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Article AUTONOME (Avis n° 2013-AC-2 du 29 juin 2013 de la Commission des participations et des transferts relatif à une cession de titres d'Aéroports de Paris)

Article AUTONOME (Avis n° 2013-AC-2 du 29 juin 2013 de la Commission des participations et des transferts relatif à une cession de titres d'Aéroports de Paris)



I. ― Par lettre du 3 juin 2013, le ministre de l'économie et des finances a saisi la commission, en application de l'article 3 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 modifiée, en vue de procéder à la cession, dans le cadre d'une procédure hors marché, de la participation de l'Etat excédant le seuil de la majorité du capital de la société Aéroports de Paris (ADP), à laquelle est invité à s'associer le Fonds stratégique d'investissement (FSI).
Le capital de la société Aéroports de Paris est réparti comme suit :
Etat français : 54,5 % ;
Fonds stratégique d'investissement : 5,6 % ;
Schiphol Group : 8 % ;
Investisseurs institutionnels : 23,6 % (le groupe Vinci déclare détenir 3,3 % du capital dans son rapport annuel 2012) ;
Investisseurs individuels : 6,6 % ;
Salariés : 1,7 %.
L'ouverture minoritaire du capital de la société Aéroports de Paris au secteur privé a été autorisée par le décret du 22 mai 2006 susvisé. Les cessions d'actions d'Aéroports de Paris sont réalisées dans le cadre du titre II de la loi du 6 août 1986 susvisée.
La procédure de cession consiste en une vente de gré à gré, sur base d'un cahier des charges, d'une fraction du capital d'ADP qui ne pourra pas être supérieure à 9,5 % au total. L'Etat continuera à détenir directement après l'opération (et l'offre aux salariés qui lui sera le cas échéant associée) la majorité du capital d'ADP.
Les objectifs de l'opération sont définis au point E du préambule du cahier des charges : « les Cédants [l'Etat et le FSI] entendent au premier chef optimiser leurs intérêts patrimoniaux, y compris de long terme, tout en veillant à préserver l'équilibre, la pérennité et la diversité de l'actionnariat de la Société, par la recherche d'actionnaires de long terme et, le cas échéant, susceptibles de conforter le développement de la Société, notamment par leur participation à sa gouvernance, dans le respect des accords de coopération conclus avec Schiphol. Ces éléments pourront être notamment appréciés sur la base des précisions apportées dans le cadre de l'Annexe 3 ».
Deux types d'offres sont proposées qui comportent l'engagement d'acquérir :
― pour l'offre A, un nombre d'actions compris entre 2 % et 4 % du capital d'ADP ;
― pour l'offre B, un nombre d'actions compris entre 4,5 % et 6 %. L'Etat s'engage à voter en faveur d'un représentant de l'acquéreur au conseil d'administration d'ADP. Tout candidat déposant une offre B doit avoir déposé une offre A et le prix par action de l'offre B doit être supérieur à celui de l'offre A.
Un même candidat ne peut être sélectionné que pour une seule offre et ne peut donc se voir attribuer plus de 6 % du capital d'ADP. Les acquéreurs s'engagent de plus à ne pas détenir pendant cinq ans plus de 8 % du capital d'ADP. Les titres acquis seront inaliénables pendant une durée minimale de six mois (offre A) ou de douze mois (offre B).
S'agissant d'une cession de gré à gré, le ou les acquéreurs sont sélectionnés, sur avis conforme de la commission, par le ministre sur la base d'un cahier des charges, conformément aux dispositions de l'article 1er (2°) du décret du 3 septembre 1993 susvisé. La commission a émis sur le cahier des charges l'avis conforme du 6 juin 2013 susvisé.
La commission a déterminé la valeur d'Aéroports de Paris, au sens de l'article 3 de la loi du 6 août 1986 susvisée, par son avis du 27 juin 2013 susvisé.
II. ― La procédure s'est déroulée selon les étapes établies par le cahier des charges :
a) Cinq sociétés ont déposé leur candidature au plus tard le 25 juin 2013 conformément à l'article 4 du cahier des charges :
Crédit Agricole Assurances ;
Norges Bank ;
RARE Infrastructure Limited ;
Industry Funds Management Pty Limited ;
Vinci.
