En application de l'article 7 de la directive « cadre » 2002/21/CE, l'ARCEP a notifié à la Commission européenne et aux autorités compétentes des autres Etats membres de la Communauté européenne, le 26 octobre 2010, le projet de décision précisant les modalités de l'accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l'ensemble du territoire à l'exception des zones très denses. A la suite de cette notification, la Commission européenne a publié ses observations le 26 novembre 2010.
1° Sur les conditions d'accès aux lignes FttH sur le segment terminal
Concernant les modalités de l'accès, la Commission européenne « juge regrettable que certains aspects essentiels de la mesure proposée n'aient été ni définis ni exposés de manière détaillée, ce qui pourrait se révéler problématique pour une mise en œuvre correcte de la mesure en question. En ce qui concerne les conditions de la prime de risque et des remises sur quantité, notamment, l'ARCEP ne compte intervenir qu'a posteriori en cas de litige et adopter, au terme du processus, une décision précisant les modalités de mise en œuvre en cas de désaccord persistant entre les opérateurs. En outre, les conditions relatives à l'offre de collecte mutualisée et à la colocalisation des équipements actifs et passifs qui, selon l'ARCEP, sont essentiels pour assurer l'accès des opérateurs tiers au segment terminal dans des conditions économiques raisonnables, ne sont pas non plus précisées. »
Eu égard à la nécessité de prévisibilité réglementaire, la Commission « invite donc l'ARCEP soit à fournir, dans la version définitive de la mesure, des informations plus détaillées sur la tarification et les conditions de l'accès, soit à demander aux opérateurs de présenter leurs accords de co-investissement et leurs offres d'accès de gros de location à la ligne pour approbation avant leur publication. La Commission demande à l'ARCEP d'envisager d'appliquer, pour l'accès aux lignes en fibre optique du segment terminal et aux équipements associés, des tarifs orientés vers les coûts comprenant une rémunération appropriée du risque ».
Enfin, la Commission « rappelle à l'ARCEP qu'il est nécessaire de garantir la cohérence entre les mesures correctrices imposées dans le cadre du projet de mesure notifié et la tarification de l'accès qui sera imposée à l'issue des futures analyses des marchés 4 et 5, et que la recommandation NGA propose que les tarifs d'accès au segment terminal soient orientés vers les coûts et qu'ils incluent une prime de risque adaptée ».
Sur ces points, l'Autorité veillera à ce que les travaux actuellement en cours avec les opérateurs concernant le détail des modalités (notamment tarifaires) de mise en œuvre de la présente décision aboutissent rapidement et, en tant que de besoin, fassent l'objet d'un document complémentaire offrant une visibilité suffisante aux acteurs économiques.
2° Sur l'accès au point de mutualisation et la fourniture d'une offre de collecte
Concernant les règles relatives au point de mutualisation, la Commission « reconnaît le bien-fondé des objectifs de l'ARCEP consistant à promouvoir les co-investissements dans le déploiement des lignes FttH dans les zones moins denses, [mais] elle est en revanche très préoccupée par certaines mesures symétriques proposées qui pourraient aller au-delà de ce que prévoit le cadre réglementaire de l'UE. La Commission rappelle que, conformément à l'article 12, paragraphe 3, de la directive "cadre”, et conformément au considérant 4 de la recommandation NGA, les ARN peuvent, lorsque la duplication de l'infrastructure serait économiquement inefficace ou physiquement irréalisable, rendre obligatoire le partage de l'infrastructure de génie civil et des segments terminaux, le cas échéant.
En outre, les ARN doivent prendre en compte le fait que, pour être commercialement viable pour le demandeur d'accès, tout point de mutualisation devra héberger un nombre suffisant de raccordements d'utilisateurs finals. A cet égard, la Commission souligne que les incitations à l'investissement pour tous les opérateurs dépendront essentiellement de la taille du point de mutualisation (dont l'emplacement est défini par l'opérateur d'immeuble) et des conditions d'accès. Par conséquent, la Commission demande à l'ARCEP de déterminer, lors de la mise en œuvre de l'obligation d'accès, si la taille des points de concentration proposés est suffisante pour garantir un co-investissement dans les zones moins denses et, si ce n'est pas le cas, de modifier la taille minimum ».
