I. ― Le cadre juridique
L'article R. 1-1-8 du CPCE prévoit que « le ministre chargé des postes, après avoir mis le prestataire du service universel en mesure de présenter ses observations et avoir recueilli les avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la commission supérieure du service public des postes et communications électroniques, arrête des objectifs de qualité applicables aux prestations du service universel qu'il détermine. Ces objectifs portent sur la rapidité et la fiabilité avec lesquelles ces prestations sont assurées. »
En application de ces dispositions, le ministre chargé des postes a saisi l'Autorité, le 19 juin 2013, pour avis sur un projet d'arrêté « relatif aux objectifs de qualité de service fixés à La Poste, pour 2013, au titre de l'offre de service universel que La Poste est tenue d'assurer en application de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques ».
L'Autorité a précédemment émis les avis suivants concernant les objectifs portant sur la rapidité et la fiabilité des prestations du service universel :
― avis n° 2008-0216 du 11 mars 2008 sur un projet d'arrêté relatif aux objectifs de qualité de service fixés à La Poste, pour 2008, au titre de l'offre de service universel ;
― avis n° 2009-0243 du 4 mars 2009 sur un projet d'arrêté fixant les objectifs pour 2009 ;
― avis n° 2010-0847 du 20 juillet 2010 sur un projet d'arrêté fixant les objectifs pour 2010, cet arrêté n'ayant toutefois jamais été publié ;
― avis n° 2011-1509 du 22 décembre 2011 sur un projet d'arrêté fixant les objectifs pour 2011 et 2012.
II. ― Le projet d'arrêté
Concernant le dispositif de mesure de la qualité de service
Le projet d'arrêté transmis à l'Autorité prévoit, concernant la méthodologie de mesure de la qualité de service applicable, que :
― « les mesures de qualité de service de la lettre prioritaire, de la lettre Verte et du courrier transfrontière communautaire doivent être effectuées conformément à la norme européenne EN 13850 » ;
― « la mesure de la qualité de service de la lettre recommandée doit être effectuée sur la base de la méthodologie prévue par la norme EN 14137 » ;
― « la mesure de la qualité de service du Colissimo guichet doit être effectuée selon une méthode qui doit être informatisée, explicitée et auditable » ;
― « la méthode de mesure du traitement des réclamations doit être conforme aux principes préconisés dans la norme européenne EN 14012 » ;
― « la mesure du taux de réparation des dysfonctionnements signalés concernant le service de réexpédition doit être effectuée selon une méthode qui doit être informatisée, explicitée et auditable ».
Concernant les indicateurs de qualité de service
Le projet d'arrêté transmis à l'Autorité reprend, dans l'ensemble, les indicateurs de qualité de service retenus dans l'arrêté précédent du 30 janvier 2012.
Deux évolutions sont toutefois prévues dans ce projet d'arrêté :
― un nouvel indicateur relatif à la qualité du service de réexpédition de La Poste a été créé : « La mesure du taux de réparation des dysfonctionnements signalés concernant le service de réexpédition doit être effectuée selon une méthode qui doit être informatisée, explicitée et auditable » ;
― l'indicateur relatif à la mesure du taux de perte des lettres recommandés, prévu dans l'arrêté précédent, n'apparaît plus dans le projet d'arrêté soumis à l'Autorité.
Le tableau ci-après retrace les objectifs arrêtés ou proposés par le ministre chargé des postes ainsi que les résultats de qualité de service obtenus.
Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 188 du 14/08/2013 texte numéro 69
III. ― Sur les dispositifs de mesure de la qualité de service
Concernant la lettre Verte
S'agissant de la méthode de mesure applicable à la lettre Verte, l'Autorité approuve le fait que le projet d'arrêté prévoit l'application de la norme EN 13850, comme elle l'avait proposé dans son avis n° 2011-1509 du 22 décembre 2011. En effet, bien qu'applicable, en principe, à la mesure de qualité de service des envois prioritaires, cette norme retient une méthodologie adaptée aux envois non prioritaires et a, par ailleurs, fait l'objet d'une révision en 2013.