Ces cinq candidats ont été déclarés recevables par le ministre de l'économie et des finances en application de l'article 4.3 du cahier des charges ;
b) Trois candidats ont déposé des offres d'achat le 28 juin 2013 conformément à l'article 7 du cahier des charges :
Norges Bank : une offre A ;
Vinci : une offre A et une offre B ;
Crédit Agricole Assurances : une offre A et une offre B.
III. ― La commission a examiné les dossiers présentés dans le cadre de leur offre par les trois candidats :
a) Norges Bank :
Norges Bank est la banque centrale de Norvège. En plus de ses missions monétaires, Norges Bank gère le Government Pension Fund Global (GPFG). Ce fonds souverain, constitué pour les générations futures et la distribution des pensions de retraite, gère environ 520 milliards d'euros investis pour 62 % en actions, 37 % en obligations (à 70 % en dette publique) et 1 % en immobilier. Norges Bank détient notamment 0,7 % d'ADP depuis l'introduction en bourse.
Norges Bank est un investisseur financier à long terme. En tant qu'actionnaire soutenant la stratégie et la direction d'ADP, Norges Bank souhaite saisir l'opportunité présente d'accroître sa participation dans ADP. Il déclare ne pas avoir de conflit d'intérêts ;
b) Vinci :
Vinci est un acteur mondial des métiers des concessions et de la construction. Le groupe a réalisé en 2012 un chiffre d'affaires de 38,6 milliards d'euros, dont 86 % dans la branche contracting (travaux publics, construction et ingénierie électrique) et 14 % dans la branche concessions (qui réalise 59 % du résultat opérationnel). Les fonds propres consolidés s'élèvent à 13,3 milliards d'euros.
La société SOC 15 est filiale intégrale de Vinci Airports, lui-même filiale intégrale de Vinci Concessions qui est filiale intégrale de Vinci.
Vinci détient des concessions dans de nombreux pays. Il est titulaire en France de la moitié du secteur autoroutier en concession et il détient en particulier le groupe ASF depuis le transfert de ce dernier au secteur privé en 2006. Dans le domaine aéroportuaire, Vinci est l'opérateur en France de dix aéroports de province sous forme de délégations de service public et à l'étranger sous forme de concessions au Cambodge (trois aéroports) et au Portugal (acquisition d'ANA avec dix aéroports). Vinci détient 3,3 % d'Aéroports de Paris.
Vinci entend conserver dans la durée sa participation. Il déclare souscrire aux axes de stratégie présentés par ADP. Il est disposé à discuter avec la société de coopérations plus approfondies, notamment dans le domaine des opérations de développement à l'international (acquisitions, prises de participation, nouveaux projets). Vinci est disposé à faire bénéficier ADP de son réseau international existant, de son expertise en construction et gestion de grandes infrastructures à l'étranger et de sa capacité à monter des financements adaptés pour de tels projets.
Vinci déclare ne pas avoir connaissance de conflits d'intérêts actuels avec le groupe ADP. Dans le cas où, à l'occasion de cette transaction, Vinci se verrait attribuer un siège au conseil d'administration d'ADP, Vinci ne participerait pas aux discussions au cours desquelles des présentations seraient faites et/ou des votes relatifs à des sujets où le groupe pourrait se trouver en situation de conflit d'intérêts ;
c) Crédit Agricole Assurances :
Crédit Agricole Assurances est le holding de tête du pôle assurances du groupe Crédit agricole et il est le premier bancassureur de France. Il est notamment l'entreprise mère de Predica (assurance vie) et de Pacifica (assurance non-vie), qui sont ses filiales intégrales.
Les en-cours de contrats gérés s'élèvent à 225 milliards d'euros et le chiffre d'affaires à 23 milliards. Les fonds propres consolidés sont de 10, 5 milliards. Crédit Agricole Assurances détient notamment 12 % de SANEF et est présent au conseil d'administration.
Le groupe Crédit agricole est le premier groupe bancaire français.