Enfin, concernant l'obligation d'offre de collecte, la Commission « rappelle qu'une ARN ne devrait, en principe, mettre en œuvre ces mesures correctrices relatives à l'accès et à la collecte qu'après avoir procédé à une analyse de marché et reconnu un opérateur comme puissant sur le marché (PSM). Ces mesures devraient en outre traiter de toutes les conditions techniques et tarifaires nécessaires. En outre, la Commission rappelle à l'ARCEP que l'article 12, paragraphe 3, de la directive "cadre” modifiée et le considérant 4 de la recommandation NGA n'autorisent le partage réciproque des éléments de réseau que sur le segment terminal et jusqu'au premier point de mutualisation et pas au-delà. Par conséquent, l'obligation de fournir l'offre de collecte proposée semble reposer sur une application incorrecte des dispositions susmentionnées. Cette utilisation intensive d'un instrument réglementaire symétrique par l'ARCEP pourrait représenter une charge disproportionnée pour les opérateurs qui ne sont pas considérés comme puissants sur le marché et, finalement, dissuader les opérateurs tiers d'investir ».
Sur ces points, l'Autorité a modifié son projet de décision pour tenir compte des observations de la Commission européenne.
3° Sur l'articulation entre les décisions d'analyse de marché
et les mesures de régulation symétrique
La Commission note que « les obligations actuellement imposées à l'opérateur PSM sur les marchés 4 et 5 ne couvrent pas les réseaux en fibre, parce que l'ARCEP a estimé que l'offre d'accès au génie civil de France Télécom associée à l'obligation symétrique d'accès au segment de distribution des réseaux en fibre est de nature à permettre le déploiement de réseaux en fibre dans les zones les plus denses, où il était prévu que le déploiement ait lieu pendant la période d'analyse en cours. La Commission fait également observer que l'analyse des marchés de la fourniture en gros d'accès à large bande en France est actuellement en cours.
Par conséquent, la Commission invite l'ARCEP à suivre attentivement l'évolution de l'investissement dans les NGA et de la concurrence, aussi bien dans les zones denses que dans les zones moins denses, afin de déterminer si les mesures de régulation symétriques restent suffisantes pour garantir la concurrence et si les instruments réglementaires symétriques proposés sont justifiés et proportionnés compte tenu des objectifs des articles 8 et 12 de la directive "cadre”. Si ce n'est pas le cas et s'il apparaît qu'un opérateur détient une puissance significative sur les marchés pertinents du haut débit, il peut être nécessaire, pour atteindre les objectifs précités, d'imposer, conformément à la recommandation NGA, d'autres formes asymétriques d'accès aux infrastructures en fibre de l'opérateur PSM, telles que le dégroupage de la boucle locale, l'accès de gros à haut débit et d'autres mesures correctrices associées (collecte, par exemple).
La Commission invite l'ARCEP à terminer dans les meilleurs délais son analyse des marchés de la fourniture en gros d'accès à large bande et à garantir la cohérence entre les obligations imposées en vertu de la mesure notifiée, les mesures symétriques introduites dans les zones denses et les mesures correctrices PSM imposées en liaison avec les marchés 4 et 5 ainsi que toute obligation imposée dans le cadre d'un régime de financement public afin de favoriser la prévisibilité réglementaire et de sauvegarder les décisions d'investissement prises par les opérateurs ».
Sur ces points, l'Autorité précise qu'elle va achever dans les prochains mois les analyses des marchés 4 et 5 pour notifier les projets de décision correspondants à la Commission européenne, en principe, avant la fin du premier trimestre 2011. L'Autorité veillera à la complémentarité et à la cohérence des obligations envisagées dans ce cadre de régulation asymétrique avec les dispositions de la présente décision.