1. Exposé des faits et de la procédure
PÉRIMÈTRES géographiques |
DÉPLOIEMENTS HORS unités urbaines |
DÉPLOIEMENTS DANS les unités urbaines |
UTILISATION EFFECTIVE des fréquences au 30 juin 2012 (déploiements d'un site par département, avec ouverture commerciale) |
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---|---|---|---|---|---|---|
Nombre de sites déployés au 30 juin 2012 |
Nombre de sites devant être déployés au 30 juin 2012 |
Nombre de sites déployés au 30 juin 2012 |
Nombre de sites devant être déployés au 30 juin 2012 |
Respect |
Non-respect |
|
Basse-Normandie |
46 |
35 |
0 |
7 |
Calvados, Manche, Orne |
|
Centre |
1 |
35 |
0 |
23 |
Eure-et-Loir |
Cher, Indre, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Loiret |
Franche-Comté |
46 |
31 |
0 |
8 |
Doubs, Jura |
Territoire de Belfort, Haute-Saône |
Lorraine |
81 |
66 |
0 |
23 |
Meurthe-et-Moselle, Meuse, Vosges |
Moselle |
Midi-Pyrénées |
125 |
82 |
0 |
21 |
Ariège, Aveyron, Haute-Garonne, Lot, Tarn-et-Garonne |
Gers, Hautes-Pyrénées, Tarn |
Nord - Pas-de-Calais |
1 |
26 |
1 |
70 |
Nord, Pas-de-Calais |
|
Pays de la Loire |
23 |
48 |
0 |
28 |
Loire-Atlantique, Vendée |
Maine-et-Loire, Mayenne, Sarthe |
Deux-Sèvres |
47 |
22 |
0 |
1 |
Deux-Sèvres |
|
Rhône-Alpes |
7 |
77 |
0 |
69 |
Ain, Drôme, Isère, Loire, Rhône, Savoie, Haute-Savoie |
Ardèche |
2. Observations de la société Altitude Wireless
DÉPARTEMENTS |
ÉCHÉANCE |
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---|---|---|---|
Hautes-Pyrénées, Sarthe, Maine-et-Loire |
Fin 2012 : mise à disposition [...] |
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Gers, Aube, Marne, Tarn |
2014 : réalisation d'au moins une BS dans le cadre de la mise en œuvre des SDAN |
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Moselle |
2013 : réalisation d'au moins une BS |
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Indre-et-Loire |
2013 : réalisation d'au moins une BS |
3. Analyse de l'Autorité sur les déploiements
Il résulte de l'état des lieux des déploiements au 30 juin 2012, tel que présenté dans la partie 1, que la société a commis des manquements à ses obligations dans le département des Deux-Sèvres et les dix régions suivantes : Auvergne, Champagne-Ardenne, Basse-Normandie, Centre, Franche-Comté, Lorraine, Midi-Pyrénées, Nord - Pas-de-Calais, Pays de la Loire et Rhône-Alpes.
L'Autorité considère que de tels manquements, dont la réalité n'est pas contestée par la société, ont des conséquences dommageables sur la bonne utilisation du domaine public hertzien de l'Etat à laquelle l'Autorité est tenue de veiller en vertu de l'article L. 32-1 du CPCE.
De plus, en matière de services fixes, et sans qu'il soit question d'imposer un choix technologique particulier aux titulaires, l'Autorité constate que des technologies existent (des stations de base et des terminaux sont utilisés en Wimax), des équipements sont commercialisés et déployés (dont certains sont compatibles Wimax et LTE, permettant le passage d'une technologie à l'autre) et une offre de service est disponible.
Si la société n'estime pas faisable ou trop risqué économiquement de respecter ses engagements de déploiement au vu d'un écosystème qu'elle juge défavorable, elle garde la possibilité de demander à l'Autorité l'abrogation de ses autorisations sur l'ensemble ou une partie seulement du territoire sur lequel elle est autorisée. Plusieurs titulaires qui ont estimé ne pas avoir de projet de déploiement suffisamment concret l'ont d'ailleurs fait.
Dès lors, les difficultés dont la société se prévaut ne sont pas de nature à l'exonérer des obligations qui s'imposent à elle en vertu des autorisations qui lui ont été attribuées.
Toutefois, il convient de tenir compte des éléments d'appréciation suivants.
