I-2. Le cadre réglementaire
I-2.1. Le cadre communautaire
La directive « service universel », telle que modifiée par la directive n° 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 dispose, en son article 30 relatif à la facilitation du changement de fournisseur, que :
« 1. Les Etats membres veillent à ce que tous les abonnés dotés de numéros du plan national de numérotation téléphonique puissent, à leur demande, conserver leur(s) numéro(s) indépendamment de l'entreprise qui fournit le service, conformément aux dispositions de l'annexe I, partie C.
2. Les autorités réglementaires nationales veillent à ce que la tarification entre opérateurs et/ou fournisseurs de services liée à la fourniture de la portabilité des numéros soit fonction du coût et que les redevances éventuelles à payer par l'abonné ne le dissuadent pas de changer de fournisseur de services.
3. Les autorités réglementaires nationales n'imposent pas, pour la portabilité des numéros, une tarification de détail qui entraînerait des distorsions de la concurrence, par exemple en fixant une tarification de détail particulière ou commune.
4. Le portage des numéros et leur activation ultérieure sont réalisés dans les plus brefs délais possibles. En tout état de cause, les abonnés qui ont conclu un accord concernant le portage d'un numéro vers une nouvelle entreprise doivent obtenir l'activation de ce numéro dans un délai d'un jour ouvrable.
Sans préjudice du premier alinéa, les autorités nationales compétentes peuvent établir la procédure globale de portage des numéros, compte tenu des dispositions nationales en matière de contrats, de la faisabilité technique et de la nécessité de maintenir la continuité du service fourni à l'abonné. En tout état de cause, la perte de service pendant la procédure de portage ne dépasse pas un jour ouvrable. Les autorités nationales compétentes tiennent également compte, si nécessaire, des mesures garantissant que les abonnés sont protégés tout au long de la procédure de changement de fournisseur et du fait que le changement de fournisseur ne s'opère pas contre le gré des abonnés.
Les Etats membres veillent à ce que des sanctions appropriées soient prévues à l'encontre des entreprises, notamment l'obligation d'indemniser les abonnés en cas de retard à réaliser le portage ou d'abus du portage par ces entreprises ou en leur nom. »
I-2.2. Le cadre interne
L'article L. 44 du code des postes et des communications électroniques (CPCE), tel que modifié par l'ordonnance n° 2011-1012 du 24 août 2011 relative aux communications électroniques, dispose que :
« [...] Les opérateurs sont tenus de proposer à un tarif raisonnable à leurs abonnés les offres permettant à ces derniers de conserver leur numéro géographique lorsqu'ils changent d'opérateur sans changer d'implantation géographique et de conserver leur numéro non géographique, fixe ou mobile, lorsqu'ils changent d'opérateur tout en demeurant en métropole, dans un même département d'outre-mer, à Mayotte ou à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les opérateurs prévoient les dispositions nécessaires dans les conventions d'accès et d'interconnexion, à des tarifs reflétant les coûts correspondants.
Les offres mentionnées à l'alinéa précédent doivent permettre à l'abonné qui le demande de changer d'opérateur tout en conservant son numéro. La demande de conservation du numéro, adressée par l'abonné à l'opérateur auprès duquel il souscrit un nouveau contrat, est transmise par ce dernier à l'opérateur de l'abonné. Le délai de portage est d'un jour ouvrable, sous réserve de la disponibilité de l'accès, sauf demande expresse de l'abonné. Sans préjudice des dispositions contractuelles relatives aux durées minimales d'engagement, le portage effectif du numéro entraîne de manière concomitante la résiliation du contrat qui lie cet opérateur à l'abonné.
Tout retard ou abus dans la prestation de conservation du numéro donne lieu à indemnisation de l'abonné.
Un décret, pris après avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques et du Conseil national de la consommation, précise les modalités d'application des deux alinéas précédents. [...] »
Par ailleurs, l'article D. 406-18 du CPCE, tel que modifié par le décret n° 2012-488 du 13 avril 2012 modifiant les obligations des opérateurs de communications électroniques conformément au nouveau cadre réglementaire européen, prévoit que :
« I. ― La conservation du numéro prévue aux trois derniers alinéas de l'article L. 44 permet à l'abonné qui le demande de conserver son numéro géographique lorsqu'il change d'opérateur sans changer d'implantation géographique ou de conserver son numéro non géographique, fixe ou mobile, lorsqu'il change d'opérateur tout en demeurant en métropole, en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, en Martinique, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin ou à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Pour la mise en œuvre de la portabilité des numéros, on entend par :
― "opérateur receveur” : l'opérateur auprès duquel l'abonné souscrit un nouveau contrat et vers lequel le numéro est porté ;
― "opérateur donneur” : l'opérateur à partir duquel le numéro est porté ;
― "opérateur attributaire” : l'opérateur à qui, conformément aux dispositions du plan national de numérotation, a été attribué le numéro objet de la demande de conservation du numéro.
