, que ces numéros soient portés ou non, sous réserve du délai maximum d'interruption de service lié à la mise en œuvre du portage.
Enfin, l'Autorité rappelle que la généralisation du routage direct à destination des numéros fixes portés n'exonère pas les opérateurs attributaires de ressources de numérotation de prendre les dispositions nécessairespour permettre l'acheminement des appels à destination du numéro fixe porté. A ce titre, les accords d'interconnexions des opérateurs doivent prévoir une prestation spécifique dite de « re-routage » permettant le bon acheminement de la communication auprès du réseau de l'opérateur receveur, composée notamment d'une prestation de « préfixage » des appels vers les numéros portés sortants dont l'opérateur est attributaire :
― en ce qui concerne les appels vers les numéros fixes portés sortant de son réseau (au format géographique commençant par 01 à 05 ou non géographique commençant par 09), cette prestation est d'ores et déjà facturée (facturation à l'appel) par l'opérateur attributaire à l'opérateur appelant ;
― en ce qui concerne les appels vers les numéros spéciaux (numéros commençant par 08) portés sortant de son réseau, cette prestation était initialement facturée (facturation à l'appel) par l'opérateur attributaire à l'opérateur receveur. Néanmoins, afin de favoriser le développement du routage direct à destination des numéros spéciaux portés, les opérateurs ont acté (18) le principe d'appliquer, depuis le 1er janvier 2012 et de manière simultanée pour l'ensemble des opérateurs attributaires de numéros de SVA, la facturation de cette prestation de préfixage à l'opérateur appelant et non plus à l'opérateur receveur du numéro porté.