En premier lieu, il est apparu que l'écosystème de la boucle locale radio s'est avéré globalement défavorable. En effet, comme le directeur général le reconnaissait dans sa décision de mise en demeure du 21 novembre 2011 : « le déploiement à ce jour uniquement partiel des réseaux de boucle locale radio par la société Altitude Wireless peut s'expliquer en partie par le décalage significatif, subi par les acteurs de ce marché, entre la réalité technico-économique et les prévisions faites lors des procédures d'attribution des autorisations de boucle locale radio. »
En deuxième lieu, et malgré cet écosystème globalement défavorable, le groupe Altitude auquel est adossée la société Altitude Wireless rappelle qu'il a réalisé des investissements significatifs pour déployer le réseau Wimax de sa filiale sur l'ensemble des territoires sur lesquels elle est autorisée (de l'ordre de 43 millions d'euros sur fonds propres).
A cet égard, il convient de relever que la société a consenti des efforts, même s'ils restent insuffisants et devront être poursuivis, pour déployer un réseau de boucle locale radio de la bande 3,4-3,6 GHz dans un certain nombre de territoires sur lesquels elle est autorisée, notamment hors des unités urbaines, et ce dans un objectif d'aménagement du territoire. Dans les territoires où elle a réalisé des déploiements, la société a mis en œuvre des projets de service fixe, conformément aux obligations figurant dans ses autorisations.
Ainsi, s'agissant des autorisations dans le département des Deux-Sèvres et dans les régions Basse-Normandie, Franche-Comté, Lorraine et Midi-Pyrénées, la société Altitude Wireless respecte, au 30 juin 2012, à plus de 75 % son obligation régionale de déploiement en nombre de sites, étant précisé que les sites manquants se situent exclusivement dans les unités urbaines de plus de 50 000 habitants. De plus, dans ce département et ces quatre régions, la société satisfait à son obligation départementale de déploiement en faisant une utilisation effective de ses fréquences dans 14 départements sur 20 (soit 3 départements de plus par rapport au jour de la mise en demeure).
En revanche, s'agissant des régions Auvergne, Centre, Champagne-Ardenne, Nord - Pas-de-Calais, Pays de la Loire et Rhône-Alpes, l'Autorité constate qu'il manque sur ces territoires entre 70 % et 100 % des sites que la société Altitude Wireless devait avoir déployés pour le 30 juin 2012 conformément à son obligation régionale de déploiement, et ne satisfait à son obligation départementale de déploiement en faisant une utilisation effective de ses fréquences que dans 12 départements sur 29.
Il convient néanmoins de noter que la société a consenti, depuis la mise en demeure, des efforts de déploiements sur ces six régions qui, même s'ils restent largement insuffisants, se sont traduits par le déploiement d'un site par département dans 10 départements de plus, ce qui lui a notamment permis de respecter, au 30 juin 2012, son obligation d'utilisation effective des fréquences dans la région Nord - Pas-de-Calais.
En troisième lieu, il n'est pas contestable que la société a consenti des efforts, à l'issue de la décision de mise en demeure, pour proposer à un grand nombre de collectivités et autres acteurs de mettre ses fréquences à leur disposition et que peu d'acteurs se sont montrés intéressés par les fréquences concernées.
En quatrième lieu, il ressort des observations écrites et orales de la société Altitude Wireless une volonté de poursuivre son projet de boucle locale radio sur certains des territoires couverts par ses autorisations : non seulement ceux sur lesquels elle a d'ores et déjà réalisé des déploiements, mais également ceux sur lesquels elle n'en a, à ce jour, réalisé aucun, mais fait état de projets à court ou moyen terme.
A ce titre, pour 9 des 23 départements dans desquels elle n'a déployé aucun site au 30 juin 2012, la société s'engage à :
― déployer et ouvrir commercialement au moins un site d'ici 2013 dans le département de la Moselle (la société indique que le groupe Altitude est présent sur ce territoire dans le cadre de l'établissement de plusieurs réseaux d'initiative publique et des solutions hertziennes sont nécessaires et impliquent une utilisation de ses fréquences) et dans le département d'Indre-et-Loire (la société estime que « ce territoire offre de fortes perspectives d'utilisation des technologies radios pour améliorer l'accès au haut débit ») ;
― mettre à disposition ses fréquences [...] dans les départements des Hautes-Pyrénées, de Maine-et-Loire et de la Sarthe, d'ici à la fin de l'année 2012 (la société justifie ce projet de mise à disposition en indiquant que [...] ; elle précise que les discussions sont à un stade avancé et un accord est en cours de finalisation) ;
― accompagner des projets de montée en débit par voie hertzienne figurant dans les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique (SDTAN) dans les départements du Gers, du Tarn, de l'Aube et de la Marne, pour assurer dans ce cadre, d'ici à 2014, le déploiement d'au moins un site par département.
