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Article AUTONOME (Décret n° 2010-1164 du 29 septembre 2010 relatif à l'appellation d'origine contrôlée « Figue de Solliès »)

Article AUTONOME (Décret n° 2010-1164 du 29 septembre 2010 relatif à l'appellation d'origine contrôlée « Figue de Solliès »)



b) Données économiques actuelles


Le poids de la figue de Solliès dans l'économie locale est important. La production est le fait d'environ 200 producteurs et représente 4 millions d'euros de chiffre d'affaires direct.
Cependant, à l'échelon mondial, le poids de la France est infime. La production mondiale annuelle de figues est de 1 000 000 tonnes, la plus grande partie étant consommée sèche. Le marché du frais, en expansion, représente seulement 100 000 tonnes par an, dont plus de 90 % proviennent du Bassin méditerranéen et du Moyen-Orient. Les pays du Maghreb ainsi que l'Iran et la Syrie produisent 360 000 tonnes par an, soit le tiers du tonnage mondial annuel de la figue. La Turquie produit quant à elle 270 000 tonnes par an et s'avère le plus gros concurrent de la figue française avec ses prix de commercialisation très bas. Le reste du marché est réparti entre l'Europe du Sud, l'Egypte, les Etats-Unis, le Brésil et... la France. Notre pays apparaît comme insignifiant en termes de production annuelle avec ses 3 000 tonnes environ par an. Plus des deux tiers de ce tonnage, soit environ 2 500 tonnes, proviennent du Var et du bassin de Solliès.
Aujourd'hui, la production est en grande partie assurée par des producteurs adhérents à une structure coopérative, qui effectue les opérations de tri, de conditionnement, de vente et d'expédition, ainsi que par des producteurs-expéditeurs indépendants. Certains des producteurs indépendants rassemblent des volumes de tonnage important grâce à un encadrement familial et à une maîtrise souvent complète du produit, du verger au quai de départ, si bien qu'ils mettent sur le marché des fruits de bonne qualité. D'autres possèdent des surfaces d'exploitation plus réduites. Ce sont en grande majorité des pluriactifs qui ont quelques figuiers dans leur jardin et qui amènent chaque jour les plateaux récoltés aux transporteurs. L'ensemble de cette production est vendu à la commission sur le MIN de Rungis. Le Syndicat de défense de la figue de Solliès regroupe aujourd'hui 74 % de la superficie totale des vergers de figues et 77 % des tonnages produits dans l'aire géographique d'appellation.
En 2008, les coûts de production sont compris entre 1,14 € et 1,37 € par kilogramme avec 0,46 € pour la culture et entre 0,69 € et 0,91 € pour la cueillette. Les frais de conditionnement s'élèvent à 0,74 € par kilogramme alors que le coût de transport est de 0,15 € par kilogramme. Le prix de vente de la figue de Solliès en centrale d'achat varie de 2 € à 3 € par kilogramme selon le calibre. En commission, le prix de vente fluctuera de 1,8 € à 3,20 € par kilogramme selon le calibre. Enfin, le prix à la consommation varie de 4 € à 8 € par kilogramme en moyenne et jusqu'à 15 € par kilogramme suivant le lieu de consommation.