En outre, l'application de la norme EN 13850 à la lettre Verte permet d'organiser conjointement la mesure de la qualité de la lettre prioritaire et celle de la lettre Verte ainsi que l'audit de contrôle de ces mesures.
Concernant la lettre recommandée
Le projet d'arrêté prévoit que la mesure du taux de distribution en J + 2 doit être réalisée selon la méthodologie prévue par la norme EN 14137. Cette norme s'applique normalement à la mesure du taux de perte et de délais excessifs des envois recommandés. Toutefois, la méthodologie qu'elle prévoit et qui repose sur la généralisation d'un système de flashage des envois en entrée et en sortie du réseau postal, apparaît tout à fait adaptée pour mesurer également un délai d'acheminement en J + 2.
La Poste a entrepris des travaux importants visant à mettre en place une mesure de la qualité de la lettre recommandée conforme à la norme EN 14137. Il apparaît donc opportun que le projet d'arrêté prévoit le recours à la norme EN 14137 pour la mesure de la qualité de service de la lettre recommandée.
Toutefois, l'Autorité estime que la conformité à la norme EN 14137 doit couvrir non seulement la mesure des délais d'acheminement en J + 2 de la lettre recommandée mais également la mesure du taux de perte et des délais excessifs de distribution de celle-ci.
Ainsi, l'Autorité estime qu'à l'instar de l'arrêté relatif aux objectifs de qualité de service de La Poste pour 2011 et 2012, le projet d'arrêté pour 2013 doit prévoir expressément que le taux de perte et de retard excessif des lettres recommandées de La Poste soit mesuré, et ceci conformément à la norme EN 14137.
Concernant le Colissimo
Il n'existe pas actuellement de norme européenne pour la mesure de la qualité de service des colis. Dans ce contexte, l'Autorité approuve la proposition du ministre selon laquelle cette mesure doit être réalisée selon une méthode « informatisée, explicitée et auditable ».
La mesure de la qualité de service des colis du service universel est aujourd'hui réalisée par La Poste sur la base d'un flashage des envois en entrée et en sortie du réseau. Le délai d'acheminement de chaque colis est ainsi mesuré par différence entre les dates de flashage à l'entrée et à la sortie du réseau postal.
La méthodologie mise en place par La Poste a fait l'objet d'une étude en 2009 commandée par l'Autorité auprès du cabinet ETDE LS. Les résultats de cette étude ont montré que la fiabilité de la mesure était globalement satisfaisante.
Concernant le service de réexpédition
L'Autorité considère qu'il est opportun d'introduire un nouvel indicateur ainsi qu'un objectif associé concernant la qualité du service de réexpédition de La Poste. Ce service, qui présente une grande utilité pour les utilisateurs, notamment lors d'un changement d'adresse, fait l'objet d'un nombre relativement important de réclamations auprès des services de La Poste et du médiateur du groupe. Il apparaît donc essentiel d'être en mesure d'évaluer le niveau de qualité du service de réexpédition fourni par La Poste aux utilisateurs et l'introduction d'un objectif fixé par le ministre devrait avoir un effet incitatif à l'amélioration du service.
Toutefois, la formulation utilisée, qui fait référence au « taux de réparation des dysfonctionnements signalés concernant le service de réexpédition », est peu compréhensible. La formulation « taux de rétablissement du service à la suite des dysfonctionnements signalés concernant le service de réexpédition » apparaît préférable.
IV. ― Sur le niveau des objectifs de qualité de service
De manière générale, l'Autorité se réjouit de l'amélioration sensible et continue de la qualité de service de La Poste observée ces dernières années. Afin d'apprécier la portée des objectifs de qualité de service envisagés dans le projet d'arrêté qui lui a été transmis, l'Autorité a analysé la progression des résultats de qualité de service enregistrés par La Poste, notamment au regard des derniers résultats obtenus.
