SOMMAIRE
1. Introduction
1.1. Processus d'analyse des marchés
1.2. Démarche suivie par l'Autorité
1.3. Durée d'application de la décision
1.4. Cadre d'analyse et définition des termes employés
1.4.1. Le haut débit fixe
1.4.1. Le haut débit fixe
1.4.2. Le très haut débit fixe
1.4.3. Marché de gros des offres activées haut débit et très haut débit livrées au niveau infranational
2. Définition du marché pertinent
2.1. Délimitation du marché en termes de produits et services
2.1.1. Principes
2.1.2. Analyse de substituabilité
2.1.2.1. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit activées livrées en IP, en ATM ou en Ethernet
2.1.2.2. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit activées utilisant la technologie DSL et celles fondées sur la fibre
2.1.2.3. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit activées utilisant la technologie DSL et celles fondées sur le câble coaxial
2.1.2.4. Substituabilité entre les offres destinées à la clientèle résidentielle et les offres destinées à la clientèle professionnelle
2.1.2.5. Substituabilité entre les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées à la clientèle professionnelle et les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées au raccordement d'éléments de réseau
2.1.2.6. Substituabilité entre les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées au raccordement d'éléments de réseau et les offres de gros d'accès haut débit activées sur faisceau hertzien
2.1.2.7. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational et celles livrées au niveau national
2.1.2.8. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit activées et les offres d'accès passives
2.1.2.9. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit activées fondées sur les réseaux filaires et les offres fondées sur les technologies d'accès hertziennes terrestres de type WiMAX, Wi-Fi, satellitaires ou les courants porteurs en ligne
2.2. Délimitation géographique du marché
2.2.1. Principes
2.2.2. Analyse fondée sur le déploiement et l'extension des réseaux
2.3. Pertinence du marché au regard de la régulation sectorielle
2.4. Conclusion
3. Désignation d'un opérateur exerçant une influence significative
3.1. Principes généraux relatifs à la détermination des conditions caractérisant une situation d'influence significative sur un marché
3.2. Analyse de l'Autorité
3.2.1. Indicateurs quantitatifs
3.2.1.1. Description des offres existantes
3.2.1.2. Eléments chiffrés
3.2.2. Critères qualitatifs
3.2.2.1. La taille de l'entreprise et le contrôle d'une infrastructure qu'il n'est pas facile de dupliquer
3.2.2.2. L'intégration verticale de France Télécom et l'existence d'économies d'échelle
3.2.2.3. L'absence de concurrence potentielle
3.2.3. Conclusion
4. Obligations imposées à l'opérateur exerçant une influence significative pour les offres de gros haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational
4.1. Principes généraux relatifs à la détermination des obligations imposées à l'opérateur exerçant une influence significative sur un marché
4.2. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès
4.2.1. Obligation générique
4.2.1.1. Obligation générique de faire droit aux demandes raisonnables d'accès
4.2.1.2. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès pour le haut débit
4.2.1.3. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès pour le très haut débit
4.2.1.4. Cas des infrastructures dont France Télécom n'est pas propriétaire
4.2.1.5. Conclusion
4.2.2. Précision de l'obligation
4.2.2.1. Prestations existantes
4.2.2.2. Les interfaces de collecte
4.2.2.3. Niveau de livraison
4.2.2.4. Offres d'accès haut débit activées avec service de téléphonie commutée et sans service de téléphonie commutée
4.2.2.5. Offre professionnelle et offre résidentielle
4.2.2.6. Offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée par transfert de ligne avec conservation du numéro
4.2.2.7. Offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée par reprise de ligne et par création de ligne
4.2.2.8. Offre monocanaux et bi-canaux pour la voix sur large bande
4.2.2.9. Offre permettant de fournir des services de télévision en Ethernet
4.2.2.10. Raccordement des éléments de réseaux distants
4.2.2.11. Migrations inter- et infra-offres
4.2.2.12. Colocalisation des équipements et raccordement des réseaux
4.2.2.13. Informations préalables
4.3. Obligation de fournir l'accès dans des conditions non discriminatoires
4.4. Obligation de transparence et de publication d'informations concernant l'accès
4.4.1. Publication d'informations préalables
4.4.2. Publication des indicateurs de qualité de service
4.4.3. Publication des spécifications techniques d'interface
4.4.4. Publication d'une offre de référence technique et tarifaire d'accès
4.4.4.1. Obligation générique
4.4.4.2. Eléments de l'offre de référence
4.4.4.3. Evolution de l'offre de référence
4.4.5. Transmission d'informations à l'ARCEP
4.4.6. Communication pour information
4.4.7. Transmission des conventions
4.5. Qualité de service
4.5.1. Publication d'indicateurs de qualité de service
4.5.2. Processus opérationnels efficaces et non discriminatoires
4.5.3. Engagement de niveau de qualité de service
4.5.4. Qualité des accès livrés
4.6. Obligation de contrôle tarifaire
4.6.1. Sur le segment des offres à destination d'une clientèle résidentielle
4.6.1.1. Tarification reflétant les coûts dans la zone où France Télécom est le seul opérateur proposant des offres de gros haut débit activées
4.6.1.2. Pas d'obligation tarifaire dans la zone où France Télécom n'est pas le seul opérateur proposant des offres de gros haut débit activées
4.6.2. Sur le segment des offres à destination d'une clientèle professionnelle
4.6.2.1. Tarification reflétant les coûts
4.6.2.2. Proscription des tarifs d'éviction
4.6.3. Suivi des obligations de contrôle tarifaire
4.6.4. Révision annuelle des périmètres des zones géographiques
4.6.5. Cas des zones où France Télécom n'est ni propriétaire ni gestionnaire de la boucle locale
4.7. Obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable
5. Révision anticipée du cadre de régulation
6. Avis de l'Autorité de la concurrence
6.1. Sur la délimitation des marchés pertinents
6.2. Sur le caractère régulable de ces marchés
6.3. Sur les conséquences relatives à la régulation de la fibre optique
7. Commentaires des autorités réglementaires nationales et observations de la Commission européenne
7.1. Sur l'absence de mesures correctrices imposées sur la base de la puissance de marché pour les infrastructures en fibre
7.2. Sur la nécessité d'apprécier de manière appropriée les différences entre les conditions concurrentielles existant dans les zones géographiques et d'imposer ou d'adapter la régulation imposée sur la base de la puissance de marche
7.3. Sur l'exclusion du câble du marché de gros de l'accès à large bande
7.4. Sur le caractère approprié de l'interdiction des tarifs d'éviction et les exigences de notification en matière d'obligation de contrôle tarifaire
7.5. Prise en compte des observations de la Commission européenne surl'absence de mesures correctrices imposées sur la base de la puissance de marché pour les infrastructures en fibre
1. INTRODUCTION
Dans les développements ci-après, l'Autorité procède à :
― la délimitation du périmètre du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, en termes de services et en termes géographiques ;
― l'analyse de l'état de la concurrence et de son évolution prévisible sur le marché puis la désignation, le cas échéant, du ou des opérateurs y exerçant une influence significative ;
― la détermination des obligations imposées à l'opérateur exerçant une influence significative sur le marché.
1.1. Processus d'analyse des marchés
Le processus d'analyse des marchés consiste, conformément aux dispositions de l'article 7 de la directive « cadre » et des articles L. 37-1 et suivants du code des postes et des communications électroniques (CPCE) :
― à définir les contours d'un marché et à déterminer si ses caractéristiques en termes de développement de la concurrence justifient l'imposition d'un dispositif de régulation spécifique ;
― à désigner, le cas échéant, les opérateurs disposant sur ces marchés d'une influence significative ;
― à fixer les obligations spécifiques, adaptées et proportionnées aux problèmes concurrentiels constatés.
L'analyse menée par l'Autorité vise, en vertu des articles L. 37-1 et suivants du CPCE, à analyser l'état et l'évolution prévisible de la concurrence sur ces marchés et à en déduire les conséquences en termes d'obligations réglementaires.
Dans ce cadre, et conformément aux articles L. 37-3 et D. 301 du même code, l'Autorité recueille l'avis de l'Autorité de la concurrence, soumet son projet de décision à consultation publique et le notifie à la Commission européenne, à l'Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) et aux autorités réglementaires nationales des autres Etats membres.
Au terme du précédent cycle d'analyse de marché correspondant au processus décrit ci-dessus, l'Autorité a adopté les décisions n° 2008-0835 et n° 2008-0836 le 24 juillet 2008 et a ainsi mis en place une régulation ex ante respectivement sur le marché de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire et sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
L'Autorité mène ici l'analyse du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, ou la « fourniture en gros d'accès à large bande ». Il s'agit du cinquième marché listé en annexe de la recommandation C(2007)5406 de la Commission européenne en date du 17 décembre 2007. La révision de cette analyse du marché a été avancée de quelques mois afin de tenir compte des évolutions récentes constatées sur ce marché.
Conformément à l'article 7 de la directive « cadre » et à l'article L. 37-1 du CPCE, l'Autorité étudie la délimitation de ce marché, désigne le cas échéant le (ou les) opérateur(s) y exerçant une influence significative et, enfin, au regard des problèmes et obstacles au développement de la concurrence, impose les obligations nécessaires et proportionnées.
1.2. Démarche suivie par l'Autorité
L'Autorité a mené, à l'été 2010, une première consultation publique portant sur son projet d'analyse des marchés du haut débit et du très haut débit, à laquelle quinze acteurs ont répondu. Une synthèse des réponses à cette consultation publique a été publiée le 24 janvier 2011.
A l'issue de cette première consultation publique, l'Autorité a fait évoluer son projet d'analyse des marchés du haut débit et du très haut débit et l'a soumis, pour avis, à l'Autorité de la concurrence le 24 janvier 2011. Les principaux points de l'avis (1) de l'Autorité de la concurrence sont synthétisés à la fin de la présente décision.
A la suite de l'avis de l'Autorité de la concurrence, l'Autorité a fait évoluer une nouvelle fois son projet d'analyse des marchés du haut débit et du très haut débit et a soumis ses projets de décision pour notification à la Commission européenne et aux autorités réglementaires nationales le 26 avril 2011. A l'issue de la consultation publique lancée en parallèle de la notification, l'Autorité n'a reçu qu'une réponse, de la part du groupe France Télécom. Les principaux points des observations (2) de la Commission européenne sont synthétisés à la fin de la présente décision.
La présente décision tient compte des observations de la Commission européenne et, plus généralement, de l'ensemble des observations formulées par les acteurs lors des processus de consultation.
1.3. Durée d'application de la décision
Conformément aux prescriptions de l'article D. 301 du CPCE, l'Autorité peut déclarer un marché pertinent « pour une durée maximale de trois ans ». L'Autorité doit réviser son analyse de sa propre initiative « lorsque l'évolution de ce marché le justifie », ou encore « dès que possible après la modification de la recommandation de la Commission européenne » précitée. En outre, en vertu des articles D. 302 et D. 303 du même code, les décisions déterminant l'existence d'une influence significative et imposant aux opérateurs des obligations sont réexaminées dans les mêmes conditions.
La présente analyse porte sur une durée de trois ans. L'Autorité s'est attachée à effectuer une analyse prospective du marché sur cette période et considère que la mise en œuvre d'une régulation de ce marché pendant une durée de trois ans est pertinente, au regard de l'absence d'évolution prévisible vers une situation de concurrence effective.
En tant que de besoin, par exemple en cas d'évolution significative de la structure du marché ou de ses acteurs, l'Autorité pourra toutefois effectuer une nouvelle analyse avant la fin de la période envisagée et, le cas échéant, prendre de nouvelles décisions.
A l'issue du présent processus d'analyse, l'Autorité adopte donc des décisions qui s'appliqueront pour une période de trois ans à compter du jour de la publication de la décision au Journal officiel de la République française.
1.4. Cadre d'analyse et définition des termes employés
1.4.1. Le haut débit fixe
Il est entendu par « offres de haut débit fixe », ci-après « offres haut débit », les produits de détail offrant une capacité de transmission de données à haut débit en situation fixe. Ces offres permettent d'accéder aux applications et services les plus répandus sur Internet, mais également, pour les utilisateurs professionnels, d'interconnecter des sites et de fournir un lien de transmission supportant une offre agrégée de services. Ceci correspond à ce jour à un débit nominal supérieur ou égal à 512 kbit/s.
Les technologies DSL, déployées sur la boucle locale cuivre, sont aujourd'hui les technologies les plus répandues pour la fourniture d'accès haut débit, et représentaient 19,7 millions d'accès haut débit au 31 décembre 2010. L'utilisation des fréquences hautes de la paire de cuivre, rendue possible grâce aux technologies DSL, permet la fourniture à l'abonné de multiples services tels que l'accès à l'Internet haut débit, la voix sur large bande ou encore la télévision. Compte tenu de l'affaiblissement des signaux DSL avec la longueur de la boucle locale cuivre, le débit disponible en DSL n'est pas le même aujourd'hui pour tous les abonnés. En particulier, les paires de cuivre les plus longues ne peuvent être activées en DSL, ce qui représente aujourd'hui près de 1,5 % des foyers.
Le haut débit par câble coaxial, disponible dans les zones d'emprise des réseaux câblés, représente aujourd'hui la deuxième technologie la plus répandue, avec 1 075 000 million d'accès au 31 décembre 2010.
D'autres technologies peuvent également être utilisées pour la fourniture d'accès haut débit, comme les réseaux hertziens utilisant des technologies de type Wi-Fi, la boucle locale radio WIMAX, les réseaux de satellites ou encore le réseau de distribution électrique (courants porteurs en ligne). Le nombre d'accès haut débit activés fondés sur ces technologies reste à ce jour très limité, avec environ 50 000 accès.
Le marché du haut débit s'est principalement développé en France grâce à la possibilité donnée aux opérateurs de communications électroniques alternatifs de dégrouper la boucle locale cuivre de France Télécom. Le secteur a ainsi connu une croissance très forte du nombre d'accès haut débit, portée par le dégroupage. En termes de nombre d'accès et de taux de pénétration du haut débit, la France se place au-dessus de la moyenne des grands pays européens. Pour la part d'accès haut débit DSL en dégroupage, la France est dans le peloton de tête, en Europe comme au niveau mondial. Le dégroupage couvre désormais plus de 80 % de la population.
Les opérateurs et fournisseurs de services proposent aujourd'hui des offres haut débit avec des déclinaisons adaptées à la clientèle résidentielle et à la clientèle professionnelle. Des services spécifiques sont commercialisés en faveur de cette dernière, notamment en termes de débits (débits élevés et garantis, connexions symétriques) et de niveau de qualité de service (temps d'intervention et de rétablissement garanti). Ces services peuvent également être utilisés au raccordement d'éléments de réseau (BTS, hotspots Wi-Fi, femtocells, etc.).
Sur le marché résidentiel, les offres de détail haut débit peuvent se limiter au seul accès à Internet ou donner en outre l'accès à un ensemble de services multimédia comprenant des services diversifiés tels que la téléphonie en voix sur large bande, voire l'accès à un bouquet de chaînes et la vidéo à la demande dans les zones concernées par le dégroupage. Là où il est techniquement possible, les offres « multiservices » ou « triple play » se sont généralisées.
1.4.2. Le très haut débit fixe
Le très haut débit est une notion éminemment relative à la notion actuelle de haut débit, compte tenu de l'amélioration et de l'enrichissement des offres et des usages permis par le très haut débit par rapport au haut débit actuel. La notion de très haut débit ne dépend pas a priori uniquement des seuls débits descendants et remontants des offres d'accès. Néanmoins, par souci d'illustration, en cohérence avec les seuils de débits retenus dans l'observatoire des marchés haut et très haut débit de l'Autorité et sans préjudice d'une définition ultérieure plus fine du très haut débit, il est ici entendu par « offres très haut débit fixe », ci-après « offres très haut débit », les offres de services de communications électroniques en situation fixe proposées sur le marché de détail avec un débit crête descendant supérieur à 50 Mbit/s et un débit crête remontant supérieur à 5 Mbit/s, incluant un service d'accès à Internet ou un service d'interconnexion de sites.
Il existe une appétence des consommateurs pour des services toujours plus innovants, nécessitant des débits de plus en plus élevés, ce qu'illustrent notamment le succès des offres de télévision par ADSL, l'essor de la vidéo à la demande, le développement de nouveaux usages sur le web, la croissance des échanges de pair à pair entre communautés d'internautes, la connexion à domicile de multiples terminaux fixes et mobiles et l'équipement progressif des ménages en écrans de télévision haute définition.
Les offres haut débit actuelles sont limitées en bande passante, notamment sur la voie remontante, ce qui peut constituer un frein au développement de certains nouveaux usages. Seul le très haut débit reposant sur la technologie fibre optique est à même de répondre, à terme, par des débits nettement supérieurs, aux nouvelles attentes des consommateurs en favorisant le développement de services enrichis, notamment dans le domaine de l'audiovisuel (ex. : haute définition d'excellente qualité sans contrainte de longueur de ligne, télévision en 3D) ou pour des usages nécessitant un débit plus symétrique de type « user generated content » (ex. : blogs, mise en ligne de vidéos et de photos ou sauvegarde des contenus personnels sur des serveurs externes).
Sur un plan technologique, le déploiement du très haut débit consiste à rapprocher la fibre de l'abonné. Une première option consiste à réutiliser une partie des réseaux en cuivre ou en câble coaxial sur la partie terminale, la plus proche des abonnés. C'est le choix retenu par le câblo-opérateur qui a engagé un plan de déploiement de fibre optique jusqu'au niveau du dernier amplificateur de son réseau de câble coaxial (FttLA : Fibre to the Last Amplifier), ce qui lui permet aujourd'hui, sur la base de la technologie DOCSIS3.0, d'offrir un débit descendant de 100 Mbit/s. Les autres opérateurs ont fait le choix de déployer leurs réseaux en fibre optique jusqu'à l'abonné (FttH : Fibre to the Home), ce qui leur permet d'offrir aujourd'hui 100 Mbit/s à chaque abonné en débit montant et descendant (débit symétrique). En outre, dans le cas de l'accès à la sous-boucle cuivre, qui suppose le déploiement de fibre optique jusqu'au sous-répartiteur, l'introduction de la technologie VDSL2 pourrait permettre d'atteindre des débits descendants de l'ordre de 30 à 40 Mbit/s pour les abonnés les plus proches.
Le déploiement des réseaux très haut débit par les opérateurs, pour adresser une clientèle résidentielle, est en cours dans les principales agglomérations de métropole. Au 31 décembre 2010, 1 075 000 logements étaient d'ores et déjà éligibles à des offres de fibre optique jusqu'à l'abonné (3). En application du cadre réglementaire adopté en décembre 2009 pour le déploiement des réseaux de fibre optique dans les zones très denses, plusieurs opérateurs (dont France Télécom, SFR et Free) ont lancé des appels au co-investissement, en vue d'un déploiement mutualisé sur 84 communes.
Deux topologies de boucle locale optique sont utilisées pour le FttH : le point-à-point et le point-à-multipoints de type PON (Passive Optical Network). Le point-à-point, comme le réseau de boucle locale cuivre de France Télécom, relie chaque foyer au répartiteur optique par une fibre dédiée. Le PON permet la mutualisation de plusieurs accès (jusqu'à 128 avec les technologies actuelles) sur une seule fibre pour une partie de la boucle locale, située entre le répartiteur optique et des points de concentration passifs, appelé coupleurs, situés plus bas dans le réseau ; à partir du dernier niveau de coupleur, une fibre est reliée à chaque foyer.
A l'horizon de la présente analyse, il apparaît difficile d'opérer une distinction claire entre haut débit et très haut débit au niveau des marchés de détail. Il existe en effet un continuum de débits entre les offres de détail fondées sur le DSL, le câble et la fibre, et aucune application spécifique au très haut débit ne semble susceptible d'induire à elle seule un clivage dans le comportement des consommateurs à court terme. En effet, à ce stade, les services permis par le très haut débit ne sont pas encore significativement différents de ceux permis par le haut débit.
1.4.3. Marché de gros des offres activées haut débit et très haut débit livrées au niveau infranational
Les offres de gros haut débit et très haut débit activées sont les offres destinées à des opérateurs, qui leur permettent de proposer sur le marché de détail des offres d'accès haut débit et très haut débit activées telles que définies ci-avant ou de raccorder des éléments de réseau distants en vue de compléter son propre réseau de collecte ou le réseau de collecte d'un opérateur client.
On entend par « raccordement infranational » un raccordement qui ne se limite pas à un seul point national et qui est réalisé au niveau régional, départemental ou infradépartemental.
L'Autorité constate que plusieurs types d'offres de gros d'accès haut débit en DSL activées actuellement proposées par France Télécom correspondent à cette définition et doivent être regardées comme des offres infranationales, à savoir :
― des offres DSL permettant de prendre livraison des flux haut débit en ATM (Asynchronous Transfer Mode) à un niveau régional et départemental. Les offres correspondantes de France Télécom sont dénommées « DSL Collect ATM » (proposées avec l'offre « DSL Access » pour la composante accès) pour les offres résidentielles et « DSL Entreprises » pour les offres professionnelles ;
― des offres DSL permettant de prendre livraison des flux haut débit en mode IP (Internet Protocol) à un niveau régional. L'offre correspondante de France Télécom est dénommée « DSL Collect IP » (proposée avec l'offre « DSL Access » pour la composante accès) et permet de construire des offres pour les clientèles résidentielle et professionnelle ;
― des offres DSL permettant de prendre livraison des flux haut débit en mode Ethernet à un niveau régional. Les offres correspondantes de France Télécom sont dénommées « DSL Collect Ethernet » (proposée avec l'offre « DSL Access » pour la composante accès) pour les offres résidentielles et l'offre « Core Ethernet Entreprises » (« CEE ») pour les offres professionnelles ;
― des offres DSL permettant de raccorder des éléments de réseau distants ; France Télécom propose notamment l'offre « AIRCOM » destinée au raccordement de stations de base mobile.
Les opérateurs alternatifs sont susceptibles de proposer des offres de gros d'accès haut débit en DSL activées alternatives à celles de France Télécom à partir du dégroupage. C'est le cas, notamment, de SFR et des opérateurs de réseaux d'initiative publique.
En outre, l'Autorité note qu'il est probable que des offres de gros d'accès très haut débit activées fondées sur la fibre optique soient proposées à l'horizon de la présente analyse par les opérateurs qui déploient des réseaux très haut débit.
Enfin, techniquement, le principal câblo-opérateur est également en mesure de proposer sur le marché de gros une offre d'accès haut débit ou très haut débit activée fondée sur le câble coaxial. Numericable propose ainsi depuis novembre 2010 une offre d'accès très haut débit activée, fondée sur la partie modernisée de son réseau de câble coaxial (grâce à la mise en œuvre de la technologie DOCSIS3.0), livrée en deux points du territoire, Paris et Lyon, à laquelle Bouygues Telecom, notamment, a souscrit.
2. DÉFINITION DU MARCHÉ PERTINENT
Le cinquième marché identifié par la Commission européenne dans sa recommandation C(2007)5406 sur les marchés pertinents en date du 17 décembre 2007 correspond au marché de la fourniture en gros d'accès à large bande.
La recommandation précise que « ce marché englobe l'accès aux réseaux non physiques ou virtuels, y compris l'accès bitstream en position déterminée. Ce marché est situé en aval de l'accès physique qui relève du marché 4 ci-dessus, car la fourniture en gros d'accès à large bande peut être mise en place en utilisant cette ressource en combinaison avec d'autres éléments ».
2.1. Délimitation du marché en termes de produits et services
2.1.1. Principes
La Commission européenne a adopté le 11 juillet 2002 des lignes directrices sur l'analyse du marché et l'évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques.
La délimitation des marchés du point de vue des services repose sur l'analyse de :
― la substituabilité du côté de la demande : deux produits appartiennent à un même marché s'ils sont suffisamment interchangeables pour leurs utilisateurs, notamment du point de vue de l'usage qui est fait des produits et services, de leurs caractéristiques, de leur tarification, de leurs conditions de distribution, des coûts de « migration » d'un produit vers l'autre. Afin d'apprécier cette notion d'interchangeabilité, l'analyse doit, entre autres, prouver que la substitution entre les deux produits est rapide (4) et doit prendre en compte les coûts d'adaptation (5) qui en découlent ;
― la substituabilité du côté de l'offre : la substituabilité du côté de l'offre est caractérisée lorsqu'un opérateur qui n'est pas actuellement présent sur un marché donné est susceptible d'y entrer rapidement en réponse à une augmentation du prix des produits qui y sont vendus.
Pour établir l'existence d'une éventuelle substituabilité du côté de la demande ou de l'offre, l'analyse peut impliquer la mise en œuvre de la méthode dite du « test du monopoleur hypothétique », ainsi que le suggèrent les lignes directrices de la Commission (6). Ce test consiste à étudier les effets qu'aurait sur la demande ou sur l'offre une augmentation légère mais durable des prix d'un service (5 à 10 % par exemple), de manière à déterminer s'il existe des services considérés comme substituables par les acteurs et vers lesquels ils sont susceptibles de s'orienter. Ce test doit être appliqué jusqu'à ce qu'il puisse être établi qu'une augmentation des prix relatifs à l'intérieur des marchés géographiques et de produits définis ne conduira pas soit les acheteurs à opter pour des substituts directement disponibles ou à s'adresser à des fournisseurs établis sur d'autres territoires, soit les offreurs à modifier leurs produits. Ainsi que le mentionnent les lignes directrices, l'utilité essentielle de cet outil réside dans son caractère conceptuel ; sa mise en œuvre n'implique pas une étude économétrique systématique poussée.
Conformément au point 5 des lignes directrices, l'Autorité se référera aux « principes et [aux] méthodes du droit de la concurrence pour définir les marchés qui devront être soumis à une réglementation ex ante ».
2.1.2. Analyse de substituabilité
Afin de délimiter le contour du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, l'Autorité a étudié le degré de substituabilité entre :
― les offres d'accès haut débit activées livrées en IP, en ATM ou en Ethernet ;
― les offres d'accès haut débit et très haut débit activées fondées sur le DSL et celles fondées sur la fibre ;
― les offres d'accès haut débit et très haut débit activées fondées sur le DSL et celles fondées sur le câble coaxial ;
― les offres destinées à la clientèle résidentielle et les offres destinées à la clientèle professionnelle ;
― les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées à la clientèle professionnelle et les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées au raccordement d'éléments de réseau ;
― les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées au raccordement d'éléments de réseau et les offres de gros d'accès haut débit activées sur faisceau hertzien ;
― les offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational et les offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau national ;
― les offres d'accès haut débit et très haut débit activées et les offres d'accès passives ;
― les offres d'accès haut débit et très haut débit activées fondées sur les réseaux filaires et celles fondées sur les technologies d'accès hertziennes terrestres, de satellites ou les courants porteurs en ligne.
2.1.2.1. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit activées livrées en IP, en ATM ou en Ethernet
Il existe à ce jour deux interfaces principalement utilisées pour la livraison d'accès haut débit activés au niveau infranational. Il s'agit, d'une part, de la livraison en ATM, qui a initialement été mise en place pour permettre l'élaboration d'offres sur le marché professionnel, et, d'autre part, de la livraison en IP, que ses caractéristiques techniques rendent plutôt adaptée à l'élaboration d'offres sur le marché résidentiel. A ce jour, les opérateurs s'adressant au marché résidentiel se fondent toutefois aussi bien sur des offres d'accès livrées en ATM qu'en IP.
Un troisième mode de collecte, l'Ethernet, est disponible et apparaît comme une technologie de transmission efficace en termes de coûts et de qualité de service. En particulier, la collecte Ethernet permet de fournir des offres à destination tant du marché professionnel que du marché résidentiel et ce en présentant une architecture et une gestion opérationnelle simplifiées par rapport à la collecte ATM. A l'horizon de la présente analyse, l'Ethernet pourrait constituer un substitut à l'ATM ou à l'IP.
Le respect du principe de neutralité technologique est défini comme un objectif de régulation en application du 13° du II de l'article L. 32-1 du CPCE. Les choix technologiques font partie intégrante de l'efficacité des opérateurs et donc de leur capacité à conquérir de nouveaux clients. Afin de respecter ce principe, il convient d'inclure dans le même marché l'ensemble des offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau infranational quelles que soient les interfaces de livraison mises en œuvre : IP, ATM ou Ethernet.
2.1.2.2. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit activées
utilisant la technologie DSL et celles fondées sur la fibre
Le déploiement des réseaux FttH a commencé. Au 31 décembre 2010, 1 075 000 logements étaient d'ores et déjà éligibles à des offres de fibre optique jusqu'à l'abonné. Par ailleurs, les principaux opérateurs ont annoncé des plans d'investissement qui pourraient permettre d'équiper 800 000 foyers supplémentaires sur la période 2010-2011. Dans ce contexte, il est probable que certains de ces acteurs soient amenés à formuler des offres de gros activées, de façon à amortir le coût d'investissement sur une base plus large d'abonnés.