c) Des facteurs naturels : le milieu géographique


La figue de Solliès jouit à la fois de critères naturels spécifiques tant au niveau topographique, géologique, pédologique, hydrologique et climatique (9). L'aire géographique de l'AOC « Figue de Solliès » est en totalité incluse dans la terminaison sud-ouest de la dépression permienne bordée à l'ouest et au nord par les formations jurassiques calcaires et à l'est par les phyllades métamorphiques du massif des Maures. Cette aire correspond également au réseau hydrographique du bassin Gapeau - Réal-Martin.
De l'ouest au nord-ouest, elle est limitée du mont Faron à Puget-Ville par un ensemble de plateaux calcaires, dont les corniches atteignant en moyenne 400-600 mètres dominent la dépression : le Coudon, le Bau Rouge, la barre de Cuers, la Blaque. A l'est, l'aire butte sur le massif cristallin et cristallophyllien des Maures, bien marqué dans le paysage de part sa topographie et ses boisements, et dont les lignes de crêtes culminent autour de 200-300 mètres au sud pour atteindre jusqu'à 400-450 mètres dans la partie septentrionale. Au nord, la dépression se rétrécit, l'aire est fermée par des corniches calcaires prenant localement une direction ouest-est et la colline de grès permiens du Bron (334 mètres). Au sud se trouve la mer Méditerranée mais il faut noter que toute une succession de collines et d'échines boisées, ne dépassant pas 200-300 mètres, limite l'ouverture du bassin sur la mer : mont des Oiseaux, le Paradis, les Maurettes, mont Redon, les Pousselons, le Roucas de Monié, la Maure de la Bouisse. L'ensemble est drainé par de nombreux petits ruisseaux qui pénètrent faiblement dans les versants calcaires et cristallins. Le drain principal est le Gapeau, qui prend sa source dans les terrains calcaires.
A partir de Solliès-Toucas, le Gapeau a incisé les plateaux et coule au fond d'une gorge profonde. Son affluent principal, le Réal-Martin, prend sa source dans le massif des Maures. Dans la dépression permienne existe un dense chevelu d'exutoires constitués de petits ruisseaux affluents des deux émissaires principaux. Tout ce réseau hydrographique a servi par le passé et sert parfois encore pour approvisionner les canaux d'irrigation, dans les secteurs non desservis par le canal de Provence.
L'organisation des reliefs qui délimitent cette aire géographique, ouverte sur la mer Méditerranée, explique l'existence d'un mésoclimat spécifique. Le nom de Solliès, terme dérivé de « soleil », tirerait son origine du mot latin solarium qui servait à désigner l'espace consacré au séchage des fruits (10).
Les données météorologiques délivrées par les stations de Cuers et de Hyères permettent d'analyser les composantes climatiques de ce bassin dans son intégralité. L'ensemble de cette aire jouit d'un climat méditerranéen. L'isotherme 14 °C remonte profondément dans le bassin puis dans la vallée de l'Aille. Ces conditions méditerranéennes chaudes sont spécifiques à cette zone. En amont de Marseille ou de l'étang de Berre, l'isotherme 14 °C remonte très peu dans l'arrière-pays (11). Cette particularité donne au bassin de Solliès une homogénéité climatique notable. Parmi les nombreux indices climatiques utilisés, aucun n'est spécifique au figuier. Cependant, le figuier bourjassotte noire, qui a un départ de végétation fin mars et une période de production à partir de fin août jusqu'en octobre, s'apparente à la vigne dans son comportement phénologique. L'indice de Winkler peut donc être utilisé pour caractériser le secteur. Cet indice est la somme des températures journalières supérieures à 10 °C du 1er avril au 31 octobre et se répartit en cinq classes. En France, la classe la plus chaude (classe IV) comprend les sommes de températures comprises entre 1 927 °C et 2 204 °C. Cette classe n'existe que dans deux régions : le bassin de Solliès et le bassin de Rivesaltes dans le département des Pyrénées-Orientales. Le secteur se distingue d'autre part par l'absence de gels importants tout au long de l'année. Parmi les stations varoises, Hyères et Cuers sont celles qui comptent le moins de jours de gel par an (moins de 20), ce qui est nettement inférieur aux stations périphériques. Le bassin de Solliès, qui appartient au climat méditerranéen marqué par la sécheresse estivale, reçoit des précipitations annuelles moyennes comprises entre 700 et 800 millimètres. La pluviométrie de la Provence montre une augmentation des précipitations d'ouest en est. La hauteur