Il ressort ainsi des éléments prospectifs dont la société fait état une volonté ferme de sa part de satisfaire, à court terme, à son obligation départementale d'utilisation effective des fréquences.
L'Autorité note que, si les engagements pris par la société sur les 9 départements précités n'ont pas vocation à lui permettre de satisfaire à court ou moyen terme à son obligation régionale de déploiement en nombre de sites, il y a lieu toutefois, eu égard à l'écosystème globalement défavorable de la boucle locale radio et s'agissant spécifiquement du contrôle de la première échéance de la mise en demeure du 21 novembre 2011, de tenir compte des engagements pris par la société sur ces 9 départements, lesquels permettent d'attester de la crédibilité de déploiements futurs à court terme. L'Autorité sera attentive à la réalisation de ces déploiements et à la poursuite des projets de la société. Elle note à cet égard que la société Altitude Wireless indique renoncer au droit d'utiliser les fréquences sur les territoires concernés s'il est constaté que ces projets restent trop indéfinis.
En cinquième lieu, la société s'engage à restituer à l'Autorité les fréquences qui lui ont été attribuées dans 14 des 23 départements dans lesquels elle n'a, à ce jour, déployé aucun site et n'a aucun projet futur, à savoir :
― l'ensemble des fréquences de boucle locale radio de la bande 3,4-3,6 GHz dont elle est titulaire dans la région Auvergne (restitution des fréquences dans les départements Allier, Cantal, Haute-Loire et Puy-de-Dôme) ; et
― une partie de celles dont elle titulaire dans les régions Franche-Comté (restitution des fréquences dans les départements du Territoire de Belfort et de la Haute-Saône), Champagne-Ardenne (restitution des fréquences dans les départements des Ardennes et de la Haute-Marne), du Pays de la Loire (restitution des fréquences dans le département de la Mayenne), du Centre (restitution des fréquences dans les départements du Cher, de l'Indre, de Loir-et-Cher et du Loiret), et Rhône-Alpes (restitution des fréquences dans le département Ardèche).
L'Autorité prend note que la société est disposée à « renoncer, sans délai, aux licences d'utilisation de fréquences » qui lui ont été accordées dans ces 14 départements. Mais elle considère que la demande formulée par la société, tendant à ce que « l'ARCEP renonce définitivement à toute poursuite envers [elle] au titre du respect des engagements de déploiement » sur les départements pour lesquels elle souhaite conserver un droit d'utilisation des fréquences, est dénuée de toute fondement et qu'elle ne peut donc qu'être rejetée.
En effet, les obligations de déploiement inscrites dans les autorisations d'utilisation de fréquences susvisées, délivrées à la société Altitude Wireless, sont maintenues et la présente décision est sans préjudice de l'attention que l'Autorité continuera de porter sur le respect de ces obligations par le titulaire.
Au vu des éléments qui précèdent, l'Autorité considère qu'il n'y a pas lieu de sanctionner la société Altitude Wireless sur le fondement de l'article L. 36-11 du CPCE pour les manquements constatés au respect des prescriptions de déploiement fixées par la première échéance de la décision de mise en demeure du directeur général de l'Autorité, dans le département des Deux-Sèvres et les 11 régions pour lesquelles elle est titulaire d'autorisations d'utilisation de fréquences dans la bande 3,4-3,6 GHz.
L'Autorité veillera au respect par la société des engagements pris ainsi qu'à la poursuite de ses déploiements.
Il convient de préciser que la société Altitude Wireless peut remplir ses obligations de déploiement par un déploiement en propre de sites équipés de stations de bases. La société peut également atteindre ses obligations en mettant à disposition ses fréquences à des opérateurs tiers, notamment des collectivités territoriales ou des opérateurs délégataires de ces dernières, sous réserve que ceux-ci puissent exploiter de façon durable et sécurisée un réseau de boucle locale radio. Elle peut aussi s'appuyer, le cas échéant, sur des accords de mutualisation de réseau ou de fréquences conclus avec d'autres titulaires d'autorisations d'utilisation de fréquences pour le déploiement de réseaux de boucle locale radio dans la bande 3,4-3,6 GHz dans les zones concernées.
4. Analyse de l'Autorité sur le paiement des redevances
4.1. Sur le non-respect par la société Altitude Wireless
de la mise en demeure
En vertu des dispositions du cahier des charges annexé à chacune des décisions d'autorisation susvisées, la société est tenue de se conformer à l'obligation d'acquittement des redevances annuelles de gestion et de mise à disposition des fréquences, instituées par le décret n° 2007-1531 du 24 octobre 2007, et dont les montants sont déterminés, pour la redevance de gestion, conformément à l'article 13 du décret n° 2007-1532 du 24 octobre 2007 et, pour la redevance de mise à disposition des fréquences, conformément aux articles 4 et 6 du même décret.