A l'horizon de la présente analyse et au regard des usages actuels des consommateurs sur les marchés concernés, la distinction entre haut débit et très haut débit sur le marché de détail reste cependant limitée, dans la mesure où il est constaté un recouvrement important des services proposés dans les offres haut débit et très haut débit.
En outre, les offres d'accès activées fondées sur le DSL et la fibre présentent des contraintes concurrentielles homogènes au niveau des marchés de gros :
― d'un point de vue économique, le génie civil constitue le principal inducteur de coût de la boucle locale et donc du coût de l'accès pour ces deux types d'offres ;
― les acteurs qui investissent dans des réseaux FttH sont déjà présents sur le marché du haut débit.
Par ailleurs, il semble que le déploiement des réseaux de nouvelle génération (dits « NGN ») se caractérise par des interfaces de livraison de plus en plus standardisées, indépendamment des technologies d'accès sur lesquelles les offres haut et très haut débit sont construites. L'Ethernet semble à ce titre constituer l'interface la plus pérenne.
Ainsi, les offres d'accès très haut débit activées fondées sur la fibre optique paraissent substituables aux offres d'accès haut débit activées sur DSL à l'horizon de la présente analyse.
2.1.2.3. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit activées
utilisant la technologie DSL et celles fondées sur le câble coaxial
Du côté de l'offre, les investissements consentis pour la mise à niveau des réseaux en vue de la fourniture de services à très haut débit incitent les câblo-opérateurs à se positionner sur ce marché. Ceux-ci conduisent notamment Numericable à proposer aux opérateurs tiers une offre d'accès activée sur son réseau qui permet de fournir des services comparables à ceux offerts en DSL, voire plus riches. Ces offres ne sont toutefois disponibles que sur l'empreinte des réseaux en câble coaxial, qui ne couvrent que 40 % des foyers.
L'Autorité note ainsi que le principal câblo-opérateur, Numericable, propose depuis novembre 2010, dans les zones où il a modernisé son réseau câble coaxial en mettant en œuvre la technologie DOCSIS3.0, une offre de gros d'accès très haut débit activée, livrée en deux points du territoire, à laquelle au moins un opérateur alternatif national, Bouygues Telecom, a souscrit.
Du point de vue de la demande, il apparaît que les offres d'accès haut débit et très haut débit activées du câblo-opérateur peuvent présenter, à l'horizon de la présente analyse, un caractère de substituabilité avéré avec les offres d'accès haut débit et très haut débit activées utilisant la technologie DSL ou fondées sur la fibre optique, tant en termes de services disponibles pour l'utilisateur final que sur le plan économique.
Du point de vue de l'offre, en ce qui concerne le segment du très haut débit, il convient d'analyser la propension pour le câblo-opérateur, qui proposerait des offres d'accès très haut débit activées fondées sur la technologie câble coaxial, à faire évoluer son réseau pour être en mesure de proposer des offres très haut débit fondées sur la fibre optique pour répondre à une potentielle augmentation des prix des produits de gros sur ce marché. Le recours à la technologie FttH supposerait pour le câblo-opérateur de déployer de la fibre optique sur le dernier segment de la boucle locale jusqu'à l'abonné, ou de souscrire une offre de mutualisation de la partie terminale le cas échéant, ce qui, dans les deux cas, ne représenterait pas un investissement considérable au regard de l'investissement déjà réalisé pour moderniser le réseau coaxial.
Ainsi, les offres d'accès haut débit et très haut débit activées fondées sur la technologie coaxiale paraissent substituables aux offres d'accès haut débit et très haut débit activées sur DSL et sur fibre optique à l'horizon de la présente analyse.
2.1.2.4. Substituabilité entre les offres destinées à la clientèle résidentielle
et les offres destinées à la clientèle professionnelle
Les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational permettant de desservir, sur le marché de détail, la clientèle résidentielle et celles permettant de desservir la clientèle professionnelle sont très proches sur les plans technique et structurel. Les réseaux et les équipements techniques impliqués sont principalement les mêmes, la différenciation s'effectuant au moyen de paramétrages techniques propres aux besoins des clients professionnels : accès symétrique, débit garanti, transparence à certains protocoles, en particulier l'Ethernet permettant l'interconnexion de LAN (Local Area Network), qualité de service accrue, garantie de temps de rétablissement. S'ils ont un impact à la hausse sur les coûts d'exploitation des accès, ces paramétrages techniques n'induisent pas de fortes dépenses d'investissement de la part de l'opérateur.
La commercialisation d'offres de gros DSL destinées au marché professionnel peut donc se faire à coût marginal dès lors qu'une offre à destination du marché résidentiel est disponible, et réciproquement. Ces deux prestations bénéficient donc l'une et l'autre d'économies d'envergure substantielles.
Ainsi, du côté de l'offre, il existe une substituabilité entre les offres DSL destinées aux clientèles résidentielle et professionnelle.
Du point de vue de la demande, il s'établit un continuum de la demande résidentielle vers la demande professionnelle. Les besoins des petites et d'une partie des moyennes entreprises sont généralement plus proches de ceux des résidentiels que de ceux des très grandes entreprises. Ainsi, les clients résidentiels vont utiliser des offres à débit non garanti de quelques Mbit/s avec une garantie de temps de rétablissement standard de quarante-huit heures. Les petites entreprises peuvent se satisfaire de débits similaires mais souhaiter une garantie de temps de rétablissement plus courte, de quatre heures par exemple, alors que des moyennes entreprises souhaiteront des débits garantis et une garantie de temps de rétablissement de quatre heures. Du point de vue de la demande sur le marché de gros, les opérateurs répercutent ces spécificités auprès de leur fournisseur : il en résulte donc un même continuum, en termes de débit et en termes de qualité de service, directement dérivé de celui observé sur le marché de détail.
En outre, la collecte par les opérateurs alternatifs des trafics issus des offres DSL professionnelle et résidentielle s'opère à partir des mêmes points de raccordement et sur le même réseau.
Les offres de gros haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational fondées sur le DSL destinées à une clientèle professionnelle et celles destinées à une clientèle résidentielle présentent ainsi un degré de substituabilité élevé du côté de l'offre et un degré de substituabilité significatif du côté de la demande.
L'Autorité considère donc que ces deux offres appartiennent au même marché.
En revanche, en ce qui concerne les offres de service de capacité (ex. : LPT, CE2O), l'Autorité constate l'absence de substituabilité des offres haut débit et très haut débit destinées à la clientèle résidentielle avec les offres DSL destinées à la clientèle professionnelle. En effet, du côté de la demande, les offres de services de capacité s'adressent à des entreprises de plus grande taille que les offres précédemment citées avec des tarifs significativement plus élevés, du fait notamment de garanties de qualité de service supérieures. Du côté de l'offre, les équipements nécessaires à la fourniture de l'offre sont en grande partie non mutualisables avec les offres fondées sur le DSL.
En outre, les offres de services de capacité, y compris sur fibre, n'apparaissent pas substituables aux offres activées fondées sur la fibre destinées à la clientèle résidentielle, dans la mesure où les réseaux correspondants ont traditionnellement été déployés de manière indépendante, même si à terme on peut s'attendre à une mutualisation partielle des infrastructures de boucle locale optique.
L'Autorité considère donc que les offres de services de capacité n'appartiennent pas au présent marché et note qu'elles font l'objet d'une régulation ex ante dans le cadre de la décision n° 2010-0402 de l'Autorité portant sur la définition des marchés pertinents des services de capacité, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre.
2.1.2.5. Substituabilité entre les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées à la clientèle professionnelle et les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées au raccordement d'éléments de réseau
Les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational permettant de desservir, sur le marché de détail, la clientèle professionnelle et celles permettant le raccordement d'éléments de réseau sont identiques sur le plan technique et très proches sur le plan opérationnel. Les réseaux et les équipements techniques impliqués sont principalement les mêmes, la différenciation pouvant s'effectuer au moyen de certains processus opérationnels propres aux besoins du raccordement d'éléments de réseau.
La commercialisation d'offres de gros DSL destinées au raccordement d'éléments de réseau peut donc se faire à coût marginal dès lors qu'une offre à destination du marché professionnel est disponible, et réciproquement. Ces deux prestations bénéficient l'une et l'autre d'économies d'envergure substantielles.
Ainsi, du côté de l'offre, il existe une substituabilité entre les offres DSL destinées aux professionnels et les offres DSL destinées au raccordement d'éléments de réseau.
Du point de vue de la demande, il est n'est pas possible à ce stade de recourir à l'offre DSL-E pour raccorder des éléments de réseau par des liens DSL en raison des conditions contractuelles de l'offre DSL-E. Hors cet obstacle contractuel, la demande professionnelle et la demande pour le raccordement d'éléments de réseau pourraient utiliser des offres très proches. Ainsi, la demande professionnelle se tournera vers des offres DSL classiques à destination des entreprises pour répondre à ses besoins (débits garantis, garantie de rétablissement en moins de quatre heures, sécurisation de la liaison, durée maximale de non-fonctionnement par an, etc.). La demande pour le raccordement d'éléments de réseau se satisfera d'offres équivalentes, éventuellement assorties d'un processus de déploiement adapté. Du point de vue de la demande sur le marché de gros, les opérateurs pourraient s'approvisionner en produits de gros DSL professionnels classiques pour répondre aux besoins de leurs clients sur le marché de détail aval.
En outre, la collecte par les opérateurs alternatifs des trafics issus des offres DSL professionnelle et DSL pour le raccordement d'éléments de réseau s'opère à partir des mêmes points de raccordement et sur le même réseau.
Les offres de gros haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational fondées sur le DSL destinées à une clientèle professionnelle et celles destinées au raccordement d'éléments de réseau présentent ainsi un degré de substituabilité élevé du côté de l'offre et de la demande.
L'Autorité considère donc que ces deux offres appartiennent au même marché.
2.1.2.6. Substituabilité entre les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL destinées au raccordement
d'éléments de réseau et les offres de gros d'accès haut débit activées sur faisceau hertzien
Le raccordement d'éléments de réseau peut être réalisé par l'intermédiaire de faisceau hertzien. Cette technologie s'appuie sur des transmissions radioélectriques pour établir des liaisons point-à-point. La mise en œuvre de cette technologie requiert des études adaptées car la qualité de transmission est sensible à de nombreux facteurs, et notamment aux obstacles entre les deux points de terminaison de la liaison, aux précipitations et perturbations climatiques et aux conditions de réfractivité atmosphérique. Ces facteurs d'atténuation peuvent induire des études de faisabilité importantes préalablement au déploiement, qui peut lui-même s'avérer complexe en fonction des contraintes révélées par l'étude.
Les réseaux et les équipements techniques impliqués dans la fourniture des deux offres sont différents et ne sont pas mutualisables. La commercialisation d'offres de gros de faisceau hertzien pour le raccordement d'éléments de réseau ne peut donc se faire qu'au prix d'un investissement important et d'acquisition de compétences nouvelles. Ces deux prestations ne bénéficient donc pas de synergie susceptible de créer des économies d'échelle et un opérateur ayant investi massivement dans un réseau capillaire en vue de collecter du trafic DSL ne pourra rentabiliser cet investissement s'il est contraint de recourir au faisceau hertzien.
Les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational destinées au raccordement d'éléments de réseau et les offres de faisceau hertzien destinées au raccordement d'éléments de réseau ne semblent donc pas pleinement substituables du côté de l'offre.
Du côté de la demande, les raccordements en faisceau hertzien présentent une faculté plus importante à fournir des débits élevés, typiquement à 34 Mbits/s, 100 Mbits/s ou 155 Mbits/s, là où les raccordements en DSL plafonnent à quelques Mbits/s. Les raccordements en faisceau hertzien présentent cependant des coûts significativement plus élevés. Ils ne peuvent non plus être employés partout sur le territoire, en raison de contraintes liées au terrain, à l'environnement ou à l'architecture des réseaux de collecte.
Les offres destinées à raccorder des éléments de réseau sont majoritairement utilisées par les opérateurs de réseaux mobiles. Ces opérateurs construisent la collecte de leur trafic en suivant une logique de plaques. Ainsi, le choix de l'offre pour raccorder une nouvelle BTS se fait essentiellement en fonction de la technologie déjà employée sur la zone géographique où se situe cette station de base.
Par ailleurs, les architectures des réseaux sont fortement liées à la technologie employée. En effet, les réseaux de collecte en faisceau hertzien utilisent des architectures en mailles où les BTS sont reliées à la BSC (Base Station Controller) par des liaisons réalisées en tronçons multiples. Les données issues des BTS les plus lointaines sont donc transmises de proche en proche jusqu'à la BSC de rattachement. Ces « bonds » permettent de limiter la puissance des antennes les plus lointaines et de réduire le nombre de faisceaux hertziens directement connectés à la BSC. A l'inverse, l'architecture utilisée dans les réseaux de collecte DSL est une architecture en étoile ayant pour centre la BSC. En effet, chaque BTS est desservie par un lien DSL dédié, reliant la BSC de rattachement via le NRA dont dépend le lien.
L'utilisation de faisceau hertzien sur une plaque filaire nécessitera donc un investissement élevé en infrastructure.
A l'inverse, les liens filaires, et en l'espèce les offres de gros d'accès haut débit activées, constituent un complément indispensable des offres de faisceau hertzien pour le raccordement des BTS, de la même manière que le bitstream est un complément indispensable du dégroupage.
Du point de vue de la demande, les deux offres ne sont donc pas pleinement substituables dans des conditions économiques raisonnables et le choix de l'utilisateur final se fera essentiellement en fonction de sa technologie, et le cas échéant, de l'environnement. Du point de vue de la demande sur le marché de gros, les opérateurs répercuteront la demande technologique des clients finals à leur fournisseur ; les deux offres ne sont donc pas substituables.
L'Autorité considère en conclusion que les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational destinées au raccordement d'éléments de réseau et les offres de gros d'accès haut débit sur faisceau hertzien destinées au raccordement d'éléments de réseau font partie de deux marchés distincts.
2.1.2.7. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit
activées livrées au niveau infranational et celles livrées au niveau national
Dans sa décision n° 2007-0089 en date du 30 janvier 2007 portant sur la levée de la régulation du marché de gros des offres d'accès haut débit activées livrées au niveau national, l'Autorité relevait que les trois critères cumulatifs de pertinence d'un marché définis par la Commission européenne n'étaient plus remplis s'agissant de ce marché.
L'Autorité a en effet considéré que la capillarité accrue des réseaux, le déploiement des opérateurs alternatifs au niveau régional, le développement des marchés de gros de l'accès dégroupé à la boucle locale et des offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau infranational et la présence d'offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau national alternatives à celle de France Télécom étaient des indicateurs de la vitalité de la concurrence sur le marché depuis l'été 2005.
Par ailleurs, elle a estimé que « la diminution de la part relative du marché de gros des offres d'accès haut débit activées livrées au niveau national au sein des marchés de gros du haut débit, l'intégration verticale croissante des acteurs et le constat qu'aucun opérateur [n'utilisait] majoritairement les offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau national de France Télécom [confirmaient] la capacité du droit de la concurrence à remédier aux éventuelles défaillances du marché ».
L'Autorité constate que les caractéristiques du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau national ont peu évolué depuis le début de l'année 2007 et considère qu'il n'y a pas lieu de définir de nouveau dispositif de régulation ex ante pour les offres de gros haut débit et très haut débit activées livrées au niveau national.
En conclusion, les conditions de concurrence ne sont pas homogènes entre les offres d'accès activées livrées au niveau infranational et les offres d'accès activées livrées au niveau national et ces dernières n'apparaissent pas substituables avec les offres relevant du présent marché.
2.1.2.8. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit
et très haut débit activées et les offres d'accès passives
Une offre d'accès passive donne aux opérateurs alternatifs une plus grande liberté dans l'étendue des services proposés à leurs clients et dans leur tarification. En effet, l'opérateur alternatif gère l'ensemble des éléments actifs du réseau permettant de fournir le service au client final, notamment les DSLAM dans le cas du dégroupage. L'opérateur dispose ainsi d'une meilleure capacité d'innovation et de différenciation, dans un contexte d'innovation technologique rapide, comme les marchés du haut et très haut débit. Par ailleurs, cela permet une indépendance industrielle et commerciale des opérateurs.
Les offres de gros haut débit et très haut débit activées sont quant à elles des offres plus intégrées, dans lesquelles les opérateurs clients utilisent des accès du réseau d'un autre opérateur. Ils sont donc soumis aux choix techniques de l'opérateur tiers qui leur propose les offres et ont ainsi une latitude plus limitée à se différencier.
De ce fait, la substitution entre ces deux offres sera, du point de vue de la demande, limitée à une substitution asymétrique des offres de gros d'accès haut débit et très haut débit vers les offres d'accès passives, qui correspond à la recherche d'une plus grande capacité de différenciation et d'innovation. Ces deux types de produits n'apparaissent pas interchangeables.
Au terme de cette analyse, l'Autorité estime que les offres d'accès passives n'appartiennent pas au même marché que les offres de gros haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
2.1.2.9. Substituabilité entre les offres d'accès haut débit et très haut débit activées fondées sur les réseaux filaires et les offres fondées sur les technologies d'accès hertziennes terrestres de type WiMAX, Wi-Fi, satellitaires ou les courants porteurs en ligne
Des offres d'accès haut débit activées peuvent être proposées par l'intermédiaire des technologies hertziennes terrestres de type WiMAX, Wi-Fi, satellitaires, ou encore des courants porteurs en ligne sur les réseaux électriques.
Sans préjuger de la substituabilité technique entre des offres de gros élaborées à partir de ces technologies d'accès et celles élaborées via la technologie DSL, l'Autorité relève que le nombre d'accès commercialisés à partir de ces technologies sur les marchés de détail représente moins de 1 % des accès haut débit commercialisés en France. Les offres utilisant ces technologies ne sont proposées que sur des zones géographiques très limitées et éparses. L'Autorité en conclut que ces technologies n'offrent pas des ressources équivalentes au réseau ubiquitaire d'accès cuivre.
Les offres d'accès haut débit activées proposées par le satellite, le WiMAX, le Wi-Fi et les courants porteurs en ligne ne sont pas substituables aux offres d'accès haut débit et très haut débit activées filaires à l'horizon de cette analyse. Une telle substituabilité nécessiterait des investissements élevés qui ne pourraient être réalisés et avoir un impact significatif sur le marché avant plusieurs années. Ces technologies d'accès doivent en conséquence être exclues du périmètre du marché.
2.2. Délimitation géographique du marché
2.2.1. Principes
Il est rappelé au point 56 des lignes directrices de la Commission européenne du 11 juillet 2002 sur l'analyse du marché et l'évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques que, « selon une jurisprudence constante, le marché géographique pertinent peut être défini comme le territoire sur lequel les entreprises concernées sont engagées dans la fourniture ou la demande des produits ou services pertinents, où elles sont exposées à des conditions de concurrence similaires ou suffisamment homogènes et qui se distingue des territoires voisins sur lesquels les conditions de concurrence sont sensiblement différentes ».
La Commission précise au point 59 de ces mêmes lignes directrices que, dans le secteur des communications électroniques, la portée géographique du marché pertinent est traditionnellement déterminée par référence à deux critères principaux qui permettent de procéder à la délimitation géographique des marchés de communications électroniques : le territoire couvert par les réseaux, d'une part, et l'existence d'instruments de nature juridique conduisant à distinguer, ou non, telle ou telle zone géographique, d'autre part.
Par ailleurs, cette analyse doit être menée dans une approche prospective. S'agissant des marchés de gros sous-jacents aux services de communications électroniques fixes, le critère de substituabilité du côté de la demande est peu pertinent pour déterminer l'étendue géographique d'un marché : un opérateur cherchant à acheter un produit de gros pour desservir un client donné situé dans une zone géographique donnée ne peut acheter un produit de gros dont l'accès est situé sur une zone géographique distincte. Si sa demande n'est pas satisfaite pour une livraison au niveau régional dans une zone donnée, il choisira plutôt d'acheter une offre de gros à un niveau supérieur, en l'espèce une offre livrée au niveau national.
Ainsi, c'est le critère de substituabilité du côté de l'offre qui primera dans l'analyse. Plus précisément, en se référant aux lignes directrices de la Commission, il conviendra de déterminer si des opérateurs qui ne sont pas encore présents sur une zone géographique donnée, mais le sont sur une autre zone géographique, feront le choix d'y entrer à court terme en cas d'augmentation des prix relatifs. Dans ce cas, la définition du marché doit être étendue à la zone sur laquelle ces opérateurs ne sont pas encore présents mais sont susceptibles d'entrer.
2.2.2. Analyse fondée sur le déploiement et l'extension des réseaux
|
JANVIER 2001 |
JANVIER 2002 |
JANVIER 2003 |
JANVIER 2004 |
JANVIER 2005 |
JANVIER 2006 |
JANVIER 2007 |
JANVIER 2008 |
JANVIER 2009 |
JANVIER 2010 |
JANVIER 2011 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
France Télécom (couverture de la population) |
36 % |
66 % |
74 % |
80 % |
90 % |
92,9 % |
98 % |
99 % |
100 % |
100 % |
100 % |
Dégroupage (couverture de la population) |
0 % |
11,9 % |
13,5 % |
30,1 % |
50,3 % |
52,5 % |
58,5 % |
67,5 % |
73,7 % |
79 % |
82,8 % |
Dégroupage (nb de NRA dégroupés) |
0 |
109 |
130 |
406 |
907 |
1 113 |
1 789 |
2 957 |
3 877 |
4 659 |
5 351 |
2.3. Pertinence du marché au regard de la régulation sectorielle
Au vu de l'analyse qui précède, l'Autorité a délimité le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, qu'elles soient fondées sur le DSL ou la fibre, indépendamment du type de clientèle visée et de l'interface de livraison utilisée. Son périmètre géographique correspond au territoire métropolitain, aux départements d'outre-mer et aux collectivités d'outre-mer.
L'article L. 37-1 du CPCE dispose que l'Autorité doit définir les marchés, « au regard notamment des obstacles au développement d'une concurrence effective ». Ainsi, aux termes de la législation nationale, pour qualifier un marché de pertinent au regard de la régulation sectorielle, il convient de mener une analyse concurrentielle de ce marché.
Le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activé a fait l'objet d'une analyse par la Commission européenne dans sa recommandation sur les marchés pertinents. Elle a estimé que ce marché remplissait, a priori, les trois critères qu'elle a définis dans sa recommandation (présence de barrières à l'entrée élevées et non provisoires, absence d'évolution vers une situation de concurrence effective, insuffisance du droit de la concurrence seul) et que, de ce fait, ce marché était, a priori, pertinent pour la régulation ex ante.
L'analyse in concreto des différentes caractéristiques structurelles de ce marché national confirme la pertinence de sa régulation ex ante au regard du développement d'une concurrence effective.
Tout d'abord, les mécanismes d'entrée sur ce marché sont limités. En effet, hormis le cas des opérateurs possédant la boucle locale ou les fourreaux permettant de relier, sur l'ensemble du territoire, les nœuds de raccordement optique aux abonnés, l'entrée en tant qu'offreur sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational n'est possible pour un opérateur que si, d'une part, il lui est donné accès à ces infrastructures et si, d'autre part, il déploie un réseau de collecte suffisamment capillaire pour rendre effective cette possibilité partout sur le territoire.
Ainsi, malgré l'obligation réglementaire pesant sur France Télécom, propriétaire de l'infrastructure essentielle de boucle locale cuivre, d'ouvrir son réseau local au dégroupage, les barrières à l'entrée sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational restent élevées. Elles sont dues au montant des investissements que suppose le déploiement d'un réseau de collecte pour le dégroupage au niveau du NRA. Par exemple, le coût propre de collecte correspondant au dégroupage d'un NRA s'élève à plusieurs dizaines voire centaines de milliers d'euros et le réseau en compte plus de 14 000. Elles sont aussi dues au caractère nécessairement progressif de ce déploiement, qui ne peut s'effectuer à grande échelle que sur plusieurs années. Enfin, elles sont renforcées par le poids des économies d'échelle qui confèrent un avantage certain en termes de coût au plus gros opérateur. En outre, l'intégration verticale des acteurs de ces marchés, et notamment la présence de l'opérateur possédant le réseau de boucle locale sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational et sur les marchés de détail aval, rend plus difficile l'entrée sur ce marché de gros intermédiaire en l'absence de régulation ex ante.
L'ensemble de ces motifs conduit à estimer que, sur ce marché, les barrières à l'entrée demeurent élevées et les perspectives de développement de la concurrence sont limitées à l'horizon de la présente analyse.
Enfin, il apparaît que le droit de la concurrence ne peut encore suffire à remédier seul aux problèmes de concurrence qui se posent à ce marché. Le régulateur sectoriel dispose d'instruments servant des objectifs différents de celui de l'Autorité de la concurrence, notamment en ce qui concerne l'incitation à l'investissement des opérateurs dans les infrastructures.
En outre, le régulateur sectoriel assure un suivi continu du marché et peut mettre en place de façon ex ante des dispositifs de séparation comptable et d'audit des coûts, selon une méthodologie spécifique adaptée au marché des communications électroniques, nécessaire au suivi et au contrôle des obligations tarifaires pesant sur l'opérateur régulé.
Pour l'ensemble de ces raisons, l'Autorité considère que le marché tel que défini dans l'analyse présentée ci-dessus doit être déclaré pertinent au titre de la régulation sectorielle des communications électroniques, à ce stade indispensable pour favoriser le développement de la concurrence et l'investissement des opérateurs dans les infrastructures.
2.4. Conclusion
Au vu de l'analyse qui précède, l'Autorité considère que l'ensemble des offres de gros haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational destinées à fournir des services de gros ou de détail pour les clients résidentiels et professionnels appartiennent au même marché, qu'elles soient fondées sur le DSL, sur le câble coaxial ou la fibre optique, sans que n'ait à être précisée a priori leur interface de livraison. En particulier, les offres livrées en IP, en ATM et en Ethernet sont incluses dans ce marché.
L'Autorité exclut notamment du périmètre du marché ainsi identifié les offres suivantes :
― les offres d'accès passives, comme le dégroupage de la boucle locale, l'accès aux fourreaux et les offres passives sur fibre ;
― les offres de gros haut débit et très haut débit activées fondées sur les technologies d'accès hertziennes terrestres de type Wi-Fi, WiMAX, satellitaires ou les courants porteurs en ligne ;
― les offres de gros haut débit et très haut débit activées livrées au niveau national ;
― les offres de service de capacité.
Compte tenu des éléments structurels sur le développement de la concurrence, l'Autorité estime pertinent pour la régulation le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, qu'elles soient fondées sur le DSL, le câble coaxial ou la fibre optique et indépendamment du type de clientèle visée, aussi bien pour les clients résidentiels que professionnels, et de l'interface de livraison utilisée. Le périmètre géographique du marché correspond au territoire métropolitain, aux départements d'outre-mer et aux collectivités d'outre-mer.
3. DÉSIGNATION D'UN OPÉRATEUR EXERÇANT UNE INFLUENCE SIGNIFICATIVE
3.1. Principes généraux relatifs à la détermination des conditions
caractérisant une situation d'influence significative sur un marché
Il découle de l'article 14 de la directive « cadre » et du point 5 des lignes directrices publiées par la Commission européenne que les autorités réglementaires nationales ne doivent intervenir pour imposer des obligations aux entreprises que dans la mesure où elles considèrent que les marchés envisagés ne sont pas en situation de concurrence réelle, essentiellement en raison du fait que ces entreprises ont acquis « une position équivalente à une position dominante » au sens de l'article 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) (ex-article 82 du traité CE).
En droit national, l'article L. 37-1 du CPCE dispose que « est réputé exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques tout opérateur qui, pris individuellement ou conjointement avec d'autres, se trouve dans une position équivalente à une position dominante lui permettant de se comporter de manière indépendante vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et des consommateurs ». Pour évaluer l'existence d'une influence significative, l'Autorité doit, conformément aux dispositions de l'article D. 302 du CPCE, tenir le plus grand compte des lignes directrices adoptées par la Commission.
Il est précisé au point 5 des lignes directrices que la Commission et les autorités réglementaires nationales doivent « se fonder sur les principes et les méthodes du droit de la concurrence pour définir les marchés qui devront être soumis à une réglementation ex ante et apprécier la puissance des entreprises sur ces marchés ».
Ainsi, les lignes directrices relèvent que la part de marché d'une entreprise constitue un critère essentiel, bien que non exclusif, de l'évaluation de la puissance d'un acteur. Notamment (7), « d'après une jurisprudence constante, la présence de parts de marché très élevées ― supérieures à 50 % ― suffit, sauf circonstances exceptionnelles, à établir l'existence d'une position dominante ». Par ailleurs, l'évolution des parts de marché de l'entreprise et de ses concurrents, sur une période de temps appropriée, constitue un critère supplémentaire en vue d'établir l'influence significative d'un opérateur donné.
