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ZONE SPÉCIALEMENT PROTÉGÉE DE L'ANTARCTIQUE N° 171, POINTE NAREc BSKI, PÉNINSULE DE BARTON, ÎLE DU ROI-GEORGE (ENSEMBLE UNE ANNEXE) ― PLAN DE GESTION
Les représentants,
Rappelant les articles 3, 5 et 6 de l'annexe V du Protocole au Traité sur l'Antarctique qui prévoient la désignation de zones spécialement protégées de l'Antarctique (« ZSPA ») et l'approbation de plans de gestion pour ces zones,
Notant que le Comité pour la protection de l'environnement a recommandé que la pointe Nare c bski, péninsule de Barton, île du Roi-George soit désignée comme une nouvelle zone spécialement protégée de l'Antarctique et qu'il a approuvé pour cette zone le plan de gestion qui figure en annexe à la présente mesure,
Conscients que cette zone protège des valeurs environnementales, scientifiques, historiques ou esthétiques exceptionnelles, ou l'état sauvage de la nature ainsi que toute recherche scientifique en cours ou programmée et qu'elle bénéficierait d'une protection spéciale,
Désireux de désigner la pointe Nare c bski, péninsule de Barton, île du Roi-George, comme une zone spécialement protégée de l'Antarctique et d'approuver le plan de gestion pour cette zone,
Recommandent pour approbation à leurs gouvernements la mesure ci-après conformément au paragraphe 1 de l'article 6 de l'annexe V du Protocole au Traité sur l'Antarctique relatif à la protection de l'environnement, à savoir que :
1. La pointe Nare c bski, péninsule de Barton, île du Roi-George, soit désignée comme zone spécialement protégée de l'Antarctique n° 171 ;
2. Le plan de gestion qui figure en annexe à la présente mesure soit approuvé.
A N N E X E
PLAN DE GESTION DE LA ZONE SPÉCIALEMENT PROTÉGÉE DE L'ANTARCTIQUE N° 171 POINTE NAREc BSKI, PÉNINSULE DE BARTON, ÎLE DU ROI-GEORGE
Introduction
La pointe Narec bski est située sur la côte sud-est de la péninsule de Barton, île du Roi-George, et est délimitée comme suit : latitude 62° 13' 40'' S ; 62° 14' 23'' S et longitude 58° 45' 25'' O ; 58° 47' 00'' O. La région est facile à reconnaître grâce à ses pics montagneux au niveau des lignes de démarcation au nord et à l'est et à son littoral sur la limite sud-ouest.
De par sa topographie exceptionnelle, la région est d'une grande valeur esthétique avec des vues panoramiques ; elle offre des opportunités remarquables d'études scientifiques des communautés biologiques terrestres caractérisées par des écosystèmes d'une grande diversité et complexité. Il convient de noter en particulier l'importante couverture de mousses et de lichens. Les communautés végétales dominantes sont les associations de principaux lichens et le tapis de mousse qui est lui dominé par Usnea-Himantormia. La flore actuelle inclut une espèce de plante à floraison de l'Antarctique (jusqu'à présent, seules deux espèces de plantes à floraison ont été identifiées dans l'Antarctique), 51 espèces de lichens, 29 espèces de mousse, 6 espèces de bryophytes et une espèce d'algue.
Une autre caractéristique à noter de ce site est la présence de plus de 2 900 couples de manchots à jugulaire (Pygoscelis antarctica) ― la plus forte concentration de toute l'île du Roi-George ― et de plus de 1 700 couples de manchots papous (Pygoscelis papua) (Kim, 2002). Il existe également douze autres espèces d'oiseaux (sept nicheurs et cinq non nicheurs). Les sept espèces d'oiseaux nicheurs de la zone sont : le labbe brun (Catharacta lonnbergi), le labbe de l'Antarctique (Catharacta maccormickii), le goéland dominicain (Larus dominicanus), la sterne de l'Antarctique (Sterna vittata), l'océanite de Wilson (Oceanites oceanicus), le chionis blanc (Chionis alba) et le pétrel géant de l'Antarctique (Macronectes giganteus).
La zone comprend en outre des systèmes de bassins versants, composés de lacs et de criques, où l'on trouve bon nombre de denses tapis microbiens et d'algues constitués d'associations complexes d'espèces. Ces ressources d'eau douce sont essentielles pour la survie des différentes formes de vie. La forte diversité biologique de la végétation terrestre et la complexité des habitats présents renforcent les valeurs potentielles à protéger dans la zone.