des précipitations augmente régulièrement de Berre (400-500 millimètres) jusqu'à Draguignan (900-1 000 millimètres). Les régions périphériques reçoivent en effet davantage de précipitations. Ces précipitations sont concentrées en automne et en hiver, ce qui implique pour le bon développement de l'arbre une irrigation estivale. Les valeurs hygrométriques sont comprises entre 60 et 75 %. Les valeurs relevées dans l'aire de production n'atteignent pas 80 % au cours de la saison contrairement à d'autres secteurs proches comme ceux de Gonfaron et du Castellet. Dans l'ensemble, les moyennes d'hygrométrie relevées montrent une certaine homogénéité entre les stations de Cuers et de Hyères qui permet de distinguer nettement l'aire de production de ses entités voisines. L'air y est en effet généralement plus sec. Les communes de Cogolin, Le Castellet et Gonfaron ont en effet des valeurs supérieures à 70 % en fin d'été et à 75 % à partir d'octobre. L'hygrométrie dans le bassin de Solliès présente de ce fait des valeurs moyennes, ni trop humides ni trop sèches. Le climat du bassin de Solliès de par ses caractères thermiques et l'hygrométrie de l'air, est donc original au sein du climat méditerranéen provençal.
La dépression permienne qui va de Fréjus à Sanary en faisant un arc par Le Muy et Le Luc est constituée de quatre bassins qui se succèdent d'est en ouest :
― le bassin du Muy-Fréjus drainé par la basse vallée de l'Argens est entièrement inclus dans les grès et schistes rouges permiens dominés à l'est et au nord-ouest par des formations éruptives et métamorphiques ;
― le bassin du Luc, également constitué de schistes et grès permiens, est dominé au nord par les grès du Trias et au sud par les gneiss métamorphiques ;
― le bassin de Solliès, de Puget-Ville à Hyères, est le seul à posséder une organisation minéralogique aussi variée.
Inclus pour l'essentiel dans la terminaison sud-ouest de la dépression permienne, il est bordé à l'ouest et au nord par une succession de strates de grès et de dolomites du Trias à la base puis du Jurassique inférieur au sommet. L'essentiel des matériaux qui ont servi à l'édification des sols colluviaux et alluviaux du secteur d'étude sont issus de grès et pélites dolomitiques, de marnes dolomitiques, d'argiles rouges et gypseuses des massifs calcaires et des argilites schisteuses du Permien supérieur. La bordure est du bassin constitue la véritable spécificité identitaire de la zone métamorphique jusqu'à l'île de Porquerolles (commune de Hyères). Il s'agit de la succession des différents types de phyllades du massif des Maures : phyllades de la Sauvette, schisto-gréseuses riches en chloritoïdes ; phyllades noires et phyllades de Carmauses ; phyllades bleues du Réal-Martin riches en séricite. Ces matériaux métamorphiques sensibles à l'érosion constituent la roche mère originale des sols du bassin de Solliès dans la zone orientale et littorale ;
― le bassin de La Seyne-Sanary, constitué de grès du Permien et du Trias, est dominé par les reliefs calcaires Crétacé formant le mont Caume.
Les six types de sols caractérisant le bassin de production (sols bruns d'alluvions récentes, sols bruns peu lessivés d'alluvions anciennes, sols bruns lessivés d'alluvions anciennes, sols bruns jeunes de colluvions ou d'éboulis, sols bruns jeunes sans réserve calcique, sols calci-magnésiens carbonatés) peuvent être regroupés en deux ensembles :
Sols sans réserves calciques :
Ils représentent les sols sur grès permiens et sur phyllades métamorphiques et leurs alluvions et colluvions afférentes. Ces sols ne sont pas calcaires mais leur capacité d'échanges est souvent saturée en calcium avec des pH compris entre 7 et 8. Ils se développent sur l'essentiel de la moitié orientale et sud de l'aire.
Sols avec réserves calciques :
Ils représentent les sols sur calcaires du Trias, du Jurassique et les dépôts détritiques associés. Ils ont moins de 20 % de calcaire total en général et les pH sont compris entre 7,5 et 8.
Enfin, le paysage botanique du bassin de Solliès présente des contrastes entre la série du chêne vert sur sol calcaire et celle du chêne liège sur sol acide, ce qui témoigne de la diversité des sols et de leur enchevêtrement au sein du bassin de production.

(9) Rapport de délimitation géographique de la commission d'experts du Comité national des produits agroalimentaires (CNPA), mai 2004, 39 pages. (10) Clément Serguier, Pour un panier de figues. (11) Etude du CEDAT, avril 2002, page 5.