Toutefois, comme il est rappelé au point 78 des lignes directrices susmentionnées, « les ARN doivent procéder à une analyse approfondie et exhaustive des caractéristiques économiques du marché pertinent avant de conclure à l'existence d'une puissance sur le marché » puisque « l'existence de fortes parts de marché signifie simplement que l'opérateur en question pourrait être en position dominante ». Ainsi, l'Autorité pourra tenir compte dans son analyse de plusieurs critères complémentaires d'ordre qualitatif, comme :
― la taille de l'entreprise ;
― le contrôle d'une infrastructure qu'il n'est pas facile de dupliquer ;
― les avancées ou la supériorité technologique ;
― l'absence ou la faible présence de contre-pouvoir des acheteurs ;
― la diversification des produits ou des services ;
― l'intégration verticale de l'entreprise ;
― la présence d'économies de gamme ou d'échelle ;
― l'absence de concurrence potentielle ;
― d'autres critères tels que l'accès privilégié aux marchés des capitaux.
3.2. Analyse de l'Autorité
Deux types d'indicateurs, quantitatifs et qualitatifs, permettent de caractériser l'état de la concurrence et d'évaluer l'influence exercée par les différents acteurs positionnés sur le marché analysé.
3.2.1. Indicateurs quantitatifs
3.2.1.1. Description des offres existantes
Il n'existe pas à ce jour d'offre de gros d'accès haut débit ou très haut débit activée livrée au niveau infranational fondée sur la fibre pour la clientèle résidentielle et permettant de desservir une partie significative du territoire. Ainsi, les seules offres de gros d'accès haut débit ou très haut débit activées livrées au niveau infranational et disponibles à ce stade sur le marché pertinent précédemment défini sont fondées sur les technologies DSL ou câble coaxial.
Concernant la technologie DSL, l'ensemble des accès haut débit activés sur DSL produits par les opérateurs est destiné à être commercialisé in fine sur les marchés de détail, résidentiel et professionnel. Pour cela, quel que soit l'opérateur, la chaîne de valeur du haut débit DSL est constituée de la boucle locale, équipée pour le DSL, à laquelle s'ajoutent plusieurs composantes :
― une prestation de collecte depuis le DSLAM jusqu'à un niveau infranational ;
― une prestation de collecte depuis un niveau infranational jusqu'à un point national ;
― dans le cas où la prestation fournie est l'accès à internet, une prestation de connectivité internet.
Un accès haut débit sur DSL produit par un opérateur donné, que ce soit l'opérateur qui possède la boucle locale ou un opérateur ayant recours au dégroupage, peut être vendu sur le marché de détail par ce même opérateur, qui contrôle alors le produit de bout en bout, ou bien cédé à un autre opérateur ou fournisseur d'accès à internet à un niveau intermédiaire de la chaîne de valeur (infranational ou national).
Dans le cadre de la présente partie, l'Autorité relève que chaque opérateur, historique ou alternatif, peut produire deux types d'accès haut débit activées sur DSL :
― des accès DSL cédés au niveau infranational à un opérateur tiers ;
― des accès DSL qui ne donnent lieu à aucune transaction marchande au niveau infranational et qui constituent sa production interne.
Concernant la technologie câble coaxial, les accès haut débit et très haut débit produits par un câblo-opérateur peuvent être soit vendus sur le marché de détail par ce même opérateur, qui contrôle alors le produit de bout en bout, ou bien cédés à un autre opérateur ou fournisseur d'accès à internet à un niveau intermédiaire de la chaîne de valeur.
En ce qui concerne le calcul des parts de marché, le Conseil de la concurrence avait indiqué dans son avis n° 05-A-03 en date du 31 janvier 2005 et relatif au premier cycle d'analyse des marchés du haut débit que, « selon une jurisprudence constante des autorités de concurrence tant nationales que communautaires, l'autoconsommation n'est pas prise en compte pour mesurer le périmètre du marché dans la mesure où, n'étant pas offerte sur le marché, elle ne vient pas concurrencer les biens ou services fournis par celui-ci ».
Dès lors, il convient de calculer stricto sensu les parts de marché des entreprises sur le marché « libre » (hors autoconsommation) avant d'étudier, lors de l'analyse des critères qualitatifs, les effets éventuels de la production interne de ces entreprises.
Dans cette perspective, l'évaluation de la part de marché des acteurs positionnés sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational doit considérer trois types d'accès :
― les accès DSL produits par France Télécom et livrés à un niveau infranational à un opérateur alternatif ;
― les accès DSL produits par les opérateurs acheteurs d'une offre de gros amont de France Télécom, notamment le dégroupage, et livrés à un niveau infranational à un opérateur tiers ;
― les accès haut débit et très haut débit produits par un câblo-opérateur et livrés à un niveau infranational à un opérateur alternatif.
3.2.1.2. Eléments chiffrés
Au 31 décembre 2010, l'Autorité estime que France Télécom détient 79 % de part du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational. Les offres concurrentes de celles de l'opérateur historique, soit 21 % des accès, sont essentiellement produites en DSL sur la base du dégroupage, les parc d'accès haut débit et très haut débit produits sur le câble coaxial et livrés à un niveau infranational n'étant pas significatifs à cette date.
La situation reste néanmoins très différente entre, d'une part, les zones où France Télécom est le seul opérateur proposant des offres de gros d'accès haut débit livrées au niveau infranational, qui représentaient une couverture d'environ 20 % de la population à cette même date, où, de facto, France Télécom détient 100 % de part de marché, et les zones avec un ou plusieurs offreurs alternatifs concurrents de France Télécom sur la base du dégroupage ou en technologie câble coaxial, sur les 80 % de la population restants, où la part de marché de France Télécom est inférieure à 60 %.
Au niveau national, le marché concurrentiel pour les offres de gros d'accès haut débit et très haut débit livrées au niveau infranational reste néanmoins limité dans la mesure où les principaux opérateurs ont recours au dégroupage dès qu'ils le peuvent, plutôt qu'aux offres de gros activées. A ce titre, il n'est pas anticipé que le marché libre se développe significativement, en termes de nombre d'accès, au cours du prochain cycle d'analyse.
Pour ces raisons, il est peu probable que les accès haut débit et très haut débit livrés au niveau infranational produits par des opérateurs alternatifs et commercialisés sur le marché libre, qu'ils soient fondées sur le DSL, le câble coaxial ou la fibre, représentent, à l'horizon du nouveau cycle d'analyse de marché, plus de 50 % du marché au niveau national.
Il apparaît donc que France Télécom détiendra encore à l'horizon de la présente analyse une part de marché très élevée au niveau national.
3.2.2. Critères qualitatifs
Le calcul des parts de marché n'est pas suffisant pour évaluer la situation concurrentielle du marché. Il est en effet utile de compléter cette mesure chiffrée par une analyse des caractéristiques économiques du marché pertinent avant de conclure à l'exercice par un opérateur d'une influence significative sur le marché.
Dans l'analyse qui suit, l'Autorité a retenu, parmi les critères qualitatifs évoqués par la Commission européenne dans ses lignes directrices sur l'analyse des marchés, ceux qu'elle estime être les plus pertinents pour la désignation de l'opérateur exerçant une influence significative dans le cas particulier du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
3.2.2.1. La taille de l'entreprise et le contrôle d'une infrastructure qu'il n'est pas facile de dupliquer
France Télécom a, depuis 2007, équipé en DSL l'intégralité des NRA. Depuis lors, plus de 1 500 nouveaux NRA ont également été mis en place pour le haut débit, essentiellement pour desservir les zones d'ombre (avec les NRA-ZO). France Télécom est ainsi en mesure de proposer aujourd'hui ses offres d'accès de gros haut débit en DSL pour l'ensemble de la population, soit plus de 14 400 NRA.
Les opérateurs tiers proposant des offres de gros d'accès haut débit en DSL alternatives fondées sur le dégroupage sont limités, de fait, à leurs propres couvertures en dégroupage. Leur couverture cumulée ne s'étend ainsi qu'à 80 % de la population, pour un peu moins de 4 800 NRA dégroupés à la fin de l'année 2010.
France Télécom détient donc à ce jour une position singulière sur le marché du haut débit en raison de l'étendue de sa couverture géographique et de son contrôle de l'ensemble des NRA.
L'Autorité rappelle à ce titre que la boucle locale de cuivre a été qualifiée de facilité essentielle par le Conseil de la concurrence à plusieurs reprises (cf. avis n° 04-A-01 du 8 janvier 2004 relatif à une demande d'avis de l'AFORST sur les principes généraux des relations contractuelles entre les utilisateurs et les différents acteurs du dégroupage, ou encore l'avis n° 05-A-03 du 31 janvier 2005 relatif au premier cycle d'analyse des marchés du haut débit).
En suivant une approche prospective, on peut estimer que France Télécom bénéficie d'une avance telle qu'il est impossible pour un opérateur alternatif de déployer un réseau haut ou très haut débit d'envergure nationale, couvrant l'ensemble des NRA, à l'horizon du nouveau cycle d'analyse des marchés.
Au vu de ce qui précède, il apparaît que la couverture géographique du réseau DSL de France Télécom rend l'opérateur actuellement incontournable sur un cinquième de la population. En outre, cette infrastructure DSL apparaît, à l'horizon de l'analyse, difficilement duplicable par un opérateur alternatif ayant recours au dégroupage ou déployant un réseau de très haut débit.
3.2.2.2. L'intégration verticale de France Télécom et l'existence d'économies d'échelle
Si, conformément à ce qu'avait indiqué le Conseil de la concurrence dans son avis n° 05-A-03 en date du 31 janvier 2005, la production interne ne doit pas être prise en compte dans l'appréciation quantitative des parts de marché des acteurs, cette production n'est pas ignorée par les autorités de concurrence pour une analyse qualitative de la position d'un acteur sur le marché. En effet, les prestations que l'entreprise se fournit à elle-même peuvent constituer un levier lui permettant d'exercer une pression concurrentielle sur les prix pratiqués sur le marché.
Ainsi, la Commission européenne précise dans ses lignes directrices du 13 octobre 2000 relatives aux restrictions verticales (8) que « la production interne, c'est-à-dire la fabrication par une entreprise d'un bien intermédiaire aux fins de sa propre production, peut revêtir une très grande importance dans une analyse de la concurrence en tant que contrainte concurrentielle ou en tant que facteur qui renforce la position d'une entreprise sur le marché ».
En l'espèce, la production d'accès haut débit étant régie par une économie de coûts fixes, le volume global d'accès destinés au marché intermédiaire et au marché de détail produits par un même opérateur est une source d'économies d'échelle substantielles qui lui confère un avantage significatif en termes de coûts par rapport à ceux de ses concurrents qui ne sont pas intégrés ou dont la production interne est moins importante.
Par le biais de ces économies d'échelles, le volume d'accès produits par un opérateur pour être commercialisés en propre sur le marché de détail a un impact direct sur les coûts de production des accès haut débit activés vendus par ce même opérateur sur le marché de gros.
Au regard de l'importance du nombre d'accès cédés en interne par rapport au nombre total d'accès produits sur les marchés du haut débit, cet effet apparaît comme particulièrement structurant sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational. Ainsi, sur l'ensemble des accès haut débit en DSL produits fin 2010, soit directement par France Télécom, soit en dégroupage, moins de 12 % seulement étaient échangés sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, les autres étant commercialisés directement sur des marchés avals.
Cet élément caractéristique du positionnement d'un opérateur sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational n'est pas mesuré par le seul calcul des parts de marché portant sur les échanges constatés. Etant donné qu'au niveau infranational France Télécom utilisait, fin 2010, pour elle-même, c'est-à-dire pour les offres qu'elle commercialise sur le marché de détail, plus de 84 % des accès qu'elle produit, la production interne liée à l'intégration verticale de France Télécom joue un rôle essentiel en permettant de diminuer les coûts de production des accès haut débit vendus par France Télécom sur le marché de gros.
En outre, l'existence de cette production interne à grande échelle permettrait à France Télécom, en l'absence de régulation ex ante, de se comporter, dans une certaine mesure, de façon indépendante de la demande exprimée par les opérateurs concurrents sur le marché de gros.
Enfin, en raison de son intégration verticale et de sa présence en amont du marché considéré, France Télécom est en mesure d'économiser les coûts de transaction que supportent, en revanche, les autres opérateurs, qui s'appuient essentiellement sur le dégroupage pour produire des offres d'accès haut débit livrées au niveau infranational.
En conclusion, l'intégration verticale de France Télécom en amont et en aval du marché, l'importance de sa production interne et de ses économies d'échelle renforcent sa capacité à se comporter, en l'absence de régulation, indépendamment de ses clients et de ses concurrents sur le marché de gros.
3.2.2.3. L'absence de concurrence potentielle
Ainsi que cela a été précédemment exposé, ni le principal câblo-opérateur (dont la couverture est limitée à 40 % des foyers), ni les opérateurs dégroupeurs (qui atteignent aujourd'hui 83 % des foyers) ne bénéficient, à l'heure actuelle, de la même couverture géographique que France Télécom.
Au-delà des zones dégroupées, la concurrence à laquelle est potentiellement confrontée France Télécom est limitée. En effet, si l'émergence d'une concurrence, essentiellement par le dégroupage, est susceptible d'intervenir sur une partie des NRA non encore ouverts, elle reste longue et coûteuse à mettre en place. En outre, l'avènement d'une situation concurrentielle sur les plus petits NRA reste peu probable et limité aux projets de collectivités.
Par conséquent, en dehors des zones dégroupées, la concurrence potentielle qui résulte essentiellement de l'extension éventuelle du dégroupage s'avère trop parcellaire et trop longue à mettre en place pour exercer une pression significative sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
3.2.3. Conclusion
A l'issue de l'analyse qui précède, l'Autorité propose de désigner la société France Télécom comme opérateur exerçant une influence significative sur le marché pertinent de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
4. OBLIGATIONS IMPOSÉES À L'OPÉRATEUR EXERÇANT UNE INFLUENCE SIGNIFICATIVE POUR LES OFFRES DE GROS HAUT DÉBIT ET TRÈS HAUT DÉBIT ACTIVÉES LIVRÉES AU NIVEAU INFRANATIONAL
Dans cette partie, l'Autorité présente les obligations qui paraissent nécessaires et proportionnées d'imposer à France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
Les développements qui suivent portent particulièrement sur les offres activées fondées sur la technologie DSL ainsi que sur les offres fondées sur la fibre, dans la mesure où France Télécom ne dispose pas de réseaux de câble coaxial et n'est donc pas en mesure de proposer des offres activées fondées sur cette technologie.
4.1. Principes généraux relatifs à la détermination des obligations
imposées à l'opérateur exerçant une influence significative sur un marché
Conformément à l'article 16 de la directive « cadre », lorsqu'une autorité réglementaire nationale a identifié un opérateur exerçant une influence significative sur un marché pertinent, celle-ci est tenue de lui imposer des mesures réglementaires spécifiques visées aux articles 9 à 13 de la directive « accès ». Ces obligations sont les suivantes :
― obligations de transparence ;
― obligations de non-discrimination ;
― obligations relatives à la séparation comptable ;
― obligations relatives à l'accès à des ressources spécifiques et à leur utilisation ;
― contrôle des prix et obligations relatives au système de comptabilisation des coûts.
L'article 8 de la directive « accès » prévoit également que les obligations imposées sont fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés dans l'article 8 de la directive « cadre ».
Par ailleurs, le paragraphe 118 des lignes directrices indique qu'un projet de mesure est considéré comme compatible avec le principe de proportionnalité si la mesure à prendre poursuit un but légitime et si les moyens employés sont à la fois nécessaires et aussi peu contraignants que possible.
Le I de l'article L. 38 du CPCE prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer, en matière d'interconnexion et d'accès, une ou plusieurs des obligations [...], proportionnées à la réalisation des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 ».
Il s'agit des obligations suivantes :
― rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès, notamment publier une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion ou d'accès lorsqu'ils sont soumis à des obligations de non-discrimination ;
― fournir des prestations d'interconnexion ou d'accès dans des conditions non-discriminatoires ;
― faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés ;
― ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ;
― isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès.
S'agissant de l'accès, l'Autorité peut imposer à un opérateur réputé exercer une influence significative de faire droit aux demandes raisonnables, notamment lorsqu'elle considère qu'un refus ou des propositions déraisonnables empêcheraient l'émergence d'un marché de détail concurrentiel durable ou risqueraient d'être préjudiciables aux utilisateurs finaux.
Dans ce cadre, l'Autorité peut préciser les contours de l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès en imposant certains des mécanismes spécifiques qui figurent notamment à l'article D. 310 du CPCE.
En outre, lorsque l'Autorité apprécie le caractère proportionné des obligations d'accès qu'elle est susceptible d'imposer, elle veille notamment à prendre en compte les critères d'analyse suivants, mentionnés au V de l'article L. 38 du CPCE :
― la viabilité technique et économique de l'utilisation ou de la mise en place de ressources concurrentes, compte tenu du rythme auquel le marché évolue et de la nature et du type d'interconnexion et d'accès concerné ;
― le degré de faisabilité de la fourniture d'accès proposée, compte tenu de la capacité disponible ;
― l'investissement initial réalisé par le propriétaire des ressources, sans négliger les risques inhérents à l'investissement ;
― la nécessité de préserver la concurrence à long terme ;
― le cas échéant, les éventuels droits de propriété intellectuelle pertinents ;
― la fourniture de services paneuropéens.
En toute hypothèse et quelles que soient les obligations qui peuvent être imposées, celles-ci doivent être proportionnées aux objectifs généraux fixés au II de l'article L. 32-1 du CPCE, à savoir :
1° A la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du service public des communications électroniques ;
2° A l'exercice, au bénéfice des utilisateurs, d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ;
3° Au développement de l'emploi, de l'investissement efficace dans les infrastructures, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques ;
4° A la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ;
5° Au respect par les opérateurs de communications électroniques du secret des correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages transmis ainsi que de la protection des données à caractère personnel ;
6° Au respect, par les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, de l'ordre public et des obligations de défense et de sécurité publique ;
7° A la prise en compte de l'intérêt des territoires et des utilisateurs, notamment handicapés, dans l'accès aux services et aux équipements ;
8° Au développement de l'utilisation partagée entre opérateurs des installations mentionnées aux articles L. 47 et L. 48 ;
9° A l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs ;
10° A la mise en place et au développement de réseaux et de services et à l'interopérabilité des services au niveau européen ;
11° A l'utilisation et à la gestion efficaces des fréquences radioélectriques et des ressources de numérotation ;
12° A un niveau élevé de protection des consommateurs, grâce notamment à la fourniture d'informations claires, notamment par la transparence des tarifs et des conditions d'utilisation des services de communications électroniques accessibles au public ;
13° Au respect de la plus grande neutralité possible, d'un point de vue technologique, des mesures qu'ils prennent ;
14° A l'intégrité et à la sécurité des réseaux de communications électroniques ouverts au public.
Compte tenu de la situation concurrentielle observée pour les offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, l'Autorité est amenée à imposer plusieurs obligations à France Télécom, établies au terme de l'analyse suivante.
4.2. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès
Le 3° du I de l'article L. 38 du CPCE prévoit que l'Autorité peut imposer des obligations d'accès à un opérateur disposant d'une influence significative sur un marché pertinent. Conformément à l'article D. 310 du CPCE, elles peuvent notamment prendre la forme d'une obligation d'accorder à des tiers l'accès à des éléments ou ressources de réseau spécifiques, de négocier de bonne foi avec les opérateurs ou encore de ne pas retirer un accès déjà accordé.
4.2.1. Obligation générique
4.2.1.1. Obligation générique de faire droit aux demandes raisonnables d'accès
L'analyse de la situation concurrentielle prévalant sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, telle que développée précédemment dans la partie relative à la désignation du ou des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché, a montré que France Télécom bénéficie sur ce marché du contrôle d'une infrastructure difficile à dupliquer.
En effet, si les opérateurs tiers peuvent, soit sur la base du dégroupage de la boucle locale cuivre, soit en déployant leurs propres réseaux de boucle locale en fibre optique, proposer aujourd'hui leurs propres offres de gros d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational concurrentes à celles de France Télécom, la fourniture de telles offres reste néanmoins limitée géographiquement à une partie du territoire, là où les opérateurs tiers ont installé leurs équipements actifs, raccordés à leurs réseaux de collecte.
Pour compléter leur couverture, et pouvoir ainsi commercialiser des offres de détail au plan national, les opérateurs tiers doivent nécessairement avoir accès aux offres de gros activées fondées sur le réseau de France Télécom, seul opérateur à avoir installé ses équipements actifs pour desservir l'ensemble du territoire national, au niveau de la totalité de ses NRA.
Il ressort de ces éléments que les critères cités aux alinéas a, b et d du V de l'article L. 38 du CPCE sont ainsi vérifiés.
L'Autorité estime ainsi qu'il est nécessaire d'imposer à France Télécom l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
Il convient dès lors d'apprécier le caractère raisonnable de telles demandes d'accès, d'une part, sur le segment de marché du haut débit et, d'autre part, sur le segment de marché du très haut débit.
4.2.1.2. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès pour le haut débit
Sur le segment de marché du haut débit, France Télécom est le seul opérateur à avoir installé ses équipements actifs DSL dans la totalité de ses 14 500 NRA. Le dégroupage ne concernait fin 2010 que 5 400 NRA, ne permettant de couvrir que 83 % des ménages.
A l'horizon de la présente analyse, et malgré les relais de croissance pour l'extension du dégroupage que constituent les réseaux d'initiative publique et l'offre « LFO » (Lien Fibre Optique) de France Télécom, il apparaît qu'une large proportion des NRA de France Télécom ne sera pas dégroupée.
Pour compléter la couverture du dégroupage, et pouvoir ainsi commercialiser des offres de détail haut débit en DSL au niveau national, les opérateurs doivent nécessairement avoir accès à des offres de gros haut débit activées en DSL de France Télécom. L'accès au réseau haut débit DSL de France Télécom est donc indispensable pour rendre possible l'exercice d'une concurrence effective entre les opérateurs sur les marchés de détail, à l'échelle du territoire national et dans l'intérêt des utilisateurs, conformément aux objectifs mentionnés au 2° du II de l'article L. 32-1 et à l'article D. 310 du CPCE.
Actuellement, plusieurs modes d'accès au réseau DSL de France Télécom coexistent : l'achat de trafic haut débit centralisé en un point de livraison national unique ou à des niveaux intermédiaires, soit régionaux, soit départementaux, du réseau. D'un point de vue économique, le recours à un système de collecte relativement capillaire plutôt qu'à une offre nationale permet à un opérateur alternatif qui a déployé son propre réseau longue distance raccordant les principales villes des différentes régions et départements de remplir ce réseau, rentabilisant ainsi plus rapidement ses investissements.
L'Autorité considère à ce titre comme raisonnable la demande d'un opérateur tiers de disposer d'un accès aux offres de gros haut débit activées fondées sur le réseau DSL de France Télécom.
4.2.1.3. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès pour le très haut débit
Sur le segment de marché du très haut débit, il convient d'analyser, comme le propose la Commission européenne dans son document de recommandation NGA, l'opportunité d'imposer à l'opérateur puissant la fourniture en gros d'offres d'accès très haut débit activées fondées sur son réseau de boucle locale en fibre optique.
De la même manière que la régulation du haut débit a permis la mise en place de conditions favorables à la concurrence par les infrastructures sur la base du dégroupage, il est nécessaire de définir un cadre permettant à l'ensemble des opérateurs d'investir dans le très haut débit.
L'Autorité estime à ce titre que le cadre réglementaire en vigueur aujourd'hui établi, d'une part, sur l'accès aux infrastructures de génie civil de France Télécom et, d'autre part, sur l'accès à la partie terminale des réseaux de fibre optique est favorable au déploiement d'infrastructures de boucle locale optique concurrentes par les différents opérateurs et donc à l'émergence d'offres innovantes et différenciées sur le segment très haut débit du marché de gros considéré.
L'Autorité note que les opérateurs poursuivent progressivement leurs déploiements de réseaux de fibre optique, avant tout au niveau des communes de zones très denses pour lesquelles devrait spontanément émerger une concurrence sur le marché de gros des offres activées, permettant à des opérateurs nouveaux entrants de pouvoir être présents sur le marché de détail. Ainsi, l'Autorité remarque avec intérêt que Numericable a proposé, en novembre 2010, une offre de bitstream très haut débit à Bouygues Telecom, établie sur son réseau de câble coaxial modernisé.
En dehors des zones très denses, l'Autorité considère, au regard du stade très peu avancé des déploiements, qu'il n'y a pas lieu de considérer, pour le présent cycle d'analyse de marché, d'obligations spécifiques sur la fourniture d'offres d'accès très haut débit activées. Néanmoins, l'Autorité entend rester vigilante sur les effets du cadre réglementaire en vigueur en dehors des zones très denses. Ainsi, si celui-ci ne conduisait pas à l'établissement d'une concurrence effective sur la fourniture de services très haut débit dans les zones considérées à l'horizon de la présente analyse, l'Autorité pourrait être amenée à réévaluer la possibilité d'imposer des obligations asymétriques sur le réseau de fibre optique de l'opérateur puissant.
L'Autorité partage ainsi l'analyse développée par l'Autorité de la concurrence lorsqu'elle considère que les obligations imposées par la régulation symétrique « sont de nature à créer une dynamique concurrentielle de laquelle peuvent émerger spontanément les offres de gros attendues par d'éventuels nouveaux entrants. [...] Si néanmoins de telles offres de gros demeuraient inexistantes ou par trop éloignées d'attentes raisonnables de nouveaux entrants, il appartiendrait alors à l'ARCEP d'intervenir en imposant, le cas échéant, des obligations complémentaires ex ante, notamment dans le cadre asymétrique de l'analyse des marchés ». (9)
Compte tenu de ces éléments, l'Autorité estime à ce stade ni justifié ni proportionné d'imposer à France Télécom, au titre de sa puissance sur le marché, de faire droit aux demandes d'accès très haut débit activées fondées sur son réseau de boucle locale optique.
4.2.1.4. Cas des infrastructures dont France Télécom n'est pas propriétaire
Dans les zones où France Télécom n'est ni propriétaire ni gestionnaire de la boucle locale (zones aéroportuaires de Paris, par exemple), une demande d'accès activé à ces réseaux formulée auprès de France Télécom ne saurait être considérée comme raisonnable. France Télécom n'est donc pas soumise sur ces zones à l'obligation de fournir des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infra-national.
En pratique, si les propriétaires ou gestionnaires de la boucle locale dans ces zones ne proposaient pas des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational dans des conditions équivalentes à celles fournies par France Télécom sur le reste du territoire, l'Autorité serait amenée à traiter cette situation en règlement de différend.
4.2.1.5. Conclusion
Au vu des éléments d'analyse qui précèdent, l'Autorité estime qu'il est nécessaire d'imposer à France Télécom l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables des opérateurs tiers visant à obtenir l'accès à des éléments de réseaux sur DSL ou à des moyens et ressources associés sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational. Ces demandes devront respecter les critères du V de l'article L. 38 du CPCE.
Dans ce cadre, France Télécom est invitée à négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent l'accès sur ce marché, afin de minimiser les cas de litiges.
En l'absence de mesure moins contraignante pour France Télécom qui permettrait d'atteindre le même but, les prescriptions sont proportionnées tant aux critères énoncés au V de l'article L. 38 du CPCE qu'aux objectifs de l'article L. 32-1 du CPCE précité, en particulier les 3° et 4°.
4.2.2. Précision de l'obligation
Le caractère raisonnable d'une demande d'accès formulée par un opérateur devra être apprécié au regard de la proportionnalité entre les contraintes économiques et techniques d'une telle demande pour France Télécom et le bénéfice attendu pour la résolution d'un problème concurrentiel particulier ou, plus généralement, pour le fonctionnement des marchés du haut débit et du très haut débit.
A cette fin, il sera tenu le plus grand compte des éléments d'appréciation retenus au V de l'article L. 38 du CPCE.
Compte tenu du développement actuel du marché et des offres, il apparaît d'ores et déjà que certaines demandes d'accès doivent être considérées comme raisonnables ; il convient donc, conformément à l'article D. 310 du CPCE, de préciser plusieurs obligations qu'il apparaît nécessaire d'imposer à France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées à un niveau infranational.
4.2.2.1. Prestations existantes
Les offres de gros actuellement offertes par France Télécom et qui relèvent du marché pertinent considéré sont les suivantes :
― DSL Entreprises ;
― Core Ethernet Entreprises ;
― DSL Access/DSL Access Only ;
― DSL Collect ATM/IP/Ethernet.