Il ressort des éléments de l'instruction que la société Altitude Wireless n'a apporté, au 30 juin 2012, aucun élément permettant de justifier du paiement de la redevance de gestion pour les années 2008 à 2011 et de la redevance de mise à disposition pour les années 2008, 2009 et 2011.
Elle ne s'est donc pas conformée aux obligations prévues par la mise en demeure du directeur général de l'Autorité en date du 21 novembre 2011.
4.2. Sur les justifications apportées par la société Altitude Wireless
Dans son courrier, enregistré le 25 juillet 2012, relatif à l'état de paiement, au 30 juin 2012, des redevances de gestion et de mise à disposition des fréquences dues, la société Altitude Wireless indique que, pour la redevance de gestion à payer au 30 juin 2012 au titre des années 2008 à 2011 et pour la redevance de mise à disposition à payer à cette même date au titre des années 2008, 2009 et 2011 : « la juridiction administrative est saisi d'un recours en annulation, les obligations de paiement sont donc suspendues ».
Mais l'Autorité estime que « les recours en annulation », auxquels la société Altitude Wireless fait référence et qui semblent correspondre aux recours en opposition qu'elle a formés contre les ordres de paiement et titres de perception émis pour ces redevances, n'ont pas l'effet que la société leur prête. De tels recours ont pour seul effet de suspendre le recouvrement forcé des créances concernées, sans suspendre leur exigibilité, laquelle a été constatée par les ordres de paiement et titres de perception émis, et sans préjudice de la mise en œuvre par l'ARCEP des pouvoirs qu'elle tire de l'article L. 36-11 du CPCE. Ces recours n'exonèrent donc pas la société de l'obligation qui est la sienne de s'acquitter de sa dette à compter de la réception des ordres de paiement émis par l'ordonnateur de l'ARCEP et, par suite, de se conformer à l'obligation lui incombant en vertu de ses autorisations d'utilisation de fréquences.
Or la société n'a fourni, à la date du 30 juin 2012, aucun justificatif pertinent permettant d'attester du paiement des redevances dues au jour de la mise en demeure, soit un montant de 1 220 970,85 euros pour la redevance de gestion et un montant de 484 926,02 euros pour la redevance de mise à disposition.
Par ailleurs, l'Autorité considère qu'il y a lieu d'écarter la demande, dénuée de tout fondement, formulée par la société dans son courrier du 5 novembre 2012, enregistré le 8 novembre, tendant à ce que « la part de ces redevances non réglée et liée aux 14 départements auxquels [elle] renoncer[rait] soit annulée à compter de la date d'attribution desdites autorisations d'utilisation ».
4.3. Conclusion
L'Autorité estime, au vu des faits et des motifs exposés ci-avant, qu'il y a lieu de sanctionner la société Altitude Wireless pour avoir manqué à son obligation de justifier, au 30 juin 2012, du respect de l'obligation d'acquittement des sommes dues au titre des redevances de gestion et de mise à disposition des fréquences, prévue au cahier des charges annexé à chacune des décisions d'autorisation susvisées.
Aux termes du 2° de l'article L. 36-11 du CPCE : « 2° Lorsqu'un exploitant de réseau ou un fournisseur de services ne se conforme pas dans les délais fixés à une décision prise en application de l'article L. 36-8, à la mise en demeure prévue au 1° du présent article ou aux obligations intermédiaires dont elle est assortie l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut prononcer à son encontre une des sanctions suivantes : [...] b) Soit, si le manquement n'est pas constitutif d'une infraction pénale : ― une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 3 % du chiffre d'affaires hors taxes du dernier exercice clos, taux porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation [...] ».
Le chiffre d'affaires de la société Altitude Wireless en 2011 atteignait 640 000 euros et l'avantage économique retiré par la société du non-paiement de ces redevances, ne serait-ce qu'en termes de facilité de trésorerie, est très supérieur au montant correspondant au 3 % de ce chiffre d'affaires.
Il résulte de tout ce qui précède que, eu égard à la gravité du manquement constaté et aux conséquences dommageables pour l'exercice d'une concurrence effective et loyale entre les titulaires d'autorisations d'utilisation de fréquences de boucle locale radio de la bande 3,4-3,6 GHz liées au non-paiement par la société de redevances que les autres titulaires payent, il y a lieu de prononcer à l'encontre de la société Altitude Wireless une sanction de 19 000 € correspondant à 3 % de son chiffre d'affaire pour 2011.
Décide :