La demande de conservation du numéro est adressée par l'abonné à l'opérateur receveur. Elle vaut demande de résiliation du contrat de l'abonné auprès de l'opérateur donneur. Dans ce cadre, l'abonné donne mandat à l'opérateur receveur pour effectuer les opérations de portage de son numéro et résilier le contrat auprès de l'opérateur donneur. L'abonné fournit à l'opérateur receveur les informations nécessaires au traitement de sa demande.
Le délai de portage correspond au nombre de jours ouvrables entre, d'une part, l'obtention par l'opérateur receveur de la confirmation de l'éligibilité de la demande de conservation du numéro et, d'autre part, le portage effectif du numéro. Ce délai ne peut excéder un jour, sous réserve de la disponibilité de l'accès, sauf demande expresse de l'abonné. Lorsque l'abonné dispose d'un droit de rétraction ou de renonciation en application du code de la consommation, le délai de portage ne court qu'à l'expiration de ce droit.
Le portage effectif du numéro entraîne la résiliation du contrat qui lie l'opérateur donneur à l'abonné en ce qu'il concerne les services fournis depuis l'accès associé au numéro porté.
Une demande de conservation du numéro peut porter sur un ou plusieurs numéros objet d'un même contrat.
Les contrats de services de communications électroniques prévoient les compensations ou formules de compensations applicables lorsque la prestation de conservation du numéro n'a pas été réalisée dans les conditions prévues aux précédents alinéas.
II. ― Une décision de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes prise en application de l'article L. 36-6 précise les modalités d'application du présent article, en tenant compte de la faisabilité technique et de la nécessité d'assurer la continuité du service fourni à l'abonné, concernant notamment :
― l'information de l'abonné ;
― les obligations de qualité de service en matière de portage et le délai maximum d'interruption du service ;
― les délais de transmission entre les opérateurs des informations nécessaires au traitement de la demande de l'abonné ;
― les autres spécifications nécessaires à la mise en œuvre de la portabilité. »
Enfin, l'article D. 406-19 du CPCE, tel que modifié par le décret n° 2012-488 du 13 avril 2012 modifiant les obligations des opérateurs de communications électroniques conformément au nouveau cadre réglementaire européen, prévoit que :
« I. ― L'opérateur donneur ne peut facturer les coûts de portage à l'abonné.
II. ― L'opérateur receveur informe l'opérateur attributaire et l'opérateur donneur du portage du numéro.
L'opérateur receveur transmet à tous les opérateurs les informations relatives aux numéros portés dont il est le receveur ainsi que l'identification des préfixes de portabilité.
III. ― Les opérateurs qui fournissent des prestations à d'autres opérateurs au titre de la conservation des numéros doivent être en mesure de démontrer que les tarifs d'accès et d'interconnexion associés reflètent les coûts correspondants. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut demander à ces opérateurs de justifier intégralement leurs tarifs et, si nécessaire, en exiger l'adaptation.
IV. ― Pour la mise en œuvre du III du présent article, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes précise, en tant que de besoin, les mécanismes de recouvrement des coûts, les méthodes de tarification et les méthodes de comptabilisation des coûts, qui peuvent être distinctes de celles appliquées par l'opérateur. Elle peut également prendre en compte les prix en vigueur sur les marchés comparables en France ou à l'étranger. Elle veille à ce que les méthodes retenues promeuvent l'efficacité économique, favorisent une concurrence durable et optimisent les avantages pour le consommateur. Elle veille également à assurer une rémunération raisonnable des capitaux employés, compte tenu du risque encouru. »
La présente décision est adoptée sur le fondement des dispositions de l'article L. 36-6 du CPCE et fera, à ce titre, l'objet d'une homologation par arrêté du ministre chargé des communications électroniques avant d'être publiée au Journal officiel.
I-3. Les limites actuelles et les enjeux de la conservation des numéros fixes
I-3.1. Evolution du marché grand public : la diffusion des numéros attribués
aux opérateurs alternatifs et le développement du très haut débit
La conservation des numéros fixes constitue un élément clé de la fluidité du marché des communications électroniques fixes pour les consommateurs comme pour les entreprises. Les outils permettant sa mise en œuvre doivent par conséquent évoluer en fonction du dynamisme de ce marché.
Ainsi, l'Autorité constate qu'après une période (années 2000-2010) marquée par l'essor du dégroupage et des conservations de numéro fixe principalement réalisées au départ de France Télécom, pour des numéros dont l'opérateur historique est attributaire (3), les demandes de conservation portant sur des numéros fixes attribués aux opérateurs alternatifs sont en constant essor.
Par ailleurs, les technologies alternatives au dégroupage de la boucle locale de cuivre (principalement câble et fibre) sont en progression. Selon les statistiques publiées par l'observatoire des communications électroniques de l'Autorité (4), la part de marché de la technologie d'accès ADSL pour la fourniture des accès haut débit/très haut débit est ainsi passée de 95 % en 2007 à 92 % en 2011.
Ces deux facteurs soulignent la nécessité de développer les outils nécessaires à la mise en œuvre des conservations de numéro fixe qui puissent être utilisés indépendamment de l'identité des opérateurs impliqués et de la technologie utilisée pour la fourniture de l'éventuel accès support du service.