Ces offres représentaient, à la date du 31 décembre 2010, 16,2 % des accès que France Télécom vendait sur le marché de gros aux opérateurs alternatifs. Elles apparaissent donc comme structurantes pour le marché. Toute remise en cause ou évolution artificielle à court terme de ces prestations serait une source de déstabilisation technique, économique et commerciale des opérateurs et serait finalement nuisible au marché.
Le maintien des prestations existantes, dès lors qu'elles sont susceptibles de répondre aux obligations imposées au titre de la présente analyse de marché, est donc un élément indispensable pour assurer la pérennité des plans de développement des opérateurs. Ce maintien doit être assuré sans coûts supplémentaires ou frais de migration.
En particulier, certaines évolutions ont été apportées par France Télécom aux processus et prestations existants depuis les décisions d'analyse de marché n° 2005-0280 et n° 2008-0836 de l'Autorité et intégrés dans l'offre de référence « accès et collecte DSL », notamment :
― pour les offres destinées in fine à une clientèle résidentielle :
― la possibilité de commander des accès en ADSL2+ ;
― la possibilité de commander des accès par reprise de ligne et par construction de ligne pour l'offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée ;
― la prestation de retour rapide en cas d'écrasement à tort ;
― la possibilité de commander des accès lorsque les lignes sont sur multiplexeurs ;
― l'introduction d'un service extranet (« e-RDV ») qui permet de prendre des rendez-vous directement dans le planning des techniciens d'intervention de France Télécom avant de transmettre la commande d'accès correspondante en cas de construction de ligne ;
― pour les offres destinées in fine à une clientèle professionnelle :
― la protection des accès sensibles contre les écrasements à tort ;
― une option payante de garantie de temps de rétablissement avant la fin du premier jour ouvrable suivant le dépôt de signalisation pour l'offre DSL Access Only.
D'autres processus et prestations, transverses aux différentes offres, ne sont pas intégrés à l'offre de référence « accès et collecte DSL », mais également proposés par France Télécom :
― pour les offres destinées in fine à une clientèle résidentielle :
― la désaturation monopaire ;
― l'introduction d'un service extranet de recherches d'informations à l'adresse ;
― pour les offres destinées in fine à une clientèle professionnelle :
― la désaturation monopaire et multipaire.
L'Autorité s'assurera que ces prestations régulées non inscrites dans l'offre de référence sont conformes aux obligations de France Télécom sur ce marché.
Toutefois, les évolutions technologiques peuvent rendre obsolètes, à l'horizon de la présente analyse, certaines prestations existantes. Sous certaines conditions, qui devront être précisées le cas échéant, l'obligation de maintenir de telles prestations, si elle ne paraît pas proportionnée, pourrait être levée.
Le maintien des prestations déjà proposées aux opérateurs, dès lors qu'elles sont susceptibles de répondre aux obligations imposées au titre de la présente analyse de marché, se fonde sur les dispositions des 1° et 3° de l'article D. 310 du CPCE. En l'absence de moyen moins contraignant permettant de rendre possible l'exercice d'une concurrence effective entre les opérateurs sur les marchés de détail à l'échelle du territoire national, dans l'intérêt des utilisateurs, conformément aux objectifs mentionnés au 2° du II de l'article L. 32-1 et à l'article D. 310 du CPCE, et compte tenu du b du V de l'article 38 du CPCE relatif au degré de faisabilité de la fourniture des accès concernés, la mesure est proportionnée au but poursuivi.
4.2.2.2. Les interfaces de collecte
Lors du premier cycle d'analyse des marchés du haut débit, deux types de réseaux avaient été principalement déployés par les opérateurs de communications électroniques pour le haut débit : les réseaux utilisant l'ATM comme protocole de transmission pour le cœur de réseau, d'une part, et les réseaux « tout IP », d'autre part. Ces choix d'architecture représentent des investissements lourds, qui ne peuvent être remis en cause que sur un terme long.
France Télécom utilise à ce stade les deux technologies sur son réseau : elle a déployé à la fois un réseau ATM très capillaire et un réseau IP qui présente au moins un point d'entrée par région. Ces deux protocoles de transport sont utilisés par le trafic issu des accès DSL. En effet, les accès DSL produits par France Télécom sont dans un premier temps transportés sur le réseau ATM à travers plusieurs brasseurs, puis convertis en IP par un équipement BAS (« Broadband Access Server ») et transportés ensuite sur le réseau IP de France Télécom.
Or, comme indiqué précédemment, un troisième mode de collecte, l'Ethernet, est disponible et utilisé par un grand nombre d'acteurs. L'Ethernet apparaît comme une technologie de transmission efficace en termes de coûts et de qualité de service. Cette interface semble aujourd'hui s'imposer comme celle des réseaux de nouvelle génération. Sur les marchés résidentiel et professionnel, les opérateurs sont aujourd'hui à même de proposer des offres adaptées aux besoins de leurs clients en déployant uniquement des réseaux Ethernet « natifs ».
La collecte Ethernet présente de nombreux avantages. Les équipements sont standardisés et font l'objet d'une demande forte au niveau mondial, ils présentent donc des coûts d'achats relativement faibles. En outre, la collecte Ethernet devrait permettre à terme de fournir des offres à destination tant du marché professionnel que résidentiel et ce, en présentant une architecture, des coûts d'exploitation et une gestion opérationnelle simplifiées par rapport à la collecte ATM.
De même, du point de vue des réseaux d'accès, il apparaît que depuis plusieurs mois déjà, les DSLAM achetés par France Télécom et par les opérateurs alternatifs sont presque uniquement des DSLAM Ethernet. De même, fin 2010, Orange avait déployé des DSLAM Ethernet dans plus de 8 000 NRA.
Dès lors, il semble nécessaire que cette évolution technologique majeure, structurante pour l'évolution des réseaux au cours des trois prochaines années, se traduise par une évolution des interfaces de livraison proposées dans le cadre des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
La livraison des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational proposées à ce stade par France Télécom se fait aujourd'hui selon deux principales modalités, conformément aux obligations imposées dans le cadre du précédent cycle d'analyse des marchés du haut débit :
― en IP, pour des offres destinées in fine au marché résidentiel ;
― en ATM pour des offres destinées in fine soit au marché résidentiel, soit au marché professionnel.
Dans ces conditions, il convient d'examiner quelles modalités d'accès, en termes d'interfaces de livraison, il apparaît justifié et proportionné d'imposer à France Télécom sur ce marché dans le cadre de la présente décision.
L'Autorité note tout d'abord que le 13° du II de l'article L. 32-1 du CPCE dispose que l'Autorité doit « veiller au respect de la plus grande neutralité possible, d'un point de vue technologique », des mesures qu'elle prend.
Par ailleurs, étant données les conditions de développement des réseaux en France précisées ci-dessus, restreindre l'offre de gros à un seul type d'interface, ATM, IP ou Ethernet, serait de nature à constituer une barrière à l'entrée pour des acteurs qui auraient fait un autre choix technologique, et limiterait ainsi de fait le développement de la concurrence sur les zones où l'accès au réseau de France Télécom est incontournable.
L'Autorité note que France Télécom a ouvert une offre en collecte Ethernet pour le marché résidentiel depuis le 1er mai 2008. L'adoption par France Télécom de cette nouvelle interface dans son réseau, au niveau cœur comme au niveau accès, n'est toutefois que partielle et sa généralisation à l'ensemble du territoire n'interviendra vraisemblablement pas avant plusieurs mois, voire plusieurs années.
La fourniture d'une offre en interface Ethernet ne pourra donc se faire que progressivement, à mesure que France Télécom installera dans ses NRA et les nœuds amont de son réseau des équipements permettant d'assurer un tel service, pour ses besoins propres comme pour ceux des clients d'une telle offre.
Enfin, l'Autorité considère que le maintien d'une offre en collecte ATM ne paraît plus proportionnée à terme, compte tenu des coûts d'achat et d'exploitation lié à cette technologie, notamment en comparaison de la technologie Ethernet. Au cours des prochaines années, une substitution devrait donc s'opérer entre l'ATM et l'Ethernet, tant chez France Télécom que chez les opérateurs alternatifs. Ainsi, dans la mesure où ces deux technologies paraissent substituables d'un point de vue fonctionnel, tant en matière d'offres DSL à destination d'une clientèle résidentielle que professionnelle, les obligations incombant aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational doivent tenir compte de cette substitution progressive.
Plus précisément, la coexistence d'un grand nombre d'interfaces de livraison n'apparaît ni justifiée ni proportionnée dès lors que cette coexistence est coûteuse et que l'Ethernet a vocation à se substituer progressivement à l'ATM.
L'obligation faite à France Télécom de proposer une offre d'accès haut débit activée sur DSL livrée au niveau infranational en collecte ATM pourrait ainsi être levée sur les NRA disposant de DSLAM Ethernet.
Cela ne pourrait toutefois se faire que sous certaines conditions, afin de ne pas mettre en péril les investissements et les plans d'affaires élaborés par les opérateurs alternatifs :
― uniquement sur les NRA ouverts à la collecte Ethernet ;
― sous réserve que la collecte Ethernet permette effectivement de proposer des offres, tant à destination de la clientèle professionnelle que de la clientèle résidentielle, avec des garanties équivalentes et des fonctionnalités similaires à la collecte ATM ;
― au terme d'un délai de prévenance raisonnable, en dissociant éventuellement la fermeture commerciale dans un premier temps puis la fermeture technique ;
― moyennant l'existence d'une offre de migration techniquement et financièrement satisfaisante pour les opérateurs alternatifs souhaitant migrer massivement leurs abonnés d'une collecte ATM ou IP vers une collecte Ethernet et sous réserve d'un dimensionnement suffisant par France Télécom de ses DSLAM Ethernet.
En particulier, dans la mesure où la migration de la collecte ATM vers la collecte Ethernet engendrerait pour un opérateur alternatif une augmentation de sa facture récurrente de collecte, la fermeture technique et commerciale, par France Télécom, sur une zone donnée, de l'offre de collecte ATM ne devra pas induire de coûts liés à l'opération de migration « forcée » vers l'Ethernet pour ces opérateurs.
En conséquence, sur le fondement des dispositions du 3° de l'article D. 310 du CPCE, l'Autorité estime nécessaire que France Télécom propose aux opérateurs alternatifs les interfaces de livraison suivantes pour la livraison infranationale de ses offres d'accès haut débit activées sur DSL :
― en IP sur l'ensemble du territoire relevant du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational ;
― en Ethernet pour l'ensemble des NRA équipés de DSLAM permettant une collecte Ethernet ;
― en ATM pour l'ensemble des NRA où les conditions énoncées précédemment ne seraient pas vérifiées.
Au demeurant, cette obligation s'impose sans préjudice du traitement qui pourrait être réservé à toute demande d'accès de livraison de flux sous une autre interface.
Cette obligation permettra de garantir une concurrence loyale et effective. Compte tenu de l'impossibilité pour les opérateurs alternatifs de mettre en place des ressources concurrentielles, du caractère limité des contraintes qu'elle crée en termes d'investissement pour France Télécom, du degré de faisabilité de la fourniture des accès en IP, en Ethernet et en ATM et de la nécessité de préserver la concurrence à long terme, conformément aux éléments mentionnée aux a à d du V de l'article 38 du CPCE et en l'absence de mesure moins contraignante permettant de garantir, dans les mêmes conditions, la loyauté et l'effectivité de la concurrence, la mesure est proportionnée à l'objectif poursuivi.
Par ailleurs, la collecte sur fibre optique offre, par rapport à la collecte sur cuivre, des capacités de collecte nettement supérieures auxquelles il importe que l'ensemble des opérateurs tiers puissent prétendre dans les meilleurs délais. A ce titre, pour les NRA pour lesquels de nouveaux équipements Ethernet sont raccordés à une collecte en fibre optique alors que les équipements ATM déjà en place sont raccordés à une collecte cuivre, il convient que les fonctionnalités des offres de gros haut débit activées en DSL de France Télécom ne soient pas artificiellement limitées. Cela suppose que France Télécom soit en mesure pour ces NRA de proposer les meilleurs débits pour ses offres de gros activées dans un délai maximum de trois mois après l'installation des équipements Ethernet.
4.2.2.3. Niveau de livraison
L'observation des réseaux déployés par les opérateurs alternatifs en France met en évidence une capillarité accrue de ces réseaux et un déploiement de plusieurs opérateurs alternatifs aux niveaux régionaux et départementaux. En effet, les réseaux de collecte des principaux opérateurs alternatifs présentent un niveau de capillarité élevé du fait de leurs investissements dans le dégroupage. Ce niveau leur permettrait, de manière quasi systématique, de prendre livraison de la collecte à un niveau départemental, quelle que soit la modalité de livraison retenue.
Les offres de gros DSL actuelles de France Télécom proposent deux types de raccordement correspondant à des niveaux tarifaires distincts :
― un niveau « plaque », correspondant à un niveau de type régional, permettant de couvrir le territoire national en raccordant une vingtaine de points du réseau de France Télécom, que ce soit en ATM, en Ethernet ou en IP ;
― un niveau « local », correspondant à un niveau de type départemental, disponible uniquement en ATM, permettant de couvrir le territoire national en raccordant une centaine de points du réseau de France Télécom.
L'opérateur peut choisir un nombre de points de raccordement intermédiaire ; il dispose alors d'un tarif mixte, relevant pour partie du tarif « local » et pour partie du tarif « plaque ».
Dans ces conditions, il convient d'examiner quelles modalités d'accès, en termes de capillarité des offres de gros, il apparaît justifié et proportionné d'imposer à France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
Il apparaît tout d'abord nécessaire, pour garantir le développement d'une concurrence durable dans les zones non dégroupées, de maintenir la disponibilité de la livraison des offres de gros au niveau régional, quelle que soit la technologie de livraison.
En effet, seul ce niveau de capillarité est en mesure de répondre aux besoins d'opérateurs tiers encore peu déployés, et de permettre ainsi le déploiement de réseaux alternatifs favorisant ainsi l'exercice d'une concurrence renforcée sur les marchés de détail du haut débit en DSL. En particulier, le déploiement éventuel par un nouvel entrant d'un réseau capillaire, en vue notamment de faire du dégroupage, est coûteux et, par conséquent, nécessairement progressif. Au cours de ses premières phases de déploiement, un tel opérateur doit pouvoir s'appuyer sur une livraison au niveau régional des offres d'accès haut débit activées sur DSL de France Télécom. Les entrées d'acteurs tels que Darty Telecom ou Bouygues Telecom sur le marché du haut débit confirment l'importance de maintenir un niveau de livraison régional.
Au-delà de ce niveau de livraison correspondant à un déploiement minimal des opérateurs, il apparaît également justifié que France Télécom accède aux demandes raisonnables des opérateurs concernant le raccordement pour un réseau plus capillaire, et donc au niveau départemental, dans la mesure où l'ouverture de tels points de raccordement est techniquement faisable et économiquement raisonnable pour France Télécom.
L'examen des contraintes représentées par la fourniture de ces offres pour France Télécom met en évidence que les niveaux de raccordement aux niveaux départemental et régional sont compatibles avec l'architecture actuelle du réseau ATM de France Télécom. Ils correspondent en effet à un accès à son réseau au niveau des nœuds qui hébergent des équipements de routage des flux, permettant d'orienter le trafic vers d'autres nœuds de son réseau : le coût supplémentaire consistant à orienter ces trafics vers le réseau d'opérateurs alternatifs qui viendraient s'y connecter est de fait réduit. En pratique, ces différents niveaux de capillarité des offres de gros sont déjà proposés par France Télécom en ATM au travers des offres « DSL Collect ATM » et « DSL Entreprises ».
En ce qui concerne la collecte Ethernet, elle est utilisée par France Télécom pour ses propres besoins sur un nombre restreint de NRA et mise en œuvre sur le marché de gros depuis le 1er mai 2008, pour les offres destinées in fine à la clientèle résidentielle. France Télécom prévoit son extension progressive à un nombre conséquent de NRA au cours des prochaines années. En outre, l'Ethernet apparaît comme la technologie la plus pérenne pour se substituer à terme à l'ATM. Cependant, l'examen des contraintes représentées par la fourniture d'une offre de collecte Ethernet met en évidence que le niveau de raccordement au niveau départemental n'est pas directement compatible avec l'architecture du réseau Ethernet déployée par France Télécom. Afin d'obtenir des fonctionnalités de sécurisation du réseau satisfaisantes pour la fourniture du service aux opérateurs tiers, France Télécom serait donc conduite à mettre en œuvre, si une obligation de fourniture à un niveau départemental lui était imposée, une architecture de collecte non optimisée, qui pourrait générer un coût de livraison au niveau départemental significativement supérieur au coût de livraison correspondant au niveau régional. Dans ces conditions, il ne semble pas proportionné d'imposer à France Télécom de fournir une telle offre.
La mise en place d'un niveau de livraison départementale paraît également difficile en IP, dans la mesure où France Télécom a mis en œuvre historiquement une architecture ne permettant qu'une livraison au niveau régional, qu'il s'avérerait complexe de faire évoluer. L'ouverture d'une offre de collecte IP au niveau départemental impliquerait en effet d'augmenter significativement le nombre de sites munis de BAS mis en œuvre par France Télécom, ce qui rendrait non proportionnée l'obligation de livrer la collecte à un niveau départemental dans le cas de l'IP.
Par ailleurs, l'Autorité note que les opérateurs peuvent être souscripteurs auprès de France Télécom de plusieurs prestations distinctes d'accès haut débit livrées au niveau infranational, comme des offres professionnelles et des offres résidentielles par exemple. Afin de favoriser une mutualisation des investissements et une rationalisation des architectures techniques, une homogénéisation des points de raccordement proposés au titre des différentes offres pourrait être garantie dans la mesure où elle est techniquement faisable.
Enfin, conformément à l'analyse présentée dans la partie « Prestations existantes », il convient de s'assurer que les offres formulées maintiennent les points de raccordement actuels, afin de ne pas déstabiliser les plans d'investissement et les stratégies de déploiement mises en place dans l'ancien cadre par les opérateurs alternatifs.
Le critère de faisabilité de l'accès énoncé au b du V de l'article L. 38 du CPCE est ainsi vérifié.
Dans ces conditions, sur le fondement du 1° de l'article D. 310 du CPCE, l'analyse concurrentielle conduit l'Autorité à proposer de mettre à la charge de la société France Télécom l'obligation de fournir aux opérateurs, en ATM :
― une offre d'accès haut débit activée sur DSL permettant une couverture nationale à travers un raccordement régional, en une vingtaine de points ;
― une offre d'accès haut débit activée sur DSL permettant une couverture nationale à travers un raccordement départemental en une centaine de points.
En ce qui concerne la collecte IP et la collecte Ethernet, sur le fondement de l'article D. 310 (1°) du CPCE, l'analyse concurrentielle conduit l'Autorité à proposer de mettre à la charge de la société France Télécom l'obligation de fournir aux opérateurs une offre d'accès haut débit activée sur DSL permettant une couverture nationale à travers un raccordement régional, en une vingtaine de points.
France Télécom devra, autant que faire se peut, homogénéiser les points de raccordement proposés au titre de ces différents modes de collecte.
Edictée dans le but de garantir une concurrence durable, en particulier sur les zones non dégroupées, et l'égalité des conditions de concurrence, et en l'absence de mesures moins contraignantes pour France Télécom, cette obligation est proportionnée aux objectifs poursuivis précités, compte tenu des éléments mentionnés aux a, b et d du V de l'article L. 38 du CPCE.
4.2.2.4. Offres d'accès haut débit activées avec service
de téléphonie commutée et sans service de téléphonie commutée
La sortie de l'offre de gros DSL Access Only de France Télécom (dite « ADSL nu ») à l'été 2006 a contribué à l'uniformisation fonctionnelle des offres haut débit sur l'ensemble du territoire : il est désormais possible pour un client final éligible à l'ADSL de s'affranchir de l'abonnement au réseau téléphonique commuté classique quelle que soit sa localisation géographique.
Depuis cette date, deux principales offres de gros de France Télécom permettent donc aux opérateurs alternatifs de proposer à leurs clients de s'affranchir de l'abonnement au réseau téléphonique commuté traditionnel. Il s'agit du dégroupage total dans les zones dégroupées et de l'ADSL nu dans les zones non dégroupées.
Ces offres portent aujourd'hui la croissance du marché et se substituent de plus en plus aux offres de gros nécessitant le maintien d'un abonnement téléphonique distinct, à savoir le dégroupage partiel et l'offre DSL Access. En particulier, l'offre de gros DSL Access Only porte aujourd'hui l'essentiel de la croissance du parc d'accès haut débit sur DSL livrés au niveau infra-national. Elle contribue à un effet de rattrapage entre les zones dégroupées et non dégroupées, en termes de taux de pénétration et d'usages.
Au cours des trois dernières années, le parc des offres de gros sans abonnement au service téléphonique achetées à France Télécom a progressé de 5,4 millions d'accès.
En outre, la faisabilité technique d'une offre d'ADSL nu pour France Télécom est relativement aisée sur le marché de gros dès lors qu'elle propose des offres d'ADSL nu sur le marché de détail résidentiel et qu'une telle offre existe d'ores et déjà dans le cadre de l'offre de référence « accès et collecte DSL » de France Télécom.
Par ailleurs, une part significative des clients finals souhaitant pouvoir conserver un abonnement au réseau téléphonique commuté en parallèle de leur abonnement haut débit, il est nécessaire que France Télécom continue à proposer une offre d'accès haut débit activée avec service de téléphonie commutée, dans la continuité de ce qu'elle propose à ce jour via l'offre DSL Access.
La faisabilité de l'accès et le caractère limité des investissements correspondants, critères cités aux b et c du V de l'article L. 38 du CPCE, sont ainsi vérifiés.
En conséquence, afin de renforcer la concurrence au bénéfice des utilisateurs finaux, l'Autorité considère que la société France Télécom doit être tenue, conformément aux dispositions de l'article D. 310 (1° et 3°) du CPCE, de proposer aux opérateurs :
― une offre d'accès haut débit activée avec service de téléphonie commutée ;
― une offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée.
Compte tenu des dispositions des a, b, c et d du V de l'article L. 38 du CPCE et en l'absence de mesures moins contraignantes permettant d'atteindre le même objectif, l'obligation imposée à France Télécom est proportionnée.
4.2.2.5. Offre professionnelle et offre résidentielle
4.2.2.5.1. Obligation générale
Les opérateurs alternatifs développent des offres de détail fondées sur des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infra-national à la fois pour la clientèle résidentielle et pour la clientèle professionnelle. France Télécom propose elle aussi ces deux types de solutions, à travers Orange Business Services s'agissant de la clientèle professionnelle, et Orange pour la clientèle résidentielle. Ces deux types d'offres, si elles correspondent à des prestations techniques voisines, se distinguent nettement en termes d'options ou caractéristiques additionnelles, notamment en termes de qualité de service et de garantie du débit, comme indiqué précédemment.
Pour un opérateur alternatif, la qualité de service dépend à la fois des services et paramètres qu'il contrôle lui-même et de la qualité de service propre de l'offre de gros de France Télécom.
Ainsi, afin de pouvoir commercialiser leurs produits auprès de clients résidentiels et professionnels, et concurrencer les offres aval de France Télécom, les opérateurs alternatifs doivent bénéficier d'offres de gros répondant aux besoins de ces deux types de clientèles, résidentielle et professionnelle, y compris à certains besoins spécifiques de la clientèle professionnelle, dont la grande variété de typologies de raccordement peut nécessiter des processus adaptés.
Pour France Télécom, la fourniture d'offres de gros destinées à la clientèle résidentielle et d'offres de gros destinées à la clientèle professionnelle ne constitue pas une charge excessive. Le réseau sous-jacent à la fourniture de ces deux catégories d'offres est le même ; seuls diffèrent les niveaux de qualité de service et de garantie du débit. Or, le réseau de France Télécom est conçu pour gérer de multiples offres, avec des paramétrages de qualité de service variés qui sont commercialisés sur les marchés de détail résidentiel et professionnel.
De plus, France Télécom propose d'ores et déjà ces deux types d'offres de gros, à travers les offres DSL Entreprises et Core Ethernet Entreprises, répondant aux besoins de la clientèle professionnelle, et les offres DSL Access, DSL Collect ATM, DSL Collect IP, DSL Collect Ethernet pour les offres à destination de la clientèle résidentielle.
Par ailleurs, dans le cadre de l'évolution de la collecte ATM vers la collecte Ethernet, il convient que France Télécom formule une offre de gros sur collecte Ethernet qui autorise les mêmes fonctionnalités que l'offre DSL Entreprises, basée sur une collecte ATM, et en particulier la transparence à l'Ethernet que ne permet pas en l'état l'offre Core Ethernet Entreprises, basée sur la collecte Ethernet. France Télécom a d'ores et déjà entamé des travaux en vue d'élaborer et de fournir une telle offre, dénommée WE-LAN, dont le démarrage est à ce stade prévu par France Télécom pour l'automne 2011. Il convient que France Télécom poursuive ces travaux, en concertation avec les opérateurs utilisateurs, afin d'aboutir à la fourniture d'une offre de gros à même de se substituer, à terme, à l'offre DSL Entreprises, avec des fonctionnalités au moins équivalentes.
L'Autorité souhaite à ce titre que les modalités d'évolution et de migration de telles offres de gros soient discutées dans le cadre des groupes de travail multilatéraux sous l'égide de l'Autorité, afin de préparer les évolutions inéluctables des architectures de réseau après 2012.
Opérateur de gros puissant, présent également sur le marché de détail, France Télécom devra en effet veiller à respecter le principe de non-discrimination et de transparence dans la conception et la mise en œuvre de ses nouvelles offres. France Télécom devra en particulier mettre à disposition des opérateurs de détail les mêmes informations préalables qu'elle utilise en interne pour adresser la clientèle professionnelle sur le marché de détail.
Il ressort de ces éléments que les critères cités aux a et b du V de l'article L. 38 du CPCE sont ainsi vérifiés. En tenant compte de ces éléments, cette obligation n'est pas disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi et des contraintes qu'elle fait peser sur France Télécom.
Les sujétions imposées à France Télécom permettent d'atteindre les objectifs visés par l'article L. 32-1 du CPCE sans qu'il puisse exister un quelconque rapport de disproportion. En effet, nonobstant l'existence actuelle de ce type d'offres, la présente obligation tient compte, d'une part, de l'impossibilité pour les opérateurs alternatifs de mettre en place des ressources concurrentes et, d'autre part, du niveau d'investissement initial réalisé par France Télécom. Cette obligation prend également en considération la nécessité de préserver la concurrence à long terme.
Par suite, conformément aux 1° et 3° de l'article D. 310 du CPCE, l'Autorité estime qu'il est nécessaire que la société France Télécom propose aux opérateurs :
― une offre adaptée à la clientèle de détail résidentielle ;
― une offre adaptée à la clientèle de détail professionnelle.
4.2.2.5.2. Précisions pour le marché professionnel
Du fait de ses spécificités et de sa sensibilité, le segment de marché professionnel requiert une attention particulière dans le traitement de la commande des accès et de la relève des dérangements.
France Télécom propose d'ores et déjà des prestations adaptées et utilisées in fine pour adresser spécifiquement la clientèle professionnelle, tant au niveau de la construction des accès (accès multipaires, SDSL, débits garantis, etc.) qu'au niveau de la qualité de service (garantie de temps de rétablissement, protection des accès sensibles contre les écrasements à tort, etc.).
Il convient que France Télécom maintienne les prestations existantes et adapte en tant que de besoin ses processus de commande ainsi que les outils mis à disposition des opérateurs tiers compte tenu de l'évolution des attentes sur le marché de détail professionnel notamment concernant la production et la livraison des liens (délais, informations) et le service après-vente.
En particulier, afin de pouvoir répondre à des besoins spécifiques de raccordement formulés par la clientèle professionnelle, et concurrencer les offres aval d'Orange Business Services, il apparaît raisonnable que les opérateurs tiers disposent d'offres de gros leur permettant d'accéder aux informations pertinentes existantes concernant la boucle locale cuivre de France Télécom permettant une meilleure anticipation des conditions de raccordement et, le cas échéant, de commander la réalisation d'un ensemble d'opérations élémentaires concernant cette boucle locale.
Ainsi, les opérateurs alternatifs ont exprimé le besoin, d'une part, d'anticiper les opérations éventuellement nécessaires préalablement au raccordement (désaturation, création de têtes de câble, réalisation de la desserte interne, etc.), et, d'autre part, de créer leurs accès sur la tête de câble de leur choix afin d'optimiser leurs déploiements et l'utilisation des ressources disponibles sur le réseau cuivre (sécurisation, limitation des désaturations, réutilisation de dessertes internes existantes, etc.). En conséquence, les opérateurs alternatifs souhaitent pouvoir s'informer sur les têtes de câbles présentes sur les sites de leurs clients finals et la disponibilité de paires de cuivre sur ces têtes de câbles.