Crédit Agricole Assurances indique son intérêt particulier pour les infrastructures, actifs stables et résilients. Il privilégie en particulier les infrastructures de transport qui présentent un couple rendement-risque attrayant. Les caractéristiques et profil de risque des infrastructures répondent donc bien aux objectifs de gestion actif-passif d'un assureur. Crédit Agricole Assurances envisage un investissement de long terme dans ADP en appui de la stratégie de développement de la société et dans une logique partenariale. Il déclare ne pas avoir de conflit d'intérêts.
IV. ― Conformément à l'article 7.2 du cahier des charges, le ministre de l'économie et des finances, après allocation entre les candidats ayant formulé les offres les mieux-disantes, a adressé à la commission une proposition relative à la sélection des acquéreurs, au nombre des actions qui est alloué à chacun d'entre eux et au prix de cession :
SOC 15 (filiale intégrale de Vinci) : offre B pour 4 643 968 actions au prix de 78,5 € par action ;
Predica (filiale intégrale de Crédit Agricole Assurances) : offre B pour 4 757 291 actions au prix de 78,5 € par action.
La commission a examiné l'équilibre de cette proposition au regard des objectifs énumérés au cahier des charges. Elle a procédé à l'audition des sociétés concernées.
Les deux acquéreurs envisagés sont des groupes de premier plan, l'un dans les secteurs de la construction et des concessions, l'autre dans les secteurs de la banque et de l'assurance, et l'acquisition projetée s'inscrit pleinement dans leurs stratégies respectives d'investissement. Ils déclarent leur intention d'être des actionnaires de long terme d'Aéroports de Paris et de conforter le développement de la société. Leur sélection répond à l'objectif de préserver l'équilibre, la pérennité et la diversité de l'actionnariat d'ADP prévu au cahier des charges.
L'annexe 3 du cahier des charges prévoit la déclaration par le candidat à une offre B de l'existence éventuelle de conflits d'intérêts avec ADP et des mesures qu'il pourrait proposer pour y remédier. Le groupe Crédit Agricole Assurances n'a pas de raison d'anticiper de conflit d'intérêts. Le groupe Vinci, compte tenu de son activité déjà existante dans le secteur aéroportuaire, qui en fait au demeurant un partenaire qualifié, étant susceptible de se trouver pour certains projets en conflit d'intérêts avec ADP, prend les engagements usuels destinés à éviter de telles situations.
La commission note que l'allocation au groupe Vinci tient compte du plafond de 8 % mentionné à l'article 10 du cahier des charges.
S'agissant du prix de cession, la commission observe qu'il est supérieur au prix par action correspondant à la valeur de l'entreprise tel qu'il est énoncé dans l'avis n° 2013-A-5 susvisé dont le texte est annexé au présent avis (annexe 1). Le prix de l'offre fait apparaître une prime significative tant par rapport à la valeur susmentionnée que par rapport au cours de bourse, lui-même actuellement à son niveau le plus élevé depuis cinq ans. Ce résultat apparaît satisfaisant eu égard aux caractéristiques particulières de l'offre B.
Au total, la commission estime que la proposition du ministre atteint les objectifs visés par l'opération, tels qu'énumérés au point E du préambule du cahier des charges, et qu'elle respecte les intérêts patrimoniaux de l'Etat.
V. ― En conséquence, au regard de la procédure définie par le cahier des charges, des objectifs et des critères qui y sont mentionnés, la commission émet un avis favorable à la proposition ci-dessus décrite du ministre de l'économie et des finances relative à la sélection des acquéreurs, au nombre des actions qui est alloué à chacun d'entre eux et aux prix de cession ainsi qu'à l'arrêté du 3 juillet 2013 fixant les modalités de transfert au secteur privé d'une participation minoritaire détenue par l'Etat et le Fonds stratégique d'investissement au capital de la société Aéroports de Paris.
Adopté dans la séance du 29 juin 2013, où siégeaient MM. Bertrand SCHNEITER, président, Pierre ACHARD, Daniel DEGUEN, Philippe MARTIN, Philippe ROUVILLOIS et Jean SÉRISÉ, membres de la commission.