Articles

Article AUTONOME (Avis n° 2011-0416 du 7 avril 2011 relatif à une modification du catalogue des prestations du service universel postal)

Article AUTONOME (Avis n° 2011-0416 du 7 avril 2011 relatif à une modification du catalogue des prestations du service universel postal)



1. La proposition de La Poste


La nouvelle offre diffère de la lettre par son délai d'acheminement qui est de deux jours avec une fiabilité de 95 %. Ce délai s'inscrit donc entre celui de la lettre, envoi prioritaire dont le CPCE requiert la distribution « le lendemain du jour de dépôt », avec une fiabilité de 84 % (1), et celui du pli économique ou « écopli » qui n'est pas précisé (3 à 4 jours) ni mesuré. Le tarif de la première tranche de poids des envois « timbre poste » sera inférieur de 3 centimes d'euro à celui de la lettre et supérieur de 2 centimes d'euro à celui de l'écopli.
La Poste escompte un report important des volumes de la lettre vers cette nouvelle offre, ce qui permettra d'augmenter sensiblement le taux d'automatisation du tri aujourd'hui limité par les contraintes horaires très strictes inhérentes à l'acheminement des envois prioritaires. Une économie nette de [SDA] millions d'euros environ pourrait être réalisée à l'horizon 2015, correspondant à une réduction des charges de [SDA] millions d'euros partiellement compensée par une réduction des revenus de l'ordre de [SDA] millions d'euros, si les trois quarts des volumes de la lettre prioritaire se reportaient vers la nouvelle offre.


2. L'analyse de l'Autorité


L'Autorité analyse cette nouvelle offre comme un enrichissement de l'offre égrenée de service universel, qui élargit le choix offert au consommateur. Elle souligne néanmoins les points suivants :
― le tarif de cette nouvelle offre s'intercale entre ceux de la lettre prioritaire et de l'écopli, distincts de 5 centimes d'euro seulement pour la première tranche de poids. La coexistence de ces trois offres dans un intervalle de prix restreint conduit à s'interroger sur la pertinence des hypothèses de report de consommation vers la nouvelle offre qui, outre le faible écart tarifaire avec la lettre prioritaire (3 centimes d'euro), présente une moindre qualité de service en J + 1 comme en J + 2. En effet, la fiabilité du délai d'acheminement à J + 2, caractéristique de la nouvelle offre (avec un niveau cible de 95 % à terme), est d'ores et déjà offerte par la lettre prioritaire (96 % de J + 2 en 2010). Aujourd'hui, l'écopli rencontre un succès limité pour les envois affranchis par timbre poste, bien que bénéficiant d'un écart tarifaire plus important (de 5 centimes d'euro). De ce fait, les économies de coût à moyen terme pourraient s'avérer moindres que celles anticipées par La Poste ;
― le service universel postal comprend obligatoirement une offre d'envois distribués en J + 1 (les envois prioritaires prévus au 1° du a) de l'article R. 1 du CPCE). La nouvelle offre ne constituera ainsi un progrès que si elle ne se traduit pas par une dégradation de la qualité de service de la lettre prioritaire. Elle ne doit pas non plus conduire à en relever les tarifs si les envois prioritaires sont retirés des processus de tri mécanisé afin d'en alléger les contraintes horaires ; en effet, le surcoût du traitement de ces envois prioritaires ne serait que la contrepartie d'une meilleure productivité dans l'ensemble de la chaîne postale. L'ARCEP veillera donc à ce que l'offre prioritaire en J + 1 prévue par le CPCE reste de qualité et fournie à un tarif abordable ;
― la dénomination du produit ne devra pas faire usage du terme « prioritaire », que l'article R. 1 du CPCE réserve aux envois en J + 1 : « Les envois prioritaires relevant du service universel postal sont distribués le jour ouvrable suivant le jour de leur dépôt. » Par ailleurs, la dénomination « lettre verte » envisagée pour la nouvelle offre créerait, quant à elle, une confusion avec la couleur du timbre couramment utilisé pour l'écopli ;
― les heures de levée précoces que l'obligation d'offrir un service à J + 1 engendre pour le courrier « timbre poste » déposé en « boîtes jaunes » (82 % des boîtes, représentant un tiers des volumes collectés par ce moyen, sont relevées avant 13 heures), s'étendent automatiquement à tous les envois empruntant ce circuit de collecte, dont la nouvelle prestation et l'écopli. En pratique, cela signifie que pour la lettre prioritaire, un courrier déposé après 13 heures dans une de ces boîtes à lettres un jour J sera distribué deux jours plus tard si la norme de qualité de service d'une distribution à J + 1 est respectée. De la même façon, la promesse d'un acheminement à J + 2 pour la nouvelle offre est respectée si l'envoi déposé dans une telle boîte est distribué 3 jours plus tard. Ainsi, le traitement postal de ce nouveau produit obéira aux mêmes contraintes d'heure limite de dépôt ;
― les consommateurs doivent bénéficier d'une information claire et complète sur les caractéristiques essentielles de la nouvelle prestation. Il conviendra, dès lors qu'elle comporte un niveau-cible de performance, que ce dernier soit connu et qu'il fasse l'objet d'une mesure également publiée. D'une manière générale, l'Autorité estime, d'une part, que cette exigence d'information loyale s'applique aux principales prestations postales offertes au grand public, indépendamment des objectifs que le ministre chargé des postes fixe aux termes de l'article R. 1-1-8 du CPCE pour des prestations qu'il détermine, et, d'autre part, demande à La Poste une amélioration substantielle de la transparence de ses offres actuelles et futures, concernant le délai effectif de distribution, afin de respecter les principes du service universel.
L'introduction de la nouvelle offre égrenée modifiera, à terme, la structure de la consommation des envois égrenés. De ce fait, l'évolution de la dépense moyenne des clients pourrait s'écarter, dès 2011, des évolutions tarifaires calculées conformément à la décision n° 2008-1286 de l'Autorité portant encadrement pluriannuel des tarifs postaux, à structure de consommation constante.


3. Conclusion


L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, au regard des informations communiquées par La Poste et de l'analyse qui précède, prend acte de la modification proposée du catalogue des prestations relevant du service universel.
Le présent avis sera transmis au ministre chargé des postes. Le directeur général de l'Autorité est chargé de le notifier à La Poste.
Fait à Paris, le 7 avril 2011.