Par ailleurs, les opérateurs alternatifs ont spécifié plusieurs besoins concernant la réalisation d'opérations sur la boucle locale cuivre de France Télécom, et en particulier :
― la création et l'extension des terminaisons cuivre du réseau sur les sites clients, appelées communément « têtes de câble », ainsi que leur déplacement ;
― le raccordement de sites sans adresse postale normalisée, de sites non desservis préalablement ou nécessitant une coordination entre France Télécom et l'opérateur tiers lors de la livraison, ou a minima la possibilité de s'appuyer sur la boucle locale cuivre de France Télécom pour procéder à de tels raccordements.
Pour qu'elles soient utilisables de manière efficace dans le cadre du marché entreprises, ces différentes opérations doivent pouvoir être coordonnées avec la livraison de produits de gros basés sur la boucle locale cuivre de France Télécom, dont les offres de bitstream.
Ces besoins, dans leur principe, apparaissent pertinents et il convient que les offres de gros permettent d'y répondre. Ils font d'ores et déjà l'objet d'échanges entre France Télécom, l'Autorité et les opérateurs alternatifs, et des travaux et expérimentations sont en cours pour permettre de préciser le caractère raisonnable du périmètre et des modalités de telles offres.
Par ailleurs, la capacité de l'opérateur à respecter les délais convenus, et à défaut, à informer son client sur les causes des décalages et les délais ainsi introduits étant un facteur particulièrement important dans la relation entre l'opérateur et le client final sur le marché entreprises, il apparaît raisonnable de demander que France Télécom transmette aux opérateurs tiers une information adaptée tout au long du traitement de la commande des accès et de la relève des dérangements. Cela concerne en particulier les cas de commande générant des désaturations ou des petites opérations d'infrastructure, pour lequel l'opérateur tiers doit systématiquement être informé dans un délai adapté, avec fourniture du type de travaux engendré et du délai estimatif modifié de livraison.
Enfin, afin de refléter l'importance particulière de la qualité de service comme facteur de compétitivité sur le marché entreprises et de permettre la réplication des engagements de qualité de service (« service level agreement ») couramment pratiqués sur le marché de détail, y compris par Orange Business Services, il est raisonnable de demander que les offres de bitstream destinées à la clientèle professionnelle soient assorties d'engagements contractuels renforcés de la part de France Télécom, incluant des mécanismes de pénalités suffisamment incitatifs.
L'Autorité sera particulièrement vigilante sur les résultats en matière de qualité de service sur les produits à destination du marché entreprises. L'absence de discrimination entre Orange Business Services et les opérateurs alternatifs sera en particulier appréciée au travers des indicateurs portant sur la qualité de service, qui pourront être complétés en tant que de besoin pour mieux évaluer les différents processus.
4.2.2.6. Offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée
par transfert de ligne avec conservation du numéro
La capacité pour un opérateur alternatif à demander, lors d'une commande d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée, c'est-à-dire une commande d'ADSL nu, pour une ligne active qui supporte un service téléphonique, la conservation du numéro de téléphone est une condition nécessaire à la fluidité du marché et à l'établissement du jeu de la concurrence. Un changement de numéro peut en effet constituer un frein important au changement d'opérateur. La conservation des numéros en cas de changement d'opérateur est par ailleurs un droit reconnu aux abonnés par l'article L. 44 du CPCE.
Cette conservation du numéro doit donc se faire dans les conditions les plus transparentes possibles pour l'abonné final changeant d'opérateur : les processus de livraison de l'accès en ADSL nu et de conservation du numéro doivent donc être synchronisés, afin que le délai de coupure du service téléphonique soit le plus court possible.
L'absence de garantie d'un délai de coupure maximal pourrait être fortement préjudiciable à l'attractivité des offres d'ADSL nu pour les consommateurs et donc au développement de cette offre durant les prochaines années en France.
La synchronisation entre différentes opérations techniques mentionnée ici représente une contrainte technique limitée pour France Télécom : il s'agit d'optimiser et d'organiser ses processus pour permettre cette synchronisation, ce qui est au demeurant une opération couramment proposée par France Télécom dans le cadre d'accords commerciaux de détail, par exemple dans certains cas de déménagements.
Actuellement, France Télécom s'engage, dans son offre de référence d'accès et de collecte DSL, à effectuer, dans 90 % des cas, la production de l'accès en DSL Access Only et la mise en œuvre de la conservation du numéro dans la même journée.
Cependant, il convient de rappeler que l'article 8 de la décision n° 2009-0637 de l'Autorité précisant les modalités d'application de la portabilité des numéros fixes et l'acheminement des communications à destination des numéros portés fixes et mobiles prévoit les obligations suivantes :
« Art. 8. ― Obligation de qualité de service du portage.
Le jour du portage effectif du numéro, les opérateurs fixes prennent toutes les dispositions nécessaires pour que l'interruption de service en émission ou en réception soit la plus courte possible pour l'abonné fixe.
En tout état de cause, l'interruption de service en émission ou en réception ne peut être supérieure à six heures à compter du 1er janvier 2011, puis à quatre heures à compter du 1er janvier 2012.
Les opérateurs font droit aux demandes raisonnables des opérateurs receveurs en vue de fournir une qualité de service accrue pour leurs abonnés entreprise.
Les opérateurs concernés par une opération de portage mettent en œuvre les procédures communes nécessaires au respect du présent article. »
L'Autorité note que le respect des délais règlementaires peut s'avérer complexe compte tenu de la mise en œuvre de certains processus opérationnels de gros. Néanmoins, il convient que France Télécom poursuive l'amélioration de ses processus afin de répondre aux exigences posées en termes de qualité de service concernant le délai de coupure du service.
Au regard des critères énumérés au V l'article L. 38 du CPCE, notamment aux a et d, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but, l'Autorité considère comme proportionné, eu égard aux objectifs précités du II de l'article L. 32-1 du CPCE, et notamment celui de protection des consommateurs, que France Télécom propose aux opérateurs un processus effectif de synchronisation de la livraison de l'accès en ADSL nu et de la conservation du numéro et s'engage à garantir un délai de coupure maximal, dans le respect de la décision de l'Autorité n° 2009-0637 précitée.
4.2.2.7. Offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée
par reprise de ligne et par création de ligne
Le réseau de boucle locale de France Télécom comporte deux types de paires de cuivre présentant une continuité métallique de bout en bout : celles qui supportent un service de communications électroniques et celles qui sont inactives, à la suite d'un déménagement par exemple. Par ailleurs, le réseau de boucle locale de France Télécom comprend des tronçons de paires de cuivre qui, s'ils sont aboutés, constituent une nouvelle paire de cuivre. La création d'une telle nouvelle paire de cuivre peut nécessiter, le cas échéant, dans la seule partie branchement, le déploiement d'un câble supplémentaire.
Ces trois types de lignes doivent être accessibles par l'offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée. En effet, comme pour le dégroupage total, un opérateur alternatif ne peut mettre en place dans des conditions économiquement viables des ressources concurrentes au réseau d'accès cuivre de France Télécom.
De plus, France Télécom utilise pour ses propres besoins de détail sur le marché résidentiel ces trois types de paires de cuivre. Notamment, les paires inactives sont utilisées en cas d'emménagement d'un nouveau client dans le local desservi. Des paires inactives ou des paires créées par aboutement de tronçons existants sont aussi utilisées par France Télécom pour produire les offres DSL Entreprises et Core Ethernet Entreprises.
En outre, l'offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée pour les paires inactives, les paires ne supportant pas de service et les paires créées par aboutement de tronçons est indispensable pour garantir l'égalité des conditions de concurrence entre France Télécom et les opérateurs alternatifs dans le cas où un client emménage dans un nouveau local et souhaite s'abonner à des services de communications électroniques filaires.
Un refus de fournir des accès haut débit activés sur DSL constitués par des tronçons de paires existants ou nécessitant le déploiement d'une capacité supplémentaire ne pourrait être justifié au regard de la faisabilité technique puisque France Télécom en réalise pour ses propres besoins.
Il ressort de ces éléments que les critères cités aux a, b et d du V de l'article L. 38 du CPCE sont ainsi vérifiés.
Par conséquent, eu égard aux conséquences sur la concurrence, notamment pour les services aux clients professionnels, il y a lieu pour l'Autorité d'imposer à France Télécom de prévoir dans son offre de référence, comme elle le fait déjà, les prestations suivantes :
― offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée pour les paires qui supportent un service de communications électroniques ;
― offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée pour les paires inactives préexistantes de bout en bout ;
― offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée pour les paires nouvelles créées entre le répartiteur principal et le point de terminaison du réseau dans les locaux de l'abonné. La création de ces paires nouvelles est effectuée par l'aboutement de tronçons existants et peut nécessiter, le cas échéant, le déploiement d'un câble supplémentaire (désaturation).
Au regard de l'objectif poursuivi et visant à établir les conditions d'égalité des opérateurs dans la concurrence et en tenant compte des éléments mentionnées aux a, b et d du V de l'article L. 38 du CPCE, la mesure constitue le minimum nécessaire pour atteindre les objectifs développés ci-dessus et est ainsi proportionnée.
4.2.2.8. Offres monocanaux et bicanaux pour la voix sur large bande
Les services de détail qui peuvent être fournis sur un accès haut débit sur DSL se multiplient. Les opérateurs proposent, outre un accès à haut débit à l'internet, des offres de téléphonie fixe ou mobile, ou encore des offres de services audiovisuels. Etant donné le rythme de l'innovation technologique et marketing constaté sur ces marchés, il est certain que ces offres s'étofferont encore dans les trois années à venir.
En particulier, en dehors des zones de dégroupage, les opérateurs ne sont en mesure de concurrencer avec une qualité de service satisfaisante les offres de détail d'Orange incluant un service de voix sur large bande que s'ils ont accès à une offre de gros d'accès haut débit sur DSL bicanaux, l'un des canaux transportant le trafic internet et l'autre étant adapté au transport de la voix. En l'absence d'alternative technique à l'utilisation des ressources de France Télécom pour ce faire, le critère énoncé au a du V de l'article L. 38 du CPCE est vérifié.
En outre, la faisabilité technique de telles offres de gros pour France Télécom est relativement aisée dès lors qu'un paramétrage bicanal est prévu pour les offres de détail de France Télécom : ces offres de gros utilisent le même réseau que les offres monocanal, avec le paramétrage et la technique développés pour les offres de détail multiservices. France Télécom propose d'ailleurs de telles offres bicanaux sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
La faisabilité de l'accès et le caractère limité des investissements correspondant, critères cités aux b et c du V de l'article L. 38 du CPCE, sont ainsi vérifiés.
En conséquence, afin de renforcer la concurrence au bénéfice des utilisateurs finaux, l'Autorité considère que la société France Télécom doit être tenue, conformément aux dispositions des 1° et 3° de l'article D. 310 du CPCE, de proposer aux opérateurs :
― une offre monocanal, adaptée à la fourniture d'accès à internet seul ;
― une offre bicanal, adaptée notamment à la fourniture couplée d'accès internet et d'accès de type voix sur large bande.
Compte tenu des dispositions des a, b, c et d du V de l'article L. 38 du CPCE et en l'absence de mesures moins contraignantes permettant d'atteindre le même objectif, l'obligation imposée à France Télécom n'est pas disproportionnée.
4.2.2.9. Offre permettant de fournir des services de télévision en Ethernet
A la suite de la généralisation des offres « triple play » en zones dégroupées à des tarifs attractifs, les consommateurs s'attendent à ce que des services audiovisuels soient proposés de façon plus large.
Or l'extension géographique du dégroupage ne suffira pas à généraliser ces services sur l'ensemble du territoire.
Dès lors, l'Autorité a consulté les acteurs, dans le cadre du deuxième cycle de révision des analyses de marché, sur la mise en place par France Télécom, dans le cadre des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, d'une prestation permettant aux opérateurs alternatifs de fournir des services de télévision en dehors des zones dégroupées.
L'émergence d'une telle offre pourrait en effet avoir un impact positif sur le secteur :
― en augmentant l'attractivité des offres de détail en zones non dégroupées, cela pourrait se traduire par une hausse significative du taux de pénétration du haut débit dans ces zones ;
― par suite, dans la mesure où l'un des principaux critères de dégroupage d'un NRA pour un opérateur alternatif est son nombre de clients sur ce NRA, elle pourrait conduire à rendre économiquement rentable à terme le dégroupage de certains NRA supplémentaires ;
― les services audiovisuels constituent des revenus additionnels de plus en plus significatifs pour les fournisseurs d'accès à internet.
L'absence d'une telle offre peut notamment s'expliquer dans la mesure où les accès haut débit sur DSL commandés à France Télécom par les opérateurs alternatifs ne sont pas construits actuellement sur des DSLAM Ethernet, alors que la quasi-totalité des offres de télévision par ADSL disponibles aujourd'hui en zones dégroupées repose sur ces équipements. En effet, l'Ethernet est la seule technologie permettant de proposer, dans des conditions techniques et économiques satisfaisantes, la diffusion de services audiovisuels en mode « multicast » (c'est-à-dire une émission unique du signal vers plusieurs récepteurs, uniquement en cas de « demande » par ces récepteurs). Le mode multicast, actuellement mis en œuvre par les opérateurs pour leurs offres de télévision dans les zones dégroupées, s'oppose à l'unicast, c'est-à-dire une diffusion en mode point à point, beaucoup trop coûteuse en termes de flux à acheminer.
Dans ce contexte, l'Autorité a ainsi envisagé la mise en œuvre par France Télécom, sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, d'une prestation multicast en collecte Ethernet permettant aux opérateurs alternatifs de proposer sur le marché de détail une offre de télévision sur ADSL. Celle-ci pourrait cependant ne pas être aussi riche qu'en zones dégroupées compte tenu de contraintes techniques comme le nombre maximal de chaînes pouvant être gérées par les DSLAM.
Sur un plan technique, cette prestation consisterait à transporter les chaînes de télévision des opérateurs tiers en multicast par la mise à disposition d'un VLAN (Virtual Local Area Network) spécifique par opérateur, comme le fait Orange pour ses offres de détail triple play sur la base de la technologie Ethernet. En pratique, d'autres opérateurs proposent déjà des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL incluant de telles prestations.
Néanmoins, il apparaît disproportionné d'imposer à ce stade à France Télécom de fournir ou d'engager des négociations de bonne foi avec les opérateurs alternatifs pour fournir une telle prestation, dans la mesure où :
― France Télécom s'est engagée à trouver une solution de raccordement passive pour les opérateurs tiers, via l'offre LFO, dans le cas particulier où un NRA est équipé par France Télécom pour fournir des services de télévision ;
― France Télécom a annoncé qu'elle utiliserait une solution de télévision par satellite en complément de couverture de ses offres actuelles de télévision par ADSL, en particulier dans les zones non dégroupées.
De manière analogue, il apparaît disproportionné d'imposer à France Télécom de fournir ou d'engager des négociations de bonne foi avec les opérateurs alternatifs pour fournir une prestation a minima limitée à la diffusion des chaînes de la télévision numérique terrestre. En effet, une telle obligation n'apportant pas de plus-value significative pour le consommateur par rapport à la réception hertzienne de ces chaines, une telle mesure apparaît disproportionnée dans le cadre de la collecte Ethernet.
Toutefois, en cas d'évolution significative de la structure des acteurs ou des offres permettant de proposer des services audiovisuels aux clients finals, l'Autorité pourra être amenée à revoir les obligations imposées sur ce point dans le cadre de l'analyse des marchés.
4.2.2.10. Raccordement des éléments de réseaux distants
Au cours de la période couverte par la présente analyse de marché, il semble probable que les opérateurs mobiles, qui achètent actuellement l'offre de gros AIRCOM de France Télécom, viennent à demander à France Télécom d'utiliser les offres de gros de bitstream, pour raccorder leurs éléments de réseau.
En effet, au cours de la période couverte par la précédente analyse, SFR, par le rachat de Neuf-Cegetel, et Bouygues Télécom sont entrés sur les marchés de gros d'accès fixe afin de proposer des offres fixes de détail destinées à la clientèle résidentielle et professionnelle à laquelle ils fournissaient déjà des services mobiles. Le groupe Iliad est par ailleurs entré sur le marché mobile à la suite de l'attribution de fréquences à Free Mobile.
La plupart de ces opérateurs sont présents sur un certain nombre de NRA et points de livraison des offres de gros de bitstream, et disposent d'un réseau de collecte adapté pour l'acheminement des données de leurs stations BTS vers leurs éléments de réseaux situés en amont, notamment les MSC (Mobile Switching Center) mobiles.
Les nouvelles normes de transmission des réseaux mobiles, telles que la 3G+ et la 4G, permettent un transport de données à des débits élevés. Cette montée en débit et le taux élevé d'utilisation des BTS nécessitent des opérateurs mobiles un réseau de collecte suffisamment dimensionné pour permettre une utilisation satisfaisante pour le consommateur des offres de données mobiles.
L'offre de gros AIRCOM répond à ces besoins mais ne permet pas à ces acteurs de valoriser leurs infrastructures de réseaux fixes capillaires et leurs investissements dans le dégroupage, contrairement au groupe France Télécom/Orange. L'offre AIRCOM est en effet soit livrée par France Télécom au niveau de nœuds de son réseau de collecte situés significativement plus en amont des nœuds qui sont aujourd'hui raccordés par ces opérateurs, soit fournie sous forme de liaisons complètes, correspondant à des liaisons xDSL depuis les BTS, un transit du trafic sur le réseau ATM de France Télécom et une livraison de ce trafic sur un tronc ATM au niveau de la BSC de rattachement, et donc tarifées en tant que telles.
Il apparaît pourtant que l'offre de gros AIRCOM, basée sur les technologies DSL, repose techniquement sur des offres de gros de bitstream disponibles. Il semble ainsi légitime que les opérateurs mobile tiers puissent avoir accès sur le marché de gros à ces mêmes briques élémentaires afin de raccorder leurs BTS. L'accès à ces offres de gros élémentaires pourrait en particulier leur permettre de bénéficier des mêmes processus que les offres de gros régulées.
Au vu des éléments présentés, la demande des opérateurs d'utiliser les offres de gros activées existantes livrées au niveau infranational pour le raccordement d'éléments de réseaux, et notamment les stations de base mobiles, semble, prima facie, constituer une demande raisonnable d'accès. France Télécom est invitée à répondre favorablement à cette demande, notamment au vu du 9° de l'article D. 310 du CPCE. En particulier, l'utilisation d'une offre existante, livrée suivant les processus et dans les conditions inscrites à l'offre de référence, ne saurait être fermée a priori au raccordement d'éléments de réseau.
Toutefois, contrairement aux offres de raccordement d'éléments de réseau passives telles que le dégroupage, pour lesquelles la livraison peut s'effectuer non sur le site de l'élément de réseau mais simplement au point de terminaison de boucle locale le plus proche (charge alors à l'opérateur preneur de construire l'infrastructure nécessaire pour atteindre le site), une offre de gros haut débit activée doit souvent être livrée directement sur le site et peut donc nécessiter des travaux de génie civil significatifs et des processus de coordination plus lourds. De plus, à ce stade, la demande pour une offre de bitstream permettant de raccorder des éléments de réseau apparaît faible et il existe un processus adapté dans le cadre de l'offre de gros activée de raccordement d'éléments de réseau par la technologie LPT. Au vu de ce qui précède, l'Autorité considère que s'il est légitime de ne pas interdire l'utilisation de l'offre en l'état, il n'est pas proportionné à ce stade d'imposer la mise en place d'une offre de gros haut débit activée nécessitant des processus spécifiques de production et de livraison dans le seul but de permettre le raccordement d'éléments de réseaux. Ce jugement pourra être révisé le cas échéant en présence d'éléments nouveaux tendant à faire évoluer la situation.
Il résulte de ce qui précède que cette obligation est proportionnée, compte tenu des éléments mentionnés aux a à d du V de l'article 38 du CPCE et des objectifs fixés par l'article L. 32-1 du CPCE, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but.
4.2.2.11. Migrations inter- et intra-offres
Pour fournir des accès haut débit sur DSL à leurs clients finaux, potentiellement situés sur l'ensemble du territoire, les opérateurs alternatifs utilisent plusieurs offres de gros de France Télécom, comme les offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées aux niveaux national ou régional et le dégroupage.
Les évolutions technologiques, les choix d'architecture et les besoins spécifiques de tel ou tel type de clientèle peuvent impliquer des modifications dans le choix des offres de gros achetées par les opérateurs. Notamment, un opérateur peut avoir besoin d'offres de plus en plus capillaires, suivant les investissements, nécessairement progressifs, qu'il consent dans de nouvelles infrastructures et de nouveaux raccordements au réseau de France Télécom.
Lorsqu'il choisit une nouvelle prestation de gros, un opérateur peut basculer l'intégralité de son parc existant vers cette nouvelle prestation à l'aide d'une offre de migration. Ces migrations inter-offres lui permettent donc tout d'abord de rentabiliser les coûts, essentiellement fixes, d'ouverture d'une zone à une offre capillaire non seulement sur les flux de nouveaux abonnés mais aussi sur le parc existant.
Elles sont de plus une condition nécessaire à la fluidité du marché et à l'établissement du jeu de la concurrence sur la base d'abonnés la plus vaste possible. En effet, étant donné la position historique forte et l'avance de France Télécom sur les marchés du haut débit, les offres de migrations représentent un élément structurant de l'établissement de la concurrence, en faisant porter la concurrence non seulement sur les nouveaux abonnés mais aussi sur le parc existant.
L'Autorité constate que France Télécom est seule à même de procéder à ces migrations, étant l'opérateur qui fournit les deux offres de gros entre lesquelles la migration a lieu : l'opérateur client ne peut techniquement y procéder lui-même.
Par ailleurs, les offres de migrations ne correspondent pas à des investissements supplémentaires de la part de France Télécom, mais sont une déclinaison des commandes d'accès classiques.
Enfin, elles sont même souvent plus simples que les commandes d'accès, puisqu'elles se réduisent dans certains cas à des manipulations logicielles et non physiques. De telles offres sont proposées aujourd'hui par France Télécom.
Au regard de ces éléments, les critères cités aux a, b et c du V de l'article L. 38 du CPCE sont ainsi vérifiés.
Ainsi, en application des dispositions du 1° de l'article D. 310 du CPCE, l'Autorité considère que la société France Télécom doit être en mesure de proposer aux opérateurs des offres de migration, a minima :
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sans service de téléphonie commutée sur DSL livrées au niveau infranational vers le dégroupage total ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées avec service de téléphonie commutée sur DSL livrées au niveau infranational vers le dégroupage partiel ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées in fine à la clientèle professionnelle vers le dégroupage total avec garantie de temps de rétablissement ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau national vers ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational en collecte IP ou ATM vers ses offres de gros d'accès haut débit sur DSL activées livrées au niveau infranational en collecte Ethernet ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau infranational en ADSL vers ses offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau infranational en ADSL2+ ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational en mode monocanal vers ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational en mode bi-canaux.
Il résulte de ce qui précède que cette obligation est proportionnée, compte tenu des éléments mentionnés aux a à c du V de l'article L. 38 du CPCE et des objectifs fixés par l'article L. 32-1 du CPCE, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but.
Jusqu'en 2008, les migrations internes aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational étaient facturées à l'acte, à des tarifs distincts selon qu'un changement de carte et/ou de DSLAM était ou non nécessaire. Désormais, ces migrations ne font plus l'objet d'un mode de facturation à l'acte, dans la mesure où France Télécom intègre les coûts correspondants dans le calcul de ses coûts récurrents pour fournir ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. Il convient que France Télécom maintienne ces dispositions, afin de lever pour les opérateurs les freins financiers aux migrations vers des technologies pérennes et efficaces, au bénéfice du consommateur final.
4.2.2.12. Colocalisation des équipements et raccordement des réseaux
Deux modes de livraison pertinents des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational existent aujourd'hui :
― une livraison du trafic à l'opérateur alternatif au niveau du site de France Télécom ;
― une livraison du trafic au niveau du point de présence le plus proche de l'opérateur alternatif.
Dans le premier cas, une prestation de colocalisation des équipements de l'opérateur alternatif dans les sites de France Télécom est nécessaire pour rendre l'offre d'accès haut débit sur DSL livrée au niveau infranational opérationnelle. Dans le second cas, une prestation de raccordement du point de présence de l'opérateur au site de France Télécom doit être fournie.
Ces deux solutions apparaissent comme nécessaires et complémentaires, en répondant à des logiques techniques et économiques distinctes.
La première offre est pertinente pour les opérateurs dont le réseau est étendu jusqu'au site de France Télécom. Son coût pour l'opérateur est essentiellement fixe, et elle est donc adaptée pour les sites à fort volume.
La seconde, dans laquelle l'opérateur n'investit pas lui-même dans le lien entre son point de présence et le site France Télécom, mais utilise le réseau de France Télécom pour ce faire, représente des coûts variables et récurrents et se prête à des volumes de trafic plus faibles.
En l'absence de ces offres de colocalisation ou de raccordement du point de présence de l'opérateur, l'offre d'accès haut débit activée sur DSL livrée au niveau infranational serait vidée de son sens puisque l'opérateur client ne pourrait pas en prendre livraison : elles constituent le lien entre l'offre d'accès proprement dite utilisant le réseau de France Télécom et le réseau de l'opérateur qui en est client.
Ces deux offres apparaissent donc comme des prestations associées à l'accès sur le présent marché, en ce qu'elles sont indispensables pour rendre effective l'utilisation des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
L'Autorité note que ces deux catégories d'offres sont d'ores et déjà proposées par France Télécom pour ses offres de gros, sur le haut débit comme sur l'interconnexion, ce qui atteste de la faisabilité de la fourniture de ces prestations associées.
Par ailleurs, la possibilité pour les opérateurs alternatifs de recourir à des ressources concurrentes est très limitée. Pour ce qui est des solutions de colocalisation dans les bâtiments de France Télécom, seule France Télécom est à même de les proposer. Pour ce qui est des solutions de raccordement distant, elles peuvent être dans certains cas proposées par des opérateurs tiers ayant étendu leur réseau propre jusqu'au site de France Télécom.
Cependant, ce cas de figure n'est pas systématique : le réseau d'un opérateur tiers peut ne pas raccorder le point de présence de l'autre opérateur ; de plus, seule une partie des sites de France Télécom est concernée. Ainsi, au regard de la capillarité du réseau de France Télécom, qui dessert l'intégralité des sites de raccordement pour le haut débit et des points de présence des opérateurs, elle seule est à même de fournir dans tous les cas ces liens de raccordement.
Au regard de ces éléments, les critères a et b du V de l'article L. 38 du CPCE sont ainsi vérifiés. Enfin, certaines modalités concernant ces prestations connexes de raccordement du réseau de France Télécom peuvent être précisées. Dans une perspective d'efficacité, il convient d'assurer la mutualisation de l'ensemble des ressources déployées sur un site, au titre des différentes options des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational ou au titre des prestations d'interconnexion ou de dégroupage, et ce afin de ne pas dupliquer inutilement les ressources. Cette mutualisation est source d'économie de ses ressources pour France Télécom. Elle améliore l'efficacité économique du dispositif mis en place pour l'ensemble des opérateurs.
De même, il est souhaitable pour favoriser l'efficacité des investissements dans les infrastructures de permettre la mutualisation de ressources entre différents opérateurs. Cette mutualisation minimise les ressources mobilisées par France Télécom pour le compte des opérateurs alternatifs et permet une réduction des coûts au bénéfice de l'ensemble des acteurs, y compris France Télécom.
Au regard de ce qui précède, l'Autorité estime qu'il est nécessaire et proportionné, sur le fondement du 6° de l'article D. 310 du CPCE, que la société France Télécom propose aux opérateurs une offre de colocalisation des équipements, d'une part, et de raccordement des points de livraison, d'autre part, en tant que ressources associées à l'accès sur le marché de gros des offres infranationales.
Les solutions proposées par France Télécom ne devront pas restreindre artificiellement les possibilités de mutualisation des ressources déployées, au titre de différentes offres ou par différents opérateurs, sur un site donné.
Edictée dans le but de permettre l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, l'obligation imposée à France Télécom constitue le minimum nécessaire permettant d'atteindre ce but, compte tenu, dans l'appréciation de l'Autorité, des éléments mentionnés aux a, b et c du V de l'article L. 38 du CPCE.
4.2.2.13. Informations préalables
Afin de réaliser des choix pertinents en matière de déploiement et d'offre commerciale, les opérateurs ayant recours aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational de France Télécom doivent avoir accès à des informations préalables concernant ces offres. L'accès à ces informations est primordial, puisqu'il est nécessaire pour garantir l'effectivité des différentes prestations d'accès proposées par France Télécom sur le présent marché ; c'est un moyen associé à l'accès au réseau proprement dit.