Dans le cadre du programme coréen de recherche dans l'Antarctique, des scientifiques se sont rendus régulièrement dans la zone depuis les années 1980 pour en étudier la faune, la flore et la géologie. Cependant la fréquentation, au cours des dernières années, de la pointe Narec bski par des visiteurs venus des stations avoisinantes dans des buts autres que la recherche scientifique, notamment pendant la saison de reproduction, s'est traduite par une vulnérabilité accrue aux intrusions humaines. Selon certaines études, l'île du Roi-George présente un potentiel de développement touristique (ASOC, 2007 & 2008 ; Peters et al., 2005) et le nombre de visiteurs de la station King Sejong est passé de moins de 20 personnes par an à la fin des années 1980 à plus de 100 ces dernières années.
La raison principale de la désignation de cette zone comme ZSPA (zone spécialement protégée de l'Antarctique) est la protection de ses valeurs écologiques, scientifiques et esthétiques contre les perturbations humaines. Par ailleurs, une protection et un suivi à long terme des diverses espèces et associations de la pointe Narec bski ne manqueront pas de contribuer à l'élaboration de stratégies régionales et mondiales idoines de conservation des espèces et de fournir des données permettant une comparaison avec d'autres sites.
1. Description des valeurs à protéger
La pointe Narec bski est essentiellement désignée zone spécialement protégée de l'Antarctique pour protéger ses valeurs écologiques exceptionnelles et faciliter les travaux de recherche scientifique en cours et planifiés. La zone offre des opportunités exceptionnelles d'études scientifiques des communautés biologiques terrestres. Des recherches scientifiques, dont le suivi des colonies de manchots, ont été réalisées par de nombreux pays depuis le début des années 1980. Les résultats ont révélé la valeur potentielle de la zone comme site de référence, en particulier en ce qui a trait au réchauffement planétaire et aux impacts des activités humaines.
La topographie exceptionnelle de la zone ainsi que l'abondance et la diversité de la faune et de la flore donnent à la zone une valeur esthétique exceptionnelle, notamment ses pics montagneux et les pics les plus au sud qui offrent des panoramas d'une beauté incomparable.
Pour toutes les raisons énoncées ci-dessus, la zone doit être protégée et les perturbations causées par les activités humaines doivent être réduites au minimum, exception faite d'études de suivi occasionnelles de la végétation et des populations d'oiseaux et d'études géologiques et géomorphologiques.
2. Buts et objectifs
La gestion de la pointe Narec bski a pour buts et objectifs les suivants :
― éviter toute dégradation des valeurs de la zone ou tout risque important pour ces dernières en prévenant les perturbations humaines inutiles ;
― permettre la réalisation de travaux de recherche scientifique qui ne peuvent pas être effectués ailleurs et assurer la continuité des études biologiques de longue durée en cours faites dans la zone ; et
― protéger les valeurs esthétiques et scientifiques de la zone, notamment en interdisant l'installation de structures.
3. Activités de gestion
Les activités de gestion ci-après doivent être entreprises pour protéger les valeurs de la zone :
― le personnel qui a accès au site doit recevoir du programme national (ou de l'autorité compétente) des instructions spécifiques sur le contenu du plan de gestion ;
― des panneaux illustrant l'emplacement et les limites de la zone, avec des indications claires des restrictions d'accès, doivent être placés à des endroits idoines sur les lignes de démarcation de la zone ;
― tous les panneaux ainsi que les équipements et marqueurs scientifiques érigés dans la zone doivent être bien attachés et entretenus dans des conditions appropriées ;
― les conditions biologiques à l'intérieur de la zone doivent faire l'objet d'une surveillance appropriée, notamment le recensement des populations de manchots et des autres espèces d'oiseaux ;
― des visites seront réalisées selon les besoins (mais au minimum une fois tous les cinq ans) pour déterminer si la zone correspond toujours aux objectifs pour lesquels elle a été établie et pour assurer le caractère adéquat des mesures de maintenance et de gestion en place ;
― les programmes nationaux dans l'Antarctique opérant dans la région sont encouragés à se consulter et à échanger des informations pour s'assurer que les activités réalisées dans la zone le sont conformément aux buts et objectifs du présent plan de gestion.
4. Durée de la désignation
La zone est désignée pour une durée illimitée.
5. Cartes
Les cartes 1 à 6 figurent à l'annexe II à la fin du présent plan de gestion.
Carte 1 : Emplacement de la pointe Narec bski par rapport à l'île du Roi-George et zones protégées existantes.
Carte 2 : Délimitations de la ZSPA.
Carte 3 : Distribution des colonies d'oiseaux et des sites où les phoques viennent à terre à l'intérieur de la ZSPA.
Carte 4 : Distribution des communautés végétales à l'intérieur de la ZSPA.
Carte 5 : Détails géomorphologiques de la ZSPA.
Carte 6 : Routes d'accès à la ZSPA.