Pour la lettre Verte, les résultats de qualité de service obtenus en 2012 et au premier trimestre 2013 semblent traduire une stagnation de la qualité de service, voire un léger recul, au regard des résultats du premier trimestre 2013, qui peut être imputable aux évènements climatiques. En revanche, la qualité de service de la lettre prioritaire n'a cessé de croître depuis 2010, enregistrant une hausse de 4,5 points en trois ans. L'amélioration de la qualité de service est encore plus marquante en ce qui concerne la lettre recommandée qui a connu une hausse de près de 9 points entre 2010 et 2012 et a encore progressé au premier trimestre 2013.
De tels progrès réalisés par La Poste concernant la qualité de service des prestations du service universel sont de nature à encourager la fixation d'objectifs relativement ambitieux s'inscrivant dans cette trajectoire d'amélioration.
Concernant la lettre prioritaire
Pour la lettre prioritaire, le projet d'arrêté prévoit que le taux de distribution en J + 1 doit être supérieur à 85 %. Comme l'a souligné l'Autorité à plusieurs reprises, notamment dans le cadre de son avis n° 2011-1509 du 22 décembre 2011, et encore dernièrement, dans son avis n° 2013-0460 du 26 mars 2013 portant sur le projet de contrat d'entreprise, un objectif de 85 % n'apparaît pas en ligne avec la trajectoire de progrès de La Poste, notamment au regard des résultats atteints par La Poste en 2011 et 2012 (respectivement 87,3 % et 87,9 % de distribution en J + 1).
Concernant la lettre Verte
L'objectif de qualité de service fixé pour la lettre Verte est un taux de 93 % de distribution en J + 2. L'Autorité rappelle que, comme l'avait d'ailleurs annoncé La Poste lors de la création de cette nouvelle offre, la qualité de service de la lettre Verte doit, à terme, atteindre un niveau de 95 % de distribution en J + 2.
Toutefois, malgré de relativement bons résultats en 2012, avec un taux de 92,8 % de distribution en J + 2, le niveau de qualité de service de la lettre Verte marque un léger recul au premier trimestre 2013, atteignant 91,7 % de J + 2 contre 91,9 % au premier trimestre 2012. Ce recul, dont la portée doit être relativisée car il ne correspond qu'à un seul trimestre et à une période difficile au niveau climatique, traduit toutefois la nécessité d'assurer un suivi de la progression de la qualité de service de la lettre Verte au cours des prochains trimestres. Dans ce contexte, un objectif de 93 % de J + 2 apparaît acceptable pour 2013, sachant que ce taux devrait passer à 94 % en 2014 et 95 % en 2015, conformément au contrat d'entreprise 2013-2017.
Concernant la lettre recommandée
Le projet d'arrêté prévoit un objectif de 93 % de J + 2 pour la lettre recommandée en 2013. Au regard des importants progrès réalisés par La Poste concernant la qualité de service de la lettre recommandée, cet objectif pourrait être plus ambitieux. En effet, au cours des quatre derniers trimestres (1), le niveau moyen de qualité de service atteint par La Poste était de plus de 94,9 % de distribution en J + 2 ; il était de 95,5 % au premier trimestre 2013 contre 94,7 % au premier trimestre 2012, soit une hausse de 0,8 point.
L'Autorité rappelle également, comme elle l'avait souligné dans son avis n° 2012-1352 du 11 décembre 2012, que la fixation d'un objectif de qualité de service en J + 2 pour la lettre recommandée ne doit pas aboutir à une dégradation de sa qualité en J + 1. Sur ce point, l'Autorité constate avec satisfaction que le taux de distribution des lettres recommandées en J + 1 n'a pas diminué mais a au contraire connu une hausse, passant de 77,6 % au premier trimestre 2012 à 80,5 % au premier trimestre 2013.