Ces informations peuvent être scindées deux catégories.
Une première catégorie d'informations permet aux acteurs intéressés par l'offre de gros de France Télécom d'identifier les investissements qu'ils devront consentir pour pouvoir utiliser l'offre de France Télécom, ainsi que la clientèle à laquelle ils auront accès selon leur architecture de raccordement. Cette catégorie d'informations doit être mentionnée à l'offre de référence publique ; ce point sera traité au paragraphe II.C sous la rubrique « Publication d'informations préalables ».
Dans un deuxième temps, les opérateurs déjà clients de l'offre ont besoin d'informations plus fines, notamment pour optimiser leurs ressources ou encore adapter, en fonction des caractéristiques de la ligne du client final, l'offre technique et tarifaire qu'ils peuvent lui proposer.
Ces informations recouvrent notamment des données précises concernant chaque ligne afin que l'opérateur soit en mesure, pour un client donné, d'estimer le tarif correspondant et de lui proposer en conséquence une offre adaptée. Dans ce cadre, ces informations sont a minima les suivantes :
― informations permettant de déterminer l'éligibilité de la ligne aux différents débits et différents services ;
― informations permettant de déterminer le rattachement de la ligne à une zone donnée ;
― tarif de la ligne au regard du déploiement de l'opérateur.
Il s'agit aussi d'informations à la maille du NRA, afin notamment de permettre à un opérateur de dimensionner correctement les conduits de collecte qu'il commande, le cas échéant, sur chaque NRA. Il peut aussi s'agir d'informations nécessaires à la planification et à l'évaluation du coût des migrations entre différentes offres.
De façon plus générale, un certain nombre d'informations préalables sont liées à chaque prestation proposée par France Télécom au titre des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. En l'absence de ces informations, l'opérateur client ne peut pas mettre en œuvre ces offres de gros : elles sont une condition sine qua non de l'effectivité des offres d'accès.
L'Autorité note par ailleurs que la mise à disposition de ce type d'informations reste peu coûteuse pour France Télécom. Ainsi, s'agissant de l'obligation de mise à disposition d'informations préalables à l'accès, les critères énoncés aux c et d du V de l'article L. 38 du CPCE sont vérifiés. Cette obligation est proportionnée, compte tenu notamment de la nécessité de préserver la concurrence à long terme mentionnée au c du V de l'article L. 38 du CPCE et du faible coût qu'elle représente pour France Télécom.
Au regard de ce qui précède, sur le fondement du 3° du I de l'article L. 38 du CPCE qui permet à l'Autorité d'imposer à l'opérateur puissant l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des moyens associés et afin de répondre aux objectifs fixés aux 2° et 4° de l'article L. 32-1 du CPCE, France Télécom devra donner accès sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational aux informations préalables nécessaires à la mise en œuvre effective des offres de gros.
4.3. Obligation de fournir l'accès dans des conditions non discriminatoires
Le 2° du I de l'article L. 38 du CPCE prévoit la possibilité d'imposer une obligation de non-discrimination à un opérateur réputé exercer une influence significative.
L'article D. 309 du CPCE précise que les obligations de non-discrimination font notamment en sorte que « les opérateurs appliquent des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres opérateurs fournissant des services équivalents, et qu'ils fournissent aux autres des services et informations dans les mêmes conditions et avec la même qualité que ceux qu'ils assurent pour leurs propres services, ou pour ceux de leurs filiales ou partenaires ».
Le principe de non-discrimination s'oppose ainsi notamment à ce que, au plan tarifaire, France Télécom valorise différemment les mêmes éléments de son réseau, ou utilise des règles d'allocation des coûts distincts, pour les prestations utilisées en interne et celles proposées sur les marchés de gros. Il s'oppose en particulier à ce que les offres de gros de France Télécom soient dimensionnées de sorte qu'elles ne soient accessibles aux conditions les plus avantageuses que pour ses propres services ou filiales. Au plan technique, il porte notamment sur la qualité de service des offres, leur richesse fonctionnelle, ainsi que la fourniture d'informations préalables à l'utilisation de ces offres d'accès.
De la même façon, un traitement discriminatoire d'opérateurs se trouvant dans des situations équivalentes aurait pour conséquence d'affaiblir la dynamique concurrentielle sur le marché de détail, en favorisant artificiellement une situation ou un choix stratégique particuliers.
France Télécom est un opérateur verticalement intégré, actif sur les marchés amont et aval du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational. Il est présent à travers la marque Orange Business Services, notamment, sur le marché de détail de l'accès haut débit et très haut débit à destination d'une clientèle professionnelle, et à travers la marque Orange sur le marché résidentiel.
Or, en tant qu'opérateur verticalement intégré, France Télécom utilise les mêmes ressources amont pour produire, d'une part, ses propres offres de détail et, d'autre part, les offres de gros destinées à ses concurrents pour construire leurs offres de détail.
Dans ces conditions et en l'absence d'une obligation de non discrimination, France Télécom pourrait être incitée à offrir à ses concurrents des conditions techniques ou tarifaires moins avantageuses que celles qu'elle s'accorde à elle-même, à ses filiales ou à ses partenaires.
Notamment, d'un point de vue tarifaire, France Télécom a intérêt à favoriser les offres pour lesquelles elle contrôle une grande partie de la chaîne de valeur par rapport aux offres de gros moins agrégées comme le dégroupage ou les offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, d'autant que ces offres servent de support à ses concurrents sur les marchés aval.
France Télécom est par ailleurs susceptible de bénéficier d'un échange d'informations facilité entre ses différentes entités, lui permettant ainsi une plus grande réactivité et une plus grande fluidité dans la réponse aux besoins des entreprises, moins standardisés que ceux du grand public.
D'un point de vue technique, si France Télécom est incitée sur les marchés de détail à fournir des offres de bonne qualité à ses clients, elle y est moins incitée en revanche sur les marchés de gros pour lesquels sa clientèle d'opérateur est captive, comme le dégroupage ou les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
Or, l'exercice d'une telle discrimination pourrait avoir pour effet de limiter artificiellement l'attractivité des offres des concurrents de France Télécom sur les marchés aval, par rapport au niveau de qualité et de tarif des offres du groupe France Télécom sur ces mêmes marchés. Elle serait ainsi fortement préjudiciable au développement de la concurrence sur les marchés aval.
Il n'apparaît pas que les conditions de fonctionnement des marchés du haut débit et très haut débit aient évolué dans un sens qui change ces incitations par rapport à ce qui a prévalu par le passé.
Il apparaît en conséquence nécessaire, sur le fondement de l'article D. 309 précité du CPCE, d'imposer à France Télécom de fournir l'accès sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational dans des conditions non discriminatoires.
Cette obligation est proportionnée en ce qu'elle constitue le minimum nécessaire permettant d'atteindre les objectifs visés au II de l'article L. 32-1 du CPCE et en particulier ceux visant à garantir « l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques » et « l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs ».
4.4. Obligation de transparence et de publication d'informations concernant l'accès
Conformément au 1° du I de l'article L. 38 du CPCE, les opérateurs réputés exercer une influence significative sur le marché peuvent se voir imposer une obligation de transparence consistant notamment à « rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès, notamment publier une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion ou d'accès lorsqu'ils sont soumis à des obligations de non-discrimination ; l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut imposer, à tout moment, des modifications à une telle offre pour la mettre en conformité avec les dispositions du présent code. L'opérateur communique à cette fin à l'Autorité de régulation des télécommunications toute information nécessaire ».
4.4.1. Publication d'informations préalables
Afin de réaliser des choix pertinents en matière de déploiement et d'offre commerciale, les opérateurs souhaitant avoir recours aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL de France Télécom doivent avoir accès à différentes informations, conformément à ce qui a été développé au paragraphe 2 b 13. Notamment, les acteurs susceptibles d'être intéressés par l'offre de gros doivent être informés des investissements qu'ils devront consentir pour pouvoir utiliser cette offre, des points de raccordement au réseau de France Télécom correspondant et des zones de clientèle auxquelles ils auront accès grâce à cette offre.
Ce type d'informations est nécessaire pour tout acteur souhaitant établir un plan d'affaires et élaborer une stratégie reposant sur l'utilisation d'une offre de gros d'accès haut débit activée sur DSL de France Télécom livrée au niveau infranational.
Dès lors que ces renseignements ne révèlent pas de données stratégiques et que leur mise à disposition ne porte pas atteinte à la sécurité des réseaux, la publicité de ces informations permet d'améliorer la visibilité de l'offre à l'attention d'un plus grand nombre d'opérateurs et d'investisseurs.
Cinq types d'informations apparaissent d'ores et déjà indispensables à ce titre :
― l'architecture d'accès au réseau, avec la liste des points de raccordement, leur zone arrière et les zones tarifaires attachées ;
― les interfaces de livraison des flux disponibles sur chacun des points de raccordement ouverts ;
― la liste des NRA fibrés et ouverts à l'ADSL2+ par France Télécom ;
― la liste des NRA ouverts au SDSL et au SDSL bis ;
― la liste des NRA ouverts aux différents modes de collecte (Ethernet, IP, ATM) par France Télécom.
Dans ces conditions, sur le fondement du I de l'article D. 307 du CPCE et notamment des dispositions qui prévoient la publication des « spécifications techniques des prestations (...) d'accès » et des « caractéristiques du réseau », il est nécessaire d'imposer à France Télécom l'obligation de publier les informations préalables susmentionnées. Au regard des objectifs visant à permettre le développement d'une concurrence effective et loyale, la proportionnalité de cette obligation est vérifiée.
4.4.2. Publication des indicateurs de qualité de service
Ce point sera traité dans la partie suivante intitulée « Qualité de service des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational ».
4.4.3. Publication des spécifications techniques d'interface
L'utilisation d'une offre de gros d'accès haut débit activée sur DSL de France Télécom par les opérateurs alternatifs suppose que ceux-ci interconnectent leur réseau à celui de l'opérateur historique. Les points d'interface entre les équipements de France Télécom et ceux des opérateurs tiers peuvent se situer à trois niveaux :
― l'équipement d'accès. Dans le cas général, les fournisseurs d'accès internet et opérateurs alternatifs fournissent ou louent aux clients finaux des équipements d'accès plus ou moins complexes : modem DSL classique, plate-forme modem et multimédia, équipement professionnel, etc. Ces équipements doivent communiquer avec les équipements réseaux de France Télécom (notamment les DSLAM). Les protocoles de communications doivent permettre l'échange de données et peuvent concerner des fonctions plus avancées, comme l'allocation dynamique de bande passante ou la supervision ;
― l'équipement d'interconnexion réseau. Les réseaux des opérateurs alternatifs et celui de France Télécom sont interconnectés physiquement. Les flux de données échangés peuvent être normalisés suivant différents protocoles (notamment IP, ATM, Ethernet en DSL). Dans tous les cas de figure, les protocoles utilisés par les deux équipements doivent être compatibles ;
― la supervision et la commande du réseau. Les progrès des technologies de réseaux et leur normalisation progressive permettent d'envisager d'ores et déjà et à l'horizon de la présente analyse de marché que des flux d'information concernant la supervision ou des éléments de pilotage du réseau (allocation de bande passante, priorisation de certains flux) peuvent techniquement être transmis entre deux opérateurs de réseaux interconnectés.
Le fonctionnement technique des réseaux haut débit suppose que les opérateurs clients des offres de gros soient parfaitement informés des spécifications techniques d'interface, c'est-à-dire des différents protocoles de communication, utilisés par les équipements de France Télécom et de leurs évolutions éventuelles, avec un préavis raisonnable.
Par ailleurs, les industriels fabriquant les équipements de réseau susceptibles d'être achetés par les opérateurs alternatifs ou par France Télécom elle-même doivent également disposer des spécifications techniques d'interfaces des équipements de France Télécom avec lesquels leurs équipements doivent être capables de communiquer.
Il convient de noter que France Télécom publie d'ores et déjà les spécifications techniques d'interfaces qu'elle propose, lorsque cela est possible. Lorsque les technologies ne sont pas complètement normalisées, France Télécom publie une série de tests permettant aux opérateurs alternatifs et industriels de s'assurer de l'interopérabilité de leurs équipements et de ceux de France Télécom. Cette solution pragmatique peut constituer une manière satisfaisante pour France Télécom d'assurer l'information des acteurs dans des conditions transparentes.
Il apparaît donc nécessaire que France Télécom publie les spécifications techniques d'interface de son réseau, couvrant les trois champs énumérés ci-avant : équipement d'extrémité, équipement de livraison du trafic en cœur de réseau et, le cas échéant, flux de données permettant la supervision ou des éléments de pilotage dynamique du service.
Une telle obligation est proportionnée dans la mesure où elle constitue le minimum nécessaire permettant d'atteindre les objectifs visés à l'article L. 32-1 du CPCE, et notamment ceux visant à garantir « (...) la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ».
4.4.4. Publication d'une offre de référence technique et tarifaire d'accès
4.4.4.1. Obligation générique
L'existence et la publication d'une offre de référence répond à plusieurs objectifs : elle pallie la faiblesse du pouvoir de négociation bilatérale des opérateurs clients de l'offre elle permet d'assurer la non-discrimination dans le traitement des opérateurs alternatifs, elle apporte de la visibilité et de la stabilité aux opérateurs pour l'élaboration de leurs plans de développement et enfin elle permet de découpler les offres en sorte qu'un opérateur n'ait à payer que les prestations dont il a besoin.
La conjonction de l'influence significative exercée par France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, du caractère incontournable de son réseau, non duplicable par les nouveaux entrants, et de l'intégration verticale de France Télécom rend peu probable le fait que les opérateurs alternatifs clients des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, concurrents de France Télécom sur les marchés aval, disposent d'un pouvoir de négociation suffisant pour obtenir une offre adaptée sur ce marché. L'existence d'une offre de référence que l'Autorité a le pouvoir de modifier est de nature à faciliter les négociations bilatérales et à éviter les litiges entre les opérateurs et France Télécom.
Par ailleurs, pour les opérateurs ayant recours à une offre d'accès haut débit activée sur DSL livrée au niveau infranational, les reversements directs à France Télécom représentent une proportion importante de leur chiffre d'affaires et apparaissent donc comme déterminants dans leur budget. Il est donc nécessaire pour leur équilibre économique de disposer d'une bonne visibilité sur les conditions techniques et tarifaires proposées par France Télécom lors de l'élaboration de leurs plans d'affaires et de leur stratégie technique et commerciale.
Enfin, le recours à une offre de référence publique permet de s'assurer du traitement non discriminatoire des différents opérateurs clients de l'offre.
Ainsi, en application des dispositions du II de l'article D. 307 du CPCE, la société France Télécom devra publier une offre de référence technique et tarifaire détaillant les prestations relevant du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
L'Autorité considère que cette obligation constitue une garantie en vue d'assurer, notamment, l'égalité des conditions de la concurrence sur le marché considéré. En l'absence de mesure permettant d'atteindre, dans des conditions identiques, le même but, l'obligation n'est pas disproportionnée.
4.4.4.2. Eléments de l'offre de référence
Conformément au II de l'article D. 307 du CPCE, il incombe à l'Autorité de fixer la liste des prestations minimales d'une offre de référence.
A la suite de l'analyse menée dans la présente décision, la liste donnée en annexe 1 recense les éléments que devra comporter a minima l'offre de référence. Cette liste recense les prestations que l'offre de référence devra proposer, ainsi que les éléments qu'elle devra préciser pour donner aux opérateurs une visibilité suffisante quant aux modalités financières, techniques et opérationnelles de recours aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et aux ressources connexes. Outre les conditions contractuelles relatives aux tarifs, aux conditions de souscription, aux modalités d'accès à l'offre, l'offre de référence de France Télécom devra ainsi inclure au minimum les prestations d'accès détaillées ainsi que les informations répondant à l'obligation de transparence (interfaces, informations préalables, qualité de service) et de non-discrimination définies dans la présente décision.
Enfin, en vertu du deuxième alinéa du II de l'article D. 307 du CPCE, l'offre de référence doit être suffisamment détaillée pour permettre à un opérateur d'estimer un plan d'affaires, donc le coût des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. A ce titre, l'intégralité des tarifs relevant des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et de leurs prestations connexes devra figurer dans l'offre de référence.
4.4.4.3. Evolution de l'offre de référence
France Télécom pourra être amenée à faire évoluer au cours du temps son offre de référence pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. Cependant, toute évolution unilatérale sans information préalable serait préjudiciable pour le secteur. L'information préalable conditionne la prévisibilité des acteurs et peut en effet remettre en question la politique commerciale d'un opérateur, et donc nécessiter un certain préavis avant de pouvoir être prise en compte. Sur le plan technique, elle peut impacter le plan de déploiement des opérateurs, ou nécessiter des adaptations longues à mettre en œuvre. Il est donc nécessaire que France Télécom publie avec un préavis suffisant toute évolution de l'offre de référence.
Ce préavis doit permettre à l'Autorité de s'assurer, le cas échéant, du respect des obligations portant sur les conditions tarifaires et techniques de l'offre. Il a aussi pour finalité de permettre à l'ensemble du secteur de répercuter ces évolutions sur les prix de détail dès leur application, de mettre en œuvre les solutions techniques correspondantes et, le cas échéant, d'adapter leurs processus opérationnels. De manière générale, au regard des délais de mise en œuvre des politiques de marketing et des délais de commande et de mise en place d'équipements techniques, un préavis de trois mois paraît adapté pour que les opérateurs soient en mesure d'utiliser effectivement les nouvelles modalités d'une offre de gros.
En pratique, ce délai, déjà imposé dans le cadre du précédent cycle d'analyse de marché, est apparu excessif lorsque la modification conduit à une baisse tarifaire d'une des prestations de l'offre. Dans ces cas précis, un préavis plus court, d'un mois, paraît davantage adapté, un préavis de trois mois n'apparaissant pas alors nécessaire aux objectifs poursuivis.
Ainsi, sur le fondement des dispositions du III de l'article D. 307 du CPCE, l'Autorité considère qu'au regard du fonctionnement actuel du marché une durée de trois mois de préavis (ramené à un mois dans le cas d'une baisse tarifaire) est adaptée au respect des objectifs d'égalité des conditions de la concurrence, sans pour autant représenter une charge excessive pour France Télécom.
En outre, lorsque ces évolutions contraignent l'opérateur alternatif à modifier ou à adapter ses propres installations, France Télécom devra respecter un délai d'un an conformément aux dispositions de l'article D. 99-7 du CPCE.
L'obligation de publication avec préavis s'entend sauf décision contraire de l'Autorité. Certains cas particuliers peuvent en effet nécessiter une mise en œuvre immédiate des évolutions de l'offre. Ce cas peut notamment se rencontrer à la suite d'une décision de règlement de litige ou d'une décision de modification de l'offre de référence.
Notamment, s'agissant de la première offre de référence publiée conformément à la présente décision, il n'y a pas lieu d'observer le préavis de trois mois susmentionné entre sa publication et son entrée en vigueur, et ce afin d'assurer au secteur une mise en œuvre des obligations telles que détaillées dans la présente décision aussi rapide que possible.
Il apparaît cependant raisonnable de laisser un mois à France Télécom à compter de l'entrée en vigueur de la présente analyse de marché pour publier une offre de référence qui y soit conforme. Ce délai apparaît suffisant au regard du fait que des offres de gros sont déjà en vigueur ou en cours d'élaboration, qu'une offre de référence existe d'ores et déjà en application des précédentes décisions d'analyse des marchés du haut débit et que France Télécom a pris connaissance du maintien de cette obligation durant le processus d'analyse de marché et de consultation du secteur, en amont de l'entrée en vigueur de la présente décision.
Par ailleurs, il semble raisonnable que France Télécom puisse, une fois l'an, au cours du premier Comité de l'interconnexion et de l'accès, préciser les chantiers en cours sur les évolutions de ses réseaux utilisés dans le cadre des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, afin de prévenir suffisamment à l'avance les opérateurs clients de ses offres des évolutions nécessaires à entreprendre de leur côté.
4.4.5. Transmission d'informations à l'ARCEP
L'article D. 309 du CPCE précise, au titre de l'obligation de non-discrimination imposée aux opérateurs exerçant une influence significative sur un marché, que « les modalités techniques et financières des services d'interconnexion et d'accès qu'ils offrent à leurs propres services, filiales et partenaires doivent pouvoir être justifiées sur demande de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ».
A ce titre, France Télécom devra transmettre périodiquement à l'Autorité un ensemble d'informations, notamment :
― la liste des NRA ouverts à l'offre de télévision par ADSL d'Orange ;
― des données relatives d'une part aux parcs d'Orange et d'autre part aux parcs d'accès de gros achetés par les opérateurs alternatifs ;
― la description précise des processus de qualité de service (commande-livraison d'une part et traitement des pannes d'autre part) mis en œuvre par France Télécom pour son propre compte pour les offres haut débit commercialisées sur le marché de détail.
Il apparaît en effet que les processus mis en œuvre par France Télécom pour ses propres besoins sur le marché de détail constituent un référentiel pertinent d'appréciation des processus mis en œuvre sur les marchés de gros pour les opérateurs tiers.
Par ailleurs, pour permettre à l'Autorité d'apprécier la situation concurrentielle du haut débit et du très haut débit, France Télécom devra transmettre périodiquement à l'Autorité, ou à sa demande, des informations complémentaires relatives au marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational et aux marchés situés en aval de celui-ci.
L'ensemble de ces informations, nécessaires à l'Autorité pour la compréhension de l'environnement financier, technique et concurrentiel des offres, est précisé en annexe 2 de la présente décision.
4.4.6. Communication pour information
Conformément au cadre réglementaire, l'Autorité entend privilégier son intervention sur les seuls marchés de gros tout en s'assurant de l'adéquation des offres d'accès régulés aux évolutions du marché de détail et notamment à la réplicabilité des offres de détail de France Télécom.
L'Autorité juge ainsi nécessaire, en cohérence avec la décision n° 2010-0402 relative à l'analyse de marché des services de capacité, d'imposer à France Télécom de lui transmettre pour information ses offres génériques (description des prestations commercialisées, documentation contractuelle et technique, grille tarifaire) commercialisées par défaut sur les marchés de détail aval à destination de la clientèle professionnelle, afin de s'assurer du bon respect par l'opérateur de l'obligation de non-discrimination sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational. Cette obligation vise par ailleurs à modifier, le cas échéant, sa régulation du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational pour la mettre en cohérence avec les évolutions des offres de détail.
Cette obligation n'ayant pas pour objet de permettre à l'Autorité de s'opposer à la commercialisation d'une nouvelle offre de détail ou à la modification d'une offre existante, il est proportionné de demander à France Télécom de communiquer ces informations postérieurement à leur prise d'effet sur le marché de détail deux fois par an, au 30 juin et au 31 décembre, mais dans un délai maximum d'un mois.
Cette obligation est une modalité de mise en œuvre des obligations de non-discrimination et de transparence imposées à France Télécom au titre des 1° et 2° du I de l'article L. 38 du CPCE.
Cette obligation, imposée au titre de l'article L. 38 du CPCE, est conforme et proportionnée aux objectifs de régulation définis au II de l'article L. 32-1 du CPCE, et en particulier ceux visant à garantir l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques et l'égalité des conditions de concurrence.
4.4.7. Transmission des conventions
En vertu du I de l'article D. 307 du CPCE, l'Autorité peut imposer, au titre de l'obligation de transparence, à tout opérateur exerçant une influence significative sur un marché pertinent, la communication, dès leur conclusion, des conventions d'interconnexion et d'accès.
La publication d'une offre de référence ne s'oppose pas à ce que France Télécom négocie des conditions d'accès qui n'auraient pas été prévues initialement par l'offre et qui doivent être signalées en tant que telles dans la convention.
Toutefois, par référence aux objectifs posés par l'article L. 32-1 du CPCE, l'Autorité doit être en mesure de vérifier qu'aucun opérateur ne fait l'objet d'un traitement discriminatoire tout en veillant parallèlement à ce que le contenu de l'offre de référence réponde de manière satisfaisante aux besoins des opérateurs et à la réalité du marché. En outre, l'obligation de transmission des conventions, à compter de leur signature, est au cas d'espèce un outil qui permet à l'Autorité d'accroître l'efficacité de son action pour promouvoir le développement et l'équilibre des conditions de la concurrence.
Ainsi, eu égard aux spécificités du marché objet de la présente analyse, et afin de permettre la réalisation des objectifs de concurrence effective et loyale dans des conditions de non-discrimination, l'Autorité impose à France Télécom de lui transmettre, dans le délai de dix jours suivant leur signature, les conventions d'accès pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et les avenants y afférant.
Par ailleurs, dans les conditions énoncées à l'article D. 99-6 du CPCE, l'Autorité pourra décider de communiquer, à la demande d'un tiers intéressé, tout ou partie du texte de la convention, sous réserve des informations couvertes par le secret des affaires.
4.5. Qualité de service
Après une phase de mise en place progressive des offres de gros portée par une croissance forte du nombre d'abonnés, le haut débit sur DSL est devenu un produit de masse. Les processus de commande et de traitement des pannes doivent permettre d'assurer un niveau de qualité de service élevé pour l'ensemble des consommateurs et des entreprises souscrivant à des offres haut débit.
La capacité qu'ont les opérateurs alternatifs de proposer des niveaux de qualité de service satisfaisants (délai de livraison, délai de réparation en cas de panne...) est un paramètre déterminant de leurs offres, et donc du choix des consommateurs.
Si la qualité de service des offres aval commercialisées par les opérateurs alternatifs dépend de la qualité de leurs propres prestations, elle est également fonction de la qualité des offres de gros achetées auprès de France Télécom à partir desquelles elles sont construites. Une situation dans laquelle France Télécom bénéficierait au niveau du détail d'une qualité de service meilleure que celle qu'elle assure aux opérateurs alternatifs tendrait à biaiser le choix des consommateurs et à distordre la concurrence sur le marché de détail.
Les opérateurs alternatifs ont des besoins légitimes en termes de qualité de service, qui peuvent être résumés par les trois points suivants :
― les niveaux de qualité de service (par exemple : délais de livraison, de réparation, taux de panne) annoncés dans les offres de gros doivent être compatibles avec les niveaux de qualité affichés sur le marché de détail, en particulier en comparaison de ceux de France Télécom. Cet objectif correspond notamment à l'obligation de non-discrimination à laquelle est soumise France Télécom. Sur le marché professionnel en particulier, il est essentiel pour les opérateurs alternatifs de pouvoir concurrencer les offres de détail professionnelles d'Orange Business Services, non seulement par une réplicabilité technique et tarifaire, mais aussi par des engagements de qualité de service comparable ;
― les niveaux de qualité annoncés dans les offres de gros doivent, autant que possible, être respectés par France Télécom, afin que les opérateurs alternatifs aient suffisamment de visibilité et puissent s'engager eux-mêmes sur des niveaux de service auprès de leurs clients ;
― les niveaux de qualité de service constatés doivent être satisfaisants non seulement en moyenne, mais également pour des sous-catégories, par exemple pour les consommateurs dont la livraison des accès ou la réparation des pannes est la plus longue.
4.5.1. Publication d'indicateurs de qualité de service
Il est souhaitable de donner une incitation à l'efficacité des processus mis en place par France Télécom et de vérifier, en application des dispositions prévues à l'article D. 309 du CPCE, que les niveaux de qualité de service de l'offre de gros sont non discriminatoires par rapport à ce que France Télécom propose pour ses propres services sur les marchés aval. Cela implique que l'opérateur historique mesure et publie mensuellement des indicateurs de qualité de service pour l'ensemble de ses offres de gros ainsi que pour les offres aval correspondantes.
En application de l'article D. 309 du CPCE, l'Autorité peut en effet imposer à France Télécom de publier des informations concernant les conditions de fourniture des prestations d'accès.
La publication d'indicateurs de niveau de service s'analyse comme une obligation proportionnée pour France Télécom. La réalisation de mesures et la publication périodique de plusieurs indicateurs de suivi constituent en effet des pratiques très courantes et constituent les mesures les moins contraignantes pour France Télécom pour s'assurer de l'absence de pratiques discriminatoires et pour permettre, notamment au client final, d'apprécier les responsabilités de France Télécom, d'une part, et de l'opérateur alternatif, d'autre part, dans la qualité de service des offres de détail.
Pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, une liste d'indicateurs, mesurés et publiés mensuellement par France Télécom à l'Autorité, existe déjà pour les offres actuelles. Ces indicateurs constituent une base pertinente de mesures pour le présent marché et les offres aval correspondantes. Pour tenir compte des évolutions du marché et de l'apparition de nouvelles offres de gros ou de détail, ils pourront toutefois faire l'objet de modifications ponctuelles, après consultation par l'Autorité de France Télécom et des opérateurs clients de l'offre de gros, au regard notamment des indicateurs que France Télécom élabore déjà pour son propre suivi.