6. Description de la zone
i) Coordonnées géographiques
bornage et caractéristiques du milieu naturel
La pointe Narec bski est située sur la côte sud-est de la péninsule de Barton, île du Roi-George, et la zone est délimitée comme suit : latitude 62° 13' 40'' S ; 62° 14' 23'' S et longitude 58° 45' 25'' O ; 58° 47' 00'' O. La zone est délimitée par quatre pics montagneux au nord et à l'est et par le littoral au sud-ouest. Il est facile de reconnaître la ligne de démarcation sud-ouest à sa géomorphologie particulière. La zone comporte uniquement la portion terrestre, à l'exclusion de la zone intercotidale, et sa superficie totale est d'environ 1 km².
La zone présente une faune et une flore riches, dont l'abondance est, dans le cas de certaines espèces, exceptionnelle. La couverture de mousses et de lichens est très vaste. Un grand nombre de manchots à jugulaire (Pygoscelis antarctica) et de manchots papous (Pygoscelis papua) sont présents, de même que les aires de reproduction de sept autres espèces d'oiseaux, dont le pétrel géant de l'Antarctique (Macronectes giganteus). La diversité des reliefs et des formes côtières attribuable à la présence de différentes géologies ainsi qu'à un système de fractures prononcé, sans oublier une couverture végétale très vaste et variée, fournissent une diversité de panoramas inhabituelle dans l'environnement antarctique.
Climat
Les données météorologiques pour la zone se limitent exclusivement aux observations effectuées à la station King Sejong (1998-2007), à environ 2 km au nord-ouest de la pointe Narec bski. Le climat est humide et relativement doux en raison d'un fort effet maritime. La température annuelle moyenne est de ― 1,8 °C (maximum 9,8 °C, minimum ― 23,1 °C), l'humidité relative est de 89 %, la pluviométrie totale est de 597,2 mm et la couverture nuageuse est de 6,8 octas. La vitesse moyenne du vent est de 7,1 m/s (37,6 m/s au maximum), essentiellement en provenance du nord-ouest et de l'est tout au long de l'année. Le nombre de blizzards enregistrés en 2007 était de 26 (durée totale : 190 heures).
Géologie
L'unité lithostratigraphique la plus basse de la péninsule de Barton est la formation de Sejong (Yoo et al., 2001), considérée auparavant comme un membre volcanique inférieur. La formation de Sejong se répartit sur les falaises sud et sud-est de la péninsule de Barton (Lee et al., 2002). Elle est composée pour l'essentiel d'éléments volcaniclastiques en pente douce vers le sud et le sud-ouest. La formation de Sejong est recouverte de laves volcaniques mafiques à intermédiaires sur l'ensemble de la péninsule de Barton, y compris à l'intérieur de la zone. Il s'agit avant tout de roches plagioclasiques phyriques ou de plagioclases et andésites ― clinopyroxènes phyriques de basalte et d'andésite massive rares. Certains tufs de lapillis épais s'intercalent dans les coulées de lave. La formation de Sejong est infiltrée par des dykes mafiques, dont la pointe Narec bski le long de la côte sud de la péninsule. Les sols de la péninsule se subdivisent en quatre séries en fonction du type de substratum rocheux, à savoir granodiorite, andésite basaltique, tuf de lapillis et formation de Sejong (Lee et al., 2004). Les sols ont généralement une faible teneur en matériaux organiques et nutriments, à l'exception de ceux qui se trouvent à proximité de colonies d'oiseaux de mer.
Manchots
Des colonies de manchots à jugulaire (Pygoscelis antarctica) et de manchots papous (Pygoscelis papua) se répartissent sur les versants rocheux et les crêtes des collines de la pointe Narec bski.
L'espèce d'oiseaux nicheurs la plus abondante du site est le manchot à jugulaire, avec au total 2 961 couples observés en 2006/07. Les manchots à jugulaire commencent à pondre au début du mois de novembre, avec une période d'incubation de 32 à 43 jours ; la haute saison pour la ponte et l'éclosion est, selon les observations, mi-novembre et mi-décembre, respectivement (Kim, 2002). Le nombre maximum de manchots à jugulaire nicheurs était estimé à 7 306 couples en 1986/87 (Trivelpiece et al., 1987), mais la population a chuté en flèche pour atteindre 1 161 couples en 1989/90 (Yoon, 1990). Cependant, depuis 1989/90, le nombre de couples de manchots à jugulaire augmente peu à peu, et la population s'est maintenue aux alentours de 3 000 couples de 1994-1995 à 2006-2007 (figure 1).
Le nombre de couples reproducteurs de manchots papous a également enregistré une augmentation constante, passant de 556 couples recensés en 1986/87 à un total de 1 719 couples en 2006/07 (cf. figure 1). La période de ponte des manchots papous commence à la mi-octobre, la haute saison se situant à la fin octobre. L'incubation dure entre 33 et 40 jours et l'éclosion se produit début décembre (Kim, 2002).
Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 70 du 24/03/2011 texte numéro 3