1. Contexte juridique
L'Autorité a été saisie le 6 mai 2011 par le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, afin de rendre un avis sur le projet de décret relatif à la gestion des domaines de premier niveau de l'internet et modifiant le code des postes et des communications électroniques.
Ce projet de décret est pris sur le fondement de l'article L. 45-7 du code des postes et des communications électroniques issu de l'article 19 de la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques, qui dispose qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application des articles L. 45 à L. 45-7 du code des postes et des communications électroniques.
Ces dispositions définissent les règles d'attribution et de gestion des noms de domaine de premier niveau de l'internet. Elles précisent en particulier :
― les modalités de désignation de l'organisme unique, appelé « office d'enregistrement », chargé de centraliser l'attribution et la gestion des noms de domaine de premier niveau, ainsi que les modalités d'accréditation des bureaux d'enregistrement, chargés de l'attribution des noms de domaine aux personnes qui en font la demande ;
― les obligations de l'office et des bureaux d'enregistrement, notamment en termes de collecte de données d'identification des titulaires de noms de domaine et de publicité des prix et des enregistrements de noms de domaine ;
― les personnes physiques et morales qui peuvent demander l'enregistrement d'un nom de domaine de premier niveau ;
― les conditions dans lesquelles l'enregistrement ou le renouvellement des noms de domaine peut être accordé, refusé ou le nom supprimé, notamment au regard de l'existence d'un intérêt légitime ou d'un usage de mauvaise foi.
Les articles L. 45 à L. 45-8 du code des postes et des communications électroniques issus de l'article 19 de la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 précitée, qui entrent en vigueur, à l'exception de l'article L. 45-3, le 30 juin 2011, ont été créés à la suite de la déclaration d'inconstitutionnalité, dans sa rédaction actuelle, de l'article L. 45, prononcée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-45 QPC du 6 octobre 2010. Cette décision a en effet pour conséquence l'abrogation, à compter du 1er juillet 2011, de l'article L. 45 issu de l'article 24 de la loin° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle.
Dans sa décision précitée, le Conseil constitutionnel a ainsi observé que « si le législateur a [...] préservé les droits de la propriété intellectuelle, il a entièrement délégué le pouvoir d'encadrer les conditions dans lesquelles les noms de domaine sont attribués ou peuvent être renouvelés, refusés ou retirés ; qu'aucune autre disposition législative n'institue les garanties permettant qu'il ne soit pas porté atteinte à la liberté d'entreprendre ainsi qu'à l'article 11 de la Déclaration de 1789 ; que, par suite, le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence ; qu'il en résulte que l'article L. 45 du code des postes et des communications électroniques doit être déclaré contraire à la Constitution » (1).
L'Autorité note ainsi que le législateur, tirant conséquence de cette inconstitutionnalité, a conféré une valeur législative à plusieurs dispositions réglementaires du code des postes et des communications électroniques en adoptant la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011.
Afin de préciser les articles L. 45 à L. 45-8 du code des postes et des communications électroniques, le projet de décret dont est saisi l'Autorité a notamment pour objet de préciser :
― les modalités de désignation de l'office d'enregistrement, les prescriptions dont sont assorties les désignations et les conditions dans lesquelles ces dernières peuvent être retirées ;
― les obligations des offices d'enregistrement, notamment en termes de signalement des noms de domaine présentant un caractère illicite ou contraire à l'ordre public et de conservation des données permettant l'identification des titulaires de noms de domaine ;
― les procédures d'obtention et de retrait des accréditations des bureaux d'enregistrement ;
― les critères relatifs à l'existence d'un intérêt légitime et de la mauvaise foi, au sens de l'article L. 45-2 du code des postes et des communications électroniques.
2. Observations relatives au projet de décret
2.1. Sur l'absence de désignation des autorités compétentes pour recevoir les signalements effectués par chaque office des noms de domaine présentant un caractère illicite ou contraire à l'ordre public
L'Autorité considère qu'il serait utile, dans l'article R. 20-44-36 relatif aux obligations de l'office d'enregistrement, de préciser quelles autorités doivent être avisées par les offices lorsqu'ils identifient ou que leur sont signalés des noms de domaine présentant un caractère illicite ou contraire à l'ordre public.
2.2 Sur l'absence de fixation de la durée de conservation des données permettant l'identification
des titulaires
de noms de domaine par les offices d'enregistrement
Le deuxième alinéa de l'article L. 45-5 du code des postes et des communications électroniques, qui entre en vigueur le 30 juin 2011, dispose que les offices d'enregistrement « collectent les données nécessaires à l'identification des personnes physiques ou morales titulaires de noms [de domaine] et sont responsables du traitement de ces données au regard de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ».
L'Autorité considère qu'il serait utile d'insérer, à l'article R. 20-44-36 relatif aux obligations de l'office d'enregistrement, une précision sur la durée de conservation de ces données, dans le respect des dispositions de la loi dite « Informatique et libertés » du 6 janvier 1978.
L'Autorité émet un avis favorable sur le projet de décret qui lui a été soumis. Le présent avis sera transmis au ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique et publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 12 mai 2011.