A minima, il semble souhaitable que soient traités dans ces indicateurs :
― la livraison des accès et le traitement des pannes ;
― de manière distincte pour la livraison, les offres avec et sans abonnement au service téléphonique commuté ;
― de manière distincte, les offres à destination d'une clientèle résidentielle et professionnelle ;
― de manière distincte pour la livraison, les offres sur ligne existante et en construction.
4.5.2. Processus opérationnels efficaces et non discriminatoires
La mise en place sur les marchés de gros d'une qualité de service permettant aux opérateurs de répondre aux attentes des consommateurs sur le marché de détail passe par des actions communes de la part de l'ensemble des opérateurs.
En effet, aussi bien lors de la commande que lors du traitement des pannes, l'efficacité de France Télécom dépend de la qualité des informations transmises par les opérateurs tiers. La qualité du prédiagnostic effectué par ces derniers avant tout envoi de ticket d'incident à France Télécom est donc indispensable pour améliorer la qualité de service.
Par ailleurs, France Télécom a historiquement installé sur son réseau de boucle locale cuivre des multiplexeurs permettant de mutualiser les signaux téléphoniques commutés de plusieurs abonnés sur une même paire de cuivre, notamment pour les abonnés situés dans des zones éloignées des commutateurs locaux. Ces multiplexeurs permettent de limiter dans ces cas la taille des câbles de cuivre déployés sur une partie significative du tracé de réseau. Des multiplexeurs ont également pu être installés localement pour répondre de façon ponctuelle au raccordement d'un nouvel abonné sans avoir à retirer un nouveau câble de cuivre jusqu'au central téléphonique.
Les multiplexeurs sont incompatibles avec les signaux DSL : un abonné ayant une ligne multiplexée ne peut pas bénéficier de services haut débit sur DSL. Des travaux de réaménagement de la boucle locale peuvent être envisagés pour apporter le DSL aux lignes situées derrière un multiplexeur, consistant soit à la pose de nouveaux câbles cuivre, soit à la mise en place d'un nouveau NRA au niveau du multiplexeur.
Lors d'une commande de gros portant sur une ligne inéligible du fait de la présence d'un multiplexeur, il apparaît justifié d'imposer à France Télécom que, lorsque des travaux de réaménagement de la boucle locale sont possibles pour rendre la ligne éligible au DSL, la mise en œuvre de ces travaux se fasse dans des délais raisonnables et que les opérateurs soient informés au mieux des délais encourus.
4.5.3. Engagement de niveau de qualité de service
L'efficacité des processus opérationnels doit s'accompagner de principes tarifaires qui incitent chaque partie à détecter et à traiter au plus vite et dans les meilleures conditions ce qui est de son ressort.
Il paraît à cet égard nécessaire que France Télécom s'engage sur des niveaux de service dans l'offre de référence et soit incitée financièrement à respecter ces engagements.
Ce principe est conforme à l'article D. 310 du CPCE, qui prévoit que l'Autorité « définit en tant que de besoin les conditions de mise en œuvre des obligations [...] de façon à assurer leur exécution dans des conditions équitables et raisonnables ». En outre, ce dispositif fait peser sur France Télécom une contrainte limitée. Ce type d'engagement correspond en effet à des pratiques commerciales courantes sur les marchés concurrentiels.
Ces mécanismes existent déjà dans les offres de référence actuelles de France Télécom et des pénalités sont prévues en cas de livraisons tardives d'un accès de la part de France Télécom.
En juin 2009, France Télécom a revu les modalités d'engagement et de respect des engagements, sous la forme d'un mécanisme de pénalités versées aux opérateurs alternatifs en cas de délais excessifs, y compris pour le traitement des pannes et le respect des délais d'expertises. Ces pénalités ne sont plus conditionnées à la fourniture de prévisions de commandes précises de la part des opérateurs depuis le début de l'année 2010.
Cela paraît conforme au fait que les commandes des opérateurs sur les marchés de gros du haut débit ne représentent qu'une partie des commandes reçues par France Télécom, de par sa position sur le marché de détail du haut débit, et plus généralement de sa connaissance de l'ensemble des commandes, sur les marchés de gros ou de détail, nécessitant l'intervention de techniciens au NRA.
4.5.4. Qualité des accès livrés
Sur le principe, les offres haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational doivent permettre aux opérateurs alternatifs de proposer toutes sortes de services sur la base des technologies xDSL, dans la limite des contraintes techniques liées à l'affaiblissement de la ligne. La totalité des accès correspondants sont ainsi utilisés en pratique par les opérateurs alternatifs pour proposer a minima des services d'accès à internet.
Le critère de continuité métallique retenu à ce jour par France Télécom ne permet que de garantir la qualité de service de la voix commutée. Au-delà de ce seul critère, il convient que les processus de rétablissement et de livraison de France Télécom soient satisfaisants pour assurer les services des abonnés finals et des opérateurs. Cela fera l'objet d'un suivi opérationnel régulier, sur la base des informations remontées par les opérateurs alternatifs, dans le cadre des groupes multilatéraux concernés.
4.6. Obligation de contrôle tarifaire
Le 4° du I de l'article L. 38 du CPCE dispose que l'Autorité peut imposer un contrôle tarifaire aux opérateurs disposant d'une influence significative.
France Télécom dispose d'une influence significative sur l'ensemble du marché des offres de gros haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational et doit faire droit, au niveau national, aux demandes raisonnables d'accès à des offres de gros haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational dans des conditions transparentes et non discriminatoires.
En ce qui concerne l'application d'une obligation de contrôle tarifaire, il convient, d'une part, d'assurer que les conditions tarifaires dans lesquelles l'accès est accordé sont à même de garantir l'égalité des conditions de concurrence et, d'autre part, d'éviter que l'opérateur disposant d'une influence significative, i.e. France Télécom, ne recoure à une tarification de monopole, au détriment du consommateur.
Au cours des deux cycles d'analyse de marché précédents, la régulation tarifaire des offres de gros haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational a consisté à maintenir un espace économique suffisant entre ces offres et les offres alternatives fondées sur le dégroupage, favorisant l'extension progressive du dégroupage vers des NRA de plus en plus petits. Plus précisément, le dispositif relatif aux obligations tarifaires pour les offres de gros de France Télécom comportait deux volets : l'interdiction pour France Télécom de pratiquer des tarifs d'éviction sur les prestations de gros, d'une part, et l'orientation vers les coûts, sous réserve du respect du principe de non-éviction, d'autre part.
Désormais, il apparaît que les conditions du marché ont changé et que le tarif des offres de gros haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational n'est plus le principal élément déterminant dans l'analyse conduite par les opérateurs alternatifs pour choisir d'aller dégrouper, ou non, un NRA. Les opérateurs alternatifs tiennent ainsi compte, dans leur décision d'aller dégrouper un nouveau NRA, du fait qu'ils disposent de revenus supplémentaires dans les zones dégroupées, grâce à des offres de services enrichies qui ne sont pas disponibles en zones non dégroupées, notamment des offres de contenus sur télévision par DSL. En outre, les opérateurs alternatifs constatent que leur part de marché en zones dégroupées est plus importante qu'en zones non dégroupées, ce qui constitue une autre incitation à l'extension de leur zone de dégroupage. Enfin l'Autorité vise spécifiquement, au travers des obligations imposées à France Télécom dans le cadre de l'analyse du marché de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire (marché 4), à mettre en œuvre tous les moyens pour favoriser l'extension du dégroupage vers des NRA de plus en plus petits, via les prestations connexes de colocalisation et l'offre de raccordement des sites distants en fibre optique.
Cette évolution des conditions du marché conduit ainsi l'Autorité, à l'occasion du nouveau cycle d'analyse du marché, à reconsidérer l'application des obligations tarifaires imposées à France Télécom pour ses offres de gros haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational.
Compte tenu des différences d'intensité concurrentielle sur le marché des offres de gros haut débit et très haut débit livrées au niveau infranational entre les segments résidentiel et entreprise, l'Autorité distingue, dans la suite de son analyse, l'application des obligations tarifaires sur ces deux segments de marché.
4.6.1. Sur le segment des offres à destination d'une clientèle résidentielle
Saisie pour avis par l'ARCEP sur le projet d'analyse de marché (10), l'Autorité de la concurrence, s'appuyant sur la position de la Commission européenne indiquant que « les différences relevées entre les contraintes concurrentielles sur les différents territoires peuvent conduire, sinon à la définition de marchés géographiques distincts, du moins à une application différenciée en fonction des territoires des obligations pouvant être imposées », invite l'ARCEP à préférer l'application de remèdes géographiques plutôt que la délimitation de marchés géographiques distincts.
Au niveau local, la situation de France Télécom varie fortement selon la zone concernée, entre les zones non dégroupées, où France Télécom dispose mécaniquement d'une part de marché de 100 % sur le marché de gros des offres haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle, et les zones dégroupées, où sa part de marché est d'autant moins élevée qu'un nombre important d'opérateurs tiers sont en mesure de proposer des offres haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational concurrentes à celles de France Télécom, soit en DSL sur la base du dégroupage, soit sur la technologie câble coaxial, disposant généralement de plus de fonctionnalités et à des tarifs moins chers.
L'intensité concurrentielle sur le marché de gros des offres haut débit livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle est ainsi en grande partie corrélée à la présence d'offres de gros alternatives proposées par les opérateurs tiers sur la base du dégroupage. Dans une moindre mesure, les offres de gros alternatives fondées sur des technologies filaires autres que le DSL, telles que les offres de gros activées proposées par le câblo-opérateur, peuvent également, localement, dynamiser la concurrence.
L'Autorité propose de tenir compte de la position hétérogène de France Télécom sur le marché de gros considéré en différenciant, géographiquement, les obligations de contrôle tarifaire qui lui sont imposées. A cet effet, l'Autorité distingue deux zones géographiques complémentaires :
― une première zone géographique, correspondant à la zone où France Télécom est le seul opérateur proposant des offres de gros haut débit activées livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle ;
― une seconde zone géographique, correspondant à la zone où au moins un opérateur tiers propose une offre alternative aux offres de gros activées de France Télécom, soit en DSL sur la base du dégroupage, soit en technologie câble coaxial, soit en fibre optique (bien que de telles offres ne soient pas disponibles aujourd'hui).
A ce jour, compte tenu de la couverture respective des différentes technologies, il apparaît que la zone de couverture des offres de bitstream fondées sur les technologies autres que le DSL, notamment le câble coaxial, reste strictement contenue dans la zone de couverture des offres de bitstream DSL alternatives à celles de France Télécom. En outre, il s'avère que l'essentiel des accès bitstream vendus à ce jour par les opérateurs alternatifs sont établis en DSL, sur la base du dégroupage. Ainsi, le périmètre de la seconde zone géographique correspond au titre de la présente analyse à l'ensemble des NRA dégroupés par au moins un opérateur tiers proposant des offres de gros haut débit en DSL livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle.
A titre d'illustration, au 31 décembre 2010, sur un total de 14 422 NRA, la première zone géographique représentait un ensemble de 9 646 NRA soit 20,5 % de la population, la seconde zone géographique représentait un ensemble de 4 776 NRA, soit 79,5 % de la population.
L'Autorité ne retient pas, à ce stade, le critère du nombre d'opérateurs dégroupeurs présents au niveau du NRA considéré, dans la mesure où l'existence du dégroupage ne conduit pas nécessairement à un degré de concurrence satisfaisant sur le marché du bitstream. En effet, un opérateur alternatif achetant du dégroupage à France Télécom ne doit pas être considéré comme un offreur potentiellement en mesure d'être présent dans un délai court sur le marché du bitstream. La fourniture d'une offre de gros de bitstream suppose en effet le développement en interne de nombreux processus : adaptation du système d'informations, développement de processus de commande, mise en place d'une filière de gros, etc. La présence d'un opérateur sur le marché de gros du bitstream relève ainsi de choix stratégiques indépendants de ses choix de dégroupage.
L'Autorité ne retient pas, à ce stade, le critère de part de marché des opérateurs de bitstream alternatif pour différencier géographiquement les obligations tarifaires. L'Autorité note ainsi que, en moyenne, la part de marché de France Télécom sur le marché de gros du bitstream décroît progressivement dès l'arrivée d'un opérateur alternatif. D'un point de vue global, l'Autorité observe en outre que France Télécom ne regagne pas de parts de marché sur le marché du bitstream dès lors qu'au moins un opérateur propose une offre de bitstream alternative. En particulier, les offres de bitstream des opérateurs alternatifs sont généralement plus intéressantes que celles de France Télécom, notamment en termes de service (télévision sur DSL).
En tant que de besoin, l'Autorité pourra néanmoins réviser ces critères si les conditions de marché étaient amenées à évoluer significativement en ce sens.
4.6.1.1. Tarification reflétant les coûts dans la zone où France Télécom
est le seul opérateur proposant des offres de gros haut débit activées
Sur l'ensemble de la première zone géographique, France Télécom est le seul opérateur proposant des offres de gros haut débit activées livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle et se retrouve donc en position de monopole local.
Dans cette situation, une obligation de tarification reflétant les coûts permet, d'une part, d'assurer l'égalité des conditions de concurrence entre les opérateurs alternatifs clients des offres de France Télécom et France Télécom en tant que fournisseur sur le marché de détail résidentiel et, d'autre part, d'éviter le risque de prix de monopole, résultant de l'absence de pression concurrentielle.
En effet, la tarification en fonction des coûts des offres de gros proposées par France Télécom permet à ce dernier de recouvrer ses coûts tout en faisant bénéficier aux opérateurs alternatifs, qui n'ont pas atteint la même masse critique, de ses économies d'échelle et en permettant in fine au consommateur sur le marché de détail d'avoir accès à des prix bas.
L'obligation pour les tarifs de refléter les coûts des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle apparaît donc comme la seule à même de répondre, sur la zone géographique considérée, aux objectifs de la régulation ex ante fixés à l'article L. 32-1 du CPCE.
L'Autorité estime donc qu'il est justifié et proportionné d'imposer à France Télécom l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle et les prestations associées sur l'ensemble de la première zone géographique précédemment définie.
Par ailleurs, conformément à l'article D. 311 du CPCE, l'Autorité considère que les mécanismes de recouvrement des coûts et les méthodes de tarification des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle doivent promouvoir l'efficacité économique, favoriser une concurrence durable et optimiser les avantages pour le consommateur.
Dès lors, les tarifs de l'offre doivent refléter les coûts de long terme d'un opérateur efficace aux caractéristiques comparables à celles de France Télécom. A ce titre, ils ne doivent pas être marqués par des effets de seuil et sont établis sur la base de choix économiques rationnels, en ayant recours notamment à des capacités adaptées.
En tant que de besoin, l'Autorité pourra être amenée à faire évoluer le système de comptabilisation et d'allocation des coûts de France Télécom actuellement en vigueur par une décision complémentaire ultérieure.
En outre, l'article D. 311 du CPCE précise qu'une fois cette obligation imposée, l'opérateur doit être en mesure de démontrer que les tarifs de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle reflètent effectivement les coûts de long terme d'un opérateur efficace.
En particulier, toute modification des prix de cette offre pourrait amener l'Autorité à demander à France Télécom de justifier intégralement ses tarifs au regard de ces coûts. Enfin, en cas d'absence de justification, l'Autorité est habilitée à exiger l'adaptation de ces tarifs et modifier l'offre de référence.
4.6.1.2. Pas d'obligation tarifaire dans la zone où France Télécom n'est pas le seul
opérateur proposant des offres de gros haut débit activées
Sur la seconde zone géographique, un ou plusieurs opérateurs tiers proposent des offres alternatives à destination d'une clientèle résidentielle aux offres de gros haut débit activées livrées au niveau infranational de France Télécom. Il s'agit essentiellement d'accès haut débit en DSL, produits sur la base de l'offre de dégroupage de France Télécom.
L'émergence d'une concurrence pérenne sur cette zone est liée à la capacité des opérateurs tiers de proposer des offres de gros d'accès haut débit suffisamment différenciées en termes de services par rapport à celles de France Télécom, et à des niveaux tarifaires attractifs. En particulier, des projets de réseaux d'initiative publique ont, localement, à l'échelle d'une agglomération, d'un département ou de toute une région, été engagés au cours des cinq dernières années, visant justement à promouvoir le développement de la concurrence via la fourniture d'offres d'accès haut débit en DSL alternatives à celles de France Télécom, notamment au niveau de petits NRA qui n'avaient pas été jusqu'à présent dégroupés par les opérateurs privés.
L'Autorité considère que, dans cette zone, quel que soit le nombre d'opérateurs tiers proposant des offres de gros haut débit activées alternatives, s'exerce désormais une pression concurrentielle suffisamment forte sur France Télécom pour limiter les risques sur le plan tarifaire. A ce titre, l'Autorité estime que l'Autorité de la concurrence est en mesure, le cas échéant, d'intervenir ex post pour sanctionner un éventuel comportement anticoncurrentiel de France Télécom, notamment dans l'hypothèse où France Télécom pratiquerait des tarifs d'éviction par rapport à ses concurrents proposant des offres de gros alternatives fondées sur le dégroupage, en particulier les opérateurs de réseaux d'initiative publique.
Au vu de ce qui précède, l'Autorité n'impose pas d'obligation tarifaire à France Télécom pour ses offres d'accès haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle résidentielle sur l'ensemble de la seconde zone géographique précédemment définie.
L'Autorité reste néanmoins vigilante au développement d'une concurrence pérenne sur ce segment de marché et saisira, en tant que de besoin, l'Autorité de la concurrence, notamment dans l'hypothèse où France Télécom pratiquerait des tarifs d'éviction par rapport à ses concurrents proposant des offres de gros alternatives fondées sur le dégroupage.
4.6.2. Sur le segment des offres à destination d'une clientèle professionnelle
Contrairement au segment résidentiel, France Télécom conserve une part de marché élevée sur le segment professionnel du marché des offres de gros d'accès haut débit en DSL livrées au niveau infranational (de l'ordre de 75 %) ainsi que sur le marché de détail sous-jacent des offres de détail d'accès haut débit (de l'ordre de 65 % à 75 %) selon les segments de marché et les services considérés.
L'intensité concurrentielle est ainsi plus réduite sur le segment professionnel que sur le segment résidentiel :
― l'empreinte géographique concernée par le dégroupage et sur laquelle sont proposées des offres de bitstream alternatives y est plus réduite, de l'ordre de 2 000 NRA correspondant à environ 60 % de la population ;
― le nombre d'offreurs est également plus limité, et fonction selon la complexité technique des offres : si sur le marché de gros du bitstream professionnel de niveau 3 ― qui permet de répondre aux besoins de la plupart des entreprises ― deux opérateurs alternatifs sont actifs et peuvent proposer des offres de niveau 3 directement sur leur réseau IP, avec des parts de marché respectives qui restent néanmoins relativement basses, il n'existe a contrario à ce jour qu'un seul offreur alternatif, avec un parc de clients relativement faible en ce qui concerne le marché de gros du bitstream professionnel de niveau 2, qui permet des offres plus avancées (transparence au trafic Ethernet, gestion de classes de services).
Au regard de ces conditions concurrentielles, l'Autorité estime qu'il est justifié et proportionné d'imposer à France Télécom l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées à la clientèle professionnelle ainsi que sur les prestations associées.
Toutefois, afin de protéger les investissements réalisés par les opérateurs alternatifs dans le dégroupage en vue de fournir des offres destinées à la clientèle professionnelle, il apparaît nécessaire d'assortir cette obligation d'une interdiction de pratiquer des tarifs d'éviction.
4.6.2.1. Tarification reflétant les coûts
Sur le segment des offres destinées à la clientèle professionnelle du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, il convient, d'une part, d'assurer que les conditions tarifaires dans lesquelles l'accès est accordé sont à même de garantir l'égalité des conditions de concurrence et, d'autre part, d'éviter que l'opérateur disposant d'une influence significative, i.e. France Télécom, ne recoure à une tarification de monopole, au détriment du client final.
Dans cette situation, une obligation de tarification reflétant les coûts permet d'assurer à la fois l'égalité des conditions de concurrence entre les opérateurs alternatifs clients de l'offre et France Télécom en tant que fournisseur sur le marché de détail, et de garantir des prix attractifs pour le client final. En effet, la tarification en fonction des coûts de l'offre de gros proposée par l'opérateur historique permet à ce dernier de recouvrer ses coûts tout en faisant bénéficier aux opérateurs alternatifs qui n'ont pas atteint la même masse critique de ses économies d'échelle et en permettant in fine au client final sur le marché de détail d'avoir accès à des prix bas.
L'obligation pour les tarifs de refléter les coûts des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées à la clientèle professionnelle apparaît donc comme la seule à même de répondre aux objectifs de la régulation ex ante fixés à l'article L. 32-1 du CPCE.
L'Autorité estime donc qu'il est justifié et proportionné d'imposer à France Télécom l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées à la clientèle professionnelle ainsi que sur les prestations associées.
Par ailleurs, conformément à l'article D. 311 du CPCE, l'Autorité considère que les mécanismes de recouvrement des coûts et les méthodes de tarification des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées à la clientèle professionnelle doivent promouvoir l'efficacité économique, favoriser une concurrence durable et optimiser les avantages pour le consommateur.
Dès lors, les tarifs de l'offre doivent refléter les coûts de long terme d'un opérateur efficace aux caractéristiques comparables à celles de France Télécom.
A ce titre, ils ne doivent pas être marqués par des effets de seuil et sont établis sur la base de choix économiques rationnels, en ayant recours notamment à des capacités adaptées.
En tant que de besoin, l'Autorité pourra être amenée à faire évoluer le système de comptabilisation et d'allocation des coûts de France Télécom actuellement en vigueur par une décision complémentaire ultérieure.
En outre, l'article D. 311 du CPCE précise qu'une fois cette obligation imposée, l'opérateur doit être en mesure de démontrer que les tarifs de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées à la clientèle professionnelle reflètent effectivement les coûts de long terme d'un opérateur efficace.
En particulier, toute modification des prix de cette offre pourrait amener l'Autorité à demander à France Télécom de justifier intégralement ses tarifs au regard de ces coûts. Enfin, en cas d'absence de justification, l'Autorité est habilitée à exiger l'adaptation de ces tarifs et modifier l'offre de référence.
4.6.2.2. Proscription des tarifs d'éviction
Afin de permettre le développement d'une concurrence pérenne par les infrastructures, la régulation mise en œuvre par l'Autorité sur les marchés de gros du haut débit a visé à favoriser l'extension du dégroupage qui consiste en la location par un opérateur alternatif de la boucle locale de cuivre de France Télécom, mise à disposition au niveau des répartiteurs de France Télécom. En effet, le dégroupage offre à l'opérateur alternatif davantage de latitude de différenciation technique et tarifaire pour concurrencer l'opérateur historique sur le marché de détail. La progression de l'opérateur alternatif sur la chaîne de valeur et une plus grande maîtrise de ces éléments de réseaux (notamment de ses propres équipements actifs) lui permet de proposer des offres différenciées de l'opérateur historique et d'animer ainsi la concurrence sur le marché de détail.
En complément du dégroupage, les offres de gros haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational de France Télécom permettent notamment aux opérateurs alternatifs de compléter leur couverture en haut débit et de proposer leurs offres à l'ensemble de la population.
L'économie du dégroupage est sujette à d'importants facteurs d'échelle : plus un répartiteur regroupe un nombre important de lignes, plus les coûts peuvent être mutualisés sur un nombre important d'accès dégroupés. Les opérateurs alternatifs ont ainsi dégroupé dans un premier temps les plus gros répartiteurs, avant d'étendre progressivement leur couverture en dégroupage.
Dans ce contexte, la régulation tarifaire des offres de gros haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, mise en place dans le premier cycle d'analyse des marchés du haut débit, et reconduite pour la période 2008-2011, a consisté à maintenir un espace économique suffisant entre ces offres et le dégroupage, favorisant l'extension progressive du dégroupage vers des répartiteurs de plus en plus petits. Plus précisément, le dispositif relatif aux obligations tarifaires pour l'offre bitstream comportait deux volets : l'interdiction pour France Télécom de pratiquer des tarifs d'éviction, d'une part, et l'orientation vers les coûts, sous réserve du respect du principe de non-éviction, d'autre part.
La proscription des tarifs dits d'« éviction » a donc prévalu jusqu'à la présente analyse de marché. En pratique, l'Autorité a développé, publié et mis à jour depuis 2005 des modèles de coût de l'accès et de la collecte pour un opérateur alternatif efficace ayant recours au dégroupage, déclinés pour la clientèle résidentielle et la clientèle professionnelle. Ces modèles permettent d'apprécier un niveau tarifaire minimum de ces offres, dites de « non-éviction », pour maintenir une incitation économique des opérateurs alternatifs à l'extension du dégroupage. L'extension du dégroupage a ainsi conduit à revoir régulièrement les tarifs des offres de bitstream de France Télécom sur la base de ces modèles de coûts, mis à jour avec les paramètres du marché, notamment le taux de pénétration du haut débit et la part de marché d'un opérateur alternatif efficace.
Aujourd'hui, il apparaît que les conditions du marché ont changé et que le tarif des offres de gros haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational n'est plus le principal élément déterminant dans l'analyse conduite par les opérateurs alternatifs pour choisir d'aller dégrouper, ou non, un répartiteur.
En particulier, sur le segment des offres à destination de la clientèle professionnelle, la progression des offres entreprises dégroupées au cours du dernier cycle a essentiellement été le fait des opérateurs mixtes résidentiel/entreprises, qui équipent les cartes SDSL des NRA initialement dégroupés pour adresser le segment résidentiel. A contrario, la dynamique de dégroupage s'est essoufflée chez les opérateurs intervenant uniquement sur le segment professionnel, dont la couverture par le dégroupage a très peu progressé, voire stagné. La déclinaison du modèle de non-éviction mis en place sur le bitstream destiné in fine à une clientèle professionnelle visait à encourager l'extension du dégroupage, notamment par des opérateurs présents uniquement sur le marché professionnel. La zone de couverture optimale pour ces opérateurs a été évaluée dans ce modèle à 125 NRA et cette couverture est désormais atteinte.
Dans ces conditions, une contrainte de non-éviction basée sur la préservation, pour un opérateur actif uniquement sur le marché entreprise, de l'incitation à aller dégrouper de nouveaux répartiteurs en limite de son empreinte de couverture n'apparaît plus fondée.
Toutefois, le marché des offres de gros haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées à la clientèle professionnelle est aujourd'hui très faiblement développé, comme l'illustrent les parts de marché des opérateurs alternatifs, de l'ordre de 25 % dans la zone où deux offreurs alternatifs sont actifs, et inférieure à 10 % dans la zone où un seul offreur alternatif est actif. Par ailleurs, la couverture des opérateurs alternatifs mixtes en offres haut débit destinées à la clientèle professionnelle est aujourd'hui inférieure à la couverture totale en offre DSL.
Il convient donc de veiller à ce que les tarifs mis en œuvre par France Télécom ne viennent pas remettre en cause les modèles économiques développés par les opérateurs tiers ou dans le cadre d'une intervention publique, sur la base du dégroupage. France Télécom dispose en effet d'économies d'échelle plus importantes que ses concurrents pour produire des accès haut débit en DSL à destination d'une clientèle professionnelle, de par sa position sur les marchés de gros et de détail. Ces économies sont susceptibles de compromettre le jeu concurrentiel sur le marché de gros, notamment sur le plan tarifaire.
En considération du stade intermédiaire de développement du marché des offres de gros haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées à la clientèle professionnelle et des risques pour le jeu concurrentiel sur ce marché de lever les obligations tarifaires imposées à France Télécom, il apparaît souhaitable de retenir une contrainte de non-éviction revue et adaptée, sur des bases visant désormais uniquement à assurer la protection des investissements consentis par les opérateurs tiers ou dans le cadre d'une initiative publique.
L'Autorité estime en conséquence justifié et proportionné que France Télécom ne pratique pas de tarifs d'éviction pour ses offres de gros d'accès haut débit en DSL livrées au niveau infranational à destination d'une clientèle professionnelle sur l'ensemble de la zone d'analyse. L'Autorité veillera, le cas échéant, à apprécier le respect de ce principe de non-éviction au regard des coûts moyens supportés par un opérateur tiers efficace et mixte, c'est-à-dire actif aussi bien sur les marchés résidentiels que sur les marchés professionnels, pour proposer, sur la base du dégroupage, des offres alternatives à celles de France Télécom au niveau d'une zone géographique pertinente. En ce sens, l'Autorité développera un modèle réglementaire de coût pour l'accès dégroupé et la collecte, qui permettra de vérifier le niveau des tarifs d'éviction des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. Ce modèle fera l'objet d'une consultation publique.
4.6.3. Suivi des obligations de contrôle tarifaire
En application des obligations tarifaires décrites ci-dessus, les tarifs des prestations proposées par France Télécom pour ses offres de gros d'accès haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational doivent, soit pour une zone géographique délimitée pour les offres à destination d'une clientèle résidentielle, soit pour l'ensemble du marché pour les offres à destination d'une clientèle professionnelle, refléter les coûts correspondants.
Afin d'être en mesure de vérifier, le cas échéant, le respect par France Télécom de ses obligations, l'Autorité peut être amenée à demander à France Télécom, pour ses offres de gros d'accès haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational de l'informer des coûts qu'elle encourt pour en fournir les différentes composantes (accès, collecte IP, collecte ATM, collecte Ethernet, prestations connexes, etc.) sur les zones géographiques considérées, en distinguant le segment résidentiel et le segment entreprise.
En cas d'évolution dans les offres de France Télécom, l'Autorité pourra être amenée, en tant que de besoin, à préciser les méthodes de comptabilisation des coûts pour l'ensemble des offres de gros du marché pertinent ainsi que les méthodes pertinentes à retenir pour la tarification des offres de gros d'accès haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational de France Télécom faisant l'objet d'un contrôle tarifaire.
4.6.4. Révision annuelle des périmètres des zones géographiques
Les périmètres des zones géographiques précédemment définies sont amenés à évoluer au cours du nouveau cycle d'analyse de marché, au fur et à mesure que les opérateurs tiers proposant des offres haut débit alternatives à celles de France Télécom équipent de nouveaux NRA en dégroupage.
A cet effet, l'Autorité considère qu'il convient de réviser régulièrement les périmètres des zones géographiques, compte tenu des principes tarifaires différents s'y appliquant respectivement. Un tel mécanisme de révision suppose, pour l'Autorité, de disposer dans un premier temps de l'ensemble des informations relatives à l'état du marché, NRA par NRA, et, dans un second temps, une fois les zones délimitées, d'être en mesure de récupérer, auprès de France Télécom, les éléments de coûts pour les zones concernées.
L'Autorité estime raisonnable qu'un tel exercice de révision soit mené une fois par an, afin que France Télécom soit en mesure, à mi-année, de déterminer les tarifs de ses offres de gros d'accès haut débit sur DSL livrées au niveau infranational en vigueur pour les douze mois à venir.
4.6.5. Cas des zones où France Télécom n'est ni propriétaire ni gestionnaire de la boucle locale
Dans les zones où France Télécom n'est ni propriétaire ni gestionnaire de la boucle locale (zones aéroportuaires de Paris, par exemple), une demande d'accès à ces réseaux formulée auprès de France Télécom ne saurait être considérée comme raisonnable. France Télécom n'est donc pas soumise sur ces zones à l'obligation de fournir des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. Si elle fait néanmoins le choix d'étendre ses offres à ces zones, l'obligation de contrôle tarifaire n'y est pas applicable.
En pratique, si les propriétaires ou gestionnaires de la boucle locale dans ces zones ne proposaient pas des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational dans des conditions équivalentes à celles fournies par France Télécom sur le reste du territoire, l'Autorité demanderait la publication d'une telle offre et pourrait, en cas de refus et en tant que de besoin, être amenée à traiter cette situation en règlement de différend.
4.7. Obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable
Les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable sont des remèdes distincts que peut imposer l'Autorité à un opérateur déclaré puissant sur un marché donné au terme des analyses de marché menées selon la procédure déclinée dans l'article 16 de la directive « cadre ».
L'obligation de comptabilisation des coûts est prévue par l'article 13 de la directive « accès », incluant également les obligations liées à la récupération des coûts, au contrôle des prix et à l'orientation des prix en fonction des coûts. L'objectif de l'imposition de ces obligations est d'éviter que l'opérateur concerné, « en l'absence de concurrence efficace, [maintienne] des prix à un niveau excessivement élevé, ou [comprime] les prix, au détriment des utilisateurs finals ».
Le 5° du I de l'article L. 38 du CPCE précise que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer, [...] [d']isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès, ou tenir une comptabilité des services et des activités qui permette de vérifier le respect des obligations imposées au titre du présent article ».
A ce titre, l'Autorité estime donc proportionné et justifié d'imposer à France Télécom une obligation de comptabilisation des coûts pour vérifier le respect des obligations tarifaires imposées à France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational au titre de la présente analyse.
L'article 11 de la directive « accès » prévoit que l'Autorité peut « imposer des obligations de séparation comptable en ce qui concerne certaines activités dans le domaine de l'interconnexion et/ou de l'accès », et ce dans l'objectif de contribuer à la vérification du respect des obligations de transparence et de non discrimination. En particulier, l'Autorité peut « obliger une entreprise intégrée verticalement à rendre ses prix de gros et ses prix de transferts internes transparents, entre autres pour garantir le respect de l'obligation de non discrimination prévue à l'article 10 ou, en cas de nécessité, pour empêcher des subventions croisées abusives ».
A ce titre, l'Autorité peut « spécifier le format et les méthodologies comptables à utiliser » et « exiger que les documents comptables, y compris les données concernant les recettes provenant de tiers, lui soient fournis si elle en fait la demande ».
Le caractère intégré et le positionnement de France Télécom sur les marchés de détail et de gros du haut débit et du très haut débit peuvent se traduire par des distorsions discriminatoires sur les marchés de gros. Ces distorsions éventuelles peuvent être mises sous surveillance grâce notamment à l'imposition d'une obligation de séparation comptable.
L'obligation de séparation comptable est justifiée étant donné la nécessité de détecter l'apparition de comportements discriminatoires et/ou de subventions croisées abusives entre le marché de gros et le marché de détail aval. L'obligation de séparation comptable est proportionnée aux objectifs fixés au II de l'article L. 32-1 du CPCE, et en particulier les 2°, 3°, 4° et 9°. Cette obligation constitue le minimum nécessaire pour s'assurer notamment de l'absence de subventions croisées abusives et du respect de l'obligation de non discrimination.
C'est pourquoi l'Autorité estime justifié et proportionné d'imposer à France Télécom une obligation de séparation comptable sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
L'obligation de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposée au titre la présente analyse doit s'appliquer à l'ensemble du marché pertinent, y compris aux offres de gros activées sur fibre. Cette obligation constitue un minimum pour s'assurer de l'absence de subventions croisées et de pratiques de ciseau tarifaire. Elle est donc proportionnée aux objectifs fixés au II de l'article L. 32-1 du CPCE, et en particulier les 2° et 9°.
Les modalités de mise en œuvre de l'obligation de séparation comptable ont été précisées dans la décision n° 2006-1007 en date du 7 décembre 2006 portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom. L'Autorité estime qu'il convient de maintenir les dispositions prévues par la décision n° 2006-1007 concernant le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational sur la période d'application de la présente décision, sans préjudice de toute décision ultérieure.
Par ailleurs, les offres sur mesure faites aux entreprises par les opérateurs sont de plus en plus complexes et sont susceptibles d'intégrer des produits de plusieurs marchés de gros. Dans la décision n° 2010-0402 relative à l'analyse de marché des services de capacité, l'Autorité a imposé à France Télécom une obligation de transmission trimestrielle d'un descriptif technique et tarifaire des offres sur mesure dont le montant dépasse 100 000 € HT et de la manière dont elles sont constituées à partir des « briques de base » techniques et tarifaires disponibles sur le marché de gros, accompagné du protocole de cession interne correspondant à cette offre.
Au titre de la surveillance du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, il semble justifié de mettre en place un dispositif similaire. Dans la pratique, ce dispositif ne devrait pas induire une complexité plus grande ni une charge supplémentaire de travail pour France Télécom car ces deux dispositifs parallèles devraient viser les mêmes contrats. Il ne sera ainsi demandé à France Télécom qu'un seul descriptif par offre sur mesure tombant sous le coup de ces dispositifs.
5. RÉVISION ANTICIPÉE DU CADRE DE RÉGULATION
Comme indiqué précédemment, l'Autorité considère qu'il n'est ni proportionné ni justifié, à ce stade, de réguler les offres de gros très haut débit actives établies sur la fibre optique de France Télécom, compte tenu du cadre réglementaire déjà en vigueur, combinant accès aux infrastructures de génie civil de France Télécom et accès à la partie terminale des réseaux en fibre optique, propice à l'émergence spontanée d'offres concurrentes sur le marché considéré.
Dans le contexte de déploiement de nouvelles boucles locales en fibre optique, les incertitudes sur les évolutions futures du marché incitent néanmoins à une surveillance étroite. A ce titre, l'Autorité entend demeurer vigilante sur l'émergence effective d'un marché de gros efficace des offres très haut débit permettant effectivement une animation concurrentielle non faussée sur les marchés de détail. L'Autorité fixe donc une clause de rendez-vous à mi-parcours du cycle d'analyse de marché, soit dix-huit mois après l'entrée en vigueur de la présente décision, pour évaluer la nécessité d'imposer des obligations asymétriques supplémentaires sur la fibre optique, sans préjudice de la possibilité de réviser à tout moment l'analyse de manière anticipée si l'évolution du marché le justifiait, conformément à l'article D. 301 du CPCE.
6. AVIS DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Conformément à l'article L. 37-1 du CPCE, l'ARCEP a sollicité l'avis de l'Autorité de la concurrence sur la délimitation des marchés pertinents et sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative. L'Autorité de la concurrence a ainsi fait part de ses observations dans son avis n° 11-A-05 en date du 8 mars 2011.
6.1. Sur la délimitation des marchés pertinents
Concernant la substituabilité entre les différentes offres de gros activées, l'Autorité de la concurrence conclut quant à la difficulté de trancher et « suggère à l'ARCEP de laisser cette question aussi ouverte que possible dans la mesure où elle n'a pas d'implication immédiate dans la régulation envisagée ».
Concernant la délimitation géographique du marché 5, l'Autorité de la concurrence note que « France Télécom détient une part de marché de 84 % (11) sur le marché 5 » mais que « la position de France Télécom est cependant très hétérogène en fonction des zones concernées : de 100 % dans les zones non dégroupées, cette position est marginale dans les zones dégroupées, où des acteurs tels que SFR proposent des offres de gros d'accès DSL activés à des tarifs souvent inférieurs à ceux de France Télécom et présentant la plupart du temps la fonctionnalité multicast ».
L'Autorité de la concurrence s'appuie sur la position de la Commission européenne indiquant que « les différences relevées entre les contraintes concurrentielles sur les différents territoires peuvent conduire sinon à la définition de marchés géographiques distincts, du moins à une application différenciée en fonction des territoires des obligations pouvant être imposées » pour inviter l'ARCEP à préférer l'application de remèdes géographiques plutôt que la délimitation de marchés géographiques distincts. A travers cette méthodologie, l'Autorité de la concurrence vise à « assurer une transition, sur la période 2011-2014, entre le dispositif actuel de régulation et la soumission des zones concurrentielles au seul respect des règles de concurrence ».
6.2. Sur le caractère régulable de ces marchés
Concernant les remèdes géographiques, l'Autorité de la concurrence suggère que, dans les zones concurrentielles, « pourraient notamment être maintenues les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable », mais que « le maintien d'obligations tarifaires ex ante dans ces zones, notamment l'obligation d'orienter les tarifs vers les coûts, ne paraît pas pouvoir se justifier ». L'Autorité de la concurrence note également que, « à l'inverse, la position de l'opérateur historique demeure forte sur les territoires moins denses et auprès de la clientèle professionnelle » et que « ces situations justifient un effort soutenu de la part du régulateur ».
6.3. Sur les conséquences relatives à la régulation de la fibre optique
Au vu de la régulation symétrique envisagée par l'ARCEP et des analyses de marché 4 et 5, il n'est pas envisagé par l'ARCEP d'imposer la fourniture d'offres de gros sur les réseaux FttH, à l'exception de l'offre de location à la ligne prévue en dehors des zones très denses.
A ce sujet, l'Autorité de la concurrence souligne que « l'absence d'offres de gros sur fibre optique limitera la liberté de choix des consommateurs, particulièrement dans la phase de déploiement des réseaux horizontaux et de raccordement des immeubles et des points de mutualisation par les différents opérateurs investissant dans les réseaux FttH. A plus long terme, il existe un risque de fermeture du marché autour d'un nombre réduit d'acteurs maîtrisant leur infrastructure et ne fournissant pas spontanément d'offres de gros ».
L'Autorité de la concurrence demande à l'ARCEP, en attendant que l'émergence d'un marché de gros soit justifiée, de s'assurer « (i) que la mise en œuvre de la régulation "symétrique” permette bien aux différents opérateurs en capacité d'investir dans les réseaux FttH et ainsi d'y exercer une concurrence effective ; (ii) que le délai dans lequel les consommateurs pourront exercer un réel choix reste raisonnable ».
7. COMMENTAIRES DES AUTORITÉS RÉGLEMENTAIRES NATIONALES
ET OBSERVATIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
La Commission européenne a formulé les observations suivantes s'agissant de l'analyse du marché pertinent de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit livrées au niveau infranational présentée par l'Autorité.
7.1. Sur l'absence de mesures correctrices imposées sur la base
de la puissance de marché pour les infrastructures en fibre
La Commission observe que, « en ce qui concerne les infrastructures en fibre optique de France Télécom, l'ARCEP n'estime ni justifié ni proportionné d'imposer des mesures correctrices asymétriques au stade actuel » et « exclut de rendre obligatoire [...] l'accès de type bitstream fondé sur la fibre » de France Télécom, considérant, d'une part, que « l'utilisation des infrastructures de génie civil de France Télécom des opérateurs tiers s'est considérablement accrue depuis la dernière analyse de marché » et, d'autre part, que « les obligations symétriques relatives à l'accès au segment terminal des réseaux en fibre optique ont permis l'entrée d'autres opérateurs sur le marché », ce qui « doit, en principe, favoriser l'apparition d'offres de gros ».
La Commission rappelle que, conformément à la recommandation NGA, « si une puissance significative sur le marché est établie sur le marché 5, et s'il n'y a pas d'accès dégroupé à la boucle locale optique qui soit effectif et susceptible de résulter en une concurrence effective sur le marché de détail, il convient de maintenir des mesures correctrices en matière de fourniture en gros d'accès à large bande ».
A cet égard, la Commission observe que « bien que plusieurs projets de co-investissement pour le déploiement de réseaux FttH soient mis en œuvre ou en cours de développement dans des zones très denses, aucun projet de ce type n'a été mis en œuvre ou développé à l'extérieur de ces zones » et que « les parts de marché de France Télécom sur les segments des marchés de détail du haut débit restent élevées, notamment à l'extérieur des zones très denses ».
La Commission estime en outre qu'« 'il est impossible de dire si des investissements dans les zones très denses seront réalisés pendant la période couverte par l'analyse de marché et s'il y aura des offres d'accès concurrentielles » et craint que, « en l'absence de mesures correctrices de la puissance de marché, FT pourrait verrouiller, sur le marché de détail, le segment du haut débit et le segment émergent du très haut débit, notamment à l'extérieur des zones très denses ».
La Commission note que « l'ARCEP se propose de revoir, le cas échéant, son analyse avant la fin de la période couverte par l'analyse de marché et que l'autorité fixe une clause de rendez-vous en vertu de laquelle elle examinera, dans les dix-huit mois qui suivent l'entrée en vigueur de la mesure adoptée, la nécessité d'imposer des mesures correctrices supplémentaires asymétriques concernant les lignes en fibre optique ».
La Commission insiste néanmoins « sur la nécessité d'établir sans délai une régulation adressant la puissance de marché claire et prévisible, conformément à la recommandation NGA selon laquelle les ARN devraient, en principe, imposer l'accès dégroupé à la boucle optique et des mesures correctrices relatives à la fourniture en gros d'accès à haut débit » et demande par conséquent à l'ARCEP « de réévaluer, conformément à l'article 8 de la directive "accès” et aux articles 22 et 31 de la recommandation NGA, la nécessité d'imposer, déjà pour la période couverte par l'analyse de marché examinée ici, des mesures correctrices concernant l'accès de gros à la fibre [...], notamment dans les zones géographiques qui, selon l'ARCEP, ne sont pas concurrentielles et où la duplication d'un réseau en fibre optique est improbable pendant la période considérée ».
7.2. Sur la nécessité d'apprécier de manière appropriée les différences entre les conditions concurrentielles existant dans les zones géographiques et d'imposer ou d'adapter la régulation imposée sur la base de la puissance de marche
La Commission observe que, « sur le marché de gros de l'accès à large bande, l'ARCEP a constaté l'existence de conditions de concurrence différentes dans deux zones géographiques selon qu'il existe un ou plusieurs opérateurs proposant des offres de gros (câbles et Fttx compris) et entend donc adapter les mesures correctrices DSL en conséquence », mais note néanmoins que « l'ARCEP ne retient ni le nombre d'opérateurs de boucles locales dégroupées par répartiteur ni les parts de marché comme des critères pertinents ».
La Commission invite ainsi « l'ARCEP à entreprendre une évaluation plus approfondie en se fondant sur tous les facteurs structurels et comportementaux pertinents (notamment les parts de marché et leur évolution dans le temps, les différences de prix, les fonctionnalités des produits/services et les stratégies de marketing) et à évaluer la nécessité d'imposer des mesures correctrices concernant les marchés de gros sur le segment résidentiel ou professionnel (quelle que soit la technologie sous-jacente) le cas échéant ».
La Commission demande notamment à l'ARCEP, « pour obtenir des données concluantes sur le niveau de concurrence, d'évaluer dans quelle mesure les demandeurs d'accès peuvent réellement, en tenant compte de considérations techniques et économiques, utiliser un produit bitstream concurrent (fondé sur le câble ou la technologie Fttx) ». La Commission suggère ainsi à l'ARCEP d'« examiner les contraintes liées à la présence d'une offre bitstream sur le câble sur une base régionale plutôt qu'au niveau de chaque répartiteur ».
En conséquence, l'Autorité a précisé son analyse sur ce point.
7.3. Sur l'exclusion du câble du marché de gros de l'accès à large bande
La Commission demande à l'ARCEP « de surveiller attentivement les caractéristiques de l'offre et de la demande de produits bitstream en France » et d'examiner en particulier « si les demandeurs d'accès ne pourraient pas être incités à compléter, voire à remplacer dans certaines zones géographiques, leur offre bitstream sur DSL par une offre bitstream sur câble et s'ils en auraient la possibilité ».
La Commission note que l'ARCEP reconnaît « que la fourniture d'accès bitstream sur câble peut faire peser une contrainte sur l'accès bitstream sur DSL » et invite ainsi l'ARCEP « à modifier la définition de marché proposée afin de l'étendre à l'offre bitstream sur le câble [...] si cette substitution se produit durant la période considérée dans l'analyse ».
En conséquence, l'Autorité a précisé son analyse sur ce point.
7.4. Sur le caractère approprié de l'interdiction des tarifs d'éviction
et les exigences de notification en matière d'obligation de contrôle tarifaire
La Commission note « que l'ARCEP impose à France Télécom une obligation de tarification de l'accès bitstream reflétant les coûts, assortie d'une interdiction de pratiquer des tarifs d'éviction uniquement en ce qui concerne la fourniture de services à des clients professionnels ». La Commission observe toutefois que « le dégroupage par les opérateurs qui ne travaillent que sur le segment des clients professionnels s'est considérablement ralenti parce que le niveau de couverture optimal est atteint et que le dégroupage pendant la période couverte par l'analyse de marché précédente était essentiellement le fait d'opérateurs travaillant à la fois sur les segments résidentiels et professionnels ».
La Commission considère que « la justification donnée par l'ARCEP pour le maintien de l'interdiction de pratiquer des prix d'éviction n'est pas suffisamment fondée » et invite donc l'ARCEP « à fournir des raisons supplémentaires justifiant le maintien de cette obligation ».
La Commission note que « l'ARCEP maintient, sur la base de son évaluation complémentaire, que ses modèles de coûts actuels sous-tendant les tarifs régulés de FT doivent être mis à jour pour refléter les coûts d'un opérateur efficace proposant des offres destinées à la clientèle résidentielle et professionnelle dans leurs zones géographiques respectives ». La Commission rappelle à cet effet « que toute mesure réglementaire imposant ou modifiant les tarifs de gros de l'accès doit faire l'objet d'une consultation nationale conformément à l'article 6 de la directive "cadre” et être notifiée conformément à l'article 7, paragraphe 3, de ladite directive ».
En conséquence, l'Autorité a précisé son analyse sur ce point.
7.5. Prise en compte des observations de la Commission européenne sur l'absence de mesures
correctrices imposées sur la base de la puissance de marché pour les infrastructures en fibre
Au terme de son analyse, la Commission semble estimer que, en dehors des zones très denses, la régulation asymétrique devrait, dès à présent, imposer à France Télécom de formuler une offre de dégroupage de la fibre FttH et une offre d'accès activée fondée sur les réseaux FttH.
Après un nouvel examen approfondi, l'Autorité estime néanmoins que de tels remèdes seraient, à ce stade, disproportionnés et prématurés, notamment eu égard aux nombreuses obligations symétriques très strictes imposées par le cadre réglementaire.
Tout d'abord, il convient de rappeler que l'analyse concurrentielle doit être menée au regard des obligations existantes imposées par le cadre réglementaire en vigueur (greenfield modified approach (12). Conformément à cette théorie, la Commission, dans sa décision du 26 novembre 2010 (13), a invité l'Autorité « à suivre attentivement l'évolution de l'investissement dans les NGA et de la concurrence, aussi bien dans les zones denses que dans les zones moins denses, afin de déterminer si les mesures de régulation symétriques restent suffisantes pour garantir la concurrence et si les instruments réglementaires symétriques proposés sont justifiés et proportionnés compte tenu des objectifs des articles 8 et 12 de la directive "cadre”. Si ce n'est pas le cas et s'il apparaît qu'un opérateur détient une puissance significative sur les marchés pertinents du haut débit, il peut être nécessaire, pour atteindre les objectifs précités, d'imposer, conformément à la recommandation NGA, d'autres formes asymétriques d'accès aux infrastructures en fibre de l'opérateur PSM, telles que le dégroupage de la boucle locale, l'accès de gros à haut débit et d'autres mesures correctrices associées (collecte, par exemple) ».
Dès lors, l'Autorité a conduit son analyse concurrentielle en tenant compte des obligations déjà imposées à l'ensemble des opérateurs dans le cadre de la régulation symétrique des déploiements de fibre optique jusqu'à l'abonné FttH, au terme, d'une part, de la loi française (art. L. 34-8-3 du code des postes et des communications électroniques), et, d'autre part, des décisions de régulation prises en son application (décisions n° 2009-1106 et n° 2010-1312 de l'Autorité).
A cet égard, il convient de rappeler deux des obligations structurantes posées par ce cadre de régulation symétrique :
― une obligation d'accès passif au point de mutualisation. Dans le cas des zones moins denses (ensemble du territoire français hors les 148 communes des zones très denses) qui semblent cristalliser les craintes de la Commission européenne, cet accès passif doit être fourni à un point de mutualisation regroupant au minimum 1 000 lignes. Cet accès passif à chaque ligne doit être fourni dans des conditions opérationnelles et tarifaires qui font l'objet d'une régulation stricte et détaillée dans les décisions de régulation symétrique adoptées par l'Autorité. Une telle offre d'accès devrait avoir pour effet de conduire les opérateurs à proposer l'équivalent d'une offre de dégroupage à la ligne FttH ;
― une obligation d'offre de cofinancement. Tout opérateur déployant un réseau FttH doit publier une offre (ab initio et ex post) de cofinancement des infrastructures en aval du point de mutualisation. Concrètement les opérateurs doivent proposer aux opérateurs tiers de cofinancer les coûts de déploiement du réseau mutualisé en échange de droits d'usage pérennes qu'ils peuvent inscrire dans leurs bilans (CAPEX). Un tel mécanisme de cofinancement constitue un rempart structurel contre les risques concurrentiels d'abus d'éviction ou d'exploitation du propriétaire de l'infrastructure compte tenu des droits intangibles et pérennes dont bénéficient les co-investisseurs sur celle-ci. Dans les zones moins denses, ce cofinancement devrait pouvoir être proposé par « tranche » (cofinancement de x % des lignes d'un point de mutualisation donnant accès à x % de ces lignes) permettant ainsi au plus grand nombre d'opérateurs d'y participer (quelque soit leur part de marché de détail).
Depuis l'entrée en vigueur de la décision de régulation symétrique adoptée par l'Autorité pour les déploiements en zones moins denses, plusieurs opérateurs (dont des opérateurs de réseaux d'initiative publique) travaillent à l'élaboration de leurs offres d'accès et de cofinancement et certaines d'entre elles ont déjà été publiées. France Télécom travaille depuis plusieurs semaines à l'élaboration de son offre qui a déjà été discutée avec les opérateurs alternatifs et qui pourrait être publiée dans les prochaines semaines. Dès lors, il serait prématuré de constater l'absence d'existence de projets de co-investissement en zones moins denses pour conclure à la nécessité d'imposer des obligations asymétriques sur l'opérateur historique alors même que ceux-ci sont en cours de finalisation.
En revanche, il ne peut être exclu que les mécanismes de cofinancement ne rencontrent pas le même succès sur l'ensemble des zones moins denses. En effet, alors que sur une partie substantielle des zones moins denses, les parts de marché de France Télécom sur le marché de détail ne sont pas très différentes de celles des principaux opérateurs alternatifs, tel n'est pas le cas dans les zones les plus rurales. Il est ainsi possible que l'animation concurrentielle n'émergera pas suffisamment dans les territoires très peu densément peuplés malgré les obligations symétriques déjà imposées (si des réseaux FttH devaient être déployés dans ces zones à l'horizon de la présente analyse). Néanmoins, à ce stade, il n'est pas sérieusement envisageable de délimiter ces zones avec précision. C'est la raison pour laquelle l'Autorité a choisi de mettre sous surveillance étroite les déploiements FttH et d'introduire une clause de rendez-vous dans dix-huit mois. L'Autorité souligne qu'une décision de régulation qui viendrait préjuger les capacités des opérateurs alternatifs à participer au cofinancement des réseaux FttH constituerait un frein à l'investissement de l'ensemble des opérateurs.
Néanmoins, afin de répondre aux craintes de la Commission européenne que France Télécom ne « verrouille » le segment de marché du très haut débit dans les zones moins denses d'ici la clause de rendez-vous fixée dans 18 mois, l'Autorité modifie son projet initial pour imposer à l'opérateur historique de l'informer, au minimum six mois à l'avance, de tout projet de déploiement FttH en dehors des zones très denses.
La décision de régulation des déploiements FttH en zones moins denses (décision du 14 décembre 2010) impose par ailleurs aux opérateurs des mécanismes d'information et de consultation de l'ensemble des acteurs concernés (notamment opérateurs et collectivités territoriales).
En tout état de cause, la réalité du déploiement d'un réseau FttH et notamment la réalisation des raccordements finaux à l'intérieur des logements des abonnés imposent des délais particulièrement longs. A la différence des déploiements FttCab (Fiber to the Cabinet, fibre jusqu'au sous-répartiteur) qui peuvent être réalisés en quelques mois de manière peu transparente, le déploiement massif d'un réseau FttH nécessite plusieurs années et ne peut être réalisé de manière non transparente. A cet égard, l'Autorité souligne qu'elle impose au terme de ses décisions d'analyse de marché un encadrement très strict du déploiement de la fibre jusqu'au sous-répartiteur, imposant à France Télécom des obligations lourdes, mais proportionnées à sa situation, permettant de protéger le dynamisme concurrentiel du dégroupage qui caractérise le marché français.
Enfin, l'Autorité constate que de nombreuses collectivités territoriales préparent des projets ambitieux de déploiements FttH dans les zones moins denses et que, si ces derniers se concrétisaient dans les prochains mois, ils constitueraient un élément important à prendre en compte dans l'analyse concurrentielle. Ici encore, des remèdes adoptés de manière prématurée pourraient contrecarrer les dynamiques propres aux acteurs du marché et constituer un frein aux investissements.
Pour l'ensemble de ces raisons, l'Autorité, qui partage les analyses de la Commission européenne sur la nécessité d'encadrer les déploiements de fibre optique de l'opérateur historique, estime que les obligations symétriques strictes déjà en vigueur en France au terme de la régulation symétrique sont, à ce jour, suffisantes pour prévenir les risques concurrentiels de « verrouillage » du marché FttH. L'Autorité maintiendra une surveillance étroite des déploiements FttH de l'opérateur historique dans les prochains mois et réévaluera, le cas échéant, la nécessité d'imposer des remèdes asymétriques complémentaires au terme de sa clause de rendez-vous à dix-huit